3

Il était midi passé de quelques minutes, lorsqu'Angélique garait son Honda CBR 600, de couleur noir et mat, dans une petite ruelle à sens unique, près du commissariat de son père. Cette moto avait été le cadeau d'anniversaire qu'elle s'était offert, grâce à l'un de ses documentaires, et l'avait choisi avec des finitions de couleur argent, qui faisait ressortir le côté mat. Elle avait le casque assortit, auquel elle avait fait ajouter deux fines bandes, toujours en argent, qui rappelait son engin. Cette moto n'était pas la plus puissante, ni la plus grosse, mais elle était la plus maniable et dans une ville comme Paris, c'était encore ce qu'il avait de mieux.

Elle enlevait son casque, y rangeait ses gants et sortit son téléphone, avant de remonter la ruelle. La jeune femme composait un numéro en soupirant et sans trop y croire, mais au bout de la 5éme sonnerie :

- Finalement. Pensa-t-elle surprise, alors que la personne au bout du fil lui répondait enfin. Monsieur Maurice Dugrand ? Demanda-t-elle, pour être sûr.

Avait-elle enfin réussi à le joindre ?

- Oui. Répondit un homme, à la voix grave et posée.

La jeune femme inspirait profondément, après trois mois d'attente, elle avait enfin réussi à joindre l'un des anciens policiers de l'affaire, sur laquelle, elle enquêtait en solo.

- Bonjour, je suis Angélique Delmare. Se présenta-t-elle. Je suis journaliste et j'enquête sur la série de meurtres, non résolue, du tueur de Thonon. Expliqua-t-elle, sans préambule.

Dès qu'on parlait de meurtre, les portes et les téléphones se fermaient brusquement. Mais avec un ancien flic, il valait mieux ne pas y aller par quatre chemins.

- Ah. Heu oui. Que puis-je pour vous ? Demanda-t-il, en essayant de ne rien laisser paraître, de sa gêne soudaine.

- J'ai essayé de vous joindre à plusieurs reprises. Expliqua-t-elle, pour commencer. J'aimerais, si cela est possible, m'entretenir avec vous, à propos de cette série de meurtres. Ajouta-t-elle, en espérant que sa franchise, ne serait pas mal interprétée.

Maurice Dugrand avait été l'un des policiers chargés d'enquêter à l'époque, sur l'un des meurtres et elle souhaitait avoir son avis, sur cette affaire. Elle entendit un soupir et un silence gênant s'installait. Elle se mordit nerveusement la lèvre.

- Monsieur Dugrand. Commença-t-elle, en espérant rattraper le coup. Comme vous le savez sans doute, les meurtres on recommencer depuis 2 ans. Essaya-t-elle, de plaider.

L'ancien policier n'était pas en train de lui faciliter la tâche. Pour elle, on ne parlait pas de ce genre de détail au téléphone, mais elle n'avait pas d'autre choix, que d'exposer certains faits.

- Je vois. Répondit-il simplement. Dans ce cas, il serait plus convenable de nous rencontrer. Je viens de rentrer de vacances, mais pourriez-vous venir sur Thonon ? Demanda-t-il, légèrement tendu.

Sa voix n'était plus aussi chaleureuse, il montrait clairement, qu'il n'avait aucune envie de reparler de cette enquête, mais la presse et les journalistes pouvaient contribuer à résoudre de vielles affaires et cela n'allait lui coûter qu'un peu de temps.

Angélique sentait bien que ça ne l'enchantait pas, mais il était l'un des seuls, à pouvoir répondre à ses questions. Et effectivement, ce serait plus "convenable" de se rencontrer.

- Oui, bien sûr. Je peux venir demain en fin de journée, vers 17 heures. Proposa-t-elle soulagée, qu'il accepte enfin de la rencontrer.

Elle attendait ce moment depuis plusieurs mois, alors pas question de perdre une minute de plus.

- Heu oui très bien. Alors à demain Mademoiselle... Delmare. Hésitait-il.

- A demain et merci encore de m'accorder un peu de votre temps. Bonne journée Monsieur Dugrand.

- De rien, à vous aussi.

Et il raccrochait.

Maurice restait un long moment, la main posée sur le combiné du téléphone. Il essayait de se convaincre, qu'il venait de prendre la bonne décision, mais en réalité, il savait au fond de lui, que ce n'était pas aussi simple. Il avait longuement pesé le pour et le contre. Cette journaliste lui avait laissé plusieurs messages, qu'il avait écouté une semaine plutôt. Il avait secrètement espéré qu'elle aille laisser tomber, mais lorsqu'il avait vu son numéro s'afficher, quelque minute plus tôt, il avait compris qu'elle ne lâcherait pas l'affaire.

Il fermait les yeux et le visage de l'une des victimes, apparu dans son esprit. Lucie Gauthier, 18 ans à l'époque, avait été la deuxième victime supposée du tueur de Thonon et aussi son ex petite amie, avant qu'il ne rencontre Claire, son ex-femme. À l'époque, ils avaient été toute une bande de copain, lors des vacances d'été. Son souvenir était aussi dur, que doux. Doux, car la jeune fille avait été sa première petite amie et dur, car aucune femme, aucun être, ne méritait une telle fin.

Sa nouvelle compagne, Magalie Neuville, entrait soudain dans la pièce et il dut reprendre contact avec le présent.

- Maurice, le déjeuner est prêt. Lui annonça-t-elle avec un immense sourire.

L'odeur qui s'échappait de la cuisine était aussi délicieuse qu'attirante, pourtant, il avait le cœur au bord des lèvres. Il se tournait vers elle, fit les quelques pas qui les séparaient et déposait un tendre baiser sur sa joue rosée.

- Je t'aime. Murmura-t-il en effleurant soudain ses lèvres.

Tendrement, Magalie s'appuyait contre lui et y déposait un baiser, avant de le prendre par la main.

- Moi aussi je t'aime, Maurice. Allons vient, le déjeuner va refroidir. Le pressa-t-elle, en direction de leur salle à manger.

Il perdit un instant son regard devant le paysage qui s'offrait à lui. Sur le lac Léman, un léger brouillard se dissipait soudain et il réalisait alors, qui, il venait d'avoir au téléphone. Il se figeait un instant avant de redire son nom :

- An... Angélique Delmare ? Murmurait-il, le cœur frappant dans sa poitrine.

Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top