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Le ciel était sombre et menaçant. Quelque faible rayon de soleil faisait rougeoyer les nuages. L'air était oppressant.
Le domaine avait un immense verger, une forêt et quelques terrains agricoles. En contre bas du manoir, à environ 600 mètres se trouvait la grange où avait été retrouvé Juliette. Un chemin de terre longeait les bois sur la gauche et quelques terrains sur la droite.
Angélique marchait. Elle avait besoin de faire le vide, de reprendre ses esprits et de remettre toutes les pièces de son passé familiale à leur place. Il fallait qu'elle comprenne ce qui s'était vraiment passé. Imaginer sa tante, romantique, douce, aimante, drôle et espiègle, violée par l'un de ses amis et que tout le monde soit au courant, qu'Olivier se fiance avec une autre femme à la même date que leur fiançailles, tout cela pour tragiquement se donner la mort, lui était tout simplement et monstrueusement insurmontable.
Ses larmes coulaient encore et encore sur ses joues. Elle repensait aux écrits, aux poèmes et à la fin du journal de la jeune femme, qui semblait soudain déverser toute sa souffrance.
- Juliette... Murmurait-elle, alors qu'elle arrivait devant la grange.
Elle se figeait sur place et soupirait longuement. En tremblant, elle touchait le bois vieilli par le temps et la nature. Son cœur se serrait, lorsqu'elle osait ouvrir la porte à double battant.
Il faisait de plus en plus sombre et une brume sinistre commençait à se propager dans le domaine.
Elle entrait et regardait à l'intérieur, surprise de voir les lieux aussi propres et bien ranger. A vrai dire, l'intérieur n'avait rien à voir avec l'extérieur. En inspectant les lieux, elle levait les yeux et vit l'une des poutres. Elle fermait les yeux et sous le coup de l'émotion, elle crut voir le corps de sa tante, qui portait une longue robe de velours rose, pendue à une corde et un vieux tabouret couché sur le sol. Sous le choc, la jeune femme ouvrit les yeux et se précipitait dehors en retenant un haut le cœur.
Le regard sans vie de sa tante la hantait. La suppliait. Son cœur se mit à battre la chamade et elle décidait de se rendre au cimetière des De-la-Tours, qui se trouvait 200 mètres plus loin dans une clairière.
Après quelques pas, elle s'arrêtait net et se retournait, croyant entendre quelqu'un crier son prénom, mais cela devait être son imagination et puis, à quoi cela servirait de retourner dans cette maudite baraque. Elle aurait dû la vendre depuis bien longtemps.
Angélique se remit en route l'esprit toujours en feu. Elle se demandait ce que son père lui avait cacher d'autre et si Henri savait lui aussi toutes ces choses, ce qui serait sans doute encore pire.
Son désarroi était soudain si implacable, que la jeune femme dut s'arrêter un instant et s'appuyer contre un arbre. Elle était maintenant à la lisière de la forêt et dans quelques centaines de mètres, elle tomberait sur un petit sentier qui mènerait au cimetière. Elle avait toujours le cœur aux bords des lèvres et avait un peu de peine à reprendre son souffle. Pourquoi avait-elle décider de venir ici ? Pourquoi avait-elle laissé ce malade à Lörrach ? Pourquoi laissait-elle Ryan prendre autant de place dans sa vie ? Pourquoi son père ne lui avait-il pas parler de tous ces secrets ? Toutes ces questions tournaient en boucle dans son esprit. Après quelques instants, elle inspirait profondément, serrait les poings et se remit en route.
Le sentier lui semblait plus long que dans ses souvenirs, mais enfin, elle arrivait devant les deux croix en fer forgé d'architecture gothique, qui faisait office de portail. Elle se figeait sur place, en croyant reconnaitre l'un des dessins qu'avait fait Amalia Vogël, dans l'un de ce cahier, mais elle secouait la tête et soupirait. Était-elle en train de devenir folle ? Tous ces rêves, ces cauchemars et cette réalité étaient en train, de la rendre malade.
Même si ce lieu était magnifique, avec au centre le tombeau familial, les tombes et sur la gauche un petit kiosque de pierre qui tombait en ruine, la jeune femme détestait cet endroit. Le lierre, la vigne vierge et les rosiers sauvages avaient pris leur quartier et donnait au lieu, en plus des couleurs automnales, un air aussi effrayant, qu'étouffant. La brume et le crépuscule lui donnait soudain des frissons.
Angélique passait devant l'entrée du tombeau, le contournait et s'arrêtait net en arrivant devant la tombe de sa tante. Son cœur cessait soudain de battre et elle plaquait sa main sur sa bouche pour retenir un cri.
Le lieu ressemblait comme deux gouttes d'eau à l'endroit, qu'elle avait découvert vers la maison de Friedrich Auer. Si ce n'était que les « cadavres » étaient toujours sous terre. Le sol était jonchés d'ossements, petits et de toutes formes. Il y avait des roses séchées et fraiche partout autour, ainsi que sur la tombe de sa tante.
Fébrilement et les jambes tremblantes, elle fit encore un pas et écarquillait les yeux en voyant que la terre semblait avoir était retournée. Le cœur tambourinant dans sa poitrine, elle faillit faire un malaise. Son épine dorsale la mit brusquement en alerte, mais elle était tellement sous le choc de ce qu'elle voyait, qu'elle sentit à peine une main se poser sur sa bouche. Et un corps se plaquer contre elle.
- Tu es mienne, ma rose sauvage. Murmurait soudain une voix, dans le creux de son oreille.
La jeune femme sentit comme une piqure au niveau de son cou. Elle crut entendre la voix de Ryan, hurler son prénom, dans les limbes de son esprit. Mais sans qu'elle puisse réagir, elle se sentit tomber lourdement sur le sol. Elle ne vit pas un sourire démoniaque se dessiner sur un visage perfide. Le monde cessait soudain de bouger, son esprit se fermait enfin et elle sombrait dans les ténèbres.
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