Chapitre 39

Je m'accroche lorsqu'il finit par emprunter une voie rapide. J'ai beau ne pas avoir accès à son tableau de bord je suis persuadée qu'on roule bien au dessus des limites de vitesses. Il emprunte la voie la plus à gauche et dépasse l'ensemble des voitures sur notre droite. Je n'arrive pas vraiment à déchiffrer son humeur ni comprendre ce qui lui prend. Je n'ai aussi aucune idée de ou est-ce qu'il m'emmène mais je me tais. Je préfère rester muette car je sais que tout ça se retournera contre moi. J'ai tout sauf envie de répondre à ses questions sur Anil.

Après plusieurs minutes, il finit par emprunter la sortie et on s'enfonce dans un quartier assez effrayant. Je ne peux m'empêcher de jeter de nouveau un coup d'œil vers Denis qui semble vraiment savoir où il va. Pour ma part, je n'ai jamais mis les pieds ici. Des hommes qui semblent tout droits sortis de films de gangsters squattent les trottoirs des rues étroites que nous empruntons.

Si j'avais été avec quelqu'un d'autre que Denis c'est sûr que je me serais mise à paniquer mais là, je suis bien plus intriguée qu'effrayée. Après plusieurs minutes, nous finissons par nous garer en face d'une salle dont sortent plusieurs femmes ainsi que des hommes. La plupart n'ont vraiment pas une allure rassurante. Qu'est-ce que c'est ici ? Une boîte de nuit ?

Il a beau faire nuit noire autour de nous je n'ai pas de mal à distinguer les yeux de Denis briller alors qu'il fixe cet endroit.
Après quelques temps dans le silence, je décide finalement de le rompre.

- On est où ?

Il ne détache pas ses yeux du monde qui a finit par se regrouper à quelques mètres de nous.

- Devant un club.

Denis semble totalement parti. Il est pensif et je dois admettre que c'est vraiment intriguant. Je ne l'ai jamais vue dans cet état de nostalgie.

- Un club de quoi ? Demandais-je.

- Le club où j'ai rencontré ton frère il y'a quelques années.

A l'entente de « mon frère », je me redresse presque immédiatement pour m'attarder sur ce fameux club. Je n'ai jamais su qu' Aless venait dans ce genre d'endroit. Il n'est pas du type discothèque. Pourtant, je ne pense pas que Denis soit actuellement en train de mentir. Alors je décide de l'interroger encore un peu.

- C'est une discothèque ?

Je finis par obtenir l'attention complète de mon interlocuteur. Il détourne le regard de ce fameux club avant de le poser sur moi. Il semble hésiter quelques secondes puis finit par se pencher vers moi sans que je ne comprenne pourquoi. Il tend sa main devant moi et se met à ouvrir la boite à gant. J'en profite pour regarder ce qu'il y'a à l'intérieur. On y trouve des lunettes de soleils, un paquet de cigarette, puis une chose métallique qui attire bizarrement mon attention.

Une arme.

Avant que je ne puisse confirmer l'identification de l'objet, il attrape un papier puis referme la boîte à gant.

Je ne comprends pas immédiatement lorsqu'il me balance le papier sur les genoux puis qu'il revient à sa place.

- Regarde. Me dit-il.

J'attrape alors ce qui me semble être une photo. Lorsque je la retourne, j'y vois quatre personnes. Une fille blonde, John en vachement plus jeune, Denis qui ne semble pas bien différent, enfin peut être un peu plus mince et Aless. Par déduction, je devine que la blonde n'est personne d'autre que Paloma. Ils sont tous les quatre assis sur une grande barrière en métal et sourient. Cette photo n'est pas récente, c'est évident. Alors, c'est vrai, ils venaient tous dans cet endroit.

Je me pose actuellement un milliard de questions. Pourquoi me montrer cet endroit maintenant ? Pourquoi cette photo ? Je ne sais pas par où commencer mais lorsque je croise de nouveau le regard de Denis je n'ose plus rien dire. Il semble vraiment attristé. Il pense à quelque chose de douloureux et puis je me demande en fait si c'est en rapport avec sa soeur.

Il finit par m'observer droit dans les yeux avant de me demander.

- Tu me fais confiance ?

Mon coeur accélère de nouveau. Comme si j'étais en train de réaliser le plus grand sprint de ma vie. Une course folle menant à un endroit et une seule et même personne, Denis. Je ne sais pas quoi répondre, moi même je ne suis pas entièrement sûre. Lui fais-je confiance ? J'en ai aucune idée. Si je réponds non, en revanche, je suis sûr qu'il arrêtera là les révélations. Alors plus pour en savoir davantage sur lui et son passé, je préfère répondre affirmatif.

- Oui.

Alors, il finit par rouvrir la boîte à gant et tirer l'arme. J'en ai la confirmation, il s'agissait bien d'une arme. Je ne la quitte pas du regard lorsque Denis finit par la dissimuler à l'arrière de son short. Je ne comprends pas. Cet endroit est si dangereux que ça ?

Il finit par sortir de la voiture et me demande de faire de même. Sans broncher, je m'exécute. Cette fois-ci, je n'ai aucune envie de jouer la courageuse et refuser.

- Suis-moi.

Il finit par s'avancer vers le club et je ne me fais pas prier pour le coller. Je suis littéralement collée à lui. Mon épaule contre son bras, je suis ses moindres faits et gestes.
Lorsqu'on arrive devant la porte d'entrée, deux hommes effrayants nous bloquent le passage. L'un d'entre eux est tatouée sur le front. C'est très laid, au passage.

- Hernandez, putain ça fait un bail ! S'écrit le non tatoué.

Denis émet un sourire contraint. Rien de sincère, je le vois.

- Tu reviens pour jouer ?

Je regarde Denis en attendant patiemment sa réponse. Pour jouer ? A quoi ?

- Zac est là ? Demande-t-il.

- Ouais, il est là entre. Ça va lui faire plaisir de te revoir ici.

Les deux hommes finissent alors par s'écarter nous laissant donc entrer. Je remarque que Denis me laisse d'abord passer devant lui alors que j'ai aucune idée de quelle direction emprunter. On se retrouve dans un couloir sombre avec une odeur d'alcool bien présente.

Soudain, je sens les deux mains de Denis se poser sur mes épaules. Je me tétanise sur place. Je ne m'habituerais jamais à la façon dont sa peau rentre en contact avec la mienne. C'est perturbant et à la fois, c'est le seul pour qui je ne ressens pas cette envie de m'éloigner. Je bascule doucement la tête en arrière pour essayer de comprendre son geste mais il ne me regarde même pas. Il émets une pression en resserrant doucement sa poigne et me pousse à avancer. Je m'exécute alors jusqu'au moment où il me dirige vers la droite.

Nous finissons par entrer dans une pièce gigantesque et bruyante. C'est une salle de combat. Je suis subjuguée face au nombre de personnes qui se tiennent sur le ring. Ils sont par groupes de deux ou trois et s'entraînent. D'un autre côté, un groupe de filles finissent par nous voir entrer. Elles me regardent et je vois leur yeux parcourir tout mon corps, de mes orteils au haut de mon crâne. C'est super dérangeant.

Denis finit par retirer ses mains de mes épaules et se positionner à ma gauche.

- Je venais ici avec mon coach, Zac.

Je regarde alors Denis qui à son tour me scrute de ses grands yeux si expressifs.

- J'y ai rencontré ton frère, Paloma et John.

- Vous vous bâtiez ?

J'ai l'impression de découvrir une personnalité cachée de mon frère. Je n'avais aucune idée qu'il fréquentait des clubs de combats. Visiblement, je ne le connais pas si bien que ça.

- Ouais.

- Pourquoi ?

C'est vrai, je ne vois pas vraiment le but de se battre dans ce genre de lieux. Il y'a la boxe qui semble bien plus légal et encadrée.

- Comment ça pourquoi ? Demande-t-il finalement l'air amusé.

Je suis surprise d'avoir apporté un peu de lumière sur son visage après ma question. Il paraissait tellement froid jusqu'à maintenant.

- Je ne vois pas le but de se battre, c'est pour ça.

- Il y a toujours un but dans tout ce qu'on fait.

Même si je ne suis pas totalement d'accord avec ce qu'il dit, je décide d'abandonner lorsque une des filles qui m'observaient il y'a quelques minutes finit par nous rejoindre.

- Hernandez, que estas haciendo aquì ?

Je comprends un peu l'espagnol alors je n'ai pas de mal à voir que cette fille s'adresse à Denis.

- Val... Je viens faire un tour.

La brune qui apparemment se surnomme « Val » finit par reporter son attention sur moi et instinctivement je souris pour ne pas paraître désagréable. Apparemment, elle ne semble pas d'humeur à me sourire puisque qu'elle ne m'accorde même pas un « salut ».

- Ça fait tellement longtemps qu'on t'a pas vu. Tu devrais venir plus souvent.

Elle a déposé sa main sur son épaule à mesure qu'elle articulait sa bouche bien trop rouge pour parler. Je commence sincèrement à ne pas apprécier cette fille. Elle a l'air méprisante et mal polie. Habituellement, je ne suis pas quelqu'un de méchant ni de méprisante mais en regardant cette fille, c'est tout ce qu'elle m'inspire.

- T'as vue Zac ? Demande alors Denis sans prêter attention à ce qu'elle vient de dire.

- Oui, il est au bar.

Alors qu'on s'apprête à se diriger vers le bar, la brune nous interrompt encore une fois.

- Hernandez....

Elle s'approche de l'oreille de Denis et se dandine étrangement avant de lui chuchoter quelque chose. Je reste subjuguée face à son geste. Je ne comprends pas immédiatement ce qui me prends mais j'ai du mal à la voir si ...proche de lui. Je détourne donc le regard pour le poser sur mes pieds. Je me sens soudainement de trop et vraiment pas à l'aise. Je ne comprends pas pourquoi il m'a emmené ici. Il aurait pu tout simplement me raconter tout ça dans la voiture. Ce n'était pas nécessaire d'entrer.

Denis finit alors par sourire bizarrement lorsque la brune s'éloigne enfin de son oreille. Je décide de reporter mes yeux sur lui avant d'intercepter de nouveau son regard. Je lui en veux sincèrement de m'avoir fait entrer. Je n'ai qu'une envie c'est de sortir, mais je prends sur moi.

La brune finit par retrouver ses amis et nous laisser. Denis paraît distrait, puis finit par se diriger vers le bar. Il s'approche alors d'un homme qui est bien plus vieux que nous au passage. Ce dernier mets peu de temps avant de reconnaître Denis et le prendre dans ses bras.

- Hernandez ! Comment tu vas ? Tu fous quoi, ici ?

Je reste un peu à l'écart ne voulant pas paraître intrusive. Peut être qu'il ne veut pas que j'écoute leur conversation.

- Je viens faire un tour.

- J'espère que t'es pas venu pour remonter sur le ring. T'as laissé tout ça derrière toi, c'est pas le moment de replonger, mec.

Cela ne m'empêche quand même pas de tout entendre. Je décide alors de prendre place sur un des tabourets et de jouer avec mes bracelets. C'est plutôt distrayant.

Après des minutes qui me semblent interminables, Denis revient se positionner à côté de moi.

- Qu'est-ce qui t'arrive ?

Je n'arrive pas à croire qu'il me pose cette question. A cette heure-ci, je devrais être tranquillement chez moi mais je me retrouve dans un club de bagarre illégales.

- Je ne vois pas ce que je fais là, voilà ce qui me prends. J'avoue avoir dit ça un peu méchamment.

- C'est toi qui me fais chier avec cette histoire avec ton frère non ?

- Oui, mais tu n'avais pas à m'emmener jusque ici. Tu as une bouche et une langue t'aurais très bien pu m'expliquer sans me faire entrer dans cet endroit.

Je vois Denis qui commence à s'agiter. Je ne veux pas paraître méchante. Je sais très bien que ça partait d'une bonne intention, mais je me sens vraiment pas à l'aise ici. Puis ce groupe de filles qui me dévisagent depuis un moment, ça commence à me mettre mal à l'aise.

- Ok, on dégage alors.

D'un coup, il me tourne le dos et se dirige vers la sortie. Sans m'attendre ni rien, je le vois quitter la salle par là où nous sommes entrer. Je n'arrive pas à croire qu'il m'ait laissé ici. Je me dépêche de le suivre avant qu'il ne m'abandonne là. Décidément, je ne devrais pas lui faire confiance.

J'ai du mal à me repérer dans le couloir mais je finis par retrouver l'extérieur. Je retrouve Denis au loin en train de monter dans sa voiture.

Je me précipite alors pour aller le rejoindre le cœur battant la chamade. Je déteste ce genre de plan et l'impression de me sentir en insécurité. Alors que je pensais que je ne risquais rien avec Denis, je me suis carrément mise à flipper quand il m'a abonné sur ma chaise en plein milieu de ces gens effrayants.

Je remonte alors dans la voiture énervée.

- Ton frère est un fils de pute qui a baisé et frapper ma sœur jusqu'à la pousser au suicide. Tu l'as ta putain d'explication, satisfaite ?

Mon cœur rate un battement lorsque les mots durs de Denis déchirent le silence dans l'habitacle. Quand je me retourne vers lui, sa mâchoire est contracté tout comme ses mains autour du volant.

Une boule vient se former dans ma gorge à mesure que je comprends ce que Denis viens de dire. Non, c'est pas possible.

Mes larmes commencent à se former mais je fais un effort surhumain pour les retenir.
Ma voix se brise quand je prends la parole sèchement.

- Tu mens.

Je sursaute lorsque Denis se met à me hurler dessus et se retourner vers moi.

- Est-ce que j'ai la tête de quelqu'un qui ment Diviya ! J'ai que ça à foutre de me pointer ici et inventer une chose pareille sur ma soeur ! Kate est morte à cause de Aless.

Ma respiration se saccade. Je n'aurais jamais pensé un jour entendre de tels accusations sur Aless. Lui qui a toujours tout fait pour me protéger. Il n'aurait jamais été capable de lever la main sur moi. Comment pourrait-il faire une chose pareille ?

Cette fois-ci mes larmes cèdent. Je les sens ruisseler le long de mes joues à mesure que j'étudie Denis. Ses yeux sont rouges, ses muscles contractés et je comprends qu'un tel mensonge n'est pas envisageable. Il ne peut pas me mentir. Ça me fait mal de l'avouer mais je comprends que Denis ne ment pas.

- Je vais te déposer chez toi, t'inquiète pas. Dit-il finalement d'une voix bien plus calme.

Il démarre alors la voiture mais avant qu'on ne quitte le parking, je dépose ma main sur la sienne qui jusqu'ici serrait le volant. Je ne comprends pas immédiatement mon geste, puis après quelques secondes j'admets que finalement, si je le comprends.

Voir Denis dans cet état me brise beaucoup plus que ce je pensais. Le voir ainsi, me bouleverse complètement.

Son regard d'habitude si dur se fend sous mes yeux alors que ma main est toujours posée sur la sienne. Il émets des allez-retours entre ma main et moi.

- Je suis désolée. Avouais-je.

Hffmbx.

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