28
- Non, putain, c'est hors de question, réplique Denis d'un ton ferme.
Je sursaute, surprise par l'expression de détermination qui se lit sur son visage.
Alana s'approche de Denis, sa petite taille contraste avec son caractère imposant qui inspire le respect.
- Denis, lorsque tu m'as parlé de Diviya, je pensais que tu étais conscient de la situation. Tu travailles pour moi depuis trois ans, je refuse de croire que tu me contredises maintenant.
La tension dans la pièce est palpable, mon regard se figent sur eux deux.
- Alana, comme tu le dis, je ne t'ai jamais contredite ni remis en question aucun de tes ordres, mais là, je te le demande en tant qu'ami. Je refuse que Diviya assiste à ça, déclare Denis d'une voix empreinte de sincérité.
Ses mots résonnent dans la pièce, suspendant l'atmosphère déjà chargée. Alana, habituellement inflexible, semble prendre un instant de réflexion. Les secondes s'écoulent lentement, chacune d'entre elles semblant retenir son souffle.
- Tu veux savoir pourquoi je t'ai engagé, Denis ? Pas parce que Zac me l'a demandé, mais parce que tu n'avais aucune attache. Quand on fait ce genre de boulot, il n'y a pas de place pour les sentiments, déclare Alana d'une voix ferme.
Soudain, je me sens un peu de trop. Tout cela est de ma faute. Denis vivait sa nouvelle vie et il a fallu que je retombe sur lui derrière ce club. Il a fallu que nos chemins se recroisent après trois ans de séparation. Je pensais que c'était fini, que jamais plus je n'aurais à ressentir toutes ces émotions en croisant son regard, en entendant sa voix et en sentant sa présence.
- Vous n'êtes pas obligée de m'inclure dans la mission, Madame, dis-je d'une voix légèrement tremblante. J'ai signé un contrat avec vous, je ne dirai rien à personne sur tout ce que je sais et je laisserai Denis faire son travail jusqu'au bout.
Alana tourne son regard vers moi, l'évaluation dans ses yeux. Elle comprend ma volonté de ne pas être une source de complication supplémentaire dans cette situation délicate.
- Diviya, je ne vais pas te laisser seule là-dedans sans protection, me répond-elle d'un ton ferme. Tu es impliquée maintenant, et nous devons gérer cette situation ensemble.
Je baisse les yeux, comprenant qu'il n'y a pas d'échappatoire. Mon destin est désormais lié à celui de Denis et de cette mission dangereuse. J'acquiesce silencieusement, acceptant ma part de responsabilité dans cette situation complexe.
Alana s'approche de moi et pose une main réconfortante sur mon épaule.
- Nous trouverons un moyen de faire face à tout cela, Diviya. Nous sommes une équipe et nous nous protégerons mutuellement.
Elle se détourne de moi pour ensuite poser son regard sur Denis.
- Denis, tu es l'un de mes meilleurs éléments. Je te fais confiance pour prendre la meilleure décision.
Je vois le corps de Denis se détendre, un soupir de soulagement lui échappant. Son visage retrouve une expression plus sereine.
- Merci, Alana.
Alana nous adresse un sourire, puis quitte finalement le bureau, nous laissant seuls, Denis et moi. Un silence s'installe, empreint de soulagement mêlé à une pointe d'appréhension.
Je me sens envahie par un mélange de curiosité et d'appréhension face à tout ça.
- Elle consiste en quoi exactement cette chose à laquelle tu ne veux pas que j'assiste ? demandé-je, le ton empreint d'urgence et d'intrigue.
Denis passe une main sur son visage, comme s'il était submergé par la situation. Sa réponse est teintée d'une certaine retenue :
- T'as pas envie de savoir, fais-moi confiance, me répond-il d'une voix chargée d'émotions.
Mes yeux s'écarquillent en entendant sa réponse. Comment peut-il me demander de lui faire confiance sans même me donner une explication claire ?
- Si ! Je veux savoir, m'exclamé-je avec détermination.
Sans hésitation, Denis pose brusquement ses mains sur la table, se levant d'un mouvement vif. Il s'approche de moi, et mes yeux suivent son geste alors qu'il tente de retirer quelque chose de l'arrière de son pantalon. Mon regard se fige lorsqu'une arme apparaît sous mes yeux, provoquant un léger mouvement de recul instinctif de ma part.
Mon cœur bat la chamade alors que je réalise la gravité de la situation. Les mots qui s'échappent de ses lèvres m'atteignent comme une véritable claque.
- Je dois éliminer quelqu'un pour demain et l'offrir à Richardson dans l'une de ses planques, déclare-t-il d'une voix chargée d'une tension palpable.
Le poids des paroles de Denis s'abat sur moi, créant une atmosphère sombre et oppressante. Je me sens submergée par un tourbillon d'émotions contradictoires, oscillant entre la peur, la confusion et un sentiment de trahison.
- Mais... pourquoi ? Je demande d'une voix tremblante.
Denis éclate de rire nerveusement, accentuant mon malaise.
- Pourquoi ? répète-t-il, ses mots porteurs d'une ironie glaciale. Parce que c'est mon travail, Diviya.
Je le vois s'éloigner de moi et se diriger vers la salle d'entraînement au fond. Instinctivement, je le suis, cherchant désespérément une réponse à mes questions. Denis s'arrête en face d'une étrange cible, sa main me positionnant derrière lui.
Il tend les bras, l'arme toujours fermement en main, et vise avec détermination. Un frisson parcourt mon corps lorsque le bruit sourd de la balle résonne dans la pièce, atteignant précisément la cible entre les deux yeux du mannequin.
Ce simple acte, empreint de froideur et de précision, soulève en moi un mélange de fascination et d'effroi. Je réalise que Denis est plongé dans un monde bien plus sombre et complexe que je ne l'imaginais. La vérité me frappe de plein fouet : il est impliqué dans des situations dangereuses et des actions dont la moralité est remise en question.
- Mon travail, c'est ça, reprend Denis d'un ton résolu. Je ne remets pas en question les ordres, je les exécute. Même si ça implique quelques sacrifices, la cause reste toujours la même.
Le regard de Denis revient vers moi lorsqu'il finit par se retourner et ranger son arme. J'ai du mal à trouver les mots.
-Ça veut dire que tu as déjà... tué ?
Il me fixe dans le silence, son regard parlant pour lui. Je comprends instantanément, sans qu'il ait besoin de prononcer un mot. C'est clair, ce n'est pas la première fois qu'il est confronté à ce genre de situations depuis les trois dernières années. Cette révélation me frappe douloureusement : Alana Ruiz a complètement transformé l'homme qui se tient devant moi.
- Mais... des innocents, Denis. Cet homme que tu t'apprêtes à tuer, il n'a rien fait. Richardson le veut pour alimenter son trafic et... toi, tu... Comment tu peux faire ça ?
Le silence s'étend dans la pièce, lourd de sens, tandis que Denis détourne le regard, semblant porter le fardeau de sa réalité sur ses épaules.
- C'est tout ce que je peux faire. Quand je suis parti pour New York, j'avais tout perdu, Diviya. Ma mère est dans un état de choc constant, elle ne réalise même pas que sa fille est morte, elle ne parle plus, et mon père me déteste. Toi, je t'ai lâchement abandonnée. Je n'avais plus rien. Alors, quand Zac m'a envoyé rencontrer Alana, j'ai pas refusé.
Mon cœur bat avec une intensité douloureuse dans ma poitrine. L'image de Denis, solitaire à New York, se causant lui-même une telle souffrance en s'éloignant de moi de sa propre volonté, me déchire le cœur en mille morceaux. Je ressens une douleur profonde et une tristesse dévorante devant la réalisation de tout ce qu'il a enduré et sacrifié.
Sans vraiment réfléchir, j'attrape ces deux mains dans les miennes. Son regard suit mon mouvement avant de replonger dans mes yeux.
- Et quand t'as mission sera terminé, qu'est-ce que tu comptes faire ? Je demande.
- Rien. Je rentre à New York et j'accepte la nouvelle mission d'Alana.
C'est plus fort que moi, je m'imagine un jour devoir le retrouver mort sur un lit d'hôpital. Cette histoire ne peut pas se terminer de façon joyeuse. Denis avance un pas dans la tombe à chaque minutes de plus qu'il travaillera pour Alana. Et je n'ai pas envie d'avoir sa mort sur la conscience, il est hors de question que je revive ça.
- Mais Denis, tu ne peux pas passer t'as vie à faire ce travail. Ça pourrait mal finir un jour !
- Diviya. J'ai choisi ce boulot pourquoi à ton avis ?
Non. Il ne peut pas ...
- Pourquoi ? Je demande.
- J'étais convaincu que si quelque chose devait m'arriver un jour, je manquerais à personne.
Ses mots résonnent dans l'air, pénétrant au plus profond de mon être. Je suis submergée par une vague d'empathie et de compréhension pour ce qu'il a traversé. Les souvenirs de ma propre détresse refont surface, les moments où j'ai désespérément cherché une échappatoire à ma douleur insupportable.
Pendant des années, j'ai porté le fardeau de mes souffrances, me détestant au point de vouloir mettre fin à ma propre vie. Je me souviens de ce jour où j'ai osé défier la mort, plongeant dans les eaux sombres et polluées d'un canal cambodgien, désespérée de me libérer de ce corps qui n'était plus qu'une prison pour moi. Je comprends cette profonde douleur qui consume Denis, cette sensation d'être indigne du bonheur, hanté par la culpabilité et la peur d'infliger davantage de souffrance à ceux qui l'entourent.
Et maintenant, face à lui, je réalise que nous partageons ce même sentiment de destruction intérieure. Nous sommes tous les deux brisés par les épreuves de la vie, luttant pour trouver notre place et notre valeur dans ce monde impitoyable.
Une émotion sincère me submerge alors que je réalise que je ne suis pas seule dans cette souffrance. Denis aussi est marqué par les cicatrices invisibles de son passé. Cette prise de conscience me lie encore plus à lui, car nous partageons cette fragilité, cette vulnérabilité qui nous rend humains.
- C'est faux. Je suis persuadée que tes parents seraient dévasté d'apprendre que leur seul fils n'est plus de ce monde tout comme John serait aussi détruit d'avoir perdu celui qui a été son meilleur ami et ... y'a Paloma aussi. Il y a moi aussi, Denis.
Les paroles que je viens de prononcer pénètrent l'atmosphère, chargées d'une conviction profonde. Denis relâche mes mains brusquement, créant un moment de vide entre nous. Puis, ses mains trouvent leur chemin vers ma nuque, ses pouces caressant doucement mes joues. Un sentiment réconfortant m'envahit, accompagné d'un frisson de papillons dans mon estomac.
- Diviya. Mes parents savent que je suis à Washington et mon père n'en a rien à foutre. Et John ne rêve que d'une chose, c'est de me voir disparaître pour t'avoir pour lui tout seul.
- Non. Je refuse de croire que ton père n'en a rien à faire. Vous devez discuter. Et avec John, on est seulement amis, Denis. Ça a toujours été comme ça pendant trois ans.
Un des pouces de Denis passe doucement sous mon menton, me forçant à relever la tête pour plonger mes yeux dans les siens.
- Regarde-moi dans les yeux, Diviya, et dis-moi qu'il n'y a jamais rien eu entre vous. Vas-y.
Je déglutis, sentant mes joues rougir de gêne. Non, je ne peux pas. Je ne peux pas lui parler de ce baiser complètement stupide, mais je ne peux pas non plus lui mentir alors qu'il est si proche de moi, comme s'il lisait directement dans mon âme.
- Je ...
J'essaie de détourner le regard mais Denis raffermit sa prise et repositionne ma tête de sorte à ce que mes yeux ne quittent plus les siens.
- Je t'écoute. Ajoute-t-il.
J'aime John comme un ami. Je l'aime comme un membre de ma famille. Je ne l'aimerai jamais comme j'ai aimé Denis.
Je crois que je ne tomberais jamais amoureuse d'un autre que lui.
Je l'ai très bien compris ce soir là dans la voiture de John. Lorsqu'il m'a embrassé. Ma faute est de ne pas l'avoir repoussé car au fond de moi, je voulais savoir ce que ça faisait d'en embrasser un autre. J'avais l'espoir que ce serait aussi fort que lorsque j'étais avec Denis mais ça ne l'était pas. Je n'ai absolument rien ressenti.
Quand je suis avec Denis, il me suffit d'un regard pour ressentir mon cœur battre comme s'il était sur le point d'exploser. Mes joues rougir comme si j'étais en surchauffe. Mon cerveau perdre tout rationnel pour laisser mon corps réagir naturellement.
Mon corps aime Denis naturellement même si mon cerveau le déteste électriquement.
- On s'est embrassés une fois. Avoué-je.
Le regard de Denis passe de l'appréhension à la colère en moins d'une seconde, ce qui me pousse à continuer à parler.
- Denis, ça ne s'est produit qu'une seule fois en trois ans, il y a un mois. Je... C'est lui qui l'a initié et je... je ne l'ai pas repoussé.
Son visage se crispe davantage au fur et à mesure que mes mots s'enfoncent et... j'ai peur. J'ai peur de ce que je ressens en ce moment même, car cela pourrait signifier que...
- Tu l'as pas repoussé ? Pourquoi ? Tu...
Sa voix résonne d'une étrange manière et il s'interrompt, comme si les mots lui brûlaient la gorge.
- Tu l'aimes, bordel, Diviya ?
- Non ! Pas comme ça.
Mes larmes continuent de couler, sans cesse. Je ne les compte plus et je me demande parfois si cela a un impact sur ma santé. Devrait-il y avoir une limite à ces lourdes gouttes d'eau salée ?
- Alors pourquoi, putain !
Je ferme les yeux alors que sa voix monte en intensité. Je voulais garder ce secret pour moi, pour John, mais je n'y parviens pas quand je suis sous son emprise. C'est tellement difficile de lui mentir.
- Parce que je voulais savoir ce que ça fait d'embrasser quelqu'un d'autre.
Les mains de Denis se détachent brusquement de moi, et il s'éloigne. Je vois ses poings se crisper le long de son corps tandis qu'il se met à marcher comme une bête en cage devant mes yeux.
- Tu aurais pu essayer avec n'importe quel autre mec, bordel Diviya, n'importe quel autre connard, mais tu l'as choisi lui ! Je vais devenir fou, putain.
Les pieds de Denis frappent violemment une chaise qui s'écrase contre le mur.
- Je suis désolée, d'accord ! Mais lui, comme tu dis, c'est le seul mec qui a été là pour moi pendant trois ans, Denis ! Je n'avais personne, je ne faisais confiance à personne !
Il revient brusquement vers moi, s'arrêtant à quelques centimètres à peine. Mes mains tremblent de colère, de tristesse et d'autres émotions indéfinissables.
- Confiance ? Il éclate de rire, un rire fou. Bon sang, Diviya, tu as le don de faire confiance aux pires salauds dans ce putain de monde.
Et cette vérité me brûle de l'intérieur. Parce que je sais qu'il a raison. Quelque chose en moi est défectueux pour aimer et accorder ma confiance aux pires individus !
Rama ...
Denis ...
Aless ...
Denis semble prendre conscience de la gravité de ses mots. Il tend une main vers moi.
- Ne me touche pas !
- Diviya, c'est pas ce que je voulais dire, je...
- T'es réellement un monstre, Denis ! Un monstre qui détruit tout sur son passage ! Et je suis la plus grande idiote de te pardonner et de ressentir de la peine pour toi !
Je récupère mon sac et je me précipite vers la sortie. J'entends les pas de Denis résonner derrière moi, mais je cours aussi vite que je peux pour m'éloigner de lui. Cependant, je réalise une fois de plus que je suis au beau milieu de nulle part. Cet entrepôt est situé dans une zone isolée, loin de tout. Le soleil s'est couché depuis plusieurs heures.
Une rage bouillonne en moi, car je me sens impuissante. Je pleure. Je laisse toutes les larmes de désespoir s'échapper de mon corps, et je m'effondre au sol, épuisée de toute énergie.
La silhouette de Denis se dessine devant moi à travers mes yeux embués de larmes. Il reste immobile, comme figé, me regardant tandis que je me laisse aller à ma vulnérabilité, sans aucune barrière. Je ne peux plus feindre que tout cela ne m'affecte pas, car je suis épuisée, émotionnellement et physiquement.
Mes mains tremblantes se lèvent lentement pour essuyer les larmes sur mon visage, mais elles se figent en chemin. Une main douce se pose sur mon épaule, et je sens une chaleur réconfortante m'envahir. Je lève les yeux et le trouve à genoux devant moi, son regard empli de tendresse et de compassion.
Sans un mot, il étend ses bras autour de moi, m'invitant à me réfugier contre lui. Mes jambes fléchissent sous le poids de l'émotion, et je me laisse aller dans ses bras. Les larmes continuent de couler, mais elles se mêlent maintenant à un sentiment de soulagement et de sécurité.
Malgré tout.
Je sens sa poitrine se soulever au rythme apaisant de sa respiration, et je m'accroche à lui comme si ma vie en dépendait. Sa présence, sa force et sa douceur me réconfortent d'une manière indescriptible. Je me sens enveloppée dans un cocon de tendresse, où toutes mes peurs et mes doutes s'apaisent.
Malgré tout.
Le monde autour de nous s'efface, ne laissant que cette connexion intense entre nos deux âmes blessées. Dans cet instant de silence, aucun mot n'est nécessaire. Seules les émotions palpables parlent pour nous.
Alors, je me laisse aller complètement, me blottissant contre lui, cherchant un réconfort qui ne peut venir que de lui.
Malgré tout.
Et là, dans cet étreinte réconfortante, nous restons, bercés par le souffle du vent qui murmure doucement à nos oreilles, comme si même la nature elle-même savait combien nous avions besoin l'un de l'autre.
Parce que je l'aime,
Malgré tout...
Hffmbx.
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