Un an derrière les barreaux


Trois-cent-soixante-cinq jours, voilà exactement le nombre qui vient de tomber, aujourd’hui en ce cinq Janvier, voilà un an que je suis ici, dans cette prison pour mineur.

Nous n’avons pas fêté Noël tout comme le jour de l’an, du moins ça nous a été interdit, si bien que la plupart des détenus ont foutus un bordel monstre jusqu’à pas d’heure, certains auraient dû partir en isolement mais part manque de place, ils ont préféré les laisser se calmer tout seul, enfin, pour plus de facilité nous avons tous été enfermés dans nos cellules.

Du coup nous en avons profiter pour nous occuper Lola et moi, alors que j’écrivais une lettre destinée à Jacob et Casey, elle était en train de dessiner sur une feuille blanche. Après lui avoir demander ce que c’était elle m’a juste répondu que c’était la Santa Muerte, la faucheuse mexicaine en somme.

Je me souviens aussi que cette soirée était épique dans le fait qu’elle voulait absolument m’en tatouer une sur le corps, chose que j’ai absolument refusé.
Néanmoins, je sais qu’à la moindre hésitation elle me tombera dessus pour me tatouer.

Ajoutant en plus qu’avoir un tatouage est un rite de passage pour toutes personnes étant allés en prison, de plus, étant du folklore mexicain, ça me laissera un souvenir du groupe en entier de façon indélébile.

Après tout, nous pouvons faire circuler beaucoup de chose ici avec plus ou moins de facilité. Je sais très bien qu’il faut juste s’adresser à la bonne personne pour obtenir ce dont on a besoin.

Bien que cela se soit passé il y a quelques jours, c’est comme inscrit dans ma tête, ne voulant pas en sortir, je suis donc allongée sur mon lit, regardant la petite fenêtre de la pièce où je vois la neige tomber, apparaissant encore plus blanche à cause du soleil qui tarde à se lever.

Je manque de pousser un cri lorsque je sens une personne me sauter dessus en me hurlant de me lever. J’entends Lola me hurler dessus un joyeux anniversaire de prison.

Parce que oui, étant donné qu’elle ne connaissait pas mon anniversaires de base, du moins jusqu’à ce qu’elle arrive à fouiller les dossiers qui sont censé être sous celées, nous avons décidé de célébrer d’une certaine façon, les années qui vont s’écouler durant mon incarcération. 

Durant cette année passées derrière mes barreaux, l’ambiance au sein de la prison n’a pas bougée, alternant constamment entre les libérations, les nouveaux et les suicides. Tous comme les prisonniers, les gardiens changent au fur et à mesure, certains partent à la retraire ou d’autres arrivent.

Mon amitié avec Lola tout comme les autres évolue au fur et à mesure des mois qui se sont écoulés, j’ai l’impression, d’une certaine manière, d’avoir trouvé une nouvelle famille, surtout avec la surprise que Lola m’a fait pour mes seize ans, alors que je m’apprêtais à fêter mon anniversaire seule, ou du moins sans que personne ne le sache, un gardien est venu me chercher.

N’ayant fait aucune bêtise pour le moment, je suis surprise d’être emmené sans raison apparente, surtout qu’on m’emmène dans une zone que je ne connais pas du tout.

Mais la surprise est encore plus grande lorsque je me rends compte qu’on se trouve dans la zone des visites et surtout, que devant moi, en plein milieu de la pièce, Casey et Jacob sont là, en train de m’attendre, un immense sourire aux lèvres.

Je n’ai pas attendue que mes menottes soient retirées pour aller dans leurs bras, heureuse d’enfin les retrouver.
Nous sommes restés les deux heures qui suivent à discuter et rire. C’est un anniversaire que je ne pourrais jamais oublier, surtout que le bonheur est de courte durée.

J’apprends en même temps que c’est Lola qui a tout organisée pour cette rencontre, cela me fait plaisir à un point que je n’aurais jamais penser, il va falloir que je la remercie une fois que je la verrais, c’est impératif.

Ma famille n’est pas venue une seule fois, de toute façon ce n’est pas quelque chose qui m’étonne venant de ma mère, sans parler du fait qu’elle a sûrement interdit à Elise de venir me voir en même temps, accompagné ou pas.

Je suis tout juste sortie des visites qu’un des gardiens qui est à l’accueil vient dans ma direction avec une enveloppe à la main à mon attention.

Sans un mot, il me donne une enveloppe avec le logo des affaires familiales puis fait demi-tour afin de repartir à son poste.

Je sais très bien qu’ici, ce sont les gardiens ou même la secrétaire qui signe nos papiers importants, nous les détenus, nous nous déplaçons uniquement à travers nos bâtiments et la cour.

Une fois dans le réfectoire, les menottes me sont retirées et les gardiens qui m’ont escorté partent dans leurs locaux de surveillance. Après un câlin de Lola pour la remercier de la surprise et lui avoir chuchoter quelques mots, je pars dans ma cellule pour enfin, découvrir ce que la lettre cache. 

Rien qu’à l’idée qu’il s’agit des affaires familiales ça ne me rassure pas. Surtout si ma mère à quelque chose à voir là-dedans. D’un geste tremblant, je m’assois sur mon lit, le faisant grincer par l’usure, puis ouvre l’enveloppe pour y faire sortir un document avec écrit en gras Directive des affaires familiales.

Le souffle semble quitter ma cage thoracique, redoutant malgré tout le document, je déchire intégralement l’enveloppe pour y sortir le papier avec la signature du juge charger de l’affaire.

Ma vue ce trouble au fur et à mesure des mots qui s’imprime sur ma rétine, mes mains tremblent de plus en plus au point que la feuille tombe comme si elle m’avait brûlé les doigts. Malgré que le papier soit à même le sol, c’est comme si, au premier coup d’œil, je pouvais encore lire ce qui est écrit dessus.

Mademoiselle Anastasia Jones,

Suite à votre incarcération pour meurtre aggravé à l’encontre de Monsieur Etienne Jared, votre mère, Madame Nathalie Jared a émise une demande auprès des affaires familiales vous concernant.

Pour vous tenir au courant de la demande encourue, le jour de votre condamnation, Madame Nathalie Jared à exprimer le souhait à son avocat, Maitre Connor, d’abandonner officiellement toutes responsabilités à votre encontre.

De ce fait, après une enquête approfondie et en vue de la situation actuelle de votre famille, la personne chargée de l’enquête n’a pu qu’être favorable à cette demande.

Cette décision prend effet immédiatement à la réception de ce courrier, étant donné que vous portez le nom de votre père, des démarches administratives pour un changement de nom de famille ne sont pas nécessaire.

Pour toutes décisions, je reste à votre disposition, pour cela, il ne vous faudrait qu’adresser une lettre à mon encontre avec l’adresse écrite en tête.
Le Juge des affaires familiales.

Comme si elle sentait mon malheur, Lola ne tarde pas à passer le pas de la porte. En quelques secondes, me voilà dans ses bras, je pourrais me mettre à pleurer mais pourtant, rien ne veut sortir si ce n’est de la rage qui commence peu à peu à monter en moi.

Je garde mes yeux rivés sur la lettre poser par terre, je me sens comme vide de toute émotion positive, je n’ai même pas envie de pleurer, parce que pour moi, j’ai l’impression d’être orpheline de parent depuis toujours, mais ce courrier signifie aussi que je n’aurais plus de sœur, je me retrouve donc totalement seule, sans aucune famille si ce n’est celle de cœur.

J’entends dans le réfectoire juste en dessous un groupe de fille parler de plus en plus fort au point de se mettre à crier, en quelques minutes, des bruits de coups et des cris se font entendre.

Il n’a fallu qu’un regard vers Lola pour que je descende en trombe et me mêle à la cohue sans même chercher à comprendre ce qu’il se passe.

Je me suis mêlée au groupe sans chercher à comprendre et me suis mise à frapper toutes personnes étant dans mon passage. J’évacue en même temps toute la rage qui s’accumule dans mon corps suite à cette nouvelle.

Je suis arrêtée par des coups de matraque me coulant au sol, en regardant autour de moi, je vois que je suis la seule dans ce cas-là, toutes les autres se sont décalées, me laissant seule contre les gardiens.

C’est le corps complètement endoloris et à moitié sonner que je sens qu’on me porte pour ensuite me trainer dans de nombreux couloirs, je ne reprends que pleinement conscience lorsque le bruit de ferraille résonne dans cette pièce vide.

Je me lève comme sur des ressorts et commence à frapper sur la porte en fer, hurlant à plein poumon à qui veut l’entendre. J’entends vaguement des craquements au niveau de mes mains mais je n’y prête pas attention, l’adrénaline annihile totalement la douleur.

Je ne sais pas combien de temps je suis restée ainsi, à hurler à plein poumon, évacuant ma rage et ma peine. Juste après, je m’allonge en plein milieu de la pièce, m’explosant la rétine avec les néons de la salle d’isolement.

La porte qui s’ouvre dans un grincement strident me faire redescendre sur terre, en regardant l’origine du bruit, je vois juste à l’encadrement de la porte une femme vêtue d’une blouse blanche avec une mallette puis, à ses côtés, deux gardiens armés.

Bien que je ne cherche pas à comprendre ce qu’elle peut bien dire, je comprends sans mal qu’elle est une infirmière du secteur et qu’elle est là suite à un appel des gardiens qui m’a vue frapper la porte à grands coups de poings.

Par soucis de sécurité et n’ayant aucun problème visible, un passage à l’hôpital n’est pas nécessaire, c’est donc pendant qu’elle me met une pommade ainsi qu’une bande que je l’écoute, presque bercée par sa voix douce, ne prêtant aucune attention aux deux gardes qui ne me lâchent pas du regard un seul instant.

J’apprends que je suis en isolement pour au minima trois semaines par rapport à ce que j’ai fait aujourd’hui. De plus, les trois filles que j’ai frappées sont toutes parties en ambulance nécessitant des soins en urgence, selon les remeurs, il y aurait au moins un bras de cassé et elles ne seront pas de retour avant quelques semaines.

C’est lorsqu’ils partent tous, me laissant de nouveau seule que je sors la photo qui ne me quitte jamais depuis le premier jours de mon incarcération, celle de mon père, ma petite sœur ainsi que moi-même. Je me souviens de cette photo, sans que je le sache, c’était la dernière journée que nous passions avec mon père.

C’était une journée en famille, pour marquer le coup, mes parents ont tenus à ce qu’on aille faire un tour dans le zoo de la ville.

Je me souviens encore de ma peur pour les autruches ainsi que les grimaces que je faisais avec mon père devant les nombreux singes ou encore les rugissements devant les lions. C’est le dernier souvenir que j’ai avec mon père, la seule photo que j’ai réussis à sauver.

Distraitement et sans lâcher la photo des yeux, je me mets à caresser là où son visage se trouve, m’apercevant comme un crève-cœur, que peu à peu, les souvenirs de mon père disparaissent. Je ne me souviens plus de sa voix, de son odeur.

Lentement, je dis tout ce que j’ai sur le cœur à mon père, que ce soient mes doutes, mes crises de colères, les moments où, à bout de nerfs, j’ai voulu pleurer au point de ne plus avoir d’eau dans le corps.

Au fur et à mesure que les mots quittent ma bouche, les larmes coulent sur mes joues, d’abord de temps en temps puis de plus en plus vite, manquant parfois de m’étouffer lors de ma crise de sanglot.

En position fœtus, mes larmes continuent de couler le long de mon visage jusqu’à atterrir à même le sol, c’est avec un mal de tête et une fatigue extrême que je ferme les yeux, ma dernière photo de famille serrer contre le cœur.

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