L'accident

L'entraînement de basket doit être terminé depuis une demi-heure environ. Normalement, Ayden doit se trouver sur le parking avec les autres membres de l'équipe. Je les croise souvent lorsque je quitte moi-même le lycée après mes propres entraînements.

Lorsque j'arrive non loin des premières voitures, j'entends la voix de Scott qui me supplie de m'arrêter. Mais mon regard est fixé sut Ayden qui rigole avec Zachary.

Je marche d'un pas rapide sur la route quand un violent crissement se fait entendre. Je tourne la tête vers la droite : j'entends alors un bruit de moteur, celui d'une puissante moto que je vois foncer vers moi. J'ai à peine le temps de noter que le conducteur porte un casque et un blouson noir et je me retrouve projetée en arrière. Ma tête heurte brutalement le sol et tout devient noir.


Lorsque j'ouvre les yeux, j'ai le sentiment d'avoir basculé dans un monde étrange où tout est blanc, du sol au plafond. La lumière crue me fait cligner des paupières puis, je suis foudroyée par un mal de tête atroce.

Et je me rappelle...

L'entraînement de baseball, Scott, Ayden, le parking, la moto.

Je m'agite sur le lit dans lequel je me trouve et une voix rauque me sort de ma léthargie :

- Elle est réveillée Chaz.

Ah, mon meilleur ami est là lui-aussi. Ouf. Mais...l'autre...c'est qui ?

Je fais un effort pour ouvrir les yeux à nouveau et je vois face à moi les mines anxieuses de Chaz et de...Scott ?

Minute, qu'est-ce que j'ai encore loupé ?

Mon meilleur ami joue accessoirement le rôle de garde du corps personnel. Comment a-t-il pu accepter qu'une personne qui ne fait pas partie de notre petit cercle d'amis se retrouve là, à ses côtés ?

Je m'assieds avec précaution et je dévisage Chaz d'un air interrogateur : il s'approche alors de moi et il me prend doucement la main.

- Comment tu te sens ?

- Oh...disons que dans ma tête les feux d'artifice du 4 juillet ont été multipliés par mille. Sinon...je crois que ça va. J'ai quoi ?

- Une commotion légère, une fracture du poignet et une entorse à la cheville.

- QUOI ? Mais...et le baseball alors ? Ma saison est fichue !

- Karlie, bordel t'es pas croyable ! On te fonce dessus, tu es blessée et toi, tu penses au baseball ?

Tu sais que ton père a demandé à ce que les accès à l'hôpital soient surveillés et qu'il y a un mec qui se trouve là derrière ta porte ?

Ça doit être les médocs qu'on m'a fait ingurgiter mais j'ai l'impression de ne pas pouvoir imprimer dans mon cerveau les paroles de Chaz. Scott s'avance alors à son tour et, avant de s'assoir à mes côtés, il se tourne vers mon meilleur ami comme pour lui demander son autorisation.

Est-ce que quelqu'un va finir par m'expliquer ce qu'il se passe ?

Le basketteur m'observe avec attention et moi, comme une cruche je me sens rougir sous son inspection.

- Karlie...on a tous été interrogés par la police. Ayden, les autres gars de l'équipe et moi. On a tous vu la même chose : la personne sur la moto t'a foncé dessus. Volontairement. C'est un miracle que tu t'en sortes aussi bien. Quand tu seras rétablie, tu devras aussi répondre à quelques questions.

J'essaie de réfléchir aussi vite que mes pauvres neurones me le permettent. On m'a foncé dessus délibérément. On a essayé de me tuer. Pourquoi ?

Mon père serait-il sur le point de découvrir qui est le tueur des Queens ? Est-ce que du coup, c'est un avertissement à son encontre ? Dégage sinon on s'en prend à ta famille ?

Ça ne m'étonnerait même pas.

- Donc...on a essayé de me tuer n'est-ce pas ?

- Ton père ne veut pas le confirmer, il n'exclut pas la possibilité que le conducteur était ivre ou quelque chose comme ça.

Depuis quand mon père discute avec Scott ?

- Hum...au fait, j'ai été inconsciente longtemps ?

- Non pas trop. Les infirmiers ont vérifié pendant la nuit que tu te réveillais assez facilement et depuis midi ils ont dit qu'on pouvait te laisser dormir.

- Attends, vous n'êtes pas allés au lycée ?

- Seulement ce matin. On a reçu l'autorisation de Weaverling. Zoey, Norah, Kellan et Terrence viendront te voir demain.

Scott consulte rapidement sa montre :

- On va devoir te laisser. L'infirmière a dit qu'on ne pouvait pas te fatiguer et que tu avais besoin de repos.

Il me fait un léger bisou sur la joue puis un petit signe à Chaz et il quitte ma chambre.

Je dévisage mon meilleur ami totalement ahurie :

- Tu es sûr que je n'ai pas dormi genre...trois ou quatre mois ?

- Non, non je t'assure, ton accident date seulement d'hier.

- Mon père lui a parlé ?

- Ouais. C'est Scott qui est monté dans l'ambulance avec toi, moi j'étais à mon club. Et le temps que j'apprenne la nouvelle...

Je suis arrivé un peu après ton père à l'hôpital.

- Merde, il va vraiment croire qu'on est ensemble Scott et moi.

- Et pourquoi pas finalement ? Tu as rougi quand il t'a regardé...Et...je pense que ton père, tout comme moi, ne dirait pas non à ce que tu aies un garde du corps supplémentaire. Bon, on reviendra sur Scott plus tard.

Ton accident est lié au tueur des Queens c'est évident. Ton père et le mien doivent sans doute s'approcher de la vérité et je pense que...nous devrions les laisser bosser et ne plus nous occuper de cette affaire.

- Mais !

- Karlie, j'ai eu la peur de ma vie ! On doit d'abord penser à surveiller nos arrières.

Je grimace mais Chaz n'a pas tort. Cependant, à moins de s'enfermer dans un bunker, je ne vois pas comment on pourrait se protéger d'un tueur en série qui m'aurait prise pour cible.

L'entrée de l'infirmière dans ma chambre m'empêche de poursuivre ma discussion avec Chaz qui est gentiment poussé vers la sortie.

Je déteste les hôpitaux et je dois dire que je suis soulagée lorsque le médecin qui a supervisé mon petit séjour m'indique que je peux rentrer chez moi trois jours après l'accident. Je déchante ensuite lorsqu'il me dit que je vais devoir rester chez moi un certain temps, que je peux oublier smartphone, ordinateur, télé, jeux vidéo et lecture pendant ma convalescence.

Et quoi je vais être obligée de compter les moutons pour m'occuper pendant tout ce temps ?

Mais le doc insiste :

- Mademoiselle Adriansen, vous devez savoir que le seul remède connu à une commotion est le repos total, physique et cognitif. Après une commotion cérébrale, le cerveau a besoin de toute son énergie pour se remettre de ses blessures. Pour cela, il faut éviter de le stimuler. Retourner trop vite au lycée, reprendre le baseball trop vite retardera la récupération.

Et c'est qu'il enfonce le clou le comique !

Je vais donc être forcée de rester chez moi deux semaines puis, lors de mon retour à l'école je suivrai un programme allégé durant trois à quatre semaines.

Avec peu d'espoir je regarde le médecin et je demande :

- Et pour le baseball ? Vous savez je me débrouille bien. Pas de risque que je me tape la tête avec ma batte.

- Je n'en doute pas mais encore une fois, la reprise devra s'effectuer en douceur.

- C'est-à-dire ?

- Tenez, je vous ai préparé un planning. La première étape sera d'effectuer de légers exercices de conditionnement. Puis un petit quart d'heure de cardio : vélo elliptique, tapis roulant, marche rapide, jogging léger au choix.

Ensuite, vous pourrez augmenter l'intensité et la durée de l'entraînement cardio, vous pourrez aussi refaire les mouvements spécifiques d'un batteur mais sans frapper réellement dans une balle.

Si cela se passe bien et que vous ne ressentez aucun symptôme, vous pourrez reprendre l'entraînement avec l'équipe du lycée. A nouveau, si tout se passe sans aucun problème, vous pourrez reprendre avec la même intensité qu'avant l'accident.

Je fixe le docteur d'un regard noir mais bon, je sais qu'il a raison. C'est lui le pro, pas moi. Mais quand même, bonjour la frustration. En plus, elles sont au moins quatre filles à vouloir ma place dans l'équipe. En deux mois elles auront largement le temps de progresser. En plus, il est marrant le médecin mais, comment voulez-vous que je ne fasse pas travailler mon cerveau en sachant que je viens sans doute d'échapper à une tentative d'assassinat parce que mon père bosse au FBI ?

Je soupire mais j'acquiesce d'un signe de tête. Je n'ai pas le choix de toute façon.

Dans le couloir du service où j'ai été admise, je repère très vite mon père, vêtu de son impeccable et habituel costume noir. Il discute avec une espère d'armoire à glace, sûrement le mec qui était chargé de surveiller ma chambre. Non loin d'eux, j'aperçois Chaz qui fait les cent pas avec...mais...mais qu'est-ce qu'il fait là encore ?

Je reste plantée sur place quelques secondes, ne sachant pas quelle attitude adopter. Puis, mon père me voit et il se précipite vers moi pour me serrer dans ses bras.

- Huuum papa tu m'étouffes !

- Karlie, bon sang j'ai eu la peur de ma vie ! Tu le sais ça ?

- Oui...

- Des mesures de sécurité supplémentaires vont être prises au lycée à la demande du FBI. Et, en attendent que tu y retournes, une équipe de quatre personnes veillera sur toi à la maison.

- WHAT ?

J'ai pratiquement hurlé et je mets une main devant ma bouche lorsque je me rends compte que tout le monde me fixe bizarrement. Bordel, je vais déjà être privée de tout ce que j'aime durant ma convalescence mais en plus, je vais être assistée comme la dernière des impotentes ? Je proteste mais mon père ne veut rien entendre. Ah, c'est qu'il prend le mot « repos » à la lettre lui...

Dieu merci, il me rassure en me précisant que mes amis auront le droit de venir me rendre visite mais uniquement deux par deux et pas plus d'une heure à chaque fois.

Mon regard dévie alors vers Scott et Chaz qui discutent avec animation. Mon père surprend mon geste et il soupire :

- Ecoute, depuis le divorce, j'ai bien remarqué que tu t'étais repliée sur toi-même et que tu as beaucoup de mal à faire confiance aux autres. Tu sais Karlie, ce n'est pas parce que ta mère et moi nous nous sommes séparés qu'obligatoirement tu vivras la même chose.

- Hein ? De quoi tu parles ?

- Ce garçon te plait, je le sais. Et...il me semble qu'il est très attaché à toi également.

- Euhhh qui ?

- Scott.

- Ah.

- Bon sang Karlie tu en fais une tête ! Tu as dix-sept ans, je ne vais pas t'empêcher te fréquenter un garçon. Je te connais, tu es une fille responsable, je sais parfaitement que je peux avoir confiance en toi. Et, je dois dire que, de te savoir un peu plus entourée au lycée n'est pas pour me déplaire.

- En gros tu veux que Scott soit mon garde du corps ? Qu'il me colle aux baskets à tout moment de la journée ?

- Hum...

- Ah et laisse-moi deviner : sa famille n'a plus aucun secret pour toi n'est-ce pas ?

- C'est normal Karlie. Etant donné le contexte...

- Rien ne dit que ce n'est pas lui le tueur...

- Ne recommence pas ! Tu sais parfaitement que tu n'auras aucune info de ma part au sujet de l'enquête.

- Même si je suis concernée ? Même si je suis devenue une cible pour ce malade ?

- Tu vas trop vite Karlie.

- Ah ouais ? Alors pourquoi ai-je droit à une équipe complète du FBI pour veiller sur moi hein ?

- Parce qu'à ce stade de l'enquête on ne peut rien exclure. Et tu es bien placée pour savoir que les membres de la famille des agents du Bureau sont des cibles privilégiées. La police a profité de notre présence pour nous demander un coup de main au sujet d'un gang qui sévit dans la région. Cela pourrait être l'un de ces membres qui a causé cet accident.

Ouais, il essaie de noyer le poisson mon paternel, évidemment, mais je ne suis pas dupe.

Je sors ensuite de l'hôpital, mon père à mes côtés et les garçons nous suivent à une distance respectable. Chaz et Scott sont venus ensemble et, avant de se diriger vers leur voiture, ils viennent me dire au revoir.

Mon meilleur ami m'explique qu'il va me faire des copies des notes de cours et qu'il me les apportera à la maison pour que je puisse y jeter un coup d'œil lorsque j'aurai l'autorisation de refaire fonctionner mon cerveau.

J'ai droit ensuite à un bisou sur la joue de la part des deux garçons. Je me fais peut-être des idées mais celui de Scott était légèrement plus...appuyé ?

Sur la route du retour je reste silencieuse et mon père abandonne très vite l'idée de faire la conversation avec moi.

En rentrant à la maison, le comité d'accueil nous attend déjà dans le salon. Je soupire et sans prendre la peine de les saluer, je me réfugie dans ma chambre et je m'écroule sur mon lit. 

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