Chapitre XXIV

Elle se tenait là, tout près de moi. Elle ne me quittait pas du regard et m'examinait un moment sans même me parler. Je fis de même en essayant de relever quelques traits de son visage qui pourraient m'être familier et commun. Ses tâches de rousseurs qui dessinaient ses joues étaient semblables aux miennes et je me retrouvais curieusement dans sa façon de regarder les personnes qui l'entouraient. Son visage creux et son crâne dégarnit lui donnait un air gracieux et délicat. Ses yeux pétillaient de milles feux quand elle croisait le mien et son sourire illuminait son visage si fragile.

Elle laissa ses bras pendrent le long de son corps et resta immobile avant de me dire:

- Ma douce Angie... Je te rencontre enfin.

Sa voix était agréable autant qu'apaisante et son radieux sourire ne quitta pas ses lèvres, ce qui accentua d'avantage ma confiance en cette femme encore inconnu à mes yeux.

- Bonjour Orana, répondis-je froidement.

Elle se retourna délicatement vers Axel et lui ordonna poliment de nous laisser seule un instant. Il s'exécuta et nous le regardions toutes deux partir au loin, moi priant pour qu'il ne s'éloigne de trop.
Elle fit un pas vers moi et continua:

- Angie, j'ai bien des choses à te dire sais-tu, me dit-elle en prennant un tout autre air désolé.

- Et j'ai bien des questions qui demeurent en suspens, répondis-je aussitôt.

- Tu es devenue une si jolie femme, je suis si ravie de découvrir la si belle personne que tu es aujourd'hui.

Je ne lui répondis pas et attendis la suite de ses explications avec impatience.

- Je ne pouvais venir te chercher, c'est pour cela que j'ai légué ce devoir à Axel il y a bien des années. J'en suis navrée!

- Mais pourquoi m'as-tu abandonné de la sorte? Finis-je pas lâcher, les yeux brouillés de larmes.

- Dès ton tout premier cris je savais que tu étais une Impure Angie et te garder au sein du Shundle, près de moi, était vouée à ta perte! C'était bien trop dangereux, tu en connais la cause désormais.

- Mais qui sont ces gens alors? Mes parents... adoptifs?

- Ta mère adoptive était une très bonne amie durant de longues années. C'est tout naturellement qu'elle a accepté de te prendre dès ta naissance étant dans l'incapacité d'avoir un enfant biologique. Elle a décidé alors de te protéger en t'emmenant très loin d'ici. Saches qu'il n'y a pas eu un jour qui s'est passé sans que je ne pense à toi... Angie, termina-t-elle en essuyant du bout de son doigts la larme brûlante qui coulait le long de ma joue.

- Mais qui suis-je? Sanglotais-je désemparée.

- Tu es un être rare, tu es un Ange, tu es Angie, ton prénom découle de ceci. Je ne pouvais te nommer autrement... Tu as une force et un courage que beaucoup de personnes envies, tu es unique, tu es ma fille.

Mes larmes ne cessaient de couler au moindre de ses mots, chaques annonces étaient comme une lame toute droite plantée au fond de mon coeur. J'avais perdu mon identité, ma vie entière n'était qu'illusion et tous mes proches n'étaient pas ceux auxquels que je prétendais. Il fallait que je me reconstruise en ramassant les miettes de ma pauvre vie.

Par étonnement, elle m'enlaca de ses longs bras fins ce qui me blottit aussitôt contre sa poitrine. Je répondis à son geste tendre et serrai mes bras autour de son buste. La chaleur maternelle de son corps me réchauffait le coeur et ce doux parfum de lavande qui s'en dégageait appaisait mes pleures.
Je me sentais étrangement bien au creux de ses bras, ses lèvres embrassant tendrement le sommet de mon crâne. Elle lâcha dans un susurre à peine audible《Je suis là maintenant ...》ce qui sécha immédiatement mes dernières larmes et qui me donna une entière confiance envers cette femme si gracieuse qu'était ma mère.

*


De retour à la clairière, mes amis gisaient dans l'herbe en attendant impatiemment notre retour.
Je lus dans les yeux de Triss l'admiration et le respect qu'elle éprouvait à la vue de ma mère. Ce style si mystérieux et obscure qu'elle dégageait ne pouvait que plaire et attirer l'attention de mon amie. Joe quant à lui resta légèrement en retrait, peut-être était-il intimidé par cette grande dame et cette forte personnalité qu'elle dégageait.

- Nous n'allons pas perdre plus de temps et nous allons débuter l'entraînement comme il se doit, lança officiellement ma mère.

Elle ouvrit le grimoire à une page bien précise et me le plaça non loin de moi, tout juste pour que je parvienne à lire les quelques phrases. Ayant découvers le don qui me permettait de voler, il fallait désormais que je m'exerce sur d'autres pouvoirs pour enrichir mes compétences.

Tous me regardaient avec attention et curiosité pendant qu'Orana me pointa du bout du doigt la phrase latine que je devais prononcer dans ma tête. Je m'executai sans trop savoir de quel don il s'agissait réellement.
Je fermai les yeux et répétai avec force et volonté cette dernière phrase dont je ne comprenais encore peu son sens.

Les fourmillements se remirent à apparaître dans le bout de mes doigts et un frisson glacial parcourut mon dos en un instant. J'ouvris les yeux aussitôt et regardai autour de moi. Rien n'avait changé, mes amis et ma mère attendaient toujours une démonstration de ce nouveau pouvoir mais à mon grand étonnement, rien ne se produit.

Je regardai la nature encore endormit, rien ne bougeait pas même une feuille ou une quelconque branche. Quand soudain un rocher assez imposant attira mon attention je ne sais pour quelle raison concrète. Je me focalisai dessus et parviens après maintes tentatives à le faire doucement bouger sans même m'y approcher. J'accentuai ma concentration et finis par le soulever et l'envoyer valser contre un épais tronc d'arbre mort non loin de là.
Je regardai avec fiertée ma mère qui me répondit d'un simple sourire d'encouragement.

Je continuai à apprendre tout un tas d'autres pouvoirs, en passant par des dons tels que l'invisibilité, le contrôle des éléments qui comprennaient l'eau, le feu, la terre et les animaux. Je ne cessais d'apprendre, je ne cessais de m'améliorer, j'en voulais toujours encore plus.

Enfin, vient le tour d'un des derniers pouvoirs d'apprentissage du grimoire. Épuisée mais toujours en soif d'apprendre et de curiosité, je m'executai dans un dernier élan.

Je fermais à peine les yeux quand soudain des cris et des voix bruillantes s'emparèrent de mon esprit me donnant un mal de tête insoutenable. Je portai mes mains sur mes oreilles comme pour arrêter tout ce vacarme mais ceci ne fit rien. Je regardai Triss et me focalisai sur ses yeux sombres qui m'épiaient depuis un certain temps. Les voix diminuèrent alors dans ma tête et devinrent plus calmes, plus ordonnées.
Une voix féminine se fit entendre et je m'aperçus après un moment qu'il s'agissait bien de celles de Triss. Je l'a fixai du regard afin de donner vie à mon tout dernier pouvoir. Tout un tas de phrases me venaient à l'esprit dans le désordre, tout était encore brouillé. Je distinguai seulement quelques brides, quelques pensées qui émanaient de son esprit tel que:
《Putain Angie la chance qu'tu as! Profites de tes dons! Si ce n'était qu'moi...》
Et se mélangeait à ceci:
《Il est si beau... R'garde moi ce regard... Mh quand il me regarde comme ca... !》

Un léger sourire se posa sur mes lèvres lorsque je surpris Triss dans ses pensées. C'était tout elle, je l'a reconnaissais bien! Je recommencai l'expérience auprès de Joe et de ma mère puis acheva ma ronde par les pensées d'Axel.
J'hésitai un moment avant de commencer, ne sachant s'il était vraiment raisonnable que je reproduise le pouvoir avec lui mais je tentai tout de même l'expérience le coeur lourd et serré de voir ce que j'allais découvrir.

《Ses cheveux... Ses yeux... Sa bouche... Son rire... Ses courbes si délicates...》

Ses pensées sensuelles arrêtèrent automatiquement mon pouvoir. Mes joues se mirent à rougir, mon coeur s'emballa et mes yeux ne savaient plus sur quoi se poser. Il m'avait désemparé.
Il s'avanca vers moi et se mit à rire en voyant un telle expression sur mon visage.

- Ses cheveux, ses yeux, sa bouche... s'exclama-t-il tout aussi moqueur.

- Qu... Quoi? Bégayais-je encore plus gênée qu'auparavant.

- Je savais que ca allait arrêter ton pouvoir. Désolé, c'était trop tentant, finit-il en riant.

- Oh je...

Je ne pû achever ma phrase par tant de gênes et de déceptions. Moi qui venais de me faire une telle joie à la découverte de ses pensées non loin d'être déplaisantes, je me suis sûrement bien trop vite emballée. Peut-être suis-je seule à ressentir une telle attirance, à avoir le coeur qui bat lorsqu'il me frôle et les yeux qui brûlent dès que je les pose sur lui.

Peut-être suis-je tout simplement idiote de croire en une telle chose, un amour sûrement irréalisable et impossible.

***

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