So let it out and let it in
Hey Jude, begin
You're waiting for someone to perform with
And don't you know that it's just you
Hey Jude, you'll do
The movement you need is on your shoulder

Paumé. Le petit anglais était complètement perdu au milieu de cette ville. Il avait rencontré les dirigeants du club. Ceux qui l'avaient convaincu de quitter son Angleterre natale. Ceux qui l'avaient convaincu de refuser l'offre d'un mastodonte tentant de se reconstruire dans son pays pour l'Allemagne. Mais l'Allemagne c'était loin d'être chez lui. Il ne comprenait rien dans la rue. Heureusement, les habitants semblaient se débrouiller un minimum dans sa langue. On l'avait mis dans une famille d'accueil. Ils étaient sympathiques, mais il n'y avait pas son frère là pour veiller sur lui, pour discuter avec lui, débriefer les entraînements. Désormais, il avait hâte que les entraînements commencent. Rencontrer des gens, croiser ses futurs coéquipiers, se faire des amis aussi. Il connaissait le club, il savait qu'il ne serait pas tout seul ici. Il ne serait pas le seul jeune perdu au milieu d'un monde d'adultes comme ça serait le cas dans d'autres endroits. Alors, peut-être il serait un peu moins paumé.

Il franchit les portes de Brackel. C'était simple, c'était jaune, c'était sa famille qui l'avait amené. Elle l'avait déposé le matin alors que les autres enfants profitaient de leur journée de vacances. Mais c'était sa passion, alors elle pouvait bien passer avant un pauvre mois de vacances. Ses rêves passeraient toujours avant. Il ferme un instant les yeux. Il sent les battements de son cœur qui s'accélèrent. Il tremble un instant. Ils étaient tellement nombreux à ne plus rien avoir à prouver ici. A avoir gagné des titres pour ce club ou d'autres. A jouer dans leur équipe nationale et à y être titulaires. Et lui. Lui, il était quoi dans tout ça ? Il était qu'un gamin. Il avait rien prouvé. Il venait de Championship. Il avait même pas réussi à maintenir son club en plus. Il était pas dans les équipes nationales. Il était rien. Pourtant, ils l'aimaient tellement là-bas, dans le club où il jouait depuis qu'il était bambin. Mais il pouvait viser plus haut. Et peut-être qu'il y arriverait.

« Bienvenue dans le meilleur club du monde ! » 

Il sursaute alors qu'une voix vient de s'adresser à lui alors qu'il a pénétré dans le vestiaire. Il se retourne pour faire face à un blond. Un blond qui le regarde avec un léger sourire et qui se lève pour venir lui serrer la main. 

« Viens t'assoir à côté de moi. » 

L'anglais est maladroit, l'accent étranger fort entendable au milieu des tentatives d'intonations. Il reste planté un instant ne sachant pas quoi faire. 

« Mais y a pas ? » 

Il déglutit un instant, alors qu'il montre les habits installés à côté de sa place. 

« Il est blessé en ce moment. » 

Les affaires sont poussées. Il n'arrive pas à détacher son regard du barbu lui faisant face. Il peut sentir ses joues le chauffer légèrement. Et puis il finit par se diriger pour s'installer à côté de celui qui l'impressionnait tant. Leur capitaine. Celui dont il avait vu des vidéos depuis qu'il commençait tout juste le foot. Et c'était lui qui l'accueillait ce jour-là.

Le silence pesant et angoissant qui s'installe dans le vestiaire alors qu'il ne sait pas quoi dire et que l'autre se battant avec sa chaussure empêche de stopper es brisé par des rires dans le couloir, suivis bien rapidement par des éclats de voix. Et lorsque la porte s'ouvre violemment trois jeunes débarquent parlant en anglais tout en riant et en se poussant. Il y a les yeux rieurs du premier qui se fait pousser par un immense blond lui répondant dans un anglais aussi impeccable que son accent était impressionnant. Et puis il y a le dernier qui danse un minimum tout en chantant du rap. Gio, Erling, Jadon. Les jeunes. Ceux comme lui. Ceux qu'ils devaient rejoindre pour s'intégrer. Mais à les voir en train de chahuter sans même le remarquer, trop pris dans leur discussion sur l'absence de permis du dernier. 

« T'as qu'à conduire sans, avec un peu de chance ils mettront des années avant de s'en apercevoir comme pour Marco et tu prendras juste une amende. » « Ce grand criminel de la route ! » 

Et les voilà qui se remettent à rire. Raclement de gorge du blond qui les fait sursauter. Ils se retournent tous dans la direction opposée. 

« Oh...

— Hey... 

— Salut Marco... 

— Plutôt que de raconter vos débilités, dites plutôt bonjour à Jude. » 

Et d'un seul coup, ils sont beaucoup plus calmes. Ils sont tout souriants, les lèvres légèrement relevées et leurs yeux brillant de malice alors qu'ils tentent d'étouffer leur envie de rire, quand ils se dirigent comme un seul vers le nouvel arrivant pour les présentations.

x x x

Visage qui se ferme alors qu'il voit Gio et Erling sortir de la voiture du second. C'était la même chose tous les matins. Le petit américain descendait tout sourire de la voiture de son camarade norvégien. Un rituel entre les deux arrivés de l'année précédente. Et lui. Il prenait le bus. Il ne pouvait pas s'empêcher de leur en vouloir. Pour ne pas le prendre avec eux dans la voiture. Mais que pouvait-il bien dire ? Ils étaient amis. Ils étaient un binôme qui fonctionnait parfaitement, il fallait être aveugle pour ne pas le voir. Et c'était peut-être leur moment à eux. Mais il rêvait d'en avoir aussi, et ce n'était pas le cas. Tout était nouveau et malgré l'aide des plus vieux qui l'emmenaient en ville, l'aidaient à s'intégrer, lui apprenaient des mots allemands, il était désespérément seul la plupart du temps. 

« Hey Jude ! » 

Boules d'énergie qui se dirigent vers lui une fois leurs sacs récupérés dans le coffre. Non, il n'était pas invisible. Il y avait juste plus important aux yeux des autres que lui.

« Tu viens faire un fifa chez moi ce soir ? » 

Il relève la tête des chaussures qu'il était en train d'enfiler pour voir le second anglais de l'équipe qui l'observe avec attention. 

« Gio, Erling et Mateu seront aussi là. » 

Mateu. C'était peut-être celui qu'il connaissait le moins. Il s'entraînait juste, blessé. Il avait compris aux conversations des autres qu'il fallait le protéger, parce qu'il avait perdu un de ses repères, parti pour Marseille depuis peu. Pourtant il avait l'air sympathique avec son sourire brillant toujours plaqué sur le visage. 

« D'accord. »

x x x

« Et victoire des USA !!! » 

Brun qui se retrouve par terre, poussé par un norvégien ne maitrisant que bien trop peu sa force et ses grands bras. 

« Désolé Gio... » 

Ça rigole. Et le jeune anglais est heureux d'avoir dit oui. Parce qu'il se sent vraiment bien, à sa place pour la première fois depuis un mois. C'était simple, mais c'était agréable. Il sourit un instant avant de reprendre la partie face à l'américain de son âge qui se moque de lui un instant. 

« Prêt à perdre Jude ? Prêt à affronter la puissance américaine ? 

— Je suis sûr qu'il connait des codes, c'est pas possible de mettre un but comme il l'a mis. 

— La ferme Haaland, t'es nul, t'es nul. » 

Ça boude, ça rit, ça crie, ça joue, ça passe une super soirée.

« Tu te sens bien ici ? » 

Tous les autres étaient partis et il prenait sa veste pour affronter le froid de la ville quand Jadon lui avait posé cette question. 

« Oui... » 

Il ne savait pas s'il mentait ou pas. Parce que ce n'était pas chez lui. C'était pour son rêve qu'il était là. Il avait été bien accueilli. Il avait le droit aux conseils des anciens, tout le temps, sur tous les sujets. Marcel, Lukasz, Marco, Thomas, Axel, ils ne cessaient de l'aider, tout le temps. Mais ils étaient bien plus vieux. Un peu trop. C'était du temps comme celui qu'il venait de passer donc il avait bien trop besoin. 

« Moi aussi c'était dur au début. Etre tout seul chez soi le soir. Ne pas connaître la langue, pas avoir de liens vraiment avec les gens alors que tu connaissais les gens de ton ancien club par cœur. »

 Légère pause marquée. 

« C'est normal de se poser des questions, moi aussi je m'en suis posé plein au début. » 

Il redépose son manteau sur le fauteuil. 

« Mais tu regretteras pas ton choix. Parce que tu joueras, tu auras ta chance. Comme Christian, comme Gio, comme Erling, comme moi. » 

Léger sourire qui vient se peindre sur son visage. L'espoir. Que ça aille mieux. Qu'il s'y fasse. 

« Et puis, tu t'y feras. C'est sûr que c'est pas la plus belle ville d'Allemagne mais c'est convivial, on compte pour eux. Le seul truc qu'ils pourraient te reprocher c'est de pas assez essayer, de ne pas avoir d'envie. Tant que tu te donnes, ils pardonnent tout. 

— Qui ? 

— Les supporters. » 

Leurs supporters, ceux qu'il avait hâte de croiser, si seulement ils pouvaient être là rapidement. 

« En tout cas, hésite pas à passer si t'as besoin de quoi que ce soit. Après tout, faut bien qu'on se serre les coudes entre anglais. » 

Et un rire s'élève dans l'appartement de l'aîné.

x x x

Ce matin-là, il descend tout sourire de la voiture de son coéquipier, comme tous les matins depuis deux semaines. Quelques minutes à discuter de tout, à se confier auprès de quelqu'un qui avait vécu la même chose que lui quelques années auparavant, ou à juste rapper dans la voiture. 

« Prêt pour le match les gars ? » 

De l'autre côté du parking, l'américain et le norvégien les saluent, un immense sourire barrant leurs visages. D'autres personnes les rejoignent bientôt et ils se dirigent vers le centre d'entrainement. Il se retourne vers Jadon et lui sourit. Il le sentait bien ce match, et il fallait le croire que c'était le cas aussi pour lui. 

« Je peux vous assurer que je ne vais pas rater mon centième ! » 

Déjà. C'est ce qui lui vient en tête. Tant de matchs déjà joués alors qu'il avait tout juste vingt ans. Il l'observe un instant. Est-ce que lui aussi en serait là à son âge ? Est-ce qu'il allait réussir le soir-même ? Une main se pose sur son épaule le sortant de ses pensées et un regard bienveillant et sage sur lui. 

« Je suis certain que ça se passera bien. » 

Et il ne peut que sourire alors qu'ils s'engouffrent dans les lieux. Il n'était plus paumé.

x x x

et un petit os sur les p'tits english et autres jeunes du borussia (à l'époque de l'écriture jude venait tout juste d'arrivé et n'avait fait que qq matchs) ! ça parait vieux maintenant cet os haha.

j'espère qu'il vous a plu.