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Elena pouvait maintenant connaître l'heure à tout moment de la journée. Il faudrait peut être affiner un peu les mesures mais une approximation la satisfaisait pour le moment.

L'horloge solaire était terminée. L'ennui allait bientôt revenir et dans son sillon, les pensées incontrôlables. Il lui fallait une nouvelle chose sur laquelle se concentrer. Incapable de la trouver, elle se laissa tomber en arrière, appuyant sa tête sur le sol froid.

L'image de Marco pointa le bout de son nez dans son esprit. Impossible de la chasser.

"C'est moi qui ai ouvert l'enveloppe."

Il avait découvert qui elle était avant les autres. Il aurait pu cacher cette lettre à ses collègues. Elena ne comprenait pas. Les constats se succédaient dans sa tête. Puis ils se mirent à former des boucles. Il ne l'aimait plus. Son espoir de sortir d'ici avec son aide s'effondrait. Chez elle, l'envie était encore là. L'envie de l'aimer, de retrouver leur complicité de jadis. Mais c'était fini. Sa dernière chance de survie s'envolait et son amour se brisait.

Il était bien tard lorsqu'elle parvint à trouver le sommeil. Elena ne pouvait plus cheminer depuis un moment et après avoir étudié une vingtaine de fois les constats qu'elle avait pu faire de sa courte entrevue avec Marco, Morphée vint lui apporter un peu de réconfort.

Le lendemain, vers 15h d'après son horloge artisanale, Ledanois vint la chercher pour un nouvel interrogatoire. Il avait commencé par lui demander si elle avait bien dormi.

Elle s'était surprise à lui confier que ça n'avait pas été fameux avant de reprendre la distance qu'elle affichait depuis son arrestation. Si la jeune femme lui parlait sans retenue de sa récente insomnie, qu'est-ce qui l'empêcherait de s'épancher, à l'avenir, sur leurs activités à la Chouette? Depuis le début, elle ne lui livrait rien et cherchait à le contrarier comme elle pouvait pour chercher à instaurer une habitude.

-Tu sais, repris l'inspecteur alors qu'ils étaient arrivés en salle d'interrogatoire, il y a quelque chose qui me chagrine un peu. C'est votre niveau d'informations.

-Oui, j'imagine que c'est décevant de voir que l'on est mieux informés que vous. Vous lisez un journal conformiste tous les matins en prenant votre petit dej?

-Non, je préfère écouter la radio. Mais ce n'est pas de vos sources pour écrire la Chouette dont je veux parler, ça, on y reviendra plus tard. Ce que je veux savoir, c'est comment vous avez su que l'on enquêtait sur vous.

-Bah... on savait pas, sinon, on aurait été se mettre à l'abri quelque part et on se serait pas laissé arrêter, dit Elena en tentant de masquer les effluves de regrets dans sa voix.

-Le journal est à l'arrêt depuis que l'enquête est arrivée à Brest. Gamper vient de nous filer entre les doigts alors qu'on allait pour l'interpeller. Et je n'oublie pas que lorsque l'on est venus chez toi, ton sac à dos semblait prêt pour partir quelques jours... à l'abri quelque part. Je me trompe?

-Dans la révolte, il y a un principe important, c'est l'anonymat. On a tous un deuxième nom. Oui, on sait que vous enquêtiez sur nous mais maintenant qu'on a... perdu? Le journal va pouvoir reprendre. On sait où est-ce que la connerie a été faite et qu'elle a consisté à se connecter sur un réseau qui n'était pas privé.

-Il y a quand même un délateur dans vos rangs.

-Ou ailleurs.

-J'en doute. Toujours aucune idée de qui ça peut être?

-Aucune.

-Si je trouve qui c'est, l'auteur de la lettre, tu me donnes un nom de la Chouette?

-Promis.

-Oh, c'est un bel engagement. Je vais tâcher de trouver vite alors. On va en rester là pour aujourd'hui.



Lundi 23 octobre 2017

C'est parti pour l'expédition. Ce matin, on a pris le premier bus pour Brest avec Iode et Gamper. Ensuite, il fallait rejoindre St Brieuc. Au début, on pensait prendre le train mais c'est trop cher alors on a décidé de faire du stop. Au début, on est tombés avec une vieille dame très sympa qui allait à Morlaix puis avec un couple qui allait dans un village juste à côté de St Brieuc donc ils nous ont déposés. Au début, on avait un peu peur mais en fait, c'était trop bien. La tante de Iode habite là bas donc on a été déposer nos affaires et après, on a commencé par le premier lycée de ma liste.

On a été voir à l'accueil. Il y avait une secrétaire aigrie qui nous a dit que tous les pensionnaires rentraient chez eux pendant les vacances. On est vite parties, c'était pas là qu'on allait trouver Marco. Les deux autres pensionnats sont à l'autre bout de la ville alors on y ira demain.

C'est marrant ce petit séjour avec Gamper et Iode. J'avais peur qu'ils s'entendent pas trop mais en fait si, beaucoup. Alors c'est cool.



Ledanois avait rejoint la salle de travail de l'enquête après son entrevue avec Elena. Marco était assis à son bureau et lui lança un regard interrogateur.

-Tiens, le rapport est à jour, t'étais où?

-J'ai été voir Elena.

-Mais pourquoi tu m'as pas dit?

L'inspecteur arrêta les protestations du jeune policier d'un geste. Nolwenn pianotait sur son clavier à l'autre bout de la pièce alors il l'entraîna dehors. Ils se retrouvèrent à discuter sur le toit.

-Bon, p'tit, faut pas que tu le prennes mal mais je pense que c'est mieux si je continue les interrogatoires seul. Après ce qu'il s'est passé hier. J'ai vu que tu allais mal devant ses larmes. Je ne sais pas si elle, elle a perçu ta tristesse mais c'est dangereux et je sais que tu le sais. On ne peut pas se permettre de montrer nos sentiments aux suspects.

-C'était qu'un accident. De toute façon, j'ai décidé que je l'aimais pas.

-Ah bon? Eh bien j'en suis enchanté, ça sera plus facile pour la suite de l'enquête mais ce n'est pas l'impression que tu m'as donnée hier. Bon, on verra pour les interrogatoires. Pour l'instant, je ne veux pas que tu y participes. De toute façon, j'ai autre chose pour toi. Ça t'intéresse une mission pour trouver qui a écrit la lettre de dénonciation? Je pense que ça pourrait nous en apprendre beaucoup.

-Je veux être utile alors d'accord.

-Parfait p'tit, on sera plus efficaces si on se répartit les tâches en plus.

-C'est mathématiquement vrai.

-Je croyais que t'y comprenais rien aux maths toi, dit Ledanois en levant un sourcil.

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