Chapitre 1

Bam bam bam

Après avoir résonné trois fois afin d'être sûr qu'on se réveille, le réveil s'éteint, laissant place aux chuchotements des membres de la secte.

Comme tous les jours, on se fait réveiller par cette alarme, puis on va se laver dans un petit bassin de pierre, les hommes d'abord, les femmes et les enfants ensuite.

Après la seule période de détente que l'on a de la journée, il nous faut préparer à manger pour nos maris. Et si, comme moi, tu n'es pas marié, dans ce cas, tu prépares à manger pour le Grand Chef, ou Dieu, comme il préfère qu'on l'appelle.

— Emi ! Ne traine pas dans le bain, Dieu attend son petit déjeuner, m'interpelle ma mère en voyant que je regarde dans le vague.

— Oui mère, j'y vais, je réponds poliment.

Intérieurement, je soupire. Des fois, je me surprends à imaginer être libre. Que peut-il bien se cacher derrière ces barrières de bois qui entourent la secte ? Y a-t-il d'autres civilisations ?

La règle numéro trois impose que nous n'avons en aucun cas le droit d'aller dehors ou de vouloir aller dehors. D'après Dieu, c'est parce qu'il y a de nombreux dangers et qu'il ne veut en aucun cas voir un de ses adeptes mourir. Il tient à nous.

Pourtant, le soir j'entends parfois des cris venant du sous-sol, cet endroit qui nous est interdit. Est-ce qu'ils torturent ceux qui n'ont pas fait leur travail ? Ou ceux qui n'ont pas respecté les règles ? Je n'en sais rien et je ne pense pas avoir envie de le découvrir. C'est là qu'il avait enfermé Mija la dernière fois...

Je me rhabille et me dirige vers les cuisines pour concocter un petit déjeuner qui, j'espère, aura meilleur effet que celui d'hier.

— Dieu, votre petit-déjeuner, avais-je dis en m'approchant de son trône et en mettant un genou à terre en guise de respect et de soumission.

Il avait inspecté l'assiette puis avait demandé :

— Qu'est-ce donc ?

— Je vous ai préparé une omelette, avec les œufs frais de ce matin, une tartine de beurre saupoudré de jus de citron ave... Aïe !

Je n'avais pas eu le temps de finir ma phrase qu'une violente gifle m'avait mise à terre. À genoux, me tenant la joue avec une main, je me rendis compte, trop tard, de mes erreurs.

— Espèce de petite sotte ! Récite moi donc les règles de la secte ! cria Dieu rouge de colère.

— Règle numéro une, ne... Bafouillais-je

— Pas toutes ! Seulement celles que tu as enfreintes.

Je... Règle numéro 2: ne jamais parler avant Dieu, ne pas se plaindre ou répliquer. Le Grand Chef a le dernier mot, car il a toujours raison. Règle numéro 5: le citron est interdit sous toutes les formes.

Le Grand Chef me prend par le menton et m'oblige à le regarder droit dans les yeux. Puis il me cracha au visage.

Alors qu'a tu fais ?

— J'ai... J'ai oublié que vous étiez aller... Que vous n'aimiez pas le citron. Je suis désolée Oh mon Dieu, je ne comprends pas ce qu'il faisait ici.

Il m'avait frappé une seconde fois et avait ordonné que je sois punie à la hauteur du crime que j'avais commis.

J'avais alors dû nettoyer toute la secte à moi toute seule, faisant la vaisselle, passant le balai, changeant les draps et nettoyant les fenêtres.

Ce matin, je suis tremblante. Je ne veux plus avoir à faire au Grand Chef. Il a beau dire qu'il ne nous veut aucun mal, il n'a pas hésité à me frapper et à me cracher dessus. Et s'il disait que c'était dangereux dehors juste pour nous garder auprès de lui, à son service ? Et s'il n'était pas réellement un dieu ?

Je secoue la tête pour chasser ses pensées. Je n'ai pas le droit d'y penser. Et je n'ose même pas imaginer ce qu'il se passerait si quelqu'un apprend que j'aimerais visiter dehors.

Deux hommes postés devant la porte de la salle du trône l'ouvrant en me voyant arriver. L'un d'eux, qui était là hier, ricane à mon passage. Ça l'a amusé de me voir autant diminué devant le Grand Chef.

Lorsque je m'avance sur le long tapis de soie rouge, je baisse les yeux, car comme je l'ai appris, je dois toujours garder une marque de soumission envers mon Maître.

Arrivée devant lui, je pose l'assiette sur la table et m'agenouille à terre, attendant qu'il m'autorise à prendre la parole.

— Qu'est-ce donc cette fois ? me demande-t-il d'un ton acerbe

— Une salade de fruits rouges composée de fraises, de framboises ainsi que de mûres, cueillis directement du jardin par mes soins. Pour accompagner ce repas, je vous ai fait un verre de jus d'orange.

— Hmmm.

Ne m'ayant pas dit de partir, ni de me relever, je reste à ma place, les yeux vers le bas.

— Tu peux partir, finit-il par me dire. Ramène cette assiette en cuisine en même temps.

Je me redresse et le salue avant de quitter la pièce.

— Alors cette fois, tu ne t'es pas fait reprendre ? ricane le garde.

Je ne réplique pas. Je n'en ai pas le droit. C'est un homme et moi, je suis... Je ne suis rien. Dans cette colonie, cette secte, ce repère, les femmes ne sont qu'une minorité et doivent obéissance à Dieu et aux hommes.

Quand nous sommes mariées, on doit s'occuper de notre mari et de nos enfants. C'est ainsi et ça le sera toujours. Nous n'avons pas le droit de choisir notre mari, c'est Dieu qui le fait. Des fois, je m'imagine partir et épouser qui je le souhaite. En ai-je le droit ?

Non, je ne peux partir. De toute façon, il n'y a rien dehors.

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