La salle était bruyante et pleine à craquer. M. Ginsique, Marine, Thomas, Marceline, Solange, Alice et moi attendions aux abords de la scène. Un escalier de huit marches et une porte nous en séparaient. M. Ginsique attendait qu'il soit 20 heures piles pour entrer sur scène et commencer à animer le spectacle. S'il était nerveux, il n'en montrait pas le moindre signe.

En revanche, Thomas et Marine, qui passaient les premiers, semblaient sur le point de déchanter. Malgré tout, ils étaient d'un calme olympien. Quant à moi, je faisais les cent pas, l'estomac noué. La porte des coulisses s'ouvrit, et de loin, je vis Lucie et Massilia dans une tenue identique à la nôtre, traverser le long couloir les séparant de nous.

— C'est vraiment trop bizarre, disait Massilia en remettant ses cheveux frisés en place, je stresse mais en même temps j'ai trop hâte !

— Bienvenue dans le paradoxe de la scène ! répondit Lucie, arrivée à notre hauteur

— Chut, les filles ! Je ne vais pas tarder à ouvrir la porte ! les prévint M. Ginsique

Elles hochèrent la tête et Massilia me sourit. Sa peau noire semblait briller de mille feux sous la lumière tamisée de la pièce. L'instant sembla se suspendre dans le temps, comme une fleur au-dessus d'un précipice. Puis, M. Ginsique brisa la magie en ouvrant la porte, son micro à la main.

— Bonsoir à tous et à toutes ! Merci d'être venus aussi nombreux ce soir ! Comme chaque année, Sainte-Cécile a l'immense joie de vous présenter le spectacle de ses élèves de première !

Une salve d'applaudissements accueillit les paroles de M. Ginsique.

— Il y a l'air d'avoir tellement de monde ! murmura Marine, aux abords de la porte

— Ça n'a pas été facile, il a fallu beaucoup de patience et d'entraînement, il y a eu des rires et des larmes, des hauts et des bas, mais les élèves se sont toujours appliqués à donner le meilleur d'eux-mêmes. Car c'est cela le but de Sainte-Cécile ! Faire ressortir le meilleur en chacun d'eux.

Des hurlements retentirent dans la salle et je souris, imaginant sans peine Simon et mes deux cousins, Thomas et Romain, hurler à tue-tête.

— Wow, ils sont aussi chaud qu'à New-York ! commenta Thomas

— Ils trépignent dans les coulisses depuis toute à l'heure, reprit notre professeur. Je propose que nous cessions de les faire attendre ! Qu'est-ce que vous en dites ?

Le public cria d'approbation.

— Accueillons sans plus attendre Marine et Thomas, qui sont Jeunes, autant que la chanson de Louane !

Un tonnerre d'applaudissements retentit et je levai mes deux pouces en signe de soutien. Ludovic et Antoine nous rejoignirent à ce moment-là, Lane Boy passant juste après Bad Romance.

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J'entendis le silence se faire et la chanson démarrer. Je savais que tous deux dansaient sous les premières notes, mais nous ne pouvions pas les voir.

— J'aimerais en suivant le soleil avoir le vertige, perdre le sommeil ! commença parfaitement Marine

— Je voudrais, au plus près des falaises sentir le danger et que ça me plaise, encore ! répondit Thomas

— Encore ! répéta Marine

Solange, Marceline, Alice et moi nous prîmes la main et nous mîmes en cercle, respirant par le ventre. Nos cœurs battaient à l'unisson. Nous ne lâchâmes nos mains que quand la chanson fut terminée.

— Merci à Marine et Thomas ! Bravo, oui !

Ils s'inclinèrent en se donnant puis rentrèrent de nouveau dans les coulisses par la gauche.

— A présent, j'ai surpris quatre de mes élèves dans une mauvaise histoire d'amour... Et le pire, c'est qu'elles ont entraîné deux danseuses avec elles... Mes amis, faites du bruit pour Marceline, Solange, Émilie et Alice ! Et bien-sûr pour Massilia et Lucie !

Nous entrâmes en scène, sous les projecteurs qui dégageaient une lumière rougie et une fumée noire. J'attrapai un micro, toute sourire et me positionnai entre Solange et Alice. Nous avions opté pour une configuration en V avec Lucie et Massilia dansant en arrière-plan. Lucie et Massilia avaient mis au point une chorégraphie que nous pouvions effectuer en tenant un micro en main. Nos positions avaient d'ailleurs été choisies en fonction de la main dans laquelle nous tenions nos micros : Solange et moi le tenions de la main gauche, tandis que Marceline et Alice le tenaient de la main droite.

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Nous nous mîmes en position sous un silence absolu.

— Oh-oh-oh-oh-oh, oh-oh-oh-oh, oh-oh-oh ! Caught in a bad romance ! commença Marceline, en bougeant son corps et sa main gauche autour de son visage

— Oh-oh-oh-oh-oh, oh-oh-oh-oh, oh-oh-oh ! Caught in a bad romance ! répétai-je en effectuant de la main droite les mêmes mouvements que Marceline

— Ra-ra-ah-ah-ah ! Roma Roma-ma ! Gaga, ooh la-la ! Want your bad romance ! poursuivit Alice en dansant

— Ra-ra-ah-ah-ah ! Roma, Roma-ma ! Gaga, ooh la-la ! Want your bad romance ! répéta Solange, tandis que nous dansions toutes la même chose

Puis, nous entamâmes le premier couplet sous les yeux du public.

— I want your ugly, I want your disease ! démarrai-je, toujours en dansant, bien en rythme avec la musique

— I want your everything as long as it's free, I want your love ! continua Marceline

— Love, love, love, I want your love ! chantâmes Marceline et moi, en chœur et en tournant sur nous-mêmes de manière saccadée, nos mains libres mimant la confidence

— I want your drama, the touch of your hand ! enchaîna Solange

— I want your leather-studded kiss in the sand, précisa Alice. I want your love, love, love, love, I want your love !

— Love, love, love, I want your love ! répéta Marceline

   Le pré-refrain entamé, nous entrions dans la chorégraphie qui nous avaient demandé des heures de coordination.

— You know that I want you... And you know that I need you... I want it bad, your bad romance ! chanta Solange, sous les projecteurs éteints

  Il faisait quasiment noir. Pile au moment où je commençai le refrain, les lumières se rallumèrent et nous exécutâmes une chorégraphie simplifiée du clip.

— I want your love, and I want your revenge ! You and me could write a bad romance !

— Oh-oh-oh-oh-oh ! fit Marceline

— I want your love, and all your lover's revenge ! You and me could write a bad romance ! chanta Alice

— Oh-oh-oh-oh-oh, oh-oh-oh-oh, oh-oh-oh ! Caught in a bad romance ! reprit Marceline, alors que nous penchions en arrière, comme des robots

— Oh-oh-oh-oh-oh, oh-oh-oh-oh, oh-oh-oh ! Caught in a bad romance ! répétai-je

— Ra-ra-ah-ah-ah ! Roma-roma-ma ! Gaga, ooh la-la ! Want your bad romance ! enchaîna Solange

   Nous reprîmes la chorégraphie du premier couplet pour le deuxième. Complètement à l'aise, je ne pouvais m'empêcher de sourire.

— I want your horror, I want your design ! 'Cause you're a criminal as long as you're mine
I want your love ! commença Alice

— Love, love, love I want your love ! murmurai-je en fond, en même temps que Solange

— I want your psycho, your vertigo stick ! Want you in my rear window, baby, you're sick ! I want your love, love, love, love ! I want your love ! poursuivit-elle

— Love, love, love, I want your love ! firent Alice et Marceline, en écho

— You know that I want you, soufflai-je, pensant à Luke

— 'Cause I'm a free bitch, baby ! s'exclama Solange, déclenchant quelques rires dans le public

— And you know that I need you... I want it bad, bad romance ! terminai-je

Marceline entonna le refrain :

— I want your love, and I want your revenge ! You and me could write a bad romance !

— Oh-oh-oh-oh-oh ! nous écriâmes-nous, en chœur

— I want your love, and all your lover's revenge! You and me could write a bad romance ! lança Alice

— Oh-oh-oh-oh-oh, oh-oh-oh-oh, oh-oh-oh ! Caught in a bad romance ! reprit Marceline

— Oh-oh-oh-oh-oh, oh-oh-oh-oh, oh-oh-oh ! Caught in a bad romance ! dis-je encore

— Ra-ra-ah-ah-ah ! Roma-roma-ma ! Gaga, ooh la-la ! Want your bad romance ! remblaya Solange

— Ra-ra-ah-ah-ah ! Roma-roma-ma ! Gaga, ooh la-la ! Want your bad romance ! répéta Alice sous un jeu de projecteurs blancs et rouges

  Marceline enchaîna avec le premier bridge, tandis que les lumières s'éteignaient et s'allumaient rapidement, donnant un ton saccadé à nos mouvements.

— Walk, walk, fashion, baby ! Work it, move that bitch crazy !

— Walk, walk, fashion, baby ! Work it, move that bitch crazy ! répétai-je

Au tour de Solange, maintenant...

— Walk, walk, fashion, baby! Work it, move that bitch crazy !

Puis d'Alice...

— Walk, walk, passion, baby ! Work it, I'm a free bitch, baby !

   Les lumières se coupèrent un bref instant, suffisamment longtemps pour que je puisse me déplacer au centre de la scène, où flambait une croix en Chatterton phosphorescente. Je me laissai tomber au sol, à genoux, la tête contre le sol. Pendant les autres s'étaient disposées en demi-cercle autour de moi.

  Les lumières se rallumèrent, braquées sur nous comme en plein jour.

— I want your love, and I want your revenge ! I want your love, I don't wanna be friends ! s'écria Marceline

Je relevai le haut de mon corps d'un coup, et à genoux, je m'écriai :

— Je veux ton amour et je veux ta revanche ! Je veux ton amour ! I don't wanna be friends !

   Je me penchai en arrière en mimant de ma main libre le désespoir. Pour qu'il transperce ma voix, je n'avais qu'à penser à Luke.

— Oh-oh-oh-oh-oh, oh-oh-oh-oh, oh-oh-oh ! chantèrent les trois autres

Je savais qu'elles faisaient des mouvements fluides derrière moi.

— No, I don't wanna be friends ! déplorai-je, en me penchant en bas à droite, cette fois

— I want you back ! s'écriaient Solange, Marceline et Alice en écho

— I don't wanna be friends ! désespérai-je en me penchant à gauche cette fois

— Caught in a bad romance !

— Want your bad romance ! hurlai-je, laissant la douleur transparaître sur mon visage

— Caught in a bad romance !

— Want your bad romance ! criai-je, terminant la litanie

   Vite, je me relevai d'un bond et me reculai, tandis que les autres faisaient pareil, sauvegardant le demi-cercle pour la fin.

— I want your love, and I want your revenge ! You and me could write a bad romance ! Oh-oh-oh-oh-oh ! I want your love, and all your lover's revenge ! You and me could write a bad romance ! chantâmes-nous, d'une voix forte et déterminée

— Oh-oh-oh-oh-oh, oh-oh-oh-oh, oh-oh-oh ! continuai-je, accompagnée par Alice

— Want your bad romance ! s'exclamèrent Marceline et Solange

— Caught in a bad romance ! répondîmes Alice et moi

— Want your bad romance ! Oh-oh-oh-oh-oh, oh-oh-oh-oh, oh-oh-oh !

— Want your bad romance ! reprîmes Alice et moi

— Caught in a bad romance ! répétèrent Marceline et Solange

— Ra-ra-ah-ah-ah ! Roma, Roma-ma ! Gaga, ooh la-la ! Want your bad romance ! conclûmes-nous, en suspendant nos gestes

Les lumières s'éteignirent. Les applaudissements retentirent, parcourus de sifflement. Les lumières se rallumèrent, nous nous prîmes la main et saluèrent le public.

— C'étaient Lucie, Solange, Marceline, Émilie, Alice et Massilia ! Bravo, la coordination était parfaite ! nous complimenta M. Ginsique

Nous lui sourîmes et sortîmes par la gauche.

Nous entendîmes encore notre professeur annoncer Ludovic et Antoine, et attendîmes d'avoir regagné les coulisses pour sauter de joie et nous serrer dans les bras.

— C'était génial ! Je suis tellement contente d'avoir partagé ça avec vous, les filles ! s'exclama Marceline

— Partager ? répéta Solange. Oui, c'est le mot parfait !

En cercle, nous posâmes nos mains l'une sur l'autre et les levâmes en même temps, criant à l'unisson, toutes les six. Puis, il fallut nous changer. Je courus dans les toilettes enfiler ma longue robe blanche, dont la jupe agrémentée par quatre volants en voile rappelait un grand lys.

Je ressortis et retournai en coulisse. La première chose que je vis fut Ludovic, torse nu, et Solange qui pointait du doigt ses biceps en riant. Si je n'avais pas été encore amoureuse de Luke, j'aurais sûrement rougi.

— Oh tiens, Emmy ! s'écria-t-elle, tu veux te rincer l'œil sur notre top model préféré ?

Je m'esclaffai, sentant cette fois-ci mes joues chauffer.

— Elle est incorrigible ! s'exclama l'interpelé. Tu me rends ma chemise ? demanda-t-il en s'approchant d'elle

— Oh, tu n'es pas drôle ! râla Solange. Allez, tiens, beau gosse ! dit-elle en lui tendant sa chemise flanquée d'une énorme tâche de faux sang en plein milieu

Alice débarqua littéralement de nulle part et entreprit de coiffer mes cheveux qu'elle m'avait lissés auparavant en un chignon bas, côté droit. J'observai, amusée, Ludovic boutonner sa chemise, sous laquelle transparaissait sa musculature fine.

Solange se joignit à Alice pour sortir quelques mèches du chignon et me les boucler.

— On te les relissera après, dit-elle, son fer en main

Elle boucla encore quelques mèches autour de mon visage et accrocha des fleurs blanches dans mon chignon.

— Et voilà ! On dirait un ange ! s'exclama-t-elle, rêveuse

— Je te rappelle que c'était le but, dis-je, en rougissant

— Dommage que tu doives porter ce faux pistolet, dans ce cas. Ça fait plutôt ange vengeur, intervint Ludovic. Je te rappelle que tu me tues, au début.

— La chanson ne précise pas si tu es innocent ou pas, rappelai-je, pour le taquiner

— Je me considère innocent, affirma-t-il en souriant de toutes ses dents

— Emmy, ton micro ! Marine vient de me le passer ! lança Alice, à l'autre bout de la pièce

Elle me tendit le micro, que je plaçai sur la bretelle de ma robe, avant de fixer le boîtier sur ma ceinture, blanche elle aussi. Avant de prendre la parole, je m'assurai qu'il était coupé. Pour faciliter mes mouvements, M. Ginsique avait préféré que je porte le micro sur moi. Je pris mon faux pistolet.

— Je suis prête ! claironnai-je. Et toi ? fis-je, à l'attention de Ludovic

— Seulement si tu es prête, répondit-il sans sourciller

— Eh bien, parfait ! répondit Lucie, accompagnée par Diane, Pierre et Raphaël

— Allons-y ! les enjoignis-je

— A toute à l'heure ! claironna Lucie, tandis que nous quittions les coulisses et que j'avais, pour ne pas changer de d'habitude, la boule au ventre

Arrivée à proximité de la scène, j'écoutai Lucie et Diane chuchoter avec les danseurs qui passaient avant nous.

— Tu n'as pas l'air trop inquiet, toi, observa Lucie en regardant Ludovic

— Je dois juste m'écrouler au sol. Franchement, ça va ! Emmy, par contre... On dirait qu'elle va rendre son repas, se moqua-t-il, gentiment

— Tu exagères ! répliquai-je plus pour oublier mon appréhension que pour la forme

— Pas du tout, tu es aussi blanche que ta robe, affirma-t-il. Allez, ne t'inquiète pas ! Tu ne t'es pas loupée une seule fois aux répétitions ! Pas un seul retard dans le rythme, pas une seule avance ! Juste parfait.

— Pas faux, admis-je, alors que M. Ginsique appelait les danseurs

Lucie prit la main de Ludovic et celle de Diane ; Ludovic me tendit la sienne et je pris celle de Raphaël. Pierre attrapa celles de Diane et Raphaël. Je fermai les yeux et me déconnectai de la réalité. Lorsque je les rouvris, les applaudissements retentissaient. Nous nous lâchâmes les mains, et j'allumai mon micro.

— Malheureusement, comme chaque année, employer mon collège M. Wiener à m'aider à faire répéter les élèves conduit à un meurtre... Mais cette année, c'était entre élèves. On ne sait toujours pas ce qu'a fait Ludovic, mais connaissant Émilie, c'était mérité. Donc, mes amis, faites du bruit pour Ludovic, Émilie, Lucie, Diane, Pierre et Raphaël pour Man Down !

  Un tonnerre d'applaudissements retentit, et nos quatre danseurs se mirent en position. Quant à Ludovic et moi, nous devions attendre que les applaudissements cessent. Dès que ce fût le cas, Ludovic partit sur scène en courant. Je comptai mentalement jusqu'à deux et me lançai à sa poursuite, traversant une opaque fumée blanche. Je pilai net et pris le temps de viser Ludovic. Dans le silence de la salle retentit brutalement un coup de feu. Je mimai le recul dû à la balle, et Ludovic s'écroula théâtralement en plein milieu de la scène, son torse à la place de la fameuse croix en Chatterton.

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   Je glissai mon faux pistolet dans ma ceinture, et la musique démarra. Je regardai autour de moi d'un air abasourdi, comme si je ne comprenais pas ce qu'il venait de se passer, puis je laissai mon regard tomber sur Ludovic, inerte, et commençai à faire les cent pas derrière lui.

— I didn't mean to end his life, I know it wasn't right
I can't even sleep at night, can't get it out my mind
I need to get out of sight, 'fore I end up behind bars ! commençai-je

  J'accélérai le pas et bougeai rapidement mes mains autour de ma tête, comme si je voulais arracher ce souvenir de mon cerveau.

— What started out as a simple altercation
Turned into a real sticky situation !

  Je joignis mes poings et les posai sur ma poitrine, laissant la douleur peindre mes traits, sans m'arrêter de marcher.

— Me just thinking on the time that I'm facing
Makes me wanna cry !

Je me tournai vers le public et regardai enfin le corps de Ludovic.

— 'Cause I didn't mean to hurt him
Could've been somebody's son ! m'écriai-je en levant les mains en signe d'innocence

— And I took his heart when, continuai-je en reposant mes mains liées sur mon coeur puis en les ouvrant, comme si j'offrais le mien. I pulled out that gun !

— Rum pa pa pum, rum pa pa pum, rum pa pa pum ! Man Down ! m'exclamai-je en visant le public avec mon pistolet

— Rum pa pa pum, rum pa pa pum, rum pa pa pum ! Man Down ! répétai-je encore, faisant semblant de tirer sur le public

Puis, je me laissai tomber à genoux à côté de Ludovic.

— Oh mama, mama, mama !
I just shot a man down ! criai-je, penchée sur lui en faisant mine de lui caresser la joue

Je relevai la tête.

— In central station
In front of a big ol' crowd !

— Oh, why ? Oh, why ? demandai-je en me prenant la tête entre les mains

— Oh mama mama mama ! repris-je la tête, levée vers un ciel que je ne pouvais pas voir. I just shot a man down ! In central station !

Je levai d'un bond, et m'approchai de Lucie d'un air menaçant, qui avait arrêté net sa danse et regardait Ludovic, les yeux exorbités.

— It's a 22, I call her Peggy Sue
When she fits right down in my shoes !

   Lucie pointa sur moi un doigt accusateur, et même je ne pouvais pas les voir, je savais que Diane, Pierre et Raphaël en faisaient autant.

— Whatchu expect me to do ? If you're playing me for a fool I will lose my cool, and reach for my fire arm ! m'écriai-je à moins d'une dizaine de centimètres de Lucie, agitant mon pistolet à proximité de sa tête

— I didn't mean to lay him down ! protestai-je, en reculant avec véhémence

— But it's too late to turn back now ! m'exclamai-je en me tournant vers les trois autres danseurs

Je me pris la tête entre les mains, désespérée.

— Don't know what I was thinking
Now he's no longer living
So I'm 'bout to leave town, aye uh ! lançai-je en reculant vers le fond de la scène

— 'Cause I didn't mean to hurt him ! dis-je en niant la chose de mon index. Could've been somebody's son, expliquai-je avant de me rendre compte de ce que j'avais fait et de porter mes mains sur mes joues. And I took his heart when I pulled out that gun !

   Je m'emparai du pistolet et visai Lucie qui se laissa tomber comme un cygne en plein vol sur Raphaël.

— Rum pa pa pum, rum pa pa pum, rum pa pa pum
Man Down !

Je réitérai en visant Diane qui pirouetta en tombant, rattrapée par Pierre.

— Rum pa pa pum, rum pa pa pum, rum pa pa pum ! Man Down !

À nouveau, je me laissai tomber au chevet de Ludovic.

— Oh mama, mama, mama !

   Je pris encore ma tête entre mes mains avant de la poser sur son torse, ma joue gauche en plein sur sa tâche de sang.

— I just shot a man down ! In central station ! In front of a big ol' crowd !

  Je me relevai et me laissai tomber en arrière, sentant le sang sur ma joue sécher au contact de l'air. Le regard rivé vers le ciel, les mains crispées sur mes tempes, je repris :

— Oh, why ? Oh, why ? Oh mama, mama, mama, I just shot a man down ! In central station !

Lucie, Diane, Pierre et Raphaël m'entourèrent et me relevèrent avec force.

— Said, I'd never thought I'd do it
Never thought I'd do it, never thought I'd do it ! protestai-je, en me débattant

Ils me lâchèrent et je partis me réfugier à l'autre bout de la scène.

— Oh gosh, what ever happened to me ? Ever happened to me, ever happened to me ? m'écriai-je en m'arrêtant net dans ma course effrénée

Je repris mon pistolet et visai Lucie, qui tomba sur ses trois camarades.

— Why did I pull the trigger, pull the trigger, pull the trigger ? Boom
And end a, end a life so soon !

Je me rapprochai de Ludovic, les quatre danseurs derrière moi et m'adressai au public :

— When me pull the trigger, pull the trigger, pull it pon' you !
Somebody tell me what I'm gonna, what I'm gonna do ? Ehh !

Puis, je reculai d'effarement.

— Rum pa pa pum, rum pa pa pum, rum pa pa pum !
Me say one man down, ah wah me say ! m'épouvantai-je

Je fermai les yeux, les bras écartés et la tête vers le ciel.

— Rum pa pa pum, rum pa pa pum, rum pa pa pum !
When me went downtown !

J'ouvris brutalement les yeux.

— 'Cause now I am a criminal, criminal, criminal ! hurlai-je en tombant à genoux

Je regardai Ludovic.

— Oh Lord have mercy, now I am a criminal ! poursuivis-je en joignant mes deux mains en signe de prière

Je me tournai vers mes quatre danseurs.

— Man Down, tell the judge please gimme minimal ! les suppliai-je. Run out a town none of them can see me now, see me now !

À nouveau, je me penchai sur Ludovic, suffisamment près pour que les mèches qui s'étaient échappées de mon chignon lui chatouillent le visage.

— Oh mama, mama, mama ! I just shot a man down ! In central station ! In front of a big ol crowd !

— Oh, why ? Oh, why ? déplorai-je, une dernière fois, mes doigts sur son front, à la naissance de ses cheveux blonds

— Oh mama, mama, mama ! I just shot a man down ! In central station ! terminai-je, apeurée, avant d'enfouir ma tête sur son épaule

Les dernières notes s'éteignirent et je relevai la tête en souriant. Ludovic se redressa, tout sourire. Je me levai et lui tendis ma main, qu'il prit pour se mettre debout. Je ne lâchai pas sa main et tendis l'autre à Pierre. Nous nous inclinâmes sous les applaudissements, toujours en souriant.

— Oui, bravo ! C'étaient Ludovic dans le rôle du cadavre, Émilie au chant, Lucie, Diane, Pierre et Raphaël à la danse !

Nous sourîmes une dernière fois et quittâmes la scène, radieux. J'entendis M. Ginsique appeler ceux qui passaient après nous puis la porte des coulisses se referma.

~
Hey ! Comment allez-vous ? :)

Merci d'avoir lu ce chapitre ! Que pensez-vous des prestations d'Emmy, de la façon dont démarre le spectacle ? 😄

Étant donné que c'est la rentrée la semaine prochaine, je vous propose de changer de jour de publication et de passer au samedi !

On se retrouve donc samedi 5 septembre pour le chapitre 68 ! 🖤