➵ Chapitre 38 - Partie I
Je tapotai fébrilement mes mains aux ongles rongés sur la table, vérifiant pour la énième fois mon téléphone. Aucun message, aucun appel, rien. Silence radio depuis le dernier appel de Caitlin.
— J'ai essayé d'appeler Luke, Mike et Caitlin, m'annonça Alice en arrivant dans notre chambre
— Oh, c'est vrai ?! m'exclamai-je en me redressant brutalement. Dis-moi que l'un d'eux t'a répondu, dis-moi qu'il va bien, Alice, s'il te plaît dis-moi qu'il va bien !
— Je ne te dirai rien alors, répondit-elle, avant de reprendre : aucun ne m'a répondu quoi que ce soit, conclut-elle, d'un visage assombri
— Oh.
Je baissai la tête. Encore et toujours rien. Pas une seule nouvelle, pas un seul message, pas un seul appel, pas un seul mot depuis deux semaines. J'étais morte d'inquiétude. Je ne m'attendais pas à ce que Luke me réponde « je vais bien » alors que pas du tout ou que Caitlin ou Mike me dise « il va bien ». Mais, j'espérais au moins qu'il se confierait à moi.
Je me sentais impuissante. Toute petite par rapport à la douleur qui le dévastait. Ne le connaissant que trop bien, je devinais son état mental mais aussi physique. Et il était capable de n'importe quoi à n'importe quel moment. Je le voyais très bien le regard brisé, hagard, le visage cerné, en proie à ses émotions. Chose qu'il détestait.
Sur un coup de tête, il était capable de commettre l'irréparable, et son silence m'alarmait plus qu'autre chose. Je mordillai mes ongles ou plutôt ce qu'il en restait en tentant de me calmer.
— Arrête ça ! s'exclama Alice en me tirant la main, tu es déjà au sang, n'en rajoute pas !
— Alice, c'est lui qui a le coeur en sang !
— Émilie ! Rester assise à te ronger les ongles en paniquant toutes les cinq minutes ne fera pas avancer les choses ! rétorqua-t-elle en me jaugeant de son regard perçant
— Tu crois que c'est facile ? Toi, tu n'as pas ce genre de problèmes puisque tu vois Antoine tous les jours ! crachai-je, sous l'effet de la colère due à mon inquiétude, tu ferais quoi à ma place ?
— Je ne resterais pas assise à me ronger les ongles, ça, c'est sûr !
— Et alors ? Que suggères-tu ? Que je prenne des plumes et les colle sur mes bras pour voler jusqu'à New-York ? Ça a déjà été fait, et ça n'a pas marché puisque notre cher ami Icare est tombé dans la mer ! Il faut se renouveler, c'est plus que moyenâgeux comme technique ! Trouve autre chose ! m'écriai-je sarcastiquement en la dévisageant
Ses yeux étincelèrent de fureur :
— Je te suggère de passer une bonne nuit de sommeil, dit-elle, un peu sèchement, tu y verras déjà plus clair.
— Encore faudrait-il que je dorme, marmonnai-je
— En même temps, je ne sais pas ce qui t'est passé par la tête pour tomber amoureuse d'un new-yorkais ! ajouta-t-elle, d'un ton bourru
— Et moi, ironisai-je, piquée au vif, je ne sais pas ce qui m'a pris non plus ! C'est vrai, dès le début je me suis dit « tiens, si je choisissais la personne la plus difficile à comprendre qui habite sur un autre continent » J'aurais du choisir un australien, c'est deux fois plus loin, tant qu'à faire ! Il paraît que les surfers sont à tomber !
— Arrête d'utiliser le sarcasme pour seule défense, et calme-toi au lieu d'être constamment sur les nerfs !
— Et comment veux-tu que je sois quand mon copain a perdu sa sœur et que je n'aie pas de nouvelles de lui depuis deux semaines et que je sais qu'en plus il peut être impulsif ? Tu veux que je souris en disant « youpi, tout va bien, la vie est belle » alors que c'est tout le contraire ? Désolée, ça ne marche pas comme ça ; je ne suis pas comme ça !
— Je ne te demande pas ça, je te demande de garder ton sang froid et de ne pas être désagréable constamment ! s'énerva Alice, en secouant ses cheveux blonds et roses décolorés
— Parce qu'en plus tu as des préférences ?
— Ce que tu es bornée ! Tu...
— Merci, j'apprécie le compliment, raillai-je
— Arrête de te comporter en adolescente en pleine crise qui croit que tout le monde est contre elle !
— C'est justement ce que je suis actuellement !
— Eh bien, grandis un peu et modère tes humeurs ! Je sais bien que c'est compliqué, mais je ne suis pas responsable de ça ! Et crois-moi, cette situation me déplaît autant qu'à toi !
Je ne trouvai rien à redire, pas même une seule remarque moqueuse ne me venait, et me contentai de fixer le parquet du sol.
— Il pourrait au moins répondre, m'envoyer un message, murmurai-je, calmée, c'est tout ce que je demande...
— Je sais bien, confia Alice en s'asseyant à côté de moi, mais, peut-être qu'il ne veut pas que tu le voies comme ça...
— Alice, je me fais un sang d'encre ! me récriai-je
— Justement, peut-être qu'il se dit que tu serais pire en connaissant son état.
— Mais ne justement pas savoir comment il est est bien pire ! Je veux simplement l'aider et lui parler ! Si c'était moi, il en ferait autant !
Alice soupira et hocha la tête. Elle remonta ses genoux sous son menton et se gratta le crâne, l'air pensif. En faisant la moue, elle s'empara d'un des élastiques qu'elle portait au poignet et s'attacha les cheveux en un chignon rapide, d'où s'échappaient déjà quelques mèches roses et dorées. Soudain, une lueur étrange s'alluma dans ses yeux noisette :
— Emmy, tu as toujours ton billet d'avion pour New-York que tu as reçu à Noël ?
— Oui, pourquoi ?
— Et dans deux semaines, nous sommes en vacances, non ?
— Continue, fis-je avec un sourire, voyant où elle voulait en venir
— Eh bien, dans deux semaines, on débarque à New-York ! s'exclama-t-elle
— Alice, nous ne sommes pas majeurs, répliquai-je, soudainement déçue
— Qu'importe !
— Alice, ça ne marche pas comme ça. On ne peut pas prendre l'avion jusqu'à New-York comme ça en claquant des doigts ! martelai-je, il nous faut...
— Non ! Ose me dire que ton frère ne t'accompagnera pas... Il est majeur, lui !
Un sourire étira mes lèvres :
— Alice, tu es...
— Brillante, je sais, coupa-t-elle, on me le dit souvent !
— Et toi ? repris-je, tu vas faire comment pour venir ?
— Je me débrouillerai, répondit-elle en haussant les épaules, une autorisation écrite de mes parents qui me placent sous la tutelle de ton frère, et hop ! Le tour est joué !
— Je ne crois pas que cela soit si simple, rétorquai-je, pensivement, c'est à réfléchir.
Elle acquiesça.
— En attendant, trouvons un autre moyen d'obtenir une réponse de la part de Luke ou de Mike et Caitlin.
— Ils ne répondent pas non plus sur les réseaux sociaux, lui avouai-je, un peu désemparée
— Et la voie postale ? suggéra-t-elle
— Les lettres mettent trop de temps à arriver, soupirai-je
— Et tu as déjà pensé à...
— Oui, j'y ai déjà pensé, coupai-je, agacée, il n'y a aucun moyen.
— Tu ne sais même pas ce que j'allais dire ! s'exclama-t-elle, en haussant un sourcil, la voix suraiguë. Tu as pensé à passer par le biais de ses parents ?
— Je n'ai pas leur numéro, mais mes parents oui. Je leur avais demandé d'appeler ou d'envoyer un message, n'importe quoi quand j'ai appris la... nouvelle. Mais, ils m'ont dit non, qu'il valait mieux les laisser tranquille, qu'ils avaient besoin de temps, déclarai-je d'une voix blanche que je ne me connaissais pas
— Oh, je vois, commenta Alice
— Je te l'avais déjà dit, continuai-je, d'un ton égal
— Tu me dis tellement de choses ! Je ne peux pas tout retenir, répliqua-t-elle sur un ton de reproche.
Un silence s'installa, un de ces silences que je détestais. Ceux où l'on avait l'impression que le temps avançait lentement et où l'on se sentait mal, comme si on ne devait pas être là. Comme si notre place devait être ailleurs. Et je savais où la mienne devait être.
— Alors on fait quoi ? fis-je, d'une voix que j'espérais calme
— Rien, dit Alice.
Elle marqua une pause.
— On attend.
~
Hey ! Comment allez-vous ? :)
Que pensez-vous de la situation que vivent Emmy et les autres, de son comportement ? Ça n'a pas l'air très facile à vivre... Et les autres, pourquoi ne lui répondent-ils pas ?
On se retrouve mardi pour en savoir plus ! (Sans doute après 18h, ça sera ma récompense pour avoir survécu à ma colle d'électromagnétisme à distance xD priez pour que le colleur soit sympa (il ne l'est pas en temps normal, mais j'ai le droit d'espérer, non ? 😅))
Bref, à très vite !
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