Chapitre 27 : Le piège
Lorsque Drago l'avait légèrement secouée pour la réveiller, Hermione avait eu l'impression que quelques minutes seulement s'étaient passées entre le réveil et le moment où elle s'était recouchée.
- Quelle heure est-il ? avait-elle demandé d'une voix pâteuse.
- Cinq heures.
Hermione avait laissé sa tête retomber sur l'oreiller, se demandant pourquoi il était si nécessaire de partir aux aurores. Mais Drago lui avait retiré le drap d'un coup sec, et demandé de se dépêcher. Sa voix semblait fatiguée et sa nuit d'insomnie se confirma par ses cernes violacées ainsi que son humeur massacrante.
Il ne parla pas de toute la matinée, répondait aux questions de Hermione par des brefs hochements de tête ou les rares mots qu'il prononçait ne variaient qu'autour de « hum », « ouais », « je sais pas ».
- Hermione un peu d'énergie ! lança Richard.
Assise devant son petit déjeuner, celle-ci sursauta et releva mollement la tête. Il rigola et lui décolla le toast beurré de sa joue.
- Allez motives-toi ma chérie, tu pars en mission ! dit-il tel un gamin avec ses héros de bande dessinés dans la tête.
- Richard je vais rencontrer des...
Le mot se bloqua dans sa gorge, encore trop terrifiant.
- Oui mais Monsieur Malefoy m'a assuré tout à l'heure que tu ne craindrais absolument rien tant que tu l'écouterais. Ah tiens le voilà justement, où sont les toasts que je lui ai préparé ?
Douché, parfumé, et déjà vêtu de son long manteau noir, Drago entra dans la cuisine, toujours avec cet air sombre.
- Tenez, prenez des forces ! dit Richard en lui installant son plateau impeccablement décoré de toasts, de confitures, d'œufs et de bacons.
Surpris, le jeune blond le remercia poliment et s'installa en face de Hermione qui n'osait pas lever les yeux vers lui.
Il lui en voulait, c'était sûr. Il s'efforçait au mieux de la protéger en respectant les termes du contrat à la lettre, la prévenait sans cesse qu'elle était désormais l'une des cibles première des Mangemorts, et que trouvait-elle à faire ? Sortir en pleine nuit toute seule et sans sa baguette magique. Hermione se maudissait de cette erreur, combien de temps cela prendrait-il avant qu'il ne lui adresse à nouveau la parole ?
Incapable d'avaler quoi que ce soit, la jeune femme sortit soudainement de la cuisine et partit préparer ses affaires. Elle ne prit qu'un sac avec sa baguette magique, des habits de rechanges, des livres sur les créatures dangereuses en espérant trouver quelque chose sur les vampires, des provisions, un peu de maquillage pour rester présentable et une trousse de secours étant donné ses faibles capacités magiques en tant qu'infirmière. Au pire, elle n'aurait qu'à transplaner si quelque chose lui manquait.
- Il est temps de partir, annonça une voix derrière elle.
Hermione se retourna vers la porte de sa chambre mais il avait déjà disparu. Elle souffla longuement, s'en voulant plus que jamais. S'il commençait à l'éviter ainsi, c'était la mission qu'il mettrait en péril. C'est pourquoi elle se promit de lui parler aussitôt qu'ils seraient loin d'ici.
Hermione prit ses affaires et descendit dans le salon. Richard, excité et débordant d'énergie, exposait le cours qu'il avait récemment donné à ses élèves sur le Cerbère, chien à trois tête que Hermione connaissait parfaitement pour en avoir rencontré un lors de sa première année. Drago écoutait d'une oreille distraite, le regard ailleurs. Richard était le genre de personne avec qui vous n'étiez pas obligé de faire semblant d'être intéressé, il pouvait parler pendant des heures, qualité fortement recommandée lorsqu'on enseignait la Mythologie ancienne dans une université d'étudiants.
Elle arriva près d'eux et Richard abandonna sa victime, qui ne lui en voulut pas du tout, pour aller lui dire au revoir. Hermione aurait voulu que Drago ne le voit pas l'embrasser, mais une autre partie d'elle se disait que ça l'aiderait sûrement à se faire une raison une bonne fois pour toutes. Faudrait-il encore qu'elle réussisse elle-même à s'en faire une...
- Tu vas me manquer, lui murmura Richard, soudain très émotif.
- Ne fais pas cette tête là, le rassura-t-elle. Tout va bien se passer, c'est toi-même qui me l'as dit. Tu ne t'inquiètes pas d'accord ?
- Promis, souffla-t-il. Je...je t'aime.
- Moi aussi, dit-elle avant de l'embrasser à nouveau.
Lorsqu'elle se détacha de lui, ses yeux ne purent s'empêcher de virer vers Drago. Ce dernier fixait intensément le mur, comme pour canaliser sa colère, ou bien sa peine. Les deux sûrement... Richard toussota légèrement et lui tendit une main chaleureuse :
- Au revoir monsieur Malefoy, ravi d'avoir fait votre connaissance. Je ne comprends pas que votre monde vous considère comme un Mange la Mort, vous êtes quelqu'un de très bien.
- Mangemort, corrigea Hermione.
Drago regarda sa main tendue mais ne la serra pas.
- Merci de m'avoir accueillit pour cette nuit, porte toi bien Richy, dit-il simplement avant de franchir la porte.
Hermione sourit une dernière fois à son petit ami et sortit dehors à son tour.
La nuit était encore très sombre, et le froid lui mordit la peau des joues qui n'était pas enfouie dans son épaisse écharpe blanche. Un petit vent glacé s'éleva et la transperça toute entière, son manteau de coton ne devait pas être assez épais et un pull de plus aurait été le bienvenu. Néanmoins elle ne dit rien et se contenta de suivre la silhouette sombre devant elle qui s'enfonçait dans la rue. Ce n'est que lorsqu'ils passèrent sous un lampadaire dont la lumière était très faible que Hermione entraperçut sa baguette magique dépasser de sa manche, et son visage tendu par la colère.
Ils n'avaient pas reparlé une seule fois de ce qu'il s'était passé la veille. Encore sous le choc, Hermione se souvint avoir été porté jusqu'au lit sans un mot, se remémora son beau visage inquiet penché au dessus du sien. Un baiser sur le front, il l'avait laissée s'endormir, et après être aller s'asseoir sur un fauteuil proche comme s'il gardait une malade, avait veillé sur elle le reste de la nuit... Richard n'avait rien su, il n'aurait pas tenu le choc : Hermione désirait le garder éloigné le plus possible de son monde, il avait suffisamment de problèmes comme ça et son inquiétude ne lui servirait à rien. Quant à l'homme qui marchait devant elle, tendu comme un piquet, le silence devint vite insupportable. Aussi décida-t-elle qu'il était temps de lui parler :
- Malefoy, souffla Hermione dont la voix se perdit dans la nuit noire.
Il s'arrêta aussitôt de marcher, mais ne se retourna pas. Elle le rejoint tête baissée et c'est d'une voix timide et gênée qu'elle prit la parole :
- Je suis désolée. Vraiment, vraiment désolée.
Elle sentit son regard dur et froid se poser sur elle, et s'interdit de lever la tête avant d'avoir fini de s'excuser :
- Je n'aurais jamais du m'éloigner ainsi toute seule, c'était idiot de ma part après tous tes avertissements. J'aurais du les prendre au sérieux, s'il te plaît excuse moi...
Malgré tous ses efforts, Hermione n'avait pas réussit à empêcher le sentiment de culpabilité lui nouer la gorge et elle ne put dire un mot de plus. Elle ne supportait pas le savoir en colère contre elle, cela lui rappelait tellement l'époque où il lui en avait voulu après leur rupture, ses regards noirs et ses mâchoires serrées lui donnaient envie de s'enfoncer sous terre.
Le silence qui suivit la terrifia. Puis, soudain, il lâcha un petit rire. Un rire froid et sans humour. Le cœur de la jeune femme passa à la vitesse supérieur, elle mordit sa lèvre inférieur pour s'empêcher de lui dire qu'il n'était pas obligé de la rabaisser encore plus, la tristesse cédant la place à la colère.
- Hermione...murmura-t-il les yeux vers les étoiles. Tu ne changeras jamais.
Celle-ci leva enfin la tête vers lui, étonnée. Qu'avait-elle encore dit ?
- Je n'arrive pas à croire que tu t'excuses, lâcha-t-il dans un souffle.
Hermione était littéralement perdue. Ses traits s'étaient adoucis mais son ton restait sec.
- Excuse-moi, bredouilla-t-elle, confuse. Je pensais que...
- Je t'en prie Hermione arrête ! explosa soudain Drago en plongeant son regard gris dans le sien. Cesse de t'excuser sans arrêt c'est pénible !
Hermione avait sursauté, et le regardait à présent avec des yeux démesurés.
- Je pensais que tu étais en colère, tenta-t-elle tout de même, incapable de réagir face à l'emportement du jeune homme.
- Oui je suis en colère ! rugit-il. Je suis furieux même ! Furieux contre moi et contre ma stupidité !
- Qu'est-ce que...
- Hermione ! la coupa-t-il en la prenant brusquement par les épaules. Cela fait moins de vingt quatre heure que l'on m'a confié ta protection, et j'ai déjà été incapable de veiller sur toi ! Je m'en veux terriblement ! A moi d'accord ? Je suis en faute, pas toi ! J'aurais du être là, j'aurais du te protéger au lieu d'attendre bêtement ton retour ! Et comme si ce n'était pas suffisant je me débrouille pour te faire culpabiliser ! Heureusement que j'ai entendu les Mangemorts crier, si j'étais arrivé quelques secondes plus tard, je...tu...
Il s'interrompit, comme si le seul fait de d'imaginer la suite lui donnait la nausée. Il relâcha la pression de ses mains et s'écarta quelques mètres plus loin, les mains jointes sur sa tête de nouveau dirigée vers l'aube naissante, essayant de reprendre le contrôle de soi.
Dans son dos, Hermione demeurait immobile, les yeux fixés vers le sol mais l'esprit tourné vers son âme sœur. Alors, lentement, elle s'avança sur la route et s'arrêta à quelques centimètres de lui. Toujours tourné vers le ciel qui s'éclaircissait de minutes en minutes, Drago ne vit pas la jeune femme tendre la main vers lui et se figer de nouveau. Elle hésita longuement, puis finit enfin par se décider à poser doucement sa main contre son dos. Hermione le sentit se raidir à son contact, et dit d'une voix assurée :
- Tout ce que je sais Malefoy, c'est que hier soir tu m'as sauvé la vie, et pour ça je t'en serai éternellement reconnaissante...
Il se retourna et la contempla longuement. Enfin, il sourit. Hermione avait l'impression que cela faisait une éternité qu'il n'avait pas souri, et son cœur sembla respirer beaucoup plus facilement.
- Tu ne m'en veux même pas, constata-t-il en secouant la tête de façon incrédule. Tu es quelqu'un d'incroyable Granger, tu sais ça ?
- Tu exagères, répondit-elle les joues pas uniquement rosies par le froid. N'importe qui d'autre ne t'en aurais pas voulu.
- N'importe qui d'autre ne se serait pas perdu dans un tas d'excuses comme tu l'as fait. Il me semble t'avoir déjà prouvé ta différence non ?
Hermione se rappela avec mauvaise humeur la fois où Drago lui avait montré ce que pensaient d'elle les élèves, la jugeant sans la connaître réellement, tout comme lui d'ailleurs.
- Je t'avais dit à quel point tu valais beaucoup mieux qu'eux, tu te souviens ? sourit Drago en devinant ses réticences au souvenir.
- Je me souviens plutôt avoir été traitée de vieille fille, répliqua-t-elle en fronçant les sourcils.
Drago rigola.
- Pourquoi tu ris ? demanda-t-elle.
- Je repense à l'époque de Poudlard, avoua-t-il. A ma ridicule obstination à me cacher la vérité sur mes sentiments. J'avais réellement dit « mieux », et pas « vieux ».
Hermione ne put s'empêcher de sourire à son tour en constatant qu'à cette époque, elle ne se doutait pas un instant qu'elle était déjà en train de faire tomber le grand Drago Malefoy sous son charme. A vrai dire, elle aussi ignorait qu'en le fréquentant, elle était en train de se nourrir petit à petit d'une drogue vitale dont elle souffrirait cruellement du manque plus tard...
- Allons-y, déclara-t-il pour briser le silence gênant.
Hermione acquiesça, contente de changer de sujet.
- Où va-t-on au fait ? demanda-t-elle en réalisant qu'ils marchaient sans but précis. Pourquoi ne transplanons-nous pas ?
- Après l'attaque de hier soir, j'ai lancé des sortilèges de protection sur une bonne partie de la ville, on ne peut plus transplaner. J'aurais du y penser bien avant.
- Arrête de te torturer pour ça, c'est du passé. Mais pourquoi y allons-nous à pied ? J'ai une voiture tu sais ?
Drago bougonna quelque chose comme « ce n'est pas si loin ». Apparemment il n'avait plus trop envi de s'essayer à la vie moldue, les remarques de Charlie sur son ignorance l'avaient sûrement vexé plus qu'il ne le laissait croire.
Une bonne demi-heure plus tard, Drago s'arrêta enfin avant de déclarer que les sortilèges s'arrêtaient à peu près à cet endroit. Ils se trouvaient en plein milieu d'un passage piéton qui séparait deux immenses trottoirs, non loin d'un bâtiment qu'elle reconnut comme la mairie. Hermione prit la main que Drago lui tendit et retrouva aussitôt les sensations de bien être et de douceur que lui procurait son transplanage parfait.
Alors qu'elle s'attendait à ouvrir les yeux sur une étendue d'herbe verte s'étalant sur une distance infinie, Hermione fut surprise de se retrouver devant la cabine téléphonique qui menait au Ministère de la Magie.
- On ne va pas en Nouvelle-Zélande ? s'étonna-t-elle.
Drago rigola. Cette habitude qu'il avait prise de se moquer d'elle l'insupportait au plus haut point. Ne pouvait-il pas rester le Drago doux et adorable qu'elle aimait tant plus de dix minutes, bannissant à jamais le petit Malefoy arrogant ?
- La Nouvelle-Zélande se trouve à des milliers de kilomètres d'ici, dit-il en lui tenant la porte de la cabine ouverte.
Hermione entra, rouge de honte. Elle aurait du se douter que Drago, aussi doué soit-il, ne pouvait pas transplaner une distance aussi grande. Elle enchaînait les erreurs en dévoilant ses lacunes en matière de transplanage et ce fut la première fois de sa vie qu'elle eut peur de perdre son titre de miss je-sais-tout. Ils arrivèrent au ministère, qui à la grande surprise de la jeune femme, n'était pas désert. En effet, même à six heures du matin cet endroit restait bondé de sorciers et sorcières courant dans tous les sens, une dizaine de dossier sous le bras. Hermione fut heureuse de voir tant de gens continuer d'agir contre cette guerre qu'ils ne considéraient pas comme perdue, et pour la première fois considéra réellement sa mission comme une nécessité pour leur monde et une grande fierté d'avoir été choisie pour l'accomplir.
- Voyez comme vous leur avez redonné espoir Miss ?
Elle se tourna vers cette voix familière et adressa un bonjour timide à Bernard qu'elle n'avait pas vu arriver.
- Hier encore, poursuivit-il, le peu de membres du ministère qui restait n'étaient occupé qu'à répondre aux appels incessants des familles en pleur qui réclamaient une recherche de plus, et leur répondait que toutes leurs équipes d'aurors étaient déjà mobilisées et qu'il leur faudrait patienter. Depuis que la presse a annoncé votre réapparition et votre volonté à nous aider de nouveau, des cinquantaines de sorciers assez doués ont accouru hier, réclamant vouloir aider bénévolement aux enquêtes avec les aurors ainsi qu'ici même, aux recherches du ministère. Évidemment, en ces temps sombres, toute aide est la bienvenue et un sentiment d'espoir règne de nouveau dans tout le bâtiment. Ne le sentez-vous pas, Miss Granger ?
Emue, celle-ci ne répondit pas.
- Ne traînons pas, déclara fermement Drago à l'adresse de Bernard.
Il s'empressa des les conduire au deuxième étage, dans une pièce qu'Hermione n'avait jamais vue auparavant. Elle était très petite et ne renfermait que de vieux objets sans intérêt apparent : des clefs rouillées, un coussin déchiré, des vêtements sales, des livres poussiéreux, une lampe cassée...
- Le vôtre est celui-ci, annonça Bernard en pointant du doigt une plante verte séchée. Bonne chance les enfants, que Merlin vous garde.
Drago prit la main de Hermione :
- A trois, dit-il. Un, deux, trois !
Ensemble, ils saisirent le pot en argile et s'envolèrent dans un tourbillon de couleur, à l'autre bout du monde...
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Contrairement au transplanage de Drago, l'atterrissage du Portoloin fut brutal et Hermione mit quelques minutes à chasser les étoiles qui dansaient devant ses yeux. Lorsque le choc passa et qu'elle s'habitua à la lumière aveuglante du jour, elle distingua Drago penché au dessus d'elle, l'air parfaitement remis du voyage.
- Ça va ? demanda-t-il en l'aidant à se relever.
- Oui, ça va. Que faisaient tous ces Portoloins au ministère ?
- Voldemort et ses adeptes contrôlent toutes formes de déplacement, expliqua-t-il. Ils sont avertis du moindre hibou qui franchirait les frontières de Londres. Tu te souviens qu'avant, Poudlard pouvait localiser les élèves de moins de dix sept ans qui faisaient de la magie ? Eh bien Voldemort utilise à présent le même système pour être informé des transplanages et autres déplacements en dehors des limites crées par les Mangemorts, ces derniers étant les seuls à transplaner où bon leur semblent. Les Portoloins du ministère ont été ensorcelés par Dumbledore lui-même peu avant sa mort, et sont donc dotés d'une grande magie qui passe inaperçue au contrôle. Malheureusement, la puissance du sort est telle que le Portoloin ne peut être utilisé qu'une seule fois.
- Oh, et pour le retour alors ? s'inquiéta Hermione.
- Les Vampires nous ramèneront.
- Les...Vampires nous...ramèneront ? répéta-t-elle sans comprendre.
- Tu es là pour les rallier à notre camp, non ? Ce sont l'une des rares créatures qui ont la faculté de transplaner n'importe où, quelle que soit la distance.
- Attend Malefoy, rigola nerveusement la jeune femme. Tu as l'air bien sûr de notre réussite à sortir vivant d'ici ! Qu'est-ce qui te fait dire qu'ils accepteront ma fichue proposition qui j'en suis certaine, n'est pas différente de celle de Voldemort ?
- J'ai confiance en toi, répondit-il simplement sous l'air hébété de l'ancienne Gryffondor. Tu t'en sortiras à merveille j'en suis sûr.
Hermione leva les bras en signe d'incompréhension complète tandis que Drago s'éloignait.
- Je peux savoir où tu vas ? lui lança-t-elle.
- Je cherche la maison que le ministère nous a installée pour la mission.
Hermione regarda autour d'elle. Alors seulement, elle prit le temps de se laisser submerger par la beauté du lieu auquel elle n'avait prêté d'attention jusqu'ici. Tout, ou presque, était exactement comme elle l'avait imaginé : des étendues de plaines vertes s'étendaient à l'horizon infinie, ponctuées de quelques arbres par ci par là dont la hauteur semblait toucher le ciel, ce dernier aussi bleu que devait être la rivière qu'on entendait couler non loin de là. Une légère brise soufflait sur le silence naturel qui unissait ce paysage paradisiaque aux montagnes alentour, dont les ombres immenses donnaient le sentiment d'un gigantesque rempart de sérénité, une frontière aux horreurs du dehors. L'herbe douce était parsemée d'une centaine de variété de fleurs différentes et rares, toutes aussi magnifiques et colorées les unes que les autres ; une en particulier attira son attention avec ses longs pétales en forme de cœur qui s'amoncelaient tout le long de la tige, où le rose et le blanc se fondaient de façon spectaculaire. Elle n'osait même pas la touchée, craignant de salir tant de beauté.
- Tu es déjà venu en Nouvelle-Zélande ? murmura Hermione, comme si elle redoutait de briser la quiétude.
Drago releva aussitôt la tête et la dévisagea :
- Pourquoi tu dis ça ? lança-t-il sèchement.
- C'est peut-être parce que tu es un homme après tout, dit-elle en faisant semblant de ne pas avoir remarqué sa colère, mais tu n'as pas l'air si émerveillé que ça par le paysage qui nous entoure.
Il sembla se radoucir et tira même un petit sourire en coin :
- J'essaie de ne me laisser distraire par rien qui puisse compromettre ta sécurité, plus vite nous trouverons la maison mieux ce sera.
Hermione aurait voulu lui dire qu'il en faisait encore trop, mais les évènements de la veille la dissuadèrent de tous commentaires.
- Je ne comprends pas elle devrait être par ici ! pesta Drago en jetant un coup d'œil au Portoloin.
Hermione scruta les environs. S'il y avait effectivement une maison non loin de là, ils l'auraient forcément aperçue dans ce désert vert. Elle fut soudainement prise d'un coup de fatigue et la jeune femme s'allongea dans l'herbe sous un immense chêne, ignorant les remarques cinglantes de son partenaire qui réclamait de l'aide. Peut-être cette fatigue était-elle due au décalage horaire malgré la rapidité du voyage ? Ils avaient quitté Londres vers six heures du matin, elle en déduisit donc qu'il devait être environ cinq heures, bien que la notion de temps semblait étrangère ici. Hermione ferma les yeux, bâilla et respira l'air pur et frais qui donnait l'impression de nettoyer ses poumons de la récente pollution de l'Angleterre, causée par les centaines de sortilèges noirs qui fusaient chaque jour lors des combats.
Lorsqu'elle ouvrit les yeux, Hermione distingua aussitôt quelque chose de bizarre dans le feuillage de l'arbre sous lequel elle se reposait.
- Malefoy ! appela-t-elle.
Celui-ci se précipita vers elle, et ralentit sa course quand il constata s'être inquiété pour rien. Il la regarda d'un air interrogateur et pour toute réponse, elle tendit son bras droit devant elle. Drago leva la tête tout là haut et observa à son tour une toute petite cabane en bois sombre qui se fondait dans le vaste feuillage du chêne. Ce dernier se dressait à plus de vingt mètres de hauteur.
- Merde, lâcha Drago.
- Je n'aurais pas dit mieux ! renchérit Hermione en se levant. Tu crois que c'est ça, notre maison ?
- Apparemment. Après tout ce n'est pas si surprenant que ce qui nous attende ne soit pas un château visible sur des kilomètres. La discrétion est un point fort si nous voulons repérer leur refuge.
- Ouais, dit-elle sans trop d'enthousiasme. Une idée pour monter ?
- C'est toi le génie, répliqua-t-il. Je ne suis que ton garde du corps.
Hermione se retint une fois de plus de lui dire ce qu'elle pensait ; jusque là, c'est lui qui avait tout prit en main sans vraiment prendre le temps de lui expliquer quoi que ce soit, et quand monsieur était à cours d'idées, c'était à elle de jouer !
Supposant le transplanage trop dangereux puisque la destination exacte était inconnue et qu'ils risqueraient de tomber à côté, Hermione fouilla sa mémoire à la recherche d'un sortilège utile qu'elle ne tarda pas à dénicher :
- Escalazum ! prononça-t-elle en dessinant avec sa baguette un long trait vertical depuis le bas.
Au fur et à mesure de son mouvement et dans un bruit de bois qui craque, une partie de l'énorme tronc sembla sortir en relief sous forme de barres séparées de quelques centimètres, formant ainsi une longue échelle jusqu'à atteindre le sommet des branches. Contente d'elle, Hermione se tourna fièrement vers un Drago qui mimait une révérence. La jeune femme respira un bon coup et posa le pied sur le premier échelon et agrippa l'écorce du troisième avant de gravir les suivants, bientôt suivie par son coéquipier.
La distance qui la séparait de la cabane semblait ne jamais diminuer, et Hermione dut faire preuve d'un grand contrôle de soi pour s'empêcher de regarder en bas. Comme s'il avait perçut sa peur, Drago, juste au dessous, la rassura, du moins à sa façon :
- Tu m'as dit qu'un Serpentard le demeurait toujours même après Poudlard, résonna sa voix dans le vide. En revanche, les Gryffondors semblent perdre de leur courage, n'est pas Granger ?
- Tais-toi et grimpe ! rétorqua-t-elle.
Hermione risqua un coup d'œil à droite et aperçut l'immensité des plaines, ainsi que la rivière agitée qu'elle avait entendue tout à l'heure.
- Quelle vue magnifique...souffla-t-elle.
- Je ne te le fais pas dire ! plaisanta Drago.
- Regarde ailleurs Malefoy ! tempêta Hermione.
Instinctivement, la jeune femme grimpa à toute allure et fut au sommet en moins de temps qu'il n'en faut pour le dire. Arrivée sur la large plateforme construite avec des planches de bois à première vue peu solides, Hermione n'attendit pas Drago pour découvrir l'intérieur de ce petit cube de bois.
Elle en eut le souffle coupé. Exactement comme avec la tente lors de leur quatrième année à la Coupe du monde de Quidditch, l'intérieur était bien plus grand contrairement à l'aspect extérieur. Elle repéra au moins trois pièces, alors qu'elle n'en avait imaginé qu'une seule étant donné les cinq mètres carrés de surface, et la hauteur du plafond mesurait bien trois mètres, alors qu'elle avait pensé ne même pas pouvoir tenir debout.
Néanmoins, cela restait ancien et piteux : la table et ses chaises qui trônaient au centre, le parquet craquelé, le plafond fissuré, les meubles, tout était rongé par les mites. Un canapé dont la housse verte était trouée sur divers endroits était installé contre le mur de gauche, sous une petite fenêtre carrée à la vitre si sale qu'on ne pouvait voir à travers. Une cuisinière à l'ancienne prenait toute la partie droite de la cabane, certains placards n'avait plus de porte et laissaient percevoir une vaisselle encrassée probablement inutilisée depuis des années. Le tout dégageait une odeur de moisi très désagréable.
- Il y a vraiment des fois où je regrette mon manoir...
Hermione se tourna vers Drago qui affichait un air de dégoût profond face à leur nouvelle demeure.
- J'imagine que ça doit te changer effectivement, avoua-t-elle avec une pointe d'ironie. Mais il faudra t'y habituer parce que tout restaurer, même avec la magie, prendrait trop de temps et nous avons autre chose à faire.
- Je peux toujours demander au ministère de nous envoyer un elfe de maison ? proposa-t-il en s'amusant du regard noir que lui lança la jeune femme.
- Ne peux-tu donc pas leur montrer un minimum de respect ? demanda-t-elle franchement, susceptible sur ce sujet qui lui tenait à cœur. Est-il possible de te prouver que ce ne sont pas des esclaves nés contrairement à ce que beaucoup de sorciers pensent, mais plutôt d'adorables créatures dotées d'une grande intelligence ?
- Hum c'est à voir, sourit-il. Essaye de me faire tomber amoureux de l'un d'eux en dix jours, ça pourrait être amusant non ? Mais cette fois je ne te garantis pas un succès aussi grand !
Hermione, dont les traits du visage se décomposèrent, le regarda exploser de rire tout seul. Comment avait-il osé plaisanter d'une telle chose ? Cette référence à leur ancien pari irrita la jeune femme plus qu'autre chose ; cette partie de sa vie avait été l'origine de son malheur actuel, de ses périodes sombres où l'envie de vivre l'avait quittée, de toutes ces nuits à verser des larmes, et que faisait-il ? Il en riait ! Avait-il réellement vécu le même chagrin qu'elle pendant tout ce temps ? L'éventualité qu'elle avait été la seule à souffrir autant lui traversa l'esprit et Hermione ne put s'empêcher de lui en vouloir, bien qu'au fond elle se haïssait elle-même d'oser présumer qu'il n'avait pas souffert.
- Je plaisante Hermione ! précisa-t-il en prenant peur devant la couleur rouge pivoine que prenait ses joues.
- Je ne trouve pas ça drôle, siffla-t-elle sans cacher sa colère.
- Pourtant, rétorqua-t-il d'une voix soudain moins rieuse, il me semble qu'à une époque le but de ce pari était que l'on en rigole non ? Tu en as d'ailleurs fait profiter toute l'école si je me souviens bien ?
- Ça suffit ! rugi-t-elle alors d'une voix cassée par la douleur. Tais-toi Malefoy ! Je ne veux plus t'entendre c'est clair !
Les larmes aux yeux, Hermione se dirigea vers la première pièce qui se présentait à elle, et claqua violemment la porte dont la poignée roula au sol. Elle se trouvait dans la seule et unique chambre : une très petite pièce avec comme seul mobilier un lit pour deux prenant presque tout la place, et une table de nuit de chaque côté.
- Hermione...souffla la voix attristée de Drago derrière la porte.
- Fiche-moi la paix ! cria-t-elle.
- Hermione s'il te plaît...
Le regret était pleinement perceptible dans le ton sa voix, et elle l'imaginait aisément en train de coller sa tête contre la porte en bois tout en se traitant intérieurement d'imbécile. Mais elle était bien trop furieuse contre lui pour lui pardonner maintenant, et le laisser réfléchir sur son comportement ne lui ferait pas de mal.
- Va-t-en Malefoy ! trancha-t-elle en s'essuyant rageusement les joues.
Elle fut heureuse d'entendre ses pas s'éloigner et souffla longuement avant de s'écrouler toute entière sur le lit qui cracha un nuage de poussière. Hermione se doutait que les intentions de Drago n'avaient pas eu pour but de la blesser. C'est vrai, pourquoi les paroles du jeune homme auraient-elles dû l'affecter puisque de toute évidence, le pari qu'elle s'était lancé un an plus tôt était destiné à l'humilier publiquement ? Car après tout, c'était ainsi qu'il la voyait, comme cette talentueuse actrice qui avait prit son cœur pour y jouer sa scène de théâtre, et peu importait de se moquer de cette époque à présent, tout cela remontait loin !
Oui mais seulement Hermione n'était pas et n'avait jamais été cette garce qui se serait abaissée au même niveau que ce prétentieux de Malefoy en voulant lui faire un sale tour. Elle était réellement tombée amoureuse, et encore l'expression restait faible, de cet homme qui avait détruit sa carapace uniquement pour elle ; et si elle avait longtemps réussi à conserver ce masque de l'indifférence à sa souffrance qu'il ne se gênait pas pour montrer, Hermione réussissait beaucoup moins bien à masquer sa propre peine. Ses perpétuelles allusions à leur passé et son effort permanent pour garder son visage impassible à ces remarques l'épuisaient fortement. Drago devait sûrement se demander pourquoi elle réagissait ainsi, et elle devrait lui mentir, une fois de plus...
Merlin lequel de nous deux souffre le plus ? murmura Hermione entre deux sanglots étouffés dans l'oreiller. Cette histoire ne finira-t-elle donc jamais ?
Comment, alors qu'ils venaient d'officialiser leur relation la veille, sa vie avait-elle tournée au cauchemar ? Pourquoi elle par Merlin ! N'avait-elle pas le droit, elle aussi, à une vie heureuse et paisible avec l'homme qu'elle aimait ? Etait-ce le prix à payer d'avoir rencontré son âme sœur ? Un tel bonheur devait-il forcément avoir sa part d'ombre ?
Autant de questions auxquelles Hermione n'aurait sûrement jamais la réponse, et le sommeil la tira doucement de son malheur l'espace de quelques heures...
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La pièce était plongée dans l'obscurité lorsque Hermione se réveilla. La nuit était tombée ainsi que la température qui lui déclencha une série de frissons et un début de claquement de dents. Elle avait du dormir plusieurs heures et la dispute précédent sa sieste lui apparaissait très lointaine maintenant.
Hermione poussa discrètement la porte de sa chambre et jeta un coup d'œil dehors. Il n'y avait personne. A peine mit-elle un pied dans le salon qu'une bouffée de chaleur la réchauffa ; un feu de cheminée avait été allumé à côté de l'entrée et une bonne odeur de friture vint lui chatouiller les narines.
Elle s'approcha de la table en bois et sourit en apercevant qu'un couvert avait été installé pour elle. La vaisselle avait du recevoir un bon coup de baguette magique car elle étincelait à présent. Son assiette comportait des frites et un gros steak haché, le tout décoré d'une feuille de salade verte. Juste à côté du verre de vin rouge, une fleur avait été déposée ; cette même fleur qu'Hermione avait repéré dans la plaine quelques heures plus tôt, avec ses couleurs roses et blanches et la fraîcheur de son parfum. Comment avait-il deviné ?
Glissée en dessous de la fleur, une lettre. Hermione s'en saisit aussitôt et parcourut les quelques lignes dont l'écriture penchée et impeccable lui tira un sourire idiot :
« Il y avait bien plus magnifique à contempler que le paysage...
Excuse-moi pour tout à l'heure, tu sais bien que je ne peux pas dormir si tu ne me pardonne pas,
Drago ».
Hermione se laisse tomber sur la chaise la plus proche. Merlin que son cœur battait vite, juste à cause de simples mots...Comment allait-elle faire ? Comment allait-elle parvenir à tenir plusieurs jours en compagnie de son âme sœur sans se jeter sur lui en lui avouant l'ampleur de son amour qu'elle cachait tout au fond d'elle, luttant pour l'empêcher de s'exprimer ?
Tout à coup Hermione se laissa envahir par des images d'elle et Drago en train de s'embrasser, de vivre heureux et de fonder une famille. Et si elle lui avouait son amour sans pour autant révéler le secret interdit ? Et si, contrairement à ce qu'elle supposait, Drago ne deviendrait pas rongé par une curiosité noire sur leur rupture qui ferait longtemps barrière à leur bonheur ? Et si elle s'autorisait à l'aimer, tout simplement ?
Mais comme d'habitude, sa raison reprit le dessus et calma ses ardeurs. L'image de Richard lui revint en tête ainsi que ses responsabilités vis-à-vis de leur mission qui se déroulerait beaucoup mieux sans conflits personnels.
Même si elle maudissait sa fichue conscience, elle ne pouvait lui être que reconnaissante de la faire redescendre sur terre aussi souvent qu'il le fallait, évitant ainsi une trop grande souffrance lorsqu'il disparaîtrait à nouveau de sa vie pour commencer la sienne...
Malgré son estomac tordu par l'image d'une autre femme embrassant Drago, Hermione entreprit de goûter son menu qui, elle dut l'avouer, n'était pas franchement équilibré. Les frites n'étaient pas assez cuites et le steak était froid. Drago avait peut-être beaucoup de qualité mais la cuisine n'en faisait apparemment pas partie. Néanmoins elle se força à tout finir, ayant parfaitement conscience de la difficulté du sortilège de nutrition, elle-même ne savait faire apparaître qu'un malheureux sandwich et dont le fromage laissait à désirer.
La vaisselle fut nettoyée et rangée en un coup de baguette et Hermione partit s'installer dans le fauteuil près du feu de cheminée. Quelques minutes s'écoulèrent avant qu'elle n'entende quelqu'un monter à l'échelle de l'arbre. Prudente, elle prit sa baguette et attendit devant l'entrée. La porte s'ouvrit et une tête blonde apparut, aussitôt suivie d'un sourire radieux :
- Je vois que tu commences enfin à prendre ta sécurité au sérieux, dit-il en retirant son manteau.
- Je suis bien obligée puisque mon garde du corps m'a délaissée, répondit-elle en mimant un air de reproche.
- Tu ne penses pas sérieusement que je t'ai abandonné sans protection ? s'effara-t-il en la dévisageant. Avec les dizaines de sorts que j'ai jeté sur la cabane j'étais sûr de te retrouver à mon retour.
- Où étais-tu d'ailleurs ?
- Parti me familiariser avec le périmètre. Je nous ai trouvé une bonne planque pour cette nuit, lorsqu'ils chasseront.
Hermione frissonna au dernier mot prononcé.
- Il faut que je t'expliques certaines choses, reprit Drago en ignorant son malaise. Des règles de vie sur les Vampires qui sont indispensables.
Hermione se redressa dans son fauteuil, attentive à sa propre survie.
- Premièrement ne leur tourne jamais le dos, c'est impoli. Très important également, ne leur coupe jamais la parole et encore moins pour les contredire. Regardez-les toujours dans les yeux, ne t'attarde pas sur leur apparence physique car ils ne supportent pas être dévisagés. Ne montre surtout jamais que tu as peur d'eux en essayant par exemple de dissimuler ton cou par reflex instinctif, cela excite en eux un plaisir de puissance qui peut se révéler dangereux s'il n'est pas contrôlé. N'élève jamais la voix, et ne les insulte pas sinon tu seras morte avant même d'avoir achevé ta phrase. Ne t'essaie pas non plus à les flatter, si ce n'est pas sincère mais seulement un moyen de gagner leur sympathie, ils le sauront. Dernier point à ne pas négliger : ne refuse jamais une invitation, quelle qu'elle soit. Tu les offenserait alors qu'ils font preuve de politesse. Ce qu'il faut que tu comprennes, c'est qu'il est très dur pour eux de parler avec courtoisie à des êtres qu'ils abhorrent et qu'ils tueraient avec plaisir ; donc ils considèrent leurs efforts comme une grande sagesse de leur part et réclament en retour le respect qui leur est dû. Hermione, tu m'écoutes ?
Le visage livide, les yeux perdus dans le vide, le corps raide et immobile, Hermione était dans un réel état de panique.
- Je vais mourir...lâcha-t-elle dans un souffle.
- Bien sûr que non !
- Je n'y arriverais jamais ! gémit-elle en levant vers lui ses yeux affolés.
- Hermione, prononça-t-il d'une voix grave en s'accroupissant devant son fauteuil. Les Vampires en ont après les sorciers qui ont l'âme noire et assoiffée de pouvoir, ils méprisent les profiteurs et les menteurs qui ont de mauvaises intentions. Ton âme à toi est aussi pure que celle d'un enfant innocent, tu réussis à trouver du bon dans chaque personne aussi mauvaise soit-elle - j'en suis la preuve -, tu risques ta vie pour sauver tout un monde sans rien demander en retour, et tu n'arrives même pas à mépriser ceux qui te veulent du mal ! Crois-moi, les Vampires sauront lire ta bonté Hermione.
- Tu...tu le penses vraiment ? bégaya-t-elle en le scrutant, les sourcils froncés. Je veux dire, comment peux-tu me décrire ainsi après...ce que je t'ai fais ?
Les derniers mots avaient été murmurés et Hermione n'en revenait pas d'avoir elle-même remit le sujet sur le tapis, contrairement à d'habitude. Drago sembla lui aussi surprit mais son visage redevint vite impassible.
- Pourquoi est-ce que tu agis comme ça Malefoy...demanda-t-elle alors, incapable de tenir plus longtemps. Pourquoi n'es-tu pas en train de me crier à quel point je suis horrible d'avoir gâché ta vie ? Tu es tellement...doux, parfois. Et d'un coup tu vas te mettre à me rappeler à quel point tu me détestes pour ce que je t'ais fais. Je suis perdue...
Drago souffla longuement, comme préparé à aborder enfin un sujet longtemps repoussé. Il se leva lentement, puis tourna le dos à la jeune femme pour contempler le feu de cheminée qui donnait l'impression de brûler toujours plus fort au lieu de s'éteindre avec le temps.
- Tu dois sûrement me prendre pour un fou...ricana-t-il au bout d'un moment.
Hermione se tut, patiente.
- C'est vrai, poursuivit-il d'une voix si basse qu'elle dut tendre l'oreille pour entendre. Je ne donne pas de nouvelles pendant un an - en même temps je savais que tu n'en voulais pas -, je débarque dans ta vie et tout en te faisant comprendre que je tiens toujours à toi, je te reproche sans arrêt ce que tu m'as fais par le passé...
Il se retourna soudain vers elle, l'air énervé :
- Je t'en tellement voulu Hermione ! dit-il d'une voix douloureuse. Si tu savais à quel point j'ai tenté de t'oublier ! Le jour du départ à Poudlard, j'étais tellement sûr que tu viendrais, que tu ne me laisserais pas tomber et que tu m'avouerais toute la vérité ! Blaise me disait de laisser tomber mais moi, comme un idiot, je m'accrochais à l'image de toi avant que tu ne partes vers le train, tu paraissais si bouleversée ! Si émue par ce que je venais de te proposer ! Je n'ai compris que bien plus tard, en me tourmentant sur le passé, que c'était simplement dû au fait que ce crétin de Donovan venait de te tromper, et moi j'ai tout rapporté à moi comme d'habitude...
Hermione secoua instinctivement la tête pour le détromper mais il fit un petit geste de la main pour lui demander de le laisser finir :
Après tout, cela m'apparaissait logique quand je repensais aux horreurs que je t'avais infligées pendant sept ans, tout ce temps passé à t'insulter et à te rabaisser toi et ta famille. Il était évident que tu te venges un jour, tu as même attendu sept années pour le faire alors que d'autres auraient été moins patients. C'est d'ailleurs cette faculté à encaisser tout ce que je te lançais à la figure sans me renvoyer la balle qui m'a intrigué chez toi, je ne concevais pas que l'on puisse être aussi passive à mes répliques, et de ce fait je me suis accroché à toi. Quand j'ai compris que tu ne viendrais pas après le départ du Poudlard Express, je me suis juré de t'oublier et de faire une croix sur tout ce que j'avais vécu avec toi, ou plutôt sur tout ce que j'avais cru vivre. Mais voilà, chaque jour que je passais était un cauchemar, ton image me hantait au point que j'avais envi de m'écraser le crâne contre un mur pour te sortir de ma tête ! Je suis resté des jours entiers sans rien avaler, des nuits entières sans dormir à me remémorer comment j'avais pu tomber aussi bas. Je pensais que le temps t'effacerais mais c'est l'effet inverse qui se produit : chaque jour nouveau mon envie de venir te rejoindre me consumait. Seulement j'avais fini par accepter le fait que tout n'avait vraiment été que comédie, je me faisais lentement à l'idée que tu t'étais réellement vengé de moi et que tu m'avais déjà classé dans le souvenir « Malefoy vieil ennemi de Poudlard », et non comme amant. Me dire que j'avais été le seul à ressentir cet amour durant tout ce temps, à vivre notre histoire avec un tel bonheur me rendait complètement malade. Je me sentais si stupide d'avoir en quelques sortes accentué mon propre malheur à cause de ma naïveté ! Mais Blaise était avec moi, et c'est grâce à lui que je suis encore en vie aujourd'hui...
Il s'interrompit un moment, repensant sûrement à son ami dont Hermione ignorait totalement le destin.
- Il a essayé de m'aider à me faire une raison, reprit-il plus calmement, mais pour moi c'était perdu d'avance. J'ai suivis son conseil et j'ai tenté de reprendre ma vie d'avant. Cependant c'était impossible pour la simple raison que je n'étais plus le même, j'étais complètement changé. Blaise ne me comprenait pas : « Elle est canon celle-là Drac' ! » me répétait-il tout le temps. « Regarde-là ! Non tu ne l'as pas regardée, t'as à peine levé la tête te fou pas de moi ! ». Il m'en a présenté des très bien, mais elles avaient toutes le même problème...elles n'étaient pas toi. Je te détestais pour m'avoir condamné à une vie de souffrance ! Pour m'avoir ôté toutes chances d'être à nouveau heureux un jour ! Pour m'avoir fait prisonnier de toi à jamais... Au début ma peine était si forte qu'il n'y avait pas de place pour la haine. Néanmoins, plus je m'enfonçais dans ma dépression, plus des idées noires m'envahissaient...J'avais besoin de détruire, de tuer, de me venger de tout mon mal mais je n'envisageais même pas de te faire souffrir toi, je n'y serais pas arrivé. Rejoindre Voldemort s'offrait à moi comme une véritable délivrance, défoulant ma haine contre des innocents, tuant à jamais cet imbécile de Drago faible qui était tombé amoureux de toi, remplacé par celui que j'avais toujours été, né pour le mal. Mais une fois de plus Blaise était là...
Ses mâchoires se contractèrent sous l'effort de retenir ses larmes, et c'est d'une voix emplie d'émotion qu'il enchaîna :
- Il m'a empêcher de le rejoindre, me répétant sans arrêt que je valais beaucoup mieux que ces Mangemorts contraints à une vie de servitude. Comme je ne l'écoutais pas, il a utilisé mon point faible : il m'a dit que ce n'était pas ce que tu aurais voulu. Mais de qui parlait-il ? Lui-même m'assénait sans arrêt des mêmes phrases, me rabâchant que celle pour qui j'étais en train de gâcher ma vie n'existait pas...Puis il est mort, tué par des Mangemorts. Ça m'a ouvert les yeux : la vie est trop courte pour que je la passe à me morfondre sur un amour qui ne serait jamais réciproque. J'ai fini par comprendre que pour être heureux, il me fallait simplement accepter l'idée de t'aimer, cesser de tenter de refouler des sentiments vraisemblablement ancrés en moi, dont je ne pourrais jamais me débarrasser. De toute façon je ne retrouverais jamais une femme, tu restais celle de ma vie alors pourquoi se battre à changer ce qui ne pouvait changer ? Je me suis autorisé à penser à toi aussi souvent que j'en avais envi, autant dire tout le temps, à prononcer ton prénom qui autrefois me brûlait la langue, à sourire sans retenue aux souvenirs de Poudlard. Je n'avais plus mal. Le fait d'accepter la réalité a été une délivrance et je pensais conserver cet état d'esprit en te revoyant.
Il marqua une pause, puis plongea enfin son regard gris dans celle qu'il aimait :
- J'avais tort, déclara-t-il. Te revoir a été bien plus douloureux que je ne le pensais. Au lieu de soutenir tous mes efforts pour regarder la vérité en face, ton visage exprimant colère, gaieté, angoisse, amusement m'a ramené à de nombreux souvenirs contre lesquels je me pensais immunisé ; ils redevinrent douloureux et bien distincts, abandonnant le statu de rêve lointain à celui de cauchemar bien réel, prêt à me briser à nouveau alors que je venais juste de me rassembler. Je ne te raconte pas tout ça pour que tu me prennes en pitié Hermione, simplement pour que tu comprennes que si je reparle de notre passé avec aisance, c'est juste parce que j'ai réussi à me faire une raison sur notre séparation. Les quelques fois où je te reproche ce que tu as fait, sont des moments où je me laisse aller à mon ancienne haine qui reprend le dessus sur moi, et dont je me sens terriblement coupable après...
Un long, très long silence suivit les paroles du jeune homme. Hermione ressentait trop de choses à la fois pour mettre la main sur sa véritable humeur. Elle regardait le sol, assimilant lentement des révélations qui détruisaient peu à peu toutes les illusions sur lesquelles elle tentait de bâtir une nouvelle vie : elle ne pouvait vivre sans Drago Malefoy, et penser avoir pu y réussir lui apparaissait complètement absurde. Comment avait-elle osé prétendre qu'il n'avait pas souffert autant qu'elle ? Il avait ressenti exactement les mêmes choses, cette envie de mourir parce que le visage que vous aimez hante chacune de vos pensées, ces journées sans rien manger, ces nuits d'insomnie, cette solitude malgré la présence d'un ami...
Sans s'en rendre vraiment compte, les larmes défilèrent une à une sur ses joues, le remord l'étouffant un peu plus chaque seconde. Elle sentit Drago s'approcher et s'asseoir sur l'accoudoir, avant de la prendre doucement dans ses bras, avec tout de même une certaine raideur. Hermione laissa sa tête tomber contre son torse, au diable sa conscience et la douleur de son bras qui sortait peu à peu d'un sommeil profond.
- Je ne voulais pas te faire pleurer, chuchota-il. Je ne pensais pas que cela t'importait vraiment, je croyais que tu considérais comme une victoire de...
Hermione éclata en sanglots bruyants, interrompant ses paroles qui ne faisaient qu'aggraver les choses.
- Je suis désolée ! pleura-t-elle. Je m'en veux tellement ! Pardonne-moi je t'en prie...
Drago resta immobile, désorienté. Il ne s'attendait vraiment pas à ce que Hermione regrette ses actes, loin de là. Il s'était tellement persuadé que sa vengeance humiliante lui avait rapporté satisfaction, que la voir dans cet état le perturbait.
- Hermione je viens de te dire que je ne t'en veux plus. Tout ça c'est du passé, et je suis prêt à te regarder vivre ta vie avec Richard si c'est ainsi que tu es heureuse.
Les sanglots de la jeune femme redoublèrent. Elle renifla bruyamment et leva vers lui ses yeux inondés de larmes. Son bras lui faisait de plus en plus mal, devinant ses envies ardentes de révéler la vérité pour ne plus souffrir. Mais elle avait clairement compris dans le discours de Drago qu'il ne pourrait vivre sans elle. Si la jeune femme mourait, son âme sœur n'y survivrait pas, et vice-versa. Divulguer la vérité et trahir le serment inviolable qui la punirait de sa vie, revenait à tuer l'homme qu'elle aimait. Résolue une fois de plus à faire ce qui était le mieux pour Drago, Hermione ferma les yeux et lâcha un nouveau mensonge dont elle en avait fait son venin :
- Le jour même où je t'ai humilié, dit-elle de sa voix brisée, je m'en suis aussitôt voulu. Tout le temps qu'a duré le défi que je me suis lancé, je pensais savourer ce fameux soir où j'exposerais ma victoire sur le Prince des Serpentards devant tout le monde. J'ai été aveuglée par mon désir de vengeance, mais lorsque j'ai compris ta peine au point que tu refusais de me croire, je me suis rendu compte de ce que j'avais fait ; quelque chose qui ne me ressemblait pas du tout. J'avais détruit une vie. Si j'avais su à quel point tu tomberais amoureux, si j'avais su avec quelle force tu t'accrocherais à moi, je n'aurais jamais fait ça. Je me suis maudite pour mon immaturité, la culpabilité me rongeait chaque jour et si je pouvais revenir en arrière crois-moi je...
Il posa un doigt sur ses lèvres, ne souhaitant en entendre d'avantage. Alors c'était donc ça, le puzzle de son passé venait de trouver ses pièces manquantes. Car malgré le fait que, pendant tout ce temps où il avait cogité sur son histoire en se faisant une raison sur sa naïveté et son amour qui n'avait en fait jamais été partagé, quelques épisodes de son passé restaient assez flou et sans explication. Par exemple, pourquoi n'avait-elle pas crié sa victoire juste après son discours devant le collège ? Pourquoi s'était-elle enfuie en courant près du lac le soir même, des larmes aux yeux qu'elle avait tenté de lui cacher ? Pourquoi avait-elle refusé de l'affronter en face dans leur salle commune, alors qu'il lui demandait des explications ? Tous ces souvenirs qui ne collaient pas du tout avec le reste, qui l'empêchaient à chaque fois de se résoudre à accepter qu'elle ne l'aimait pas, venaient enfin de trouver une réponse : elle s'en voulait affreusement. Elle n'avait jamais retiré aucune fierté de ses actes, comme le lui avait dit Blaise, la foule ce n'était pas son fort et avoir ainsi attirer l'attention sur elle l'avait déstabilisée. Il aurait du le deviner, Hermione était une fille bien trop timide, honnête, généreuse et juste pour tirer satisfaction de ce qu'elle avait fait. Il devait vraiment l'avoir fait beaucoup souffrir pour qu'un tel désir de vengeance l'aveugle sur ses principes et sa bonne éducation, et savoir cela le dégoûtait de lui-même. Il méritait ce qui lui arrivait : c'était à son tour de souffrir à présent...
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La nuit était noire à présent, mais il faisait beaucoup moins froid qu'à Londres, étant donné que la Nouvelle Zélande se trouvait être en été contrairement à l'Angleterre qui entamait l'hiver. Néanmoins la température restait basse et Hermione fouilla dans son sac avant de dégoter un gros pull qui lui donnerait sûrement l'air d'une grand-mère.
- Très jolie avec ce pull, commenta Drago qui venait d'entrer dans la chambre.
- Tu peux rigoler Malefoy, mais tu feras moins le fier dehors lorsque tu te rendras compte que ton beau manteau n'est pas assez chaud !
- Je lui ai jeté un sort pour qu'il me chauffe en permanence. C'est incroyable comme les sorciers qui grandissent avec des moldus ne pensent jamais à utiliser la magie pour leurs besoins personnels !
Hermione accepta la remarque sans rien dire, dans la mesure où il ne pensait pas à mal et qu'il n'avait pas forcément tort.
- Et j'étais sérieux, à propos du pull, ajouta-t-il.
Hermione sourit. Il lui était beaucoup plus facile à présent d'accepter ses compliments puisqu'elle les savait désormais sincères et ne craignait plus une quelconque ironie de sa part.
Drago explosa soudain de rire et Hermione se retourna vivement vers lui en espérant de tout cœur qu'il n'ait pas regardé à l'intérieur de son sac. Trop tard. Le jeune homme avait la main les deux gros ognons qu'Hermione avait jugé utile d'emmener.
- Tu n'es pas sérieuse ! s'esclaffa-t-il.
Elle lui reprit des mains et les fourra aussitôt dans son sac avant de lui lancer un regard noir. Elle se doutait bien qu'ils ne serviraient à rien mais n'avait pu s'empêcher de les emmener.
- Je pourrais toujours leur jeter à la figure s'ils nous poursuivent, grogna-t-elle en essayant de se justifier.
Il rigola de nouveau :
- S'ils nous poursuivent, tu n'auras même pas le temps de penser à leur jeter qu'ils seront déjà sur toi !
Hermione, plus terrifiée qu'énervée, suivit Drago à l'extérieur.
- Sans vouloir te vexer Malefoy, dit-elle alors qu'il descendait le premier la grande échelle. S'ils sont si forts que ça, à quoi tu peux bien me servir en tant que garde du corps ?
- Tu oublies la magie Granger, elle est plus forte que leur rapidité. Ils nous craignent pour cela, et n'oserait jamais attaquer un sorcier à moins de cinq.
Hermione se sentit quelque peu rassurée par ces paroles, et entreprit à son tour de descendre le chêne. Une fois en bas, Drago la prit par la main et avança sans lui laisser le temps de réagir.
- Je suis plus rassuré ainsi, expliqua-t-il quand même.
Hermione le cru car il serrait sa main si fort qu'elle sentit à quel point il angoissait à l'idée de l'égarer. Cette situation lui rappela Poudlard, pendant le peu de temps où ils sortaient ensemble, lorsqu'ils se tenaient fièrement la main devant le regard ahuri des élèves. Elle se sentait si sereine à son contact, ayant l'impression que rien ni personne ne pouvait l'atteindre tant qu'il serait à ses côtés. Hermione profita de la nuit noire pour sourire sans crainte d'être aperçue. Elle ne savait ni trop où ni trop comment cette première rencontre avec les vampires allait se passer, mais l'angoisse qui somnolait au fond d'elle n'arrivait pas à accéder à la réalité, bercée par le bonheur d'être avec lui.
Alors qu'il marchait depuis une dizaine de minutes, Drago s'arrêta et, au grand regret de l'ancienne Gryffondor, lâcha sa main.
- C'est ici, dit-il.
Il lui désigna un tas d'épais buissons épineux qui surplombait une bonne partie de la colline ; entassés les uns contre les autres, ils formaient une barrière idéale pour se cacher. Ils s'assirent en silence sur l'herbe humide et Hermione sortit sa baguette.
- Que faisons-nous à présent ? chuchota-t-elle.
Pour toute réponse, Drago sortit également la sienne et parut se concentrer un instant avant de lancer :
- Fascinatum !
De sa baguette magique jaillit alors une gigantesque forme noire qui bondit au-delà des buissons. Lorsque Hermione rouvrit les yeux, elle distingua alors une magnifique panthère noire qui s'éloignait à petits pas rapides vers la plaine voisine.
- Tu...tu as fait apparaître un animal ? s'exalta-t-elle. Je n'ai pas rêvé, ce n'était pas qu'une illusion ?
- Non c'était une véritable panthère, assura-t-il fièrement.
- Par Merlin ce sortilège est impossible à réaliser ! Je veux dire, je ne suis même pas sûr que Mc Gonagall elle-même saurait faire apparaître un être vivant ! Je me souviens avoir lu en cinquième année un livre de Carl Oates, un philosophe américain ; il disait que le jour où l'homme saurait faire naître la vie, la fin du monde serait proche, car tout le monde se mettrait à faire apparaître des êtres humains qui plus tard seraient malheureux et se retourneraient contre...
-Eh Hermione ! l'interrompit Drago. Ne t'emballes pas, la panthère disparaîtra dans quelques heures.
- Oh, souffla celle-ci, mal à l'aise.
- En fait si ce sort est si facile à pratiquer pour moi, c'est parce qu'il relève de la magie noire.
Hermione aurait du s'en douter. A force de considérer son âme sœur comme la perfection, elle avait tendance à le surestimer !
- En réalité c'est un Portoloin, expliqua-t-il. Voldemort a inventé ce sort quand j'étais tout jeune mais n'y trouvait pas grand intérêt, tandis que moi je ne l'ai jamais oublié. La panthère va nous servir d'appât : les vampires chassent en solitaire, et se nourrissent de félins ou même d'ours la plupart du temps. Seulement, depuis que les sorciers les ont banni ici, la nourriture manque et je suis presque certain qu'il ne se passera pas deux heures avant que l'un deux ne repère la délicieuse odeur d'une nourriture rare. Une fois que le vampire aura mordu sa proie, il se retrouvera directement transporté ici, ingénieux n'est-ce pas ?
Et comment ! Hermione se sentait ridicule à côté de lui et de ses incroyables connaissances. Certes, c'était de la magie noire, mais son titre de miss je-sais-tout lui était définitivement retiré ! Néanmoins, elle était assez intelligente pour deviner que cette méthode d'approche ne mettrait pas forcément le vampire de bonne humeur...
- Hum, Malefoy ? Loin de moi l'intention de contester tes prouesses magiques mais, ne crois-tu pas que nous risquons de passer pour des ennemis en agissant ainsi ? Tu utilise un appât, ce qui revient à tendre un piège et d'après ta description des vampires, j'ai le sentiment que ce sera très, mais alors très mal pris, je me trompe ?
- Tu as entièrement raison, dit-il en souriant. Le problème, c'est qu'il n'y aucun moyen, et j'entends par là non risqué, de trouver un vampire. Ce n'est pas le genre de créature qui prend sur rendez-vous si tu vois ce que je veux dire. Elle est rapide, discrète, agile et aucun œil humain ne serait capable de distinguer ses mouvements, encore moins la nuit. Le seul moyen d'attirer son attention est de le piéger, et sous l'effet de la surprise, nous aurons le temps de le neutraliser avant qu'il ne déguerpisse à la vitesse de la lumière.
Hermione ne répondit rien, cependant elle n'était pas vraiment d'accord. Elevée dans un esprit de paix et d'entente, elle avait toujours été convaincue qu'il existait bien des solutions d'attirer l'attention de quelqu'un sans utiliser la force. Elle repensa notamment à la fâcheuse habitude qu'avait eu Drago de l'entraîner de force là où il le désirait, et elle s'était montrée si ferme sur cette manie détestable qu'il ne l'avait plus jamais forcée à sa volonté.
- Ce sont des vampires, Hermione ! s'exclama Drago qui semblait remarquer son désaccord. Quelle que soit la façon dont tu les approches, leur haine envers les sorciers reste la même !
- Mais leur réaction sera différente ! Si nous essayions de les approcher avec respect nous aurons déjà plus de chances de...
- J'y crois pas ! lança-t-il. Tu te mets à trouver du bon dans les vampires ! Hermione, je sais que tu es d'une bonté quelque peu hors norme, mais là c'est carrément de l'aveuglement !
- On me traitait aussi de folle à Poudlard quand j'affirmais qu'il y avait du bon en toi ! Mais regarde aujourd'hui, à quel point je leur ai prouvé que j'avais raison !
Le silence tomba, lourd. Drago baissa les yeux, tandis que Hermione le regardait fixement. Il l'aimait tant pour ça, pour cette détermination à croire que tout pouvait devenir rose lorsqu'on le voulait vraiment. Il n'osa pas la faire redescendre sur terre, elle comprendrait bien assez vite qu'il existait des âmes tellement plus noires que la sienne qu'elle ne les changerait jamais malgré toute la volonté du monde...
Ils attendirent ainsi pendant plusieurs minutes, minutes qui se transformèrent en heures...Le froid avait raidit les membres de la jeune lionne et c'est sans s'en rendre vraiment conte qu'elle vint chercher de la chaleur contre son garde du corps. Celui-ci n'avait pas baissé sa garde une seconde depuis leur arrivée, et se trouva bien bête de constater qu'elle était gelée seulement maintenant. Il s'empressa de lui jeter un sort de réchauffement et fut satisfait de la voir se détendre. Il sentait qu'elle luttait contre le sommeil et l'envie de s'écrouler contre son épaule.
- Tu devrais aller dormir un peu, suggéra-t-il au bout d'un moment. Je reste ici, va te mettre au chaud.
- Ne dis pas n'importe quoi, répondit-elle en vacillant dangereusement. J'ai dormi tout l'après-midi je ne suis pas fatiguée...
Un long bâillement vint confirmer ses paroles mais Drago n'insista pas, trop heureux de la sentir se réchauffer contre lui.
- Malefoy...
- Hum ?
- Crois-tu que les Mangemorts ont conscience du mal qu'ils font ?
Drago se raidit, puis se redressa aussitôt avant d'essayer de lire de l'humour dans le regard de la jeune femme.
-Hermione...commença-t-il, incertain.
- Non je ne suis pas en train d'essayer de trouver du bon chez les Mangemorts ! précisa-t-elle avec une pointe d'agacement.
- J'avoue que tu m'as fait peur là, pourquoi poses-tu des questions pareilles ?
Elle sembla hésiter un moment, puis finit par répondre :
- L'autre soir, quand je me suis faite attaquée...
Comme elle s'y attendait, Drago pinça les lèvres, réticent à un souvenir qu'il désirait effacer. Mais elle poursuivit tout de même :
- Je pense particulièrement à Yaxley, la façon dont il m'a regardée ! Avec ces yeux si curieux...
- Qu'est-ce que tu essayes de me dire Hermione ? s'impatienta Drago qui sentait la colère prendre le dessus à l'évocation d'un nom qui le rendait fou de rage.
- Je me demandais simplement s'il était différent des autres. C'est dur à expliquer, mais tu aurais vu la façon dont il parlait de moi ! Comme si j'étais un vulgaire objet, incapable de ressentir quoi que ce soit si ce n'est de la peur ! Il me pensait faible et née pour la soumission ! Les autres Mangemorts veulent se débarrasser des Sang-de-Bourbe...
- Hermione ! gronda Drago, réellement en colère cette fois.
Cette dernière fut amusée de constater qu'il ne supportait plus cette appellation qu'il avait pourtant souvent utilisée par le passé. Elle continua comme si de rien était :
- Ils veulent se débarrasser des gens comme moi par simple désir de servir Voldemort ! Mais avant son retour, ils n'ont jamais été dérangés par notre présence ! Ils osaient nous parler et nous toucher ! Mais Yaxley, ce Mangemort est différent, oui il l'est.
- C'est le plus cruel de tous, cracha Drago.
- Parce qu'il croit vraiment que nous sommes des monstres ! s'émerveilla Hermione.
Le jeune blond paraissait complètement ahuri, incapable de comprendre son enthousiasme.
- Il ne me touche pas, continuait-elle. Ni ne me parle, parce qu'il est persuadé que je suis inhumaine ! Il s'est même demandé comment tu avais pu me porter de l'intérêt, il était si curieux de comprendre pourquoi tu étais attaché à moi !
Cette conversation semblait l'avoir réveillée aussi bien qu'une dizaine de café et Drago souffla d'exaspération :
- Et en quoi c'est bien, tout ça ?
- Tu ne comprends pas, répliqua-t-elle. Ce n'est pas une question de bien ou de mal ! Yaxley est convaincu de faire le bien ! Tu te rends compte ? Il croit réellement aider le monde en éliminant ce qu'il considère comme des monstres, et c'est pour cela qu'il ne saisit pas ce qui peut bien t'attirer chez moi !
- Admettons, grogna Drago. Cela fait de lui quelqu'un de bon selon toi ?
Elle regarda ailleurs et respira un grand coup, comme pour se calmer :
- Non souffla-t-elle. Bien sûr que non. Mais cela fait de lui quelqu'un de moins mauvais.
Drago secoua la tête comme si elle était devenue folle. Il se ferait un plaisir de lui montrer lui, à son vieux pote Yaxley, comment il était possible de laisser charmer par la créature qui se tenait assise à ses côtés : c'était tout simplement un morceau d'ange tombé sur terre...
Un rugissement effroyable les fit sursauter. Drago saisit aussitôt sa baguette et se leva d'un bond, repoussant Hermione à terre. La panthère, dont le pelage noir était noyé de rouge par la morsure, gisait au sol. Drago s'élança au dessus des buissons et lança le sortilège de paralysie. Mais trop tard. Il eut tout juste le temps d'apercevoir briller deux pupilles rouges dans la nuit avant que son sort ne vienne exploser contre l'animal mort qui disparût en fumée.
- Merde ! hurla Drago, hors de lui. Merde ! Merde ! Merde ! C'est un Sang-Pur !
Il haletait de rage. Il avait complètement raté son attaque et maintenant Merlin savait où il était ! S'il prévenait sa colonie, Hermione et lui n'auraient plus aucune chance de les retrouver !
Son cœur s'arrêta soudain de battre : Hermione !
Drago fit volte face et manqua de s'effondrer devant le spectacle qu'il redoutait tant : deux longues dents blanches étincelaient à quelques centimètres du cou de la jeune femme. Cette dernière, crispée, semblait retenir sa respiration de peur, les yeux exorbités de terreur, fermement emprisonnée par deux mains blanches et aussi froides que la glace.
- Lâche ta baguette, sorcier ! ordonna la voix mielleuse du vampire.
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