Chapitre 20

Une odeur d'effervescence circulait dans le château, tandis que la date fatidique approchait. Leur Noël avait été plutôt calme. Ils avaient été autorisé à faire un tour chez les Potter avant de retourner à Poudlard pour la pleine lune, sans Peter. Euphemia les avait couvert de cajoleries et d'attentions, pour leur plus grand plaisir, et Fleamont leur avait préparé ses fameux biscuits à la cannelle. Ils avaient offert à chacun des jeunes hommes un vinyle différent, qu'ils étaient allés choisir dans les bacs des magasins Moldus de Londres. Ils n'y connaissaient pas grand-chose, mais le vendeur les avait conseillé et leur avait mis entre les mains des classiques immanquables. Remus hérita de Bowie, James des Beatles et Sirius de The Cure. Ils leur donnèrent même un enregistrement des Stones, à faire passer à Peter.

- C'est Peter qui va être content, lui qui râle parce qu'on écoute tout le temps la même chose ! dit James, des étoiles plein les yeux.

Remus et Sirius étaient toujours un peu étonnés que les parents de James s'occupent d'eux comme de leur propre enfant, alors ils bafouillèrent simplement des remerciements émus.

Les quatre garçons avaient convenus de s'offrir leurs cadeaux de Noël au nouvel an, lorsqu'ils seraient tous ensemble. La pleine lune s'était passée aussi bien qu'une nuit de transformation pouvait se passer. Remus avait profité des vacances pour rattraper quelques heures de sommeil et avait dormi presqu'une journée entière après. James et Sirius en avait profité pour s'entrainer au Quidditch malgré le froid. Ils étaient unanimes sur le fait qu'ils ne pouvaient pas se permettre de perdre la coupe alors que c'était leur dernière année.

Sirius avait aussi reçu un paquet emballé grossièrement dans du kraft. Il avait hésité à l'ouvrir, mais il avait finalement décidé que tout ce qui parvenait chez les Potter, le jour de Noël qui plus est, avait quelque chose de miraculeux. Dedans, il avait trouvé un livre, pas aussi imposant que les manuels de cours où les grimoires abrités par la bibliothèque de Poudlard. Il était blanc, pas très épais, et le titre attira tout de suite la curiosité de Sirius. « Ne tirez pas sur l'oiseau moqueur ». Intrigué, Sirius avait ouvert le livre à la première, pour découvrir quelques mots griffonnés d'une écriture sale qu'il reconnut comme celle de son oncle.

Sirius,
Je passais chez un bouquiniste sur les quais de Tamise, et j'ai pensé à toi en voyant ce livre. Je doute qu'il y ait quelque autre ouvrage chez tes parents que la généalogie complète de la famille Black en sept tomes, alors il est temps que tu commences à te constituer ta bibliothèque personnelle. Ce livre a été écrit par un Moldu, mais je crois que tu y verras une ressemblance troublante avec nous autres. Pour le meilleur ou pour le pire.
Joyeux Noël, j'imagine.
A.

Alphard avait beau être un peu bourru et largement désillusionné, Sirius avait toujours adoré ses cadeaux. Ce n'était pas bien difficile de faire mieux que les Black en terme de personnalisation, mais Alphard savait taper juste et était doté d'une sensibilité qu'il cachait soigneusement mais qui le rapprochait inlassablement de Sirius. Le jeune homme avait serré l'ouvrage contre son coeur un sourire aux lèvres, sachant déjà qu'il y trouverait le réconfort de savoir que quelqu'un pensait à lui, parfois, quelque part. 

Mais à présent, Noël était passé, et ce qu'ils attendaient tous approchait dangereusement. Le jour fatidique arriva, et les septièmes années de Gryffondor furent pris dans une sorte de frénésie préparatrice.

- Personne ne touche à mes cheveux à part Sirius, est-ce que c'est clair ?! hurla Marlene après qu'un troisième année lui ai fait l'affront de frôler une de ses mèches en passant.

Le jeune homme s'avança avec un air solennel pour tresser les longs cheveux blonds de la jeune fille.

- James, t'aurais pas une chemise à me prêter ? s'inquiéta Peter. Ma mère a oublié de les laver, et je n'en ai plus une seule propre.

- Ah, quelle bande de tête en l'air, vous les Pettigrow ! se moqua gentiment James. Donne moi tes chemises, je vais les ensorceler pour qu'elles soient comme neuves.

- Oh, merci Prongs ! Tu penses que c'est grave si j'y vais comme ça ? Je veux dire, ça ne fait pas trop négligé ? J'ai l'impression que tout le monde a sorti le grand jeu...

- Ah, ça, c'est sûr qu'on se prend au sérieux. Mais tant que tu te sens bien dans ta tenue, c'est l'important, Pete.

- Tu vas y aller comment, toi ?

- À pieds, j'imagine. On ne peut pas transplaner à l'intérieur de Poudlard, tu savais ?

- James... soupira le jeune homme.

- Oui, Peter ? C'est moi, en personne.

Pour toute réponse, il poussa un grognement et s'éloigna pour aller chercher ses chemises.

Remus ne s'inquiétait pas trop, pour sa part. Il n'avait jamais accordé beaucoup de crédit à son apparence, et heureusement d'ailleurs, sinon il aurait été souvent déçu. Il avait prévu de porter un des vieux costumes de son père. Il faisait un peu vintage, mais pour être tout à fait honnête, il trouvait qu'il lui allait bien. Il lui donnait un petit côté élégant, ce dont Remus n'avait pas du tout l'habitude. Un peu d'élégance ne ferait de mal à personne, pensait-il. Il n'avait pas pensé à Sirius qui eut quasiment le souffle coupé en le voyant.

- Rappelle moi pourquoi tu ne t'habilles pas comme ça tous les jours ? demanda-t-il sans pouvoir détacher ses yeux de Remus.

- Parce que si tu le voyais tous les jours, ça perdrait tout son charme, répondit-il avec un sourire timide. Ça... te plait ?

- Tu rigoles ? Il devrait y avoir une loi qui empêche les gens d'être aussi beaux. Quoique, non, je ne voudrais rater ça pour rien au monde.

Il plaqua Remus contre le lavabo de la salle de bain, jeta un coup d'oeil à la porte et l'embrassa avidement, jalousement. Il ne voulait pas qu'il oublie qu'il était à lui. Parce que, si tout le monde ne tombait pas amoureux de Remus ce soir, Sirius n'y comprenait plus rien. 

Mais d'ailleurs, Sirius n'y avait jamais compris grand-chose. Ç'avait été dur de regarder les garçons, et de réaliser qu'il les regardait vraiment, pas comme les autres, de comprendre que c'était les filles qu'il aurait du aimer et qu'il y avait quelque chose qui était cassé chez lui. Il avait eu mal quand il avait compris qu'il devrait toujours se taire, que ces choses là, ça ne se disait pas, et que tout le monde agissait comme si ignorer leur existence les ferait disparaitre. Et pourtant, année après année, Sirius avait été ignoré, il s'était ignoré, et il existait toujours bel et bien. Malgré tout. Grandir en sachant qu'il y avait quelque chose qui n'allait pas chez lui, même si personne ne lui avait jamais dit, ou plutôt même si tout le monde lui avait toujours répété avec les regards, les gestes brusques et les pincements de lèvre, ça ne l'avait jamais quitté. Ces choses-là, ça ne vous quittait jamais. Mais ça se conjurait, comme des malédictions. Ça se conjurait avec les caresses de Remus, les sourires de James, les gestes affectueux de Peter. Ça se conjurait en pensant au futur qui serait forcément mieux que le passé, puisqu'il ne pouvait pas être pire.

- Allez, Sirius, il faut qu'on y aille.

- Tu me manques déjà.

- Je suis là.

- Je sais.

Ce n'est pas assez, pensa-t-il, mais il ne dit rien. Ce n'était pas à Remus de l'entendre, mais au reste du monde.

Chez les filles aussi, le dortoir était secoué d'une grande agitation.

- Lily ! hurla Mary. Il FAUT que tu fasses quelque chose pour mes cheveux ! Je ne peux pas sortir comme ça !

- J'arrive, répondit la jeune fille d'un ton calme. Je finis ceux de Dorcas et je suis à toi.

- Vous aimez bien cette couleur ? demanda Marlene qui étudiait des fards à paupières . Ça fait pas trop flashy ? Celle-là, sinon ?

- Mar, flashy, c'est ta marque de fabrique, la rassura Dorcas. Le bleu, c'est très bien.

- Mouais, t'as raison.

- Évidemment que j'ai raison.

- Mary, tu pourras me prêter ton eyeliner ? demanda Lily. J'ai envie de tester un truc ce soir.

- Oh là là, Lily, j'ai hâte de te voir, tu vas être incroyable !

- Comme vous toutes, les filles.

Et puis, ce fut le moment. La tour d'Astronomie était déjà bien remplie lorsque les jeunes Gryffondors arrivèrent. Marlene avait revêtu une courte robe dorée à paillettes, qui attirait tous les regards (comme si elle-même ne suffisait pas déjà). Elle avait finalement mis le fard à paupières bleu pailleté recommandé par Dorcas qui soulignait ses yeux. Cette dernière quant à elle, avait passé un débardeur noir dont les bretelles formaient des croisillons complexes dans son dos et un pantalon noir ainsi que des bottes brillantes (sur insistance de Marlene). Mary s'était décidée pour un top décolleté et une jupe plissée qui produisait un effet saisissant sur les garçons de septième d'année, d'après leurs yeux écarquillés. Elle était toujours célibataire, mais aimait bien flirter, alors il n'était pas rare qu'on la voit avec un élève qui tentait sa chance. Et apparemment, ils étaient nombreux ce soir à vouloir être l'élu de son coeur. Lily, pour finir, avait choisi une robe vert d'eau qui tombait tout en douceur le long de ses bras, puis de sa taille. La couleur allait remarquablement bien avec ses cheveux. Comme promis, elle avait également un trait d'eyeliner audacieux qui mettait ses yeux en valeur.

Ce soir-là, elles laissèrent un souvenir durable à n'importe qui les ayant aperçus. Leur quatuor était parfaitement équilibré entre fougue de jeunesse et élégance des adultes qu'elles étaient en train de devenir, et si les employés du Ministère les avaient vus, le sourire aux lèvres et l'étincelle dans le regard, mains dans les mains, ils auraient peut-être pensé que le futur serait un peu plus lumineux, puisqu'il les aurait. Les quatre gryffondors donnaient l'impression qu'elles n'avaient peur de rien, ce qui était faux bien sûr, ou en tout cas qu'elles auraient toujours l'audace nécessaire pour combattre leurs angoisses, ce qui était fondamentalement vrai.

Les garçons s'étaient déjà regroupés autour de Mary, tandis que Marlene avait entrainée Dorcas sur la piste de danse, ce qui laissa Lily, qui avait décliné l'invitation à danser de ses amies, relativement seule. En vérité, elle cherchait quelqu'un, sans trop se l'avouer. Elle voulait voir le sourire de James, son excitation et son bonheur de voir les gens être heureux en partie grâce à lui, elle voulait le voir s'amuser et profiter comme il arrivait toujours à le faire quelques soient les conditions. Mais il restait absent à la fête. Lily en profita pour parler avec quelques serdaigles avec qui elle s'était toujours bien entendue, pour remarquer que les serpentards avaient un sens du style indéniable et qu'ils étaient venus malgré leur mépris affiché pour la fête et pour boire un demi verre de jus de citrouille qui avait un gout assez étrange. 

Elle commença presque à s'inquiéter - où étaient passés les maraudeurs ? - lorsque la porte s'ouvrit avec fracas. Elle secoua la tête d'un air excédé, mais un sourire aux lèvres. Évidemment qu'ils aimaient soigner leurs entrées, ces imbéciles. Remus passa la porte en premier, son costume aussi élégant que son sourire discret. La moitié de Poudlard avait été un peu amoureuse de lui à un moment ou à un autre, mais très rare étaient les élèves qui avaient tenté quelque chose. Il semblait appartenir à un autre monde merveilleux et n'être que de passage sur cette terre. Il fut suivi de Peter, qui n'avait rien mis de vraiment spécial, mais qui avait réussi l'exploit de faire passer son uniforme pour un habit de fête en trifouillant sa cravate pour qu'elle soit à moitié dénouée, en faisant des revers nets à son pantalon et en laissant la moitié de sa chemise dépassée. On voyait l'inspiration négligée de James et Sirius, mais ce look décontracté lui allait plutôt bien. Il adressa un sourire plutôt confiant à l'assistance, ce qui était assez rare, et plusieurs furent déconcertés de constater que Peter était plutôt mignon quand il souriait. 

Enfin, vint le duo tant attendu. La foule d'élèves retint son souffle tandis que James et Sirius passaient la porte. Ils avaient choisi de s'habiller comme des rockeurs moldus, et bon sang qu'ils étaient beaux. Des jeans ouverts sur leurs chevilles, des bottes de cow boy, un blouson de cuir pour Sirius, un t-shirt déchiré à l'effigie de Bowie pour James. Même si beaucoup de sorciers connaissaient de loin la musique moldue, aucun d'eux n'auraient eu l'audace de s'habiller comme ces chanteurs qui jouaient trop fort et qui disaient des choses qui auraient fait rougir leurs grandes tantes. Alors évidemment, il fallait s'appeler James Potter et Sirius Black pour oser le faire. Et évidemment, ça leur allait incroyablement bien. Ça renforçait leur côté rebelle et puis ça leur donnait une aura, plus encore que d'habitude. C'était choquant, c'était bien trouvé, c'était inattendu, c'était Gryffondor. Remus et Peter les observèrent avec attention, pas fâchés que ce soient eux qui fassent le plus d'étincelles, puisque c'était leur rôle. Peter faillit se décrocher la mâchoire quand ils entrèrent, et en voyant le même sourire sur les lèvres de Remus, il s'écria :

- Tu savais ? Ils t'avaient dit qu'ils allaient s'habiller comme ça ? Je suis encore le dernier au courant ?

- Non, Pete, répondit-il tranquillement. Ils ne m'avaient pas dit à moi non plus. Ils ont gardé le secret jusqu'au bout. Sacré Pads et Prongs.

- Ah, ça on peut le dire, oui... confirma Peter, toujours ébahi.

Lily de son côté, n'avait pu masquer sa surprise elle non plus. À force de côtoyer les maraudeurs, elle connaissait tous les groupes de pop-rock à la mode chez les moldus (elle avait même envoyé quelques enregistrements à Petunia, mais apparemment elle n'avait pas trop apprécié), et elle en était venue à adorer leur musique aussi. Mais voir James habillé comme ses muses sur les pochettes des vinyles, c'était autre chose. Et cette autre chose faisait faire des mouvements étranges à l'estomac de Lily.

- Il est beau, hein ? remarqua rêveusement une des serdaigles avec qui elle parlait.

La Lily d'avant aurait levé les yeux au ciel et aurait nié, parce que James Potter avait déjà bien assez d'ego pour ne pas qu'en plus elle l'acclame comme les autres. Mais ce soir, c'était peut-être son étrange verre de jus de citrouille, elle dit simplement la vérité.

- Oui. Oui, il est beau.

Et comme toute la tour d'Astronomie, elle le regarda s'avancer au milieu des élèves, radieux. Et elle rit un peu lorsqu'après avoir ménagé son effet dramatique, il s'exclama :

- Maintenant la fête peut vraiment commencer.

Tous les élèves l'acclamèrent sauf les serpentards qui restaient dans leur coin, et il se fit avaler par la foule avec Sirius. Pourtant, magiquement peut-être, cinq minutes plus tard il se retrouva juste à côté de Lily qui lui sourit.

- Alors ? Qu'est-ce que t'en penses ? fit-il en se désignant d'un geste général.

- Ça... me plait bien, en fait, fit-elle puis elle faillit rougir. Enfin, j'aime bien le style que ça te donne. Un petit mélange de Freddy Mercury, David Bowie et Paul McCartney.

- Mais c'est qu'elle est connaisseuse ! On est même allés dans des magasins moldus de Londres avec Sirius pour compléter nos tenues. C'était incroyable ! Je t'emmènerais, un jour.

- Peut-être. Enfin, pour l'instant, tu as déjà un verre de retard sur moi, répondit-elle en levant le dit-verre presque vide.

- Serait-ce un défi ? Vos désirs sont des ordres, madame !

Il tendit galamment la main dans laquelle elle déposa son verre en riant, qu'il finit cul-sec.

- Je t'en ramène illico-presto un autre. Ne bouge pas !

Puis il partit avec un clin d'oeil. Et Lily pensa, quand même, il se pourrait que je sois un peu dingue de lui. Potentiellement. Il y avait une probabilité. De la piste de danse, Marlene lui fit de grands pouces en l'air qui lui firent lever les yeux au ciel mais rire franchement.

Finalement, peut-être que James avait raison, et que cette soirée allait être inoubliable. 

***

NDA : Ne sous-estimez pas le pouvoir du quatuor des filles. Elles sont aussi redoutables que les maraudeurs, et elles vous raviront votre coeur en un clin d'oeil.

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