8| Mon héritage

You've got a hold of me
Don't even know your power
I stand a hundred feet
But I fall when I'm around 

Mercy - Shawn Mendes

( À écouter de préférence avec le chapitre. )



J-25 avant Noël.

PDV Akane

Il ne neige pas aujourd'hui, pensais-je en levant la tête vers les nuages sombres qui ornent le ciel.

Le temps est à l'image de mon humeur, triste et morne, comme un miroir reflétant les émotions de mon cœur.

Ça fait plus d'une semaine que je n'ai pas vu Tora. Plus d'une semaine que l'azur de ses yeux n'a pas illuminé ma vie.

Je ne sais même pas pourquoi j'y attache autant d'importance. On ne se connaissait pas. Enfin, pas au sens où les autres l'entendent. Ce n'était qu'un inconnu, à peu de choses près.

Mais je le vois partout. Dans les flocons, sur les bancs. Dans les chats, aussi.

<< Eh, les portes sont pas ouvertes ? >>

Et dans ce foutu lycée devant lequel je dois passer tous les jours.

Je presse le pas en priant pour qu'il ne soit pas là, ou du moins qu'il ne me voie pas.

<< Attends ! >>

Je slalome au milieu des élèves qui s'interpellent. Il faut vraiment que je trouve un autre itinéraire pour aller à Yuei.

<< Attends, je te dis ! >>

Une main attrape brusquement mon poignet et me retiens en arrière. Je me retourne pour croiser le regard de deux pupilles glacées, couleur d'argent sans vie.

<< Putain, t'es sourde ou quoi ? Je t'appelles depuis tout à l'heure ! >>

- Désolée...

L'excuse sort avant que je puisse m'en empêcher. Non, pas désolée, pas du tout même. Je voudrais lui dire de me lâcher, que je dois y aller, qu'il serre trop fort, mais les mots restent coincés dans ma gorge tandis que mes yeux se baissent automatiquement vers le sol.

<< Eh, détends-toi princesse, je veux juste discuter...>>

Je me tends en entendant ce surnom qui n'a rien à faire là, dans la bouche de quelqu'un que je ne connais pas.

- Discuter de quoi, au juste ?

Ses lèvres se tordirent en un sourire narquois.

<< De ce cher Todoroki, qui d'autre ? >>

Je sursaute et lève les yeux par réflexe.

- C'est toi...

<< Oh, tu m'as reconnu ? J'en suis honoré, parce que tu vois, moi, je sais exactement qui t'es. >>

Je reconnais ce visage, maintenant. C'est le garçon avec qui Tora s'est battu la dernière fois.

<< Ryuki Yoshida, enchanté. >>

J'aimerai bien dire la même chose, mais j'ai pour principe de ne pas mentir...

Ça, évidemment, je le garde pour moi, et je me contente de garder mes lèvres closes en espérant qu'il en finisse vite.

<< Bon, allez, balance, je jugerai pas, je peux reconnaître qu'il est flippant quand il s'y croit. >>

Devant mon étonnement apparent, il se décide à développer.

<< Il t'a payé combien pour faire croire qu'il a des amis ? Franchement c'est pathétique...>>

- Quoi ?

Il commence à perdre patience devant mon incompréhension.

<< Il a pas choisi la plus intelligente, le budget devait pas être très élevé ! lance-t-il à la cantonade. >>

Quelques rires retentissent parmi les élèves, mais la plupart se contentent de baisser la tête ou de regarder ailleurs.

Mes joues me brûlent et la honte me laisse un goût amer dans la bouche. Par pitié...Que ça s'arrête.

<< Je comprends mieux pourquoi c'est toi qu'il a pris, vous avez le même niveau de second degré...M'enfin bref, du coup, combien ? >>

- Il ne m'a rien donné...

<< C'est ça, ouais, à d'autres. Je peux te donner plus, tu sais ? Déjà qu'il a dû demander à sa mère de faire des heures sup' pour pouvoir te filer ne serait-ce que 1000 yens*...>>

(* Environ 12,60 euros.)

Mon sang se glace au sous-entendu à peine dissimulé, mais c'est surtout son mépris qui me donne envie de le gifler. Je devine déjà que c'est un « fils de » rien qu'à son expression.

<< Allez, sérieux ! Tu veux combien ? J'ai que ça sur moi mais je peux te donner plus si tu me dis tout. >>

Il me tends une épaisse liasse de billets qui est sans doute équivalente à la moitié du salaire d'un mois de ma mère. « Que » ça ? Mes doigts me brûlent devant autant d'argent, mais sa désinvolture me refroidis aussitôt. Comment peut-on avoir autant d'argent dans sa poche alors que des gens se tuent au travail de l'autre côté de la rue ?

- Il n'y a rien à dire. Laisse-moi aller en cours maintenant, merci.

Il attrape ma capuche alors que je m'apprête à partir et me retiens en m'étranglant à moitié.

<< T'as cru que j'allais te laisser partir aussi facilement ? C'est presque mignon. Mais puisque la manière douce ne fonctionne pas...>>

Il attrape mon épaule et me plaque contre un mur en retenant mes mains.

Je laisse échapper une grimace de douleur en sentant mon épaule heurter durement la pierre tandis qu'il continue à m'immobiliser. Je pourrai utiliser mon alter mais je n'ai pas envie d'avoir de problèmes. Et puis surtout, il évite soigneusement mon regard, comme si il savait très bien ce dont j'étais capable.

<< Pour ton bien, t'as intérêt de tout m'expliquer vite fait si tu veux pas repartir d'ici avec quelques bleus. >>

- Arrête, lâche-moi !

<< Te lâcher ? Alors que je peux enfin remettre ce putain de taré à sa place ? Tu rêves ! J'ai l'occasion de plus voir sa sale gueule pour de bon, je vais pas me priver ! Si il t'as pas payé, c'est que t'es vraiment son amie, pour une raison que je ne m'explique pas. Ça veut dire que tu le connais et que tu peux me filer les infos pour le faire virer de ce lycée une bonne fois pour toute. >>

Il me lance un bref regard et je peux voir une lueur de joie, presque de folie dans ses yeux. 

<< Plus de deux ans que j'essaie...Et il m'offre la solution sur un plateau d'argent. >>

Qu'est-ce que je fais ? Je pourrais essayer de lui mettre un coup de pied bien placé, mais...

<< Mr Yoshida, mais qu'est-ce que vous faites ? Lâchez immédiatement cette jeune fille ! >>

Je sens sa main se détacher de mon épaule et il se tourne vers la jeune femme qui vient d'arriver avec un sourire innocent.

<< Madame la directrice, c'est un regrettable malentendu ! Figurez-vous que... >>

<< Je ne veux pas de vos excuses ! le coupa-t-elle. En colle demain. >>

<< Mais...>>

<< Et allez en cours, ce n'est pas votre argent qui va réussir vos contrôles à votre place ! Et vous, mademoiselle, je vous suggère de rejoindre votre établissement. >>

- Oui...

Je me dépêche de partir avant que qui que ce soit ne m'interpelle.

Mais qu'est-ce qui s'est passé ?

~~~

Je passe la porte de ma maison. J'ai été dans un brouillard toute la journée et Saki l'a bien vu, mais n'a cherché qu'à me réconforter plutôt que de tenter de m'exhorter des infos que je n'aurais de toute façon pas donné...

<< Salut, crevette ! Maman est pas là, elle travaille encore, alors je me demandais si tu voulais pas qu'on se regarde quelque cho- Oulà, ça va pas, toi. >>

Je secoue la tête en guise de réponse.

<< Tu veux en parler ? C'est parce que t'as perdu ton collier ? >>

- Pas vraiment, non...Attends, quoi ?? 

Je tâte mon cou, sans sentir le cordon habituel sous mes doigts. Oh non...

Je sens les larmes me monter aux yeux. Décidément, cette journée est de pire en pire.

<< Eh, détends-toi, on va le retrouver, t'inquiètes. T'es allée où à part Yuei ? >>

- Devant le lycée Otsuma...

<< Ok, va voir là-bas et je te rejoins quand j'ai fini. >>

Il me tapote la tête et part en courant tandis que je prends le même chemin que lui plus lentement.

Je finis par arriver devant le lycée. Il reste encore des élèves qui n'ont pas fini les cours ou qui en sortent juste et je sens leurs regards pesant sur ma nuque pendant que je cherche autour du portail sans rien trouver.

Je finis par abandonner après une bonne vingtaine de minutes. Il n'y a rien ici, j'espère que Kaen aura eu plus de chance de son côté...

Un bruit métallique me fait soudain tourner la tête et je vois Ryuki en train de jouer avec quelque chose, le lançant et le rattrapant avec nonchalance.

<< C'est ça que tu cherches ? me nargua-t-il en brandissant un objet argenté. >>

Mon collier. Je sens la colère bouillir sous ma peau. Il n'a pas le droit de jouer avec comme si c'était un simple bout de métal.

- Rends-le moi.

<< Sinon quoi, tu vas t'énerver ? Ouh, j'ai peur ! >>

Je m'avance vers lui tout en m'efforçant de me contenir.

<< Essaye de l'attraper pour voir. >>

Il lève le bras hors de ma portée. 

C'est ça qu'il veut ? Que je m'humilie en essayant en vain de l'attraper ?

<< Allez, vas-y, attrape... >>

Je le gifle violemment et tends la main vers mon collier, mais il se ressaisit avant que j'ai pu le récupérer et attrape mon poignet.

<< Bien essayé, princesse, mais tu vois, vu ta carrure, tu ferais mieux de la fermer et de te calmer. T'as du bol, la dirlo est arrivée tout à l'heure, mais là y'a personne pour te sauver la mise donc t'as plutôt intérêt à me supplier si tu veux récupérer ton vieux pendentif moisi. >>

- C'est pas un « vieux pendentif moisi » comme tu dis, mais j'imagine que ça serait trop demander à tes deux neurones de comprendre qu'il n'y a pas que l'argent qui a de la valeur.

Ses yeux luisent de rage, à présent.

<< T'as cru que tu pouvais me parler comme ça ?! Pour qui tu te prends, hein ?! >>

Il lève la main et m'assène un coup au visage avant que je puisse le parer. J'entends un bruit sourd derrière lui, et il tend son bras de nouveau, un sourire cruel sur le visage.

<< Touche-la encore une fois et tu sera mort dans la seconde. >>

( Dessin de AoiNaraa merci de respecter et de ne pas s'approprier son œuvre. ) 

Tora lâche son poignet et le repousse loin de moi avant de se placer entre nous en tendant son bras enflammé devant moi.

<< Il ne manquait plus que toi, ricana Ryuki. Pile à temps pour sauver ta chérie tel un prince charmant de conte de fées. Ça te donne un genre, pas vrai ? De penser que tu sers à quelque chose ? Mais regarde sa tronche, elle est terrifiée la pauvre petite...>>

Le jeune homme me jeta un rapide coup d'œil.

<< On voit pas la même chose, alors. Moi, j'ai plutôt l'impression qu'elle veut te casser la gueule. >>

Je laisse échapper un rire étouffé.

<< Vous vous croyez invincibles, là ? Vous êtes deux contre un ? Mais si je veux, je vous emmène devant la justice pour violence et je doute que vous puissiez faire quoi que ce soit...>>

<< Ils auront un bon avocat avec eux. >>

Je tourne la tête pour croiser le regard de Kaen.

<< Merci d'être intervenu, je serais arrivé trop tard, lança-t-il à Tora. >>

Ryuki semble se tasser devant mon frère. Autant il était plus grand que moi et n'avait pas tant de différence avec le Todoroki, autant là, devant le mètre 87 de Kaen, il a l'air soudain bien plus insignifiant.

<< T'es qui, toi ? demande-t-il quand même d'un ton agressif. >>

<< Et la politesse, tu connais ? Je te montre si tu veux. Bonjour, êtes-vous bien l'enfoiré qui a volé le collier de ma sœur ? >>

<< T'as cru que tu pouvais débarquer et me parler comme ça ?! >>

<< J'ai pas cru, non, je le fais là. Maintenant, tu rends le collier. >>

<< Tu vas faire quoi ? >>

<< Crois-moi, tu veux pas le savoir. File. >>

Kaen tendit la main, mais Ryuki recula d'un pas.

<< Mmmh, non, j'ai pas envie. >>

Tora attrapa d'un bond le pendentif et me le rendit en jetant un regard sombre à son camarade.

<< Merci. Allez, on y va et je t'embarque aussi, si ça ne te dérange pas, ajouta-t-il à l'intention du jeune Todoroki. >>

<< Ça me va. >>

Il ramasse son sac -voilà d'où venait le bruit sourd que j'ai entendu tout à l'heure- et nous suit jusqu'au portail.

<< Ouais c'est ça, fuyez, bande de lâches ! >>

Je vois Tora se crisper devant moi mais c'est Kaen qui se retourne et repars vers lui.

- Ne fait...

<< T'inquiètes pas pour moi. >>

Il s'arrête juste devant Ryuki.

<< Eh, j'oubliais. >>

<< Quoi ? >>

Il lève son pied et lui colle un kick dans la tempe.

<< Ça c'est pour ma sœur, connard ! >>

Il revient vers nous.

<< Allez, on y va. >>

À suivre...

~~~

De retour, enfin !

J'ai écrit ce chapitre en un jour et je dois avouer que j'en suis plutôt fière.

Passez une bonne soirée !

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