19| Brisée

                                                       I haven't been myself that I've know lately                                                                                                             So sick and tired of fucking faking

MAYDAY - Elijah

J-13 avant Noël 

PDV Akane

Je m'étire dans mon lit sans réussir à trouver le sommeil. Saki dort à côté de moi depuis quelques minutes maintenant. Elle a préféré venir fêter son anniversaire chez moi après qu'on se soit promenées dans la ville jusqu'au coucher du soleil et je la comprends. Sa mère n'était même pas là quand on est passé chez elle pour récupérer des affaires.

Elle a manqué l'anniversaire de sa propre fille...

Je me tourne en essayant de m'endormir à mon tour, mais on dirait que le sommeil a décidé de me fuir. Il est presque deux heures du matin, et je suis épuisée, mais rien à faire.

<< Tu dors pas ? >>

Je me retourne vers elle en entendant sa voix à peine plus forte qu'un murmure. Elle a les yeux ouverts et l'air plutôt réveillé. Dans la faible lumière du clair de lune, ses yeux sont d'un vert presque fluorescent.

- Toi non plus, fais-je remarquer.

<< J'y arrive pas. J'arrête pas de me dire...c'est idiot, mais j'ai peur de dormir et de faire un cauchemar. >>

- De ce qui s'est passé cette nuit-là ? 

Elle hoche la tête, le regard tourné vers le plafond, les pupilles brillantes de larmes contenues.

<< Je me sens plus en sécurité en ce moment, avec ma mère qui continue à boire et à sortir toute la soirée. Le seul endroit où je peux dormir, c'est...avec toi, mais même ça j'y arrive plus. >>

Je prends doucement sa main et la presse légèrement.

- Tu veux que je ramène Liloo en guise de grosse peluche ?

<< Pas sûre qu'elle soit consentante. >>

- Tu devrais tenter ta chance. J'ai vu comment elle te regardait, hier.

Elle se crispe légèrement et serre un peu plus ma main, entrelaçant ses doigts aux miens.

<< Et si je l'ai déjà fait ? finit-elle par chuchoter. >>

Je me redresse légèrement.

- Tu m'en as pas parlé.

Ça sonne comme un reproche et c'est peut-être à moitié le cas. Parce que ça me blesse.

<< Je sais pas ce qu'il y a entre nous. Si on est amies ou plus, et même si c'est moi qui ai proposé cet entre-deux, j'admet ouvertement que c'était une idée complètement débile. Mais elle m'a dit qu'elle était pas prête et comme je suis une personne égoïste, j'ai pas pu renoncer. >>

Je m'appuie sur mon coude et lui jette un coup d'œil. Elle a l'air tellement perdue.

- Saki, on est tous égoïstes et ça dérange personne jusqu'au jour où ça va pas dans leur sens. Mais je crois que tu devrais lui parler.

<< Je peux pas lui demander de me donner une réponse définitive après même pas 4 jours alors que j'ai dit que j'attendrai. >>

- Elle comprendra si elle voit à quel point ça te pèse.

<< J'ai peur qu'elle m'aime pas assez, Akane. Qu'elle se rende compte que je suis moins bien que Touya et qu'elle décide de m'abandonner. Elle aurait le droit. Qu'est-ce que je fous ? >>

Je me penche au-dessus d'elle et la regarde dans les yeux avec toute la conviction possible.

- Tu as le droit d'être aimée. Peu importe ce que les gens ont pu te dire, tu vaux autant que n'importe qui. Tu es légitime.

<< J'arrive pas à y croire... >>

- Alors, j'y croirai pour toi.

Je me rallonge et il se passe tellement de temps que je suis sûre qu'elle dort, alors parce qu'il est tard, que je suis fatiguée et que je pense que personne ne peux m'entendre, je murmure une confession au ciel étoilé en espérant qu'il la garde pour lui.

- Je crois que je suis amoureuse de Tora.

Et puis, alors que je commence enfin à sombrer, la voix douce de ma meilleure amie me répond dans le silence glacial.

<< Je sais. Et lui aussi. L'autre jour, à la sortie des cours, il te regardait comme si tu étais son monde et son univers tout entier. >>

*

Au final, le lendemain, on a pas vraiment reparlé de notre discussion nocturne. On était toutes les deux épuisées, surtout qu'on avait cours aujourd'hui.

La cloche sonne et je meurs d'envie de sortir, mais le prof nous retient.

<< J'ai corrigé les contrôles de mardi. Je vais vous les rendre et vous pourrez sortir après ça. >>

Je me tends immédiatement sur ma chaise. Déjà ?

 Il passe entre les bureaux pour distribuer les copies et s'approche bien trop vite de moi. Il s'arrête devant ma table, et dépose le contrôle devant moi.

Le 47 entouré en rouge sur ma copie me brûle les yeux.

<< Ne vous relâchez pas, mademoiselle, me recommande-t-il à voix basse. Vous êtes capable de bien mieux. >>

Et il s'en va sans un regard de plus.

Ma vision se trouble et je fourre la copie dans mon sac avant de me lever précipitamment. Je ne peux pas rester là. Je ne veux pas craquer devant tous ces gens.

- Je vais bien ! lancé-je à Saki qui s'approche de moi. J'ai un truc urgent à faire, pars sans moi, ok ?

Et je sors de la salle de classe d'un pas aussi calme que possible, avant d'accélérer dès que j'ai dépassé le couloir. Je cours presque, au hasard, juste pour essayer de fuir mes pensées sombres qui me poursuivent, à la limite de mon esprit.

Et je craque, tombant contre le mur dans ce que je crois être une cabine des toilettes du premier étage, et là, j'ai beau avoir fuit pendant ce qui me semble des heures, ces horreurs que je tentais de repousser me tombent dessus et je suis coincée.

Je ferme les yeux, la main serrée au point de faire blanchir mes phalanges autour de mon collier, et je tente de respirer calmement, mais tout me dépasse et mon cœur accélère tellement que je me demande s'il ne va pas s'arrêter ici et maintenant. J'ai le souffle court et l'impression que le monde s'écroule.

Je veux mourir, là, tout de suite, si tout s'arrête.

J'entends confusément une porte s'ouvrir, des pas et des voix distinctement féminines.

Que tout s'arrête, pitié. Plus je perds le contrôle et plus tout empire.

Chaque son m'agresse et je peux entendre mon pouls dans mes tympans.

J'ai la nausée et la peau humide de sueur.

Puis un bruit sourd ébranle le tourbillon qui m'assaille et un flash de lumière me ramène à la réalité.

La serrure de la porte de la cabine a explosé, et dans l'ouverture je peux voir le visage paniquée de Liloo, et les cheveux blonds de Mio juste derrière elle. Qui tient un morceau de métal brûlé dans la main.

Elle a fait exploser la serrure et je n'ai même pas entendu avant que le souffle de l'explosion me parvienne.

<< Ace ? Viens tout de suite, lance la Takami sans me quitter des yeux. >>

<< Dans les toilettes des filles ?? >>

<< Bouge-toi avant que je te traîne ici de force, grogne Mio en jetant un regard vers le couloir. >>

<< Si c'est demandé si gentiment...>>

Je n'ai même pas la force ou l'envie de bouger. À quoi bon ? Je suis pathétique. J'ai fait une crise de panique dans les toilettes du lycée et des élèves plus jeunes ont dû me sauver.

Les mèches rouges sombres du jeune homme apparaissent dans l'embrasure et il jette un coup d'œil vers moi. Je vois son visage se décomposer, même avec la vision brouillée par les larmes.

<< Oh, merde. Akane...Je-- >>

Il s'approche doucement, pas à pas, avec précaution. Parce que je suis fragile. Je suis cassée et on me ménage pour éviter d'agrandir la fêlure.

<< Je peux ? >>

Je hoche la tête, juste une fois et il m'enveloppe dans une étreinte réconfortante qui referme un peu ma blessure.

<< Ça va aller, souffle-t-il. Tout ira bien, ok ? >>

Je hoche la tête contre son épaule, même si je n'arrive pas à y croire. Pas maintenant.

<< On a quoi comme cours ? demande-t-il à Mio sans me lâcher. >>

<< J'en sais rien, mais sans doute un truc qu'on devrait pas louper. >>

<< Ils veulent nous former en tant que héros ? La personne qui a le plus besoin d'aide, elle est juste devant moi. >>

Il se relève et me tends la main.

<< Viens, on se barre. >>

J'attrape sa main et me redresse.

- Va en classe, ça ira.

Évidemment, c'est faux, mais je secoue la tête pour éclaircir mes pensées et me dirige vers la porte.

<< Je t'abandonne pas, Akane. Tu vas mal et je te demande pas de me raconter pourquoi, mais t'attends pas à ce que je te laisse seule, rétorque Ace en se plantant devant moi, les bras écartés pour m'empêcher de passer. >>

- J'ai 17 ans. Je sais me gérer moi-même. Merci de m'avoir aidée mais ça va. 

<< Tu me couvres, mec ? questionne-t-il Satsuki par-dessus son épaule. >>

<< Évidemment. >>

- Tu m'écoutes quand je parle ? J'ai dit que--

<< Je m'en fous. Tu sais pas reconnaître que t'as besoin d'aide, tant pis, mais je te lâche pas. Je suis pas devenu apprenti héros pour me la raconter. Je vais rester avec toi le temps que t'aille mieux, et s'il le faut, je te suis jusqu'en Russie. >>

Il lève le menton, l'air déterminé et se campe fermement sur ses jambes. J'ai l'impression d'affronter un vrai héros...Il en a le regard, en tout cas.

Pourquoi je n'y arrive pas, alors ?

<< Akane, où est Saki ? me demande Liloo l'air inquiet. Je pensais qu'elle serait avec toi. >>

- Je lui ai dit de partir sans m'attendre. Ace, écoute, tu peux rien faire pour moi, d'accord ? C'est comme ça et ça changera pas. Maintenant, laisse-moi passer, s'il te plaît.

On ne répare pas une fissure intérieure. On met un pansement éphémère sur ce qu'on peut voir de l'extérieur et on prie pour qu'il tienne aussi longtemps que possible. Et j'ai un gouffre en moi.

- Je veux pas être sauvée. Je peux pas être sauvée, parce que ça fait plus longtemps que tu ne peux l'imaginer que je suis blessée. Et on soigne pas une plaie de 10 ans. Elle cicatrise peut-être, mais elle part jamais tout à fait. Et j'ai pas une cicatrice, mais une entaille ouverte, ok ? Tu peux rien faire, accepte-le.

Il ouvre la bouche pour dire quelque chose, mais je l'en empêche en lui coupant la parole.

- Les héros ne peuvent pas aider tout le monde. On aimerait mais on y arrive pas, c'est comme ça. Tu ne me sauvera pas, dis-je en appuyant distinctement sur chaque mot de la dernière phrase.

Je ne sais même pas pourquoi j'utilise la troisième personne. Je ne suis pas une héroïne.

Je suis une épave qui survit péniblement.

- S'il te plaît.

Il hésite, les bras tremblants.

<< Et si je te laisse partir et que tu fais une connerie ? Je veux pas...je veux pas me dire que j'aurais pu empêcher ça. >>

- Je ferais pas de connerie, Ace. Promis.

<< Laisse-la partir, lance doucement Satsuki derrière lui. Tu ne peux pas sauver quelqu'un qui n'en a pas l'envie. >>

Il me lance un regard compréhensif et je sais, je le sens, qu'il a connu une personne comme moi.

Ace recule enfin et je me faufile devant lui pour quitter la cabine.

- N'en parlez à personne, d'accord ?

Ils hochent tous la tête, les yeux pleins de diverses émotions allant du regret à la tristesse et je quitte les toilettes.

J'ai gagné, cette fois, alors pourquoi j'ai l'impression d'avoir essuyé une défaite ?

<< Je peux pas la laisser comme ça, souffle une voix dans mon dos. >>

<< T'as pas le choix. Tu dois la laisser se battre. La laisser trouver son Dynamight pour qu'elle s'en sorte. >>

À suivre...

~~~

Chapitre plutôt court mais assez riche en émotions, enfin j'espère xD

Akane...elle sombre, mais comme l'a dit Satsuki, il faut la laisser vouloir être sauvée, or là elle en a plus l'envie, elle se considère comme un poids puisqu'elle est censée être celle qui aide les gens. Donc forcément, faire manquer des cours à Ace, « juste » pour la soutenir, elle n'en voyait pas l'utilité.

Certains vont peut-être trouver qu'elle a réagit excessivement pour une simple note pas super, mais elle est au bord du précipice depuis longtemps. Dix ans, en réalité. Elle s'en approche simplement de plus en plus ces derniers temps. Et comme Elijah le dit dans la chanson en média, elle est fatiguée de faire semblant et de ne plus être elle-même.

Bref, je vous dis à bientôt !

Et n'oubliez pas...Tout ira bien.

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