I've been watchin' you for some time
Can't stop starin' at those ocean eyes
Burning cities and napalm skies

Ocean eyes - Billie Eilish

( Je rallonge encore l'histoire finalement ToT mais j'avais tellement envie d'écrire ce chapitre ! )

PDV Saki

J'hésite, le doigt au-dessus du bouton "envoyer", relisant mon message pour la centième fois.

Puis, finalement, je le supprime avant même de pouvoir faire quoi que ce soit, et balance mon téléphone sur mon lit d'un geste rageur.

- Putain, Saki, t'as peur de quoi ? me murmurais-je. Qu'elle te laisse des cicatrices ? T'en as déjà des biens plus visibles...

C'est vrai ça, de quoi j'ai peur, au juste ? D'un rejet ? On se connait à peine. Et peut-être bien... Peut-être bien que ça marchera. Toutes les fois où on s'est parlé, où elle m'a soutenue, quand Akane n'était pas là et qu'on a mangé ensemble, à parler de nous deux. Et plus je la connais, plus je tombe amoureuse.

Puis je me rappelle d'une chose.

Touya Todoroki-Nekomura.

Je déteste ce nom. Alors que je l'avais trouvé super pendant l'intervention. Je déteste cet homme sans même le connaître, parce que c'est lui que Liloo veut. Lui et pas moi, et ça ne changera jamais.

Évidemment qu'elle ne veut pas de moi. Quie choisirai à la place de quelqu'un de plus vieux, plus beau, plus expérimenté ?

Plus... masculin.

J'ai tendance à l'oublier, ça.
Rien ne dit qu'elle aime ou aimera les filles un jour. Je devrais abandonner.

Alors, pourquoi je n'y arrive pas ?

Parce que tu sais que c'est différent. Qu'elle est différente.

Tu parles, je suis juste obsédée par elle pour un rien. C'est glauque. Je suis glauque. Glauque et défigurée.

Mon portable vibre et je l'attrape d'une main, espérant qu'il annonce une distraction, n'importe quoi qui puisse me faire oublier mes pensées sombres.

{Liloo, aujourd'hui 12h23
T'es libre ce midi ? }

Meilleure distraction du monde.

*

- Papa, j'y vais !

<< Amuse-toi bien, ma puce ! Tu veux de l'argent en plus ou ça ira ? >>

- Non, c'est bon. À tout à l'heure !

<< Bisous ! >>

Je sors de la maison et doit réfréner mon excitation pour ne pas courir tout le long du trajet.

En chemin, everything I wanted de Billie Eilish résonne dans mes écouteurs et je fredonne les paroles tandis que j'arrive au lieu de rendez-vous avec 5 bonnes minutes d'avance.

Je la cherche du regard parmi les quelques personnes qui marchent dans la rue, mais je ne vois rien, jusqu'à ce qu'un éclat blond attire mon attention.

Elle est là, un casque sur les oreilles, et l'air parfaitement décontractée. Elle est là et je ne sais pas si j'arrive à y croire.

Puis, elle tourne la tête et croise mon regard. Et son sourire illumine tout son visage, tellement que je me demande si elle a conscience d'à quel point elle brille, tellement que les hommes et les femmes se retournent pour regarder un peu plus longtemps ce petit bout de soleil piégé dans un être humain.

Je ne crois pas que je pourrais un jour me lasser de la voir heureuse.

Elle s'approche de moi et retire son casque.

<< Salut ! J'espère que t'as pas trop attendu... >>

- Non, je viens d'arriver en fait.

<< Ok, tant mieux ! Je suis là depuis 10 minutes et je te voyais pas, j'avais peur de t'avoir manquée, mais c'est juste moi qui était en avance. >>

J'aurais peut-être dû courir, finalement, si ça m'avait permis de passer ne serait-ce que ces pauvres secondes de plus avec elle.

- Tu veux aller où, alors ?

*

On s'arrête finalement à la terrasse d'un petit restaurant chaleureux et l'odeur de viande qui s'en dégage fait aussitôt gargouiller mon ventre.

<< Tu veux aller à l'intérieur ou bien...? >>

- Comme tu veux, le froid ne me dérange pas.

À peine ma phrase terminée, elle s'installe sur une table et me jette un regard coupable.

<< J'adore la neige, en fait, rit-elle avec une expression d'enfant pris la main dans le sac. >>

Je m'assieds en face d'elle.

- Moi aussi. Enfin, j'adore pas ça, mais je trouve ça magique à chaque fois.

<< Oui ! Comment on peut être blasé en voyant de la neige ? Je comprends pas. >>

- Moi non plus ! Émerveillez-vous les gars, arrêtez d'être blasés face à ce cadeau du ciel !

<< Exactement, à chaque fois je me retiens de secouer Satsuki parce qu'il est là "ouais, c'est de l'eau gelée quoi." >>

- Mais quoi ? Comment il fait ?

<< J'en sais rien ! s'exclame-t-elle en secouant la tête d'un air faussement dépité. >>

<< Excusez-moi, mesdemoiselles, puis-je prendre votre commande ? >>

Je lève les yeux vers la serveuse qui semble presque gênée de nous interrompre.

- Oh, euh, oui, pardon, je vais prendre--

J'ai même pas eu le temps de regarder la carte...!

<< Deux katsudon ? propose Liloo d'un air parfaitement naturel. >>

Elle s'est souvenue de mon plat préféré.

- C'est...parfait.

Ça ne peut que l'être.

<< Désolée, j'ai juste pensé que tu voulais peut-être un coup de main, et comme tu m'avais dit que t'adorais ce plat, je me suis dit que ça t'irait mais on peut changer si tu veux ! >>

- Mais non, c'est bon ! Merci, j'avais pas eu le temps de voir la carte...

<< J'avais deviné, sourit-elle, on aurait dit qu'on t'avait annoncé la mort de quelqu'un. >>

- Ah bah super.

Allez, Saki, c'est ton moment. Faut trouver un truc hyper intelligent ou drôle à dire.
Je peux le faire.

Nos plats arrivent au même moment, coupant court toute tentative de réflexion de la part de mon cerveau devant l'alléchante odeur qui se dégage des assiettes.

<< Bon appétit ! >>

- Bon appétit !

Je commence à manger, laisse échapper un soupir de satisfaction en avalant ma première bouchée et lève les yeux vers Liloo par automatisme.

Son grand sourire presque enfantin fait aussitôt fondre mon cœur, tandis qu'elle mâche une bouchée, puis elle croise mon regard et m'offre une moue complice.

Nous continuons de manger silencieusement, savourant nos plats, jusqu'à ce qu'elle prenne soudainement la parole.

<< Et si je te disais que je n'aime pas les oignons ? >>

Je hausse les sourcils, un peu perdue.

<< C'est un jeu qu'on a inventé avec Ace, genre questions-réponses, mais en plus... naturel ? Je me disais que tu voudrais peut-être parler. >>

Je me creuse la tête pour trouver quelque chose.

- Et si je te disais que je déteste le popcorn salé ?

<< Alors, je te dirai que je ne suis pas fan non plus. Et si je te disais que je préfère l'hiver à l'été ? >>

On continue ce jeu tout en se promenant dans la ville, toujours sous la neige, dans une ambiance douce, et mon cœur bat à tout rompre.

- Et si je te disais que mon meilleur souvenir, c'est une nuit que j'ai passé à jouer à Smash Bros avec Akane ?

<< Alors je te dirai que le mien, c'est le jour où j'ai rencontré Ace, Satsuki et Mio.  Et si je te disais que je trouve les cicatrices hyper badass ? >>

Oh fuck, non, tout sauf ça. Je peux choisir de ne pas lui en parler, mais est-ce que c'est ce que je veux ?

- Alors, je te dirai que j'en ai une et qu'elle est tout sauf badass.

Je relève la mèche qui cache mon front pour lui montrer la marque. Son regard s'assombrit aussitôt.

<< C'est une cicatrice faite par du verre ça, non ? >>

- De la porcelaine.

C'est plus dur de dire ces trois petits mots que tout ce que j'avais imaginé.

<< Saki, je vais pas te demander de tout me raconter, parce qu'on se connait sans doute pas assez et que ce serait injuste de ma part de le faire. Mais je suis là, ok ? >>

Elle hésite un instant.

<< Je peux...? >>

Je hoche la tête une fois, la gorge serrée par des larmes que je retiens tant bien que mal. Elle tend la main vers mon front et, lentement, avec douceur, effleure ce morceau de moi qui ne guérira jamais tout à fait, aussi bien à l'extérieur qu'à l'intérieur.

<< T'as tort sur un point, finit-elle par murmurer en faisant glisser ses doigts sur ma tempe. Elle est super stylée, tu ressembles encore plus à une guerrière comme ça. >>

- Et c'est ton premier mensonge de la journée, soufflais-je.

<< J'ai l'air de mentir, là ? >>

Mon cœur s'emballe en sentant sa main sur ma peau, tandis que mon esprit panique. Je ne peux pas, je ne dois pas apprécier ça, pas là, ici. Pas sur cette blessure qui me défigure à tout jamais.

" C'est ta faute.

Ta faute

Ta faute
Ta faute
Ta faute
Ta faute. Tout ce qui s'est passé est ta faute. "

Je sens ma main commencer à trembler, et je ne sais pas si elle lit quelque chose dans les yeux, mais elle retire immédiatement ses doigts.

- Et si je te disais...parvins-je à peine à articuler. Si je te disais que ma chanson préférée, ça a longtemps été Too sad to cry de Sasha Alex Sloan ?

<< Alors, je te dirai que la mienne c'était we fell in love in october de girl in red. Et si je te disais que ma couleur préférée c'est le rouge ? >>

Et on continue comme ça, petit à petit, jusqu'à ce que je me sente mieux et que le soleil commence à descendre dans le ciel.

<< Et si je te disais que les gens pensent qu'Ace et moi on sort ensemble, parfois ? >>

- Alors, je te dirai que bizarrement, ça m'étonne pas tant que ça. Et si je te disais que le monde peut bien s'effondrer tant que ceux que j'aime vont bien ?

<< Alors, je te dirai que c'est pareil pour moi. Et si je disais que j'ai peur du temps qui passe ? >>

- Alors, je te dirai que moi aussi. Et si...

Peut-être bien que je peux le faire, finalement.

- Si je te disais que j'écoute Billie Eilish, que je veux me faire un piercing à la lèvre et que j'ai des bagues et des jeans larges ?

Je peux pas faire plus clair ni plus cliché comme aveu.

<< Alors je te dirai que peut-être que moi aussi. >>

Je crois que mon cœur s'est arrêté de battre.

- Peut-être que quoi ?

<< Peut-être bien que j'écoute Billie Eilish aussi, que j'aime les piercings et que je suis attirée par les filles. >>

J'imagine que c'est comme un pansement qu'on arrache. Mieux vaut le faire d'un coup et souffrir rapidement.

- Spécialement celles qui ont les cheveux violets, les yeux verts et un gros problème à exprimer clairement ce qu'elles ressentent ?

C'est fait. C'est fini maintenant. J'ai tout gâché, mais c'est fini.

<< Peut-être bien que oui. >>

Je lève les yeux d'un mouvement brusque, et elle est là, un peu trop près, à me regarder par en-dessous avec un air sérieux. Et ce que je lis dans ses yeux manque de faire exploser mon cœur.

J'ouvre la bouche et la referme, puis inspire un grand coup et demande d'une petite voix :

- Pour de vrai ?

Et elle rit.

<< Oui, pour de vrai. Vrai de vrai. >>

Je vois ses yeux glisser jusqu'à ma bouche, puis revenir se poser sur les miens.

<< Saki ? >>

- Oui ?

Je crois que c'est la première fois que j'aperçois de l'hésitation dans son regard, qui est vite remplacée par une étincelle indéfinissable.

<< Arrête de me regarder comme ça, j'arrive pas à réfléchir. >>

- Réfléchir à quoi ?

Elle fait un pas vers moi, son souffle s'échouant sur ma joue.

<< À ton avis ? >>

Et elle m'embrasse. Juste comme ça, un baiser volé au crépuscule, sur un pont qui surplombe la ville. Simplement ses lèvres sur les miennes et le temps qui s'arrête pour quelques instants.

Puis elle s'éloigne, et je me demande si je n'ai pas rêvé, parce que ça me semble irréel.

Elle se détourne, regarde la ville en contrebas, et je ne sais pas pourquoi, mais j'ai peur tout d'un coup.

<< Je peux te dire quelque chose sans que tu me détestes ? >>

- Vas-y.

J'ai presque l'impression qu'elle évite mon regard.

<< Touya et ma sœur...ça fait quelques jours que c'est officiel. Enfin, qu'ils nous l'ont dit. >>

- Oh.

Juste oh, parce que je n'ai pas envie de comprendre ce que je crois qu'elle sous-entend.

<< Ça m'a fait mal, au début. Ça fait toujours mal, en fait. Mais pas autant que ce que je pensais. Je n'ai pas compris pourquoi, au début. Et après, j'ai su. C'est parce que je ne suis plus amoureuse de lui. >>

C'est le moment où je dois sortir une grande tirade pour lui dire que j'espère que c'est moi dont elle parle. Mais je la laisse parler.

<< C'est pas facile à expliquer, souffle-t-elle. Ça fait des jours que je réfléchis à un beau discours, et maintenant je m'emmêle juste les pinceaux. La vérité, c'est que depuis que tu es arrivée dans ma vie, j'ai su que t'allais tout bousculer. Et c'est dur à dire. C'est dur d'abandonner un amour qui a duré des années. >>

Elle se tourne vers moi avec un sourire un peu tremblant, un peu moins lumineux, mais mon dieu, je crois que je l'aime encore plus que les autres.

<< T'es pas Touya. Tu es plus douce, moins sûre de toi et un million de fois plus touchante. Tu n'es pas lui et il m'a fallu du temps pour réaliser que c'était pour le mieux. Mais j'ai peur, Saki. J'ai peur, parce que il y a quelque chose de rassurant à savoir que quelqu'un ne t'aime pas en retour. Tu sais qu'il n'arrivera jamais rien, c'est comme un rêve. Je sais pas quoi faire, je sais pas si je suis prête pour une relation. La seule chose dont je suis sûre, c'est que je veux être avec toi. Mais... >>

- ...peut-être pas maintenant, je complète.

<< Voilà. Et je sais que c'est nul. >>

- Ça l'est pas. Je m'attendais juste pas à...ça.

<< Je sais. Désolée. >>

Je m'accoude à la rambarde, sans la regarder, parce que l'idée qui me traverse l'esprit tout d'un coup est stupide.

- Sinon, on...

<< On ? >>

- C'est débile, mais...on peut être, genre...des amies en un peu plus proches ? 

<< Saki, non. C'est pas correct vis-à-vis de toi. >>

- C'est moi qui le propose.

<< Arrête. J'arriverai pas à te dire non et c'est une mauvaise idée. >>

- En quoi ? Si tu veux pas, on le fait pas, c'était juste--

<< J'en meurs d'envie, mais je veux pas t'utiliser comme ça ! me coupe-t-elle.>>

- Tu rigoles ? C'est plus avantageux pour moi que pour toi.

<< Qu'est-ce que t'y gagnes de plus que moi ? J'ai tout ce que je veux dans cette histoire. Toi et du temps pour pouvoir officiellement te demander d'être ma copine. >>

- Ouais, mais je t'ai, toi et des baisers. 

Elle laisse échapper un petit rire.

<< D'accord, alors quoi ? On est kissfriends, maintenant ? >>

- Je valide le nom. Tu sais quoi ? Si tu veux, on fait un contrat. Tu peux établir plein de règles pour te rendre compte que c'est tout autant à mon avantage qu'au tien.

Elle secoue la tête, l'air amusée.

<< Pas besoin. >>

- Sûre ? Après, tu pourras plus me demander de t'appeler reine suprême de l'univers.

<< C'est vrai que c'est très tentant... >>

Je lui tends une main.

- Kissfriends ?

Elle hésite un instant avant de la prendre dans la sienne

<< Ok. Kissfriends. >>

Je ne la lâche pas et elle ne demande pas à ce que je le fasse. On reste comme ça, nos doigts entrelacés, dans la lumière orangée, avec trois mots qui flottent entre nous, mais pour l'instant, aucune de nous deux ne ressent le besoin de les prononcer.

Je t'aime.

~~~

AHAHAHAHA-

Pardon, il est minuit, je pars un peu en vrille là.

J'adore ce couple. Je les aimes de tout mon cœur de fille qui écoute Billie Eilish, qui veut un piercing à la lèvre et qui porte des bagues et des jeans larges x).

OUI, Saki c'est mon côté bi ✨ elle me ressemble pour ça, même si Akane reste le personnage qui est moi à 200%.

J'avoue que ce chapitre était un peu...cliché ? Mais parfois, je trouve que ça fait pas de mal.

Après, je sais que de l'extérieur on peut avoir l'impression que leur relation est allée très vite, mais faut se rappeler que y'a eu tous les moments « hors-caméra » dont le rendez-vous en tête à tête au réfectoire pendant que Akane et Tora étaient au café, bref, j'aurais voulu mieux développer ça, mais vous avez l'idée, elles sont bien plus proches que de simples connaissances xD.

Et même de simples connaissances ne sont pas à l'abri d'un coup de foudre !

N'empêche que ça me fait rire de me dire que je vous ai prévenu il y a quelques chapitres qu'on rentrait dans la partie sombre et que depuis, y'a eu que des petits chapitres mignons. Normalement, on arrive vraiment sur des chapitres moins joyeux, maintenant.

Après, y'a clairement un truc moins adorable dans ce chapitre, et une question que vous devez vous poser, d'ailleurs :

Comment Saki a obtenu sa cicatrice ?

J'avoue que je suis curieuse d'entendre vos théories, même si vous avez quelques indices assez évidents. C'est aussi pourquoi, en fait.

Bref, je vous souhaite une bonne soirée !

( I could eat that girl for lunch ✨)