Chapitre 3 : Humain
C'était déjà la fin de l'été. Fin de la tournée, fin des festivals mais en réalité, Ken, Jason, Fabrice, Théo, Deen, Sneazzy, Alpha, Eddy, Roméo, Antoine, Florian, Olivio, son frère, lui et surtout elle savaient parfaitement qu'à présent, leurs destins étaient liés. Drôle de coïncidence.
En moins de deux mois, tous étaient devenus unis par leur passion de la musique, de la création, de la scène. Puis, il y avait eu elle, son coup de foudre à lui et leur histoire à eux.
En réalité, tous savaient que le reste de l'année allait être plus que chargée : l'installation aux Tarterêts, le mariage – dont ils étaient d'ailleurs dans les préparatifs –, la naissance du fils de Yanis et surtout les concerts qu'elle organisait avec une équipe qu'elle avait constituée.
Et comme cette situation était très simple, ils décidèrent de tout faire en même temps ; mais cette situation ne fut pas plus mal car ils ne se rendirent même pas compte de la transition entre le mois d'août et celui de septembre. Ils enchaînaient les rendez-vous chez le notaire, le tailleur, la couturière, le fleuriste... Sans oublier avec tout le staff. Et pour éviter qu'ils soient tous débordés, elle avait comme d'habitude tout planifié : chaque jour était consacré à une seule activité. Et aujourd'hui, ils étaient à la banque. 15 personnes pour faire le compte-rendu de l'été. Tarik et elle avaient décidés de commencer ensemble, par simplicité et par logique.
« Très bien, je vais commencer par vous mademoiselle. Vos salaires de juillet et d'août ont bien été versés... ». Seuls l'équipe, la banquière et lui étaient au courant. Oui, ils avaient décidé sans aucune hésitation à la payer pour tout ce qu'elle avait fait pour eux.
« Pardon ? Excusez-moi mais il doit y avoir une erreur car j'ai démissionné fin juin de mon boulot et depuis... ». Elle le regarda lui et face à la tête accomplie qu'il devait faire, elle comprit.
« Non, vous n'avez pas fait ça... ». Puis, elle s'adressa à la banquière : « Pouvez-vous me communiquer le montant ? ». Et quand elle l'entendit, elle devint blême. De surprise, elle resta silencieuse pendant le reste de l'entretien. Mais lorsqu'ils sortirent du bureau, elle s'adressa à eux avec son air faussement fâché : « Mais vous êtes tous des grands malades, je l'ai pas mérité cet argent ! Mon but, c'est de passer du temps avec vous, pas de vous ruiner. ».
« Boucle-là, tout travail mérite salaire. Et le tien est justifié. Tu ne te rends pas compte de tout ce que tu fais pour nous. ». Jason ne parlait pas souvent, mais quand il le faisait, il avait raison.
« On vient d'ouvrir un compte courant, tu mettras ce que tu veux dessus. Pour le reste, tu es indépendante. Voiture, sapes, musique, livres. C'est ton fric. ». C'était tout ce qu'il avait à dire.
Elle les regarda pour finalement hausser les épaules et se poser avec un livre. Mais il ne la suivit pas des yeux parce qu'il devait déjà rentrer dans le bureau, avec cette fois-ci son frère.
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Le lendemain, ils emmenèrent leurs bus dans un entrepôt pour qu'ils soient révisés. Ainsi, chacun récupéra sa voiture. Une vraie concession automobile sans aucune marque identique.
« Rappeurs et totalement clichés avec vos Mercédès, BM et Audi... Heureusement que Olivio les casse avec sa Golf... », engagea-t-elle la conversation en descendant ses cartons du bus.
Ces derniers n'étaient pas très nombreux, réunissant seulement les quelques affaires qu'elle avait pour la salle à manger, la cuisine, les quelques décorations du salon, le minimum de produits pour la salle de bain et enfin trois cartons de vêtements divisés entre ses habits, ses chaussures et ses vestes. Il savait qu'elle avait aussi deux bibliothèques remplies de livres et de papeterie, entreposés dans son petit chez soi, dont elle venait de résilier le bail. Elle ne voulait pas y retourner, ce qu'il comprenait et pour éviter toute emmerde, il avait préféré lui payer directement un petit camion de déménagement, qui devait arriver le lendemain matin.
« Heu... Ce n'est pas la mienne. ». Et même si Olivio lui avait répondu sur un ton humoristique, elle devint toute rouge.
« Oh pardon, excuse-moi ! Mais du coup, elle est à qui ? Si personne ne me répond, je veux bien... ». Elle avait bien raison de dire ça, car elle n'avait qu'une simple Twingo.
« A moi. ». Il prit sa voix grave, et le fit exprès car il se tenait derrière elle. Elle sursauta presque et porta sa main à sa bouche.
Mais pour se défendre, elle utilisa comme d'habitude l'ironie : « Nan, impossible, je ne te crois pas. Bon, après réflexion, c'est vrai qu'avec ton frangin, vous ne faîtes rien comme les autres... Du coup, je peux mettre mes affaires dans le coffre ? ».
Il l'ouvrit automatiquement grâce au bouton spécifique qu'il avait sur la clé. Et une fois qu'ils eurent chargé leurs affaires, il ne resta plus que les deux places de l'avant libres.
« J'espère que l'ascenseur fonctionne... », dit-elle en fermant la dernière porte arrière. Mais avant qu'il ne réplique, son frère fut plus rapide : « Comme si j'allais laisser ma reus porter les cartons dans les étages. ». Sur ses paroles, Tarik checka son frère et lui fit un clin d'œil.
Puis, tous se dirent bêtement au-revoir parce que chacun savait qu'ils allaient bientôt se revoir. Elle haïssait ce sentiment d'abandon. Cela se voyait à sa manière de trembler. Alors, il l'entraina dans la voiture. Mais chez eux, un trajet en vago rimait avec musique. Et avant qu'il ne put lancer sa playlist, elle commença naturellement à chanter : « Mets le coco et on démarre... ».
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Enfin, ils arrivèrent aux Tarterêts. Et comme à chaque fois qu'il revenait chez lui, il se disait que sa cité lui avait manquée. Là-bas, il était tranquille car il ne risquait pas de se faire aborder tous les mètres. Pour raisons pratiques, il se gara devant la porte du bâtiment, suivi de son frère. Il y avait quand même quelques avantages à y vivre, comme d'avoir une certaine entraide entre les habitants. Quand les gamins reconnurent leur voiture, ils vinrent les voir en chahutant.
Ils firent rapidement connaissance avec elle et de toute façon, ils savaient qu'elle allait devenir la femme de Tarik donc ils avaient intérêt de ne rien dire et de la respecter. Ainsi, tous les cartons furent rapidement montés sur le palier. Tarik enfonça ses clés dans la serrure et se sentait plutôt confiant car il savait que sa voisine, Nora – qu'elle considérait d'ailleurs comme son petit-fils –, était venue la veille pour faire rapidement le ménage et ouvrir les volets.
Son appartement était simple mais pratique. Blanc, mais quand même décoré avec un goût surprenant par rapport à ce que certains pouvaient penser d'un mode de vie stéréotypé d'un rappeur. Tout avait été rénové et des meubles neufs comblaient l'espace, qui était divisé entre une grande entrée carrée donnant directement sur la droite à une salle de bain, en face d'eux une chambre d'ami, la cuisine et le salon-salle à manger et enfin, tout à gauche, sa chambre.
Ils rentrèrent en silence, plus préoccupés qu'autre chose par le placement de leurs affaires. Et quand elle arriva dans le salon, elle regarda les disques d'or, puis se mit sur le balcon.
« Alors, t'en dis quoi ? ». Il mourrait d'envie de lui poser cette question depuis qu'elle découvrait les pièces les unes après les autres.
« C'est sympa comme tout ! Après, je te fais confiance pour me dire où je dois m'installer... ». Elle était tout le temps comme ça, à ne jamais vouloir déranger et s'imposer.
« Maintenant, tu es chez toi ici. Tant que tu ne me mets pas des bouquets de fleurs sur la table et de la tapisserie sur les murs, tout ira bien pour toi. ». Souvent avec elle il prenait son air boudeur. Mais elle n'y prenait que rarement compte. Parce qu'elle l'aimait. A l'ammoniaque.
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