Les parasites

Constance

J'ai envoyé Peter balader et laisser partir Aimé à regret avant de me rendre à mon rendez-vous avec Beldari.

Il est là, toujours aussi sûr de lui, un sourire aux lèvres.

— Il y a quelque chose de drôle ? Lui demandé-je avec une mauvaise humeur évidente.

— J'ai cru comprendre que le docteur Rotman était en ville... c'est fou le nombre de personne qu'on croise "par hasard" dans ce bled paumé.

— Oh ça va hein !

C'est bien une des dernières personnes avec qui je compte épiloguer sur le sujet.

— Vous savez, je croyais que c'était votre personnalité d'être aussi désagréable mais je sais maintenant que c'est un air que vous vous donnez et je trouve que ça ne vous réussi pas.

Je rêve ou quoi ce type se prend pour mon père... Tout à coup je me demande si j'avais eu un père est-ce qu'il aurait agit comme ça ? Ma mère a été l'une des pionnières en terme d'insémination sur une femme célibataire. Mon père est une éprouvette ! Il faudra que je reparle de ça à Mamé.

Beldari se laisse tomber sur sa chaise et me dit d'une voix déterminée.

— J'ai un patient, le jeune Charles qui veut que vous l'opèriez. Il a eu un accident de scooter il y a un an et demi et est resté défiguré ...

— ... C'est non !

— Je n'ai encore rien dit !

J'arque un sourcil, il me prend pour une idiote ? Je dois lui concéder qu'il est déterminé cet uluberlu.

— C'est un fils "de" ? Pour que vous vous pointiez ici sachant pertinemment ce que que je vais répondre ? Je suppose que c'est un fils à papa richou ?

— Tu en connais beaucoup des fils à papa qui se promènent en scooter ?

Tiens on est passé au tutoiement ?

— On a bien un président qui l'a fait !

Il sourit et me montre une photo que je ne regarde même pas.

— Écoutez Beldari, j'ai eu mon lot d'emmerdes pour mériter ma tranquillité or je viens de me farcir une catastrophe écologique, une maison à retaper qui n'avance plus trop, un ex qui me poursuit et j'en passe... Alors, je le répète, qu'est ce qui n'est pas clair dans ma demande qu'on me foute la paix ?

— Peut-être que vous êtes doué, que les gens tiennent à vous ... et justement parlons-en, à la clinique de Saint-Jean vous avez été grandiose et j'ai appris que vous y retourniez, pourquoi ne pas prendre Charles.

J'avale d'un trait mon café.

— Je termine toujours ce que j'ai commencé, je ne fais que les cas que j'ai eu ces jours-là.

— Et j'ai vu le résultat ! Ces jeunes sont chanceux.

— Allez dire ça aux parents du gosse qui n'a pas fini de faire de la rééducation avec son bras !

— Au moins il a quelque chose à rééduquer.

C'est un dialogue de sourd. Je me lève et repars.

Sur la table, je ne remarque pas l'absence de la photo de Charles.

Peter m'attend toujours au bar de la place, je m'assieds à côté de lui.

Il est penaud et pensif.

— J'ai jamais voulu te tromper Constance, je n'aurais jamais dû !

— Je ne suis pas partie à cause de ça, je croyais que c'était normal ... mais maintenant je sais que ça ne l'est pas, que je ne suis pas frigide.

— Tu me passeras les détails s'il te plaît !

Je lui lance un regard noir et rétorque avec hargne :

— Parce que Tu m'as épargné les détails en couchant avec Sofia dans MON lit ? Quelle salope !

— Ne dis pas ça !

Une évidence me saute aux yeux.

— Tu aimes Sofia ? Sérieux !

Il se renfonce dans sa chaise.

— Mais qu'est-ce que tu fous là ? C'était quoi ces textos amoureux à la limite du harcèlement ?

Il se lève et s'en va dans sa chambre, mais pas avant d'avoir balancé sa dernière vacherie.

— Qu'est-ce que tu voulais que je fasse ce jour-là ? Tu es resté une semaine dans le coma, je devais agir ? Tu vois c'est tout toi ça, rester allonger pendant que je m'active.

— Casse-toi Peter ! très vite avant que je te pète les dents !

Il désigne, blasé, ses mains.

— Ouh j'ai peur du mannequin main !

Je me lève et je pense qu'il tilte que je n'opère plus car il monte les escaliers plutôt rapidement. Je ne sais pas trop pourquoi à vrai dire car je n'ai jamais su me battre alors que lui à une très bonne droite.

Je frissonne de colère à la pensée des décisions qu'il a prise pendant mon coma et leurs impacts.

*

Aimé

Je regarde Peter d'un œil torve, il arpente ma salle d'attente et intrigue les patients.

— Ça fait quoi, deux mètres de large par cinq de long ? Tu as déjà eu assez de patients pour la remplir ?

— Monsieur Rotman, je vous prie de partir.

Il lève les yeux au ciel et se tourne vers monsieur Durand.

— On se tape la même femme, ça le rend nerveux.

— Je rectifie, je sors avec ton EX, ce qui veut dire que TU ne sors plus avec.

Monsieur Durand toussote, gêné.

— Je peux repasser docteur.

— Non ce monsieur n'a rien à faire là et va s'en aller.

Peter est figé devant Durand et lui tend la main.

— Aujourd'hui est votre jour de chance, je vais m'occuper de vous, j'ai remarqué que vous ne respirez pas par le nez, je suis persuadé que votre embonpoint n'est pas la seule raison. Suivez-moi.

Peter entraîne un monsieur Durand halluciné vers mon cabinet. Je crois que je suis tellement sidéré que je ne tilte l'absurdité de la situation que lorsqu'il me repousse et me claque la porte au nez.

Wilfried arrive pour chercher sa patiente (qui tente de retenir un rire nerveux) et l'entraîne dans son bureau avant de me lancer un regard intrigué.

— Il est où Durand ? Tu l'as expédié ou quoi ? Si oui, bien joué !

Je hausse les épaules, je préfère éviter d'en parler mais il entend les voix de Peter et monsieur Durand en provenance de mon bureau.

— Je te raconterais tout à l'heure... C'est compliqué !

Je vais dans le bureau de l'ancienne secrétaire et me prend un café. Le pire c'est que ça fait dès années que je tanne Durand pour aller voir un ORL et qu'il s'y refuse.

Un quart d'heure plus tard, je vois Peter sortir du bureau en tapant dans le dos de Durand qui lève à mon attention un pouce vainqueur. Avec un sourire très figé, je le félicite d'avoir franchi le pas et il m'annonce que Peter va l'opérer sur la clinique de Saint-Jean dans quinze jours. Ma tête doit parler pour moi car Peter m'explique qu'il a passé quelques coups de fils et qu'on ne lui refuse jamais rien et que la santé des gens prime sur tout.

Je crois qu'à cet instant, je comprends la phrase énigmatique de Constance, ce type est une pire qu'une lampe halogène, les gens s'y collent avec plus de ferveur qu'une luciole.

Il est en train de manipuler un sachet de tisane les deux marmottes.

— C'est votre vieille bique de secrétaire qui boit du pisse-mémé ?

— On a pas de secrétaire ! On est passé à doctolib.

— ah ok, le vieux snock que tu as comme associé ?

Rester calme ...

J'attrape mon téléphone et tape un SMS pour Constance.

{Aimez-moi}
Viens chercher Peter ! Il me gonfle !

{Super Adler}
Surtout pas ! J'en veux pas garde-le, Marco peut pas le blairer et on fait l'électricité.

{Aimez-moi}
Tu vas me le payer cher

{Super Adler}
Toujours prête à payer en nature mes dettes à ton encontre :)

Peter me dévisage longuement et soupire :

— On dirait qu'elle ne veut pas de moi aujourd'hui.

— Il ne fallait pas la tromper.

— C'est facile toi tu ne connais que Super Adler...

Je suis estomaqué comment sait il que c'est son surnom ? Il s'aperçoit de sa bourde et bafouille.

— Oh c'est bon, j'ai juste lu vos textos tu n'avais pas verrouillé ton téléphone...

— ... Ça vas pas, non !

— Quoi c'était marrant et édifiant. Mais arrête de me couper dans ma phrase, je disais juste que toi tu connais Super Adler mais moi je vivais avec Casdler.

Devant mon air interrogatif il s'agace.

— Casper et Adler ? Ou castratrice comme tu veux.

Mouais ... qui m'a dit qu'il avait un humour décapant ?

— Bon laisse tomber, tu es encore tendu. Je vais t'expliquer. Elle me laissait six mois de l'année seul et quand elle était là, c'est à peine si on se croissait . Elle était tout le temps fatiguée et me sortait l'excuse de la migraine très souvent. Donc j'ai été dissipé et j'ai cédé aux femmes qui me sautaient dessus. Et elles ne prenaient pas toutes l'attention pour elles...

Il griffonne en même temps les mots croisés et me surprend par la même occasion, c'est qu'il est doué le con !

Il relève la tête et un vague instant je perçois l'homme derrière le guignol. Mais aussitôt son masque d'ironie reprend place.

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