Gober les mouches

Aimé

Oh ... My ... God !

...

Qu'est-ce que c'est que ce bordel !

On est installé dans la véranda, chez moi quand on aperçoit la silhouette de Peter accompagné de Jésus. Mais pas n'importe quel Jésus, un après "reine du shopping" ou "pretty woman"

Et Christina Cordula semble être Peter qui se tient en retrait, pas peu fier du résultat.

Il est habillé avec un jean serré bleu moyen, une chemise cintré recouverte en partie par une veste de costard chic et j'aperçois des bretelles. On en parle des bretelles ? Ma mère m'en mettait pour "faire bien" mais la vérité c'est que je trouvais ça hideux. Alors pourquoi sur Marco ça rend super bien ?
Il lui a quasiment rasé les cheveux sur les côtés alors en soit ce n'est plus vraiment Jésus, c'est plus Sexy Marco. Même si, entre nous, Marco a un visage trop atypique pour être qualifié de "beau gosse" je cogite donc pour le demander s'il est BCBG au sens de Peter ou juste BC... Et quel âge il a ? Dépenaillé il faisait la cinquantaine et là je me rends compte qu'il est à peine plus âgé que nous. Merde !

À côté de moi, Constance a la bouche ouverte d'admiration, mon sex appeal en prend une claque.

— Ferme la bouche, tu vas gober les mouches !

Marco nous regarde et sourit.

— Ça vous plait ?

Plutôt mourir que de dire oui...

— J'adore ! S'exclame Constance toujours nichée au creux de mes bras. C'est en quel honneur ? Avec ta paie tu t'es décidé à acheter quelque chose ?

— Non c'est une avance sur salaire pour  repeindre ma maison, s'exclame Peter, théâtralement.

Grand moment de flottement ! Mes mains se glacent.

— Ta quoi ?

— Je viens d'accepter de muter chez Beldari. Après d'intenses supplications de sa part, bien évidemment. Et puis comme tu n'as pas réagi quand je t'en ai parlé j'en ai déduit que tu étais OK.

En une fraction de seconde notre regard ébahi est passé de Marco à Peter... je crois qu'en cette même fraction, mon paradis est devenu un enfer. Vivre à proximité de Peter, tout un poème !

— Mais pourquoi ? Balbutie Constance.

— Pourquoi pas.

Marco nous lance lui aussi un regard désespéré mais Constance le rembarre.

— Ah non ! Tu l'encourages dans ses conneries, je ne vais sûrement pas te plaindre ! Et pourquoi tu as accepté ça en plus ?

— Pour être beau pour ma fille quand elle vient. Je veux pas qu'elle voit le SDF. Et après finir chez toi, il faut travail.

Je comprends qu'il veuille que Giulia soit fière mais il aurait pu nous demander plutôt que de pactiser avec l'ennemi, rien que pour éviter ça j'aurais été près à refaire toute la baraque ! Et même moi je l'aurais rendu beau comme un pape. Le fait que ce soit Peter qui l'ai fait n'est pas complètement philanthropique. Ce pervers narcissique essaie encore de me rendre jaloux.

D'ailleurs Peter s'invite et dépose un grand sac sur la table de ferme qui trône dans ma véranda.

— Allez à table ! Hervé arrive, on mange chinois ce soir pour fêter ça. Je t'emprunte le micro-onde parce que c'est froid, Montpellier c'est pas la porte à côté.

— Justement tu te vois faire la route tous les jours ?

— T'es touchant de te préoccuper de ça. N'ai pas d'inquiétude.

Constance se lève et va s'assoir à table, elle me jette un regard défaitiste et je me demande à son clignement de paupière, si elle ne tente pas le morse pour me lancer un S.O.S

Pourtant ... durant le dîner, entre désespoirs et admirations, je m'éclate. Entre rembarrer Peter et rire de ses blagues, je passe une très bonne soirée. Pour autant quand Constance, le soir, me dit que c'était un calvaire - ce que je soupçonne d'être faux d'ailleurs - je lui dit "m'en parle pas"

Parce que, il faut au moins lui accorder ça, Peter est de bonne compagnie, il est cultivé, intelligent et drôle. Ce qui compense un peu le fait que dès qu'il ouvre la bouche on veuille le claquer.

*

Constance

Dès le lendemain, après mes deux consultations post-op et mon coup de fil incendiaire à Beldari, je vais tambouriner à la porte de Peter. Personne ne me répond, typique !

{Casdler}
T'es où ?

{The emmerdeur}
Pourquoi ? Je te manque ?

{Casdler}
Faut qu'on parle affaire !

{The emmerdeur}
Tu me fais pas peur Constance ! Je suis avec Mamé en direction du lac des Pises, c'est vrai que tu avais promis de l'emmener et que tu ne l'as pas fait ?

{Casdler}
Zut ! #%!@ !

{The emmerdeur}
Attends tu n'as toujours pas appris à jurer dans un texto ? Trop drôle ! Ça te sert à quoi d'avoir Bac+14 !

Une appréhension me saisie...

{Casdler}
Qui conduit Peter ? Si tu me parles par texto ?

Pas de réponse ... Il paiera pour chacun des coup bas qu'il me fait, j'en fais le serment.

{The emmerdeur}
Pas moi :) Mais t'inquiète on est à l'arrêt, on ramasse un renard tout maigrichon qui voulait monter dans la voiture. Je crois que je suis le petit Prince.

Respire Constance  !

Mon amoureux arrive en sifflotant de l'autre bout de la place avec Hervé, c'est son après-midi de libre... une idée me vient.

— Hé les gars ! Ça vous dit un pique nique dans le plus bel endroit de la terre ?

— T'es folle ! Il fait moins dix degrés.

Hervé exagère toujours. Je désespère, j'ai aucune envie d'y aller seule. J'essaie une nouvelle tentative de séduction mais j'échoue à nouveau.

— Peter a kidnappé Mamé et passe encore pour le Dieu vivant.

Devant leurs regards sceptiques, je suis bien obligé de tout leur avouer. Mais la moue dubitative de Aimé m'annonce que la partie n'est pas gagnée.

— Attend, c'est là où vous êtes tombés en panne avec Marco ?

— Oui bon ça va hein ! C'est pas une fatalité ! Puisque c'est ça j'y vais toute seule.

Ça, cela doit être l'argument qui fonctionne parce que Aimé s'empresse d'être de la partie et que Hervé n'a guère d'autre choix que de nous suivre. Sa condition me surprend un peu, il veut qu'on passe chercher Marco avant. Mais il me semblait bien moi que Marco refusait de remonter dans Titine avec moi pour y retourner.

Sauf que visiblement, il a oublié car je me retrouve dans une voiture pleine de testostérone avec la musique des Bee Gees qui gueule à tout va dans l'habitacle.

Trois-quart d'heures plus tard, l'installation des pneus neiges et un calage en côte plus tard, on est sur le parking du lac des Pises. Il faut vraiment le vouloir pour arriver là, il faut serpenter des heures, traverser les plateaux gelés des Causses, serpenter à nouveau en épingle à cheveux pour atterrir sur tout petit parking mal balisé. Hervé sort de la voiture et reste pantois devant la voiture de Peter...

— Pourquoi y a un renard miteux qui dort dedans ?

Marco s'approche à son tour et tapote la vitre, ils me regardent tous deux interrogatifs.

Je hausse les épaules, à quoi bon répondre !

On prend en silence le chemin verglacé pour se rendre au lac. On passe le quart d'heure qui suit à regarder nos pieds pour ne pas tomber, j'ai une réminiscence de mes piètres tentative de faire du ski il y a six ans. Si Mamé ne s'est pas cassée une hanche avec ça ...
Je vais tuer Peter, c'est décidé !

Puis soudain la vue du lac me calme.

L'étendue gelée qui s'offre à nos regards n'a plus rien à voir avec mes souvenirs estivaux mais ça n'en demeure pas moins très poétique.

Aimé passe son bras dans le bas de mes reins et me retient pour m'embrasser passionnément.

— En quel honneur ?

— Pour ça. Pour cette vie pleine d'imprévus depuis que je te connais.

Ou depuis qu'il connait Peter mais je m'abstiens de tous commentaires.
On avance en se tenant le bras jusqu'à ce qu'on les trouve.

Je dois au moins lui reconnaître une chose à Peter, son affection pour Mamé est réelle. Elle se tient contre lui, recouverte d'un grand manteau en fourrure qui me donne de l'urticaire rien qu'à penser que cela provient d'animaux. Son sourire est immense en nous voyant tous les quatre arriver vers eux.

Peter lance haut et fort.

— Ma chérie, je disais justement à ta grand-mère combien tu étais ravie que j'ai pu te rejoindre ici, dans les Cévennes.

— Quoi ?

— Mais oui, mon cœur tu sais, tu me disais justement hier que nous devrions accélérer le mariage.

Oh ... le ... con ! Il fait croire à Mamé qu'on est toujours ensemble. Je sens Aimé se tendre comme un arc dans mon dos.

— Deux mois Constance et tu n'as rien dis à ta grand-mère ?

Oui enfin, il y avait autre chose que je devais dire à Mamé de plus grave et je n'ai pas réussi.
... donc bon, l'information je sors avec Peter/Aimé n'est pas passée et alors ?

"The emmerdeur" sourit, fier de lui, puis j'aperçois l'ébauche du sourire de Mamé, elle est dans le coup ?

— Mamé, je ne suis plus ...

Elle hoche la tête et tape Peter dans le dos. Aimé se dégonfle comme un ballon de baudruche à mesure qu'elle parle.

— Tu m'étonnes, il est infernal ! Je l'adore mais il faut quelqu'un de plus patient que toi pour le supporter. C'est un exploit que tu ne l'ai pas étripé avant.

Elle me fait place entre Peter et elle avant de me serrer dans les bras. Peter pose une main sur mon épaule.

— Je ne pensais pas qu'on serait si nombreux mais ça devrait le faire. Qui a faim ? Y a même du Saumur Champigny.

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pour ou contre que Peter s'installe vraiment dans le coin ?

Il prépare une nouvelle connerie, je vous annonce la couleur.

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