Le vaisseau était à peine sortit d'hyperespace qu'Hélèna sélectionna la liaison enregistrée dans son holocom, la boule au ventre.

Pendant qu'une sonnerie lui annonçait que le contact avait été effectué avec succès, elle décida de ne rien dire à propos de Larièn. Même si son enquête avançait, elle était encore loin d'être en mesure d'affirmer pouvoir la libérer un jour... Et elle ne voulait pas donner de faux espoirs à Elby.

La sonnerie se tut, et elle entendit un léger bruit, comme si quelqu'un avait décroché, mais ne parlait pas. Au bout de quelques secondes, une voix de clone annonça « Vous êtes sur un canal privé. Identifiez-vous. »

Bien sur, la liaison avait été ouverte depuis leur casque, aussi ils n'avaient pas l'image. Et ils n'étaient pas au courant qu'un commando l'avait aidée à pirater leur fréquence. Si c'était bien eux...

« C'est Hélèna, je... heu, pardon de vous déranger... » Dit-elle de manière un peut gauche.

Elle n'eut pas le temps de finir qu'un autre claquement se fit entendre, comme si un micro supplémentaire s'était branché sur la fréquence.

« Ner vod, c'est bien toi ? » Sans aucun doute, c'était Quinnan.

Le cœur d'Hélèna bondit dans sa poitrine. Sprinter avait bien fait son travail, la liaison était bel et bien établie. Et elle parlait à son Vod, qui semblait ravi de l'entendre.

« Oui, c'est moi. Comment-allez vous tous ? »

« Oya, c'est Elby. Ici ça va pas mal et toi ? Mais dis-nous, comment as-tu fait pour te brancher sur notre com' interne ? Nos appareils sont ultra-sécurisés. Et on n'a pas pu te joindre depuis un moment... »

« Je vous expliquerai, j'ai plein de choses à vous raconter ! »

« En tout cas on est ravis de t'entendre ! » Ajouta Quinnan.

« Moi aussi ! Alors vous ne m'aviez pas oubliée ? »

« Jamais de la vie ! Mais ça a été pas mal mouvementé par ici, on a eu chaud au shebs ! »

« Comment ça ? »

« Confidentiel »

Bien sûr... La conversation n'avait pas tellement changée depuis la dernière fois où elle leur avait parlé. Mais elle était heureuse de les entendre, même si elle ne pouvait pas savoir où ils se trouvaient ni ce qu'ils y faisaient. Elle ne pouvait expliquer ce sentiment, mais elle s'était attachée à eux, et elle avait eu peur pour eux ces derniers mois. Peut être que le fait de survivre à leurs côtés au moment où elle apprenait la mort de ceux qu'elle avait considérés comme sa famille y avait contribué. Mais elle avait maintenant le sentiment que ces quatre hommes étaient tout ce qu'il lui restait au monde. Même si parmi les quatre elle en appréciait certains plus que d'autres, elle avait appris à tous les estimer, même Ebonn. Et les savoir en vie lui apportaient du réconfort.

« Tu es où Hél'ika ? » La voix de Quinnan se faisait douce au travers de l'holocom. Ils avaient tous le même timbre de voix et des cordes vocales identiques, mais ils n'avaient pas tous la même manière de parler. Elle s'en était rendu compte avec les commandos. Tous les clones avaient des accents et des débits de parole différents, même si ils variaient plus d'une compagnie à une autre qu'entre frères.

« Confidentiel » Lui répondit Hélèna en riant.

Elle entendit plusieurs voix rire à leur tour dans l'appareil de communication.

« Est-ce qu'on peut espérer se revoir un jour ? » Leur lança-t-elle. Elle se posait cette question depuis longtemps, et elle espérait de tout son cœur que cela soit possible.

« On ne peut pas te dire où on se trouve. Mais on en a bientôt fini ici. Après je ne sais pas encore si on aura droit à une perm' ou si on nous envoie ailleurs... Mais si on peut, on viendra te voir sur Kuat, si tu y es toujours. »

« J'y serais » Elle n'avait nulle part d'autre où aller puisque son vaisseau n'était toujours pas en état de voler. Et de toute manière elle comptait bien les y attendre là bas s'il y avait un infime espoir qu'ils y passent.

« Bon, on doit te laisser, on est en plein débriefing de mission. »

« Vous êtes sérieux ? »

« Bah quoi ? Ils ne peuvent pas nous entendre au travers des casques... » Ria Elby.

« On pourra te joindre sur ce canal ? » demanda Quinnan.

« Absolument, quand vous voulez ! »

« Alors à bientôt, prends soin de toi Ner Vod ! »

La liaison coupa, laissant place à un grésillement.

Hélèna se laissa tomber sur la couchette de sa cabine, le sourire aux lèvres. Elle était rassurée, elle les avait enfin entendus et ils allaient bien. Pourtant, elle éprouvait comme un vide à l'intérieur d'elle. Comme si ce n'était pas suffisant. Elle ignorait où ils étaient et ce qu'ils y faisaient. Tout ce qu'elle savait c'était qu'ils avaient fini une mission et qu'ils s'apprêtaient à recommencer à risquer leur vies pour la république. Hélèna s'était attachée à eux mais elle aurait préféré qu'ils ne travaillent pas pour une république corrompue qui les utilisent comme de simples droïdes. Qu'ils n'aient pas une croissance accélérée qui leur fasse manquer la moitié de leur vie. Bref, qu'ils ne soient pas des clones. C'était tellement injuste !

Elle frissonna et se glissa sous la couverture. Elle ferma les yeux et entreprit de prendre un peu de repos, mais n'arriva pas à s'enlever ces idées de la tête. Elle repensa à Quinnan, qui n'avait pas eu d'enfance. Ce gamin de 13 ans qui avait vu son premier frère mourir à l'entrainement... La gorge d'Hélèna se serra. Combien d'autres clones étaient éliminés pendant les entrainements ou « reconditionnés ». Elle ignorait encore ce que signifiait ce mot, mais il lui donnait des frissons depuis qu'elle l'avait entendu de la bouche de Quinnan puis des commandos. S'ils étaient encore très jeunes biologiquement, il était évident que la croissance accélérée ne touchait pas uniquement leur corps. Leur esprit avaient également évolué beaucoup trop vite, probablement agrémenté d'un bourrage de crâne intensif dès leur plus jeune âge. Mais il leur manquait une partie essentielle du développement. Hélèna sourit en repensant à cela. La sociabilité n'était pas leur point fort. A aucun d'entre eux. Bien que certains fassent des efforts considérables pour communiquer, ils restaient des enfants à ce niveau.

On frappa à la porte de sa cabine, la sortant de ses pensées. Elle sortit du lit et se dirigea vers la porte, mais se rendit compte à ce moment là qu'elle était épuisée et avait froid. Elle attrapa la couverture et la balança sur ses épaules avant d'ouvrir. C'était T'ad qui se tenait à l'entrée et se balançait d'un pied sur l'autre, l'air embêté.

« Je ne te dérange pas ? » Dit-il en regardant à l'intérieur de sa cabine.

« Non, c'est bon. Ça ne va pas ? » Elle ferma un peu la porte, pour ne pas qu'il voit tout le bazar qu'elle avait mis en se changeant rapidement avant d'appeler ses frères.

« Tu as pu les joindre ? »

« Oui, merci d'avoir demandé à Sprinter de faire ça. »

« Pas de quoi. Heu... Tu peux venir un instant ? Olan voudrait te dire quelque chose. »

Hélèna regarda dans sa cabine, l'holocom qu'elle avait posé sur son lit. Pas la peine de le prendre, ils ne rappelleraient surement pas ce soir.

« Bien sur. » Dit-elle en fermant la porte derrière elle et en le suivant, la couverture toujours sur les épaules.

Olan et Sprinter regardaient les fichiers qu'elle avait aidé à récupérer, tous les deux assis sur les banquettes. En s'asseyant à côté d'eux, elle ne put réfréner un bâillement. Maintenant que la pression était descendue et qu'elle s'était étendue quelques instants, elle se sentait réellement à bout de force.

Le regard d'Olan se posa sur elle.

« Désolé de t'embêter avec ça, tu voudrais sûrement te reposer en ce moment... Mais il fallait qu'on te montre ça... »

Il tourna le datapad vers elle. Elle vit la photo d'un homme qui lui arracha un hoquet de stupeur.

« Sur les fichiers volés se trouvent les identités des plus farouches opposants à la république. Tu connais cet homme, pas vrai ? »

C'était... impossible ! Et comment s'avaient-ils qu'elle le connaissait ?

« Qu'est ce qui vous fait dire ça ? » Demanda-t-elle à Olan, suspicieuse.

« Je t'en prie ! » S'énerva Sprinter derrière. « On t'avait bien dit qu'on s'était renseigné sur ton passé non ? Tu peux nous expliquer comment un de tes anciens compagnons se retrouve à la tête d'un mouvement séparatiste ? »

« Non, c'est impossible, il y a erreur... »

« Sénateur ! Il est sénateur chez les sép' ! Tu sais ce que ça signifie ? Il rallie des mondes à leur cause. Il perpétue la guerre. Et c'est notre ennemi. »

Tout se bousculait dans la tête d'Hélèna. Elle croyait que Simold était mort. Et le voilà ressortit d'outre tombe, et chez les sép'... Non ça ne tenait pas debout... Il avait quitté leur groupe lorsqu'ils avaient liquidé leur activité de piraterie au profil de la contrebande. Au moment ou Jakin était décédé... Depuis elle n'avait eu aucune nouvelle et toute tentative de retrouver sa trace s'était avérée un échec.

Aujourd'hui elle avait sa photo sous les yeux et elle remarqua qu'il opérait même sous son vrai nom.

« De toute manière je n'ai plus rien à voir avec lui depuis qu'il nous a abandonnés » Déclara-t-elle en redonnant le datapad à Olan.

« Ça, on le sait bien. Mais on a un service à te demander. Vu que tu l'as connu... »

« Vous voulez que je le coince pour vous ? C'est hors de question ! » Les larmes montèrent aux yeux d'Hélèna. La fatigue, l'énervement et surtout voir ce qu'était devenu le petit garçon qu'elle avait recueilli à bord de son vaisseau... C'en était trop pour la journée !

T'ad, qui se tenait toujours debout derrière elle, intervient :

« Non, il ne s'agit pas de ça. On ne te demanderait jamais de piéger un frère ! »

« On voudrait juste que tu prennes contact avec lui et que tu essayes de lui arracher des infos. » Compléta Sprinter. « C'est une chance inespérée pour nous. Cette liste de noms, ça fait 7 mois qu'on essaye de la récupérer. Et si ça se trouve, les infos qu'il nous manque se trouvent entre les mains de ce type, que tu connais déjà... »

« Vous voulez juste savoir ce qu'ils préparent ? »

« Exact, on ne lui fera rien. »

« C'est quoi ces informations dont vous avez tant besoin ? Vous ne pouvez pas lui demander vous-même ? » Hélène ne savait pas encore si elle avait envie de revoir Simold. En tout cas, pas dans ces conditions...

« C'est quelque chose de capital pour l'avenir de tous les clones. » Dit-Sprinter très sérieusement, en la regardant dans les yeux.

« Écoute, il faut que tu sache qu'on peut lui extraire toutes les infos qu'il possède. » renchérit-Olan « On est doué en interrogatoires aussi, mais j'espère juste pour lui qu'il craquera rapidement... »

« Vous parlez de le torturer ? » Elle était choquée d'entendre Olan lancer ça comme ça.

« C'est justement parce que tu le connais qu'on s'est dit qu'il existe surement une méthode plus simple et plus rapide. »

« J'ai un deal pour toi » Coupa Sprinter avant que la conversation ne tourne mal, face au manque de tact d'Olan. « Un de nous vient avec toi au rendez-vous, au cas où ça tourne mal. Et pendant ce temps les autres vont chercher l'esclave sur qui tu nous as demandé des infos. »

Hélèna le regarda longuement sans savoir quoi répondre.

Ce pouvait être une chance inespérée. Elle savait bien que les commandos avaient plus de chance qu'elle de récupérer Larièn. Et ils agiraient plus vite... Elle ne pouvait pas décider égoïstement de la laisser croupir en attendant d'avoir réparé son vaisseau... mais en faisant ça elle portait préjudice à un vieil ami. Un ami qui l'avait abandonnée, qui était devenu séparatiste, et qui avait visiblement des informations importantes pour les clones, ses Vodes compris.

« C'est d'accord »

T'ad émit un rire de satisfaction derrière elle tandis qu'Olan la regardait toujours durement.

Sprinter, quant à lui, s'empara du datapad et se mit à pianoter dessus.

« Mais j'ignore si il se laissera approcher comme ça, il sait que je ne serais jamais du côté des Sép' et on ne s'est pas parlé depuis des années. Il se méfiera surement. »

« T'inquiète pas pour ça » Dit Olan, « on va faire fuiter l'information que ton vaisseau a été détruit et que tu es encore en vie. Il te contactera lui-même, pensant que l'idée vient de lui. »