On a droit à la suite ?
MAËLLE : Vous vous êtes rencontrés comment ?
EMILE : On était amis depuis longtemps. Depuis la première année d'université. Enfin pas vraiment ; on se connaissait depuis le début mais on est devenus amis progressivement. Après, Rose est partie à l'étranger, elle a voyagé quelques années.
ROSE : Et je n'ai plus eu de nouvelles.
EMILE : Jusqu'à ce que je publie mon roman.
MAËLLE : Celui qui parlait de Nora et de toutes les autres filles à qui tu ne convenais pas ? Je l'ai lu. Un peu trop mélodramatique à mon goût. Et le héros ne te mettait pas vraiment à ton avantage. Tu sembles lui accorder si peu de mérite ; il se déprécie constamment c'est assez agaçant. Mais la fin est géniale ! Exactement ce qu'il fallait !
EMILE : J'aimerais pouvoir la réécrire. Ajouter une fin après la fin.
MAËLLE : Pour mettre Rose dans l'histoire ? C'est adorable ! Comment ça se fait que ton roman vous ait rapprochés d'ailleurs ?
EMILE : Elle l'a lu. Et en le lisant elle a compris que j'avais changé.
ROSE : J'ai compris qu'il n'avait pas changé surtout. Je suis tombé sur ce livre dans une librairie, j'ai vu son nom dessus alors forcément je l'ai acheté. Et plus je lisais, plus je le reconnaissais, plus je me souvenais. Et j'ai réalisé à quel point il me manquait. Et je me disais que peut-être, seulement peut-être, maintenant c'était le moment. Que peut-être que à présent il pourrait me voir différemment. Qu'il recherchait enfin quelque chose de différent.
MAËLLE : Différent de quoi ?
ROSE : Différent de Nora.
MAËLLE : En quel sens ?
EMILE : Et donc Rose m'a écrit. Elle ne m'a pas écrit un mail, comme tout être humain normalement constitué l'aurait fait.
MAËLLE : Elle t'a écrit une lettre ? Comme les êtres humains anormalement constitués que vous êtes vous autres étudiants en littérature ?
EMILE : Quand je dis « pas comme les êtres humains normalement constitués », c'est un compliment. Mais Rose ne m'a pas écrit une lettre. Elle m'a écrit un livre. Elle m'a envoyé un mail qui disait simplement « Voici le dernier récit autobiographique que j'ai écrit, avec quatre ans de retard. Si jamais t'as le temps pour une relecture... » Mais il y avait une pièce jointe.
MAËLLE : Et que racontait cette pièce jointe ?
ROSE : Oh, c'est euh. C'est personnel. Trop personnel pour que ça finisse un jour dans une librairie. Disons que c'était une réécriture de mes journaux intimes de l'époque où lui et moi étions amis.
EMILE : Et en la lisant, j'ai compris à quel point j'avais été bête. A quel point j'avais été aveugle. Alors je lui ai répondu. Par une lettre en fait, je suis bien forcé de l'admettre, aussi cliché que ce soit. C'était une lettre d'excuses.
ROSE : A la fin de laquelle il me proposait de le voir quand je rentrerais en France.
EMILE : Et par chance elle est rentrée un mois plus tard. Alors je l'ai vue, on a discuté. Et tout est revenu : tous les liens qu'on avait créés auparavant. Sauf qu'à présent je pouvais leur donner un sens différent. A présent j'étais capable d'en reconnaître la valeur.
ROSE : Et voilà.
MAËLLE : J'ai compris : je devrais me contenter de la version abrégée.
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