1 - Prologue
Point de vue Sada
<< Tu t'étonnes de ce qui se passe ? Remets toi en question Sada, t'es une putain d'égocentrique ! T'es toujours froide et même au lit, j'ai l'impression de baiser avec une statue de bronze ! Tu parles jamais de tes sentiments, je me rappelle même pas de la dernière fois que tu as dis que tu m'aimais mais tu veux constamment que je te prouve que je t'aime ! Pire encore, quand tu me parles c'est toujours pour te plaindre mais sinon, RIEN ! Tout le monde ne tourne pas autour de ton putain de nombril de princesse pourrie gâtée ! Je suis pas ton bouche trou !! Oui je t'ai trompé, et je ne regrette pas ! Avec elle je me sens moins étouffé ! >>
Je ne dis rien et l'écoute sans l'interrompre, ni me mettre en colère. J'ai récemment découvert que mon mec m'avait trompé avec une "collègue" de son agence, car oui, mon futur EX copain est un héros stagiaire dans une petite agence de quartier. Il s'appelle Jun et n'a qu'un an de plus que moi. Ca faisait même pas trois ans de couple et notre relation n'a fait que se détériorer. Entre temps, on s'est déjà séparés deux fois et remis ensemble pour la même raison : des problèmes de communication.
Aussi, on n'a pas exactement la même vision du monde et de la société actuelle. En gros, il avait des attentes et une vision du couple différentes des miennes. J'ai essayé de changer pour améliorer les choses, d'être plus douce et compréhensive, plus à l'écoute, mais j'avais l'impression que Jun, de son côté, me prenait pour acquise à chaque fois qu'on se remettait ensemble. Au bout de la troisième fois, j'ai joué la carte de l'indifférence et je n'ai plus fais d'effort pour le tester, et voir s'il était prêt à changer pour moi. Total, je l'ai surpris au lit avec une autre. Etonnamment, je ne me suis pas énervée, ça m'a juste surprise sur le coup. La fille est partie en s'excusant devant moi et depuis une bonne heure, j'encaisse les sermons de Jun en restant la plus sereine possible.
<< Tu vois comment tu es ? Tu fais toujours la même tête, je sais même pas ce que tu penses, si tu es en colère ou triste ! Tu penses qu'à toi, tu te rends pas compte à quel point c'est déprimant d'être avec toi ! J'ai pas l'impression de compter pour toi ! >>
- Tu as fini ?
<< C'est tout ce que t'as à me répondre ?! >>
- Et tu voudrais quoi ? Que je te crie dessus et te jette des trucs à la gueule comme une hystérique ?
<< Franchement ouais, juste pour me montrer que t'as des sentiments pour moi, à quel point ça te fait mal de savoir la vérité ! >>
- Et t'as rien trouvé de mieux que me tromper en espérant me rendre jalouse ?
<< Putain Sada, je suis quoi pour toi ?!! >>
Je continue d'affronter son regard déformé par la colère de voir le mien aussi stoïque. Bien sûr que j'ai mal au fond de moi, parce que d'une part je l'aime encore, mais je ne vois pas en quoi ça améliorerait notre relation de péter les plombs, alors que le mal est fait. J'ai toujours eu l'habitude de refouler mes émotions et quand bien même, il y a parfois des jours où j'ai besoin d'extérioriser, mais j'ai mes propres méthodes solitaires pour m'apaiser.
- À ce moment précis, tu n'as plus aucune valeur pour moi.
<< Parce que j'en avais avant ?? T'as une drôle de façon de l'exprimer ! >>
- C'est vrai. Tu as raison sur toute la ligne, je ne montre pas assez mes sentiments. Pourtant, ce n'est pas faute de t'avoir prévenu au début de notre relation. Je t'avais dis qu'il était très difficile d'être à mes côtés, est-ce que tu m'as écouté ? Tu m'as dis "C'est pas grave". Pour ma part, c'est toi que je ne comprends pas. Ca t'allait jusqu'à notre première rupture et maintenant tu te plains de ce que je t'ai mis en garde.
<< Je rêve où tu te victimises ? >>
- Non, je dis simplement la vérité parce que je me rappelle très bien que c'est toi qui m'as abordé pour sortir avec moi. Je n'ai jamais fais un pas vers toi pour être en couple, tu es venu de ton plein gré. Mais puisque que c'est le jour des vérités, laisse moi te partager mon point de vue. J'ai l'impression que ce qui t'énerve, c'est de ne pas avoir réussi à me formater à l'image parfaite de la "bonne petite amie" que tu aurais voulu que je sois.
<< Hein ?? Quelle image ?? >>
- Celle de la petite amie qui t'accueille à bras ouverts quand tu rentres du boulot, qui te comble d'affection à chaque pas que tu fais, qui te rassure au moindre stress, qui te soutient et partage toujours ton point de vue, qui te dis Amen à tous tes désires etc... Le cliché de la bonne femme au foyer qui prend le rôle de ta mère en soi.
<< Je n'ai jamais voulu que tu changes comme ça ! >>
- La preuve que si, tu viens de me le reprocher.
<< Non ! Je voulais juste que t'arrêtes d'être toujours stoïque et quand j'avais besoin de ton soutien, c'était selon tes humeurs autrement t'étais jamais là pour moi ! >>
- Et qu'est-ce que tu voulais que je fasse quand tu te plaignais toujours que tes parents te soûlaient ? Je n'ai pas à me mêler de vos conflits familiaux non plus.
<< Juste me montrer ta présence, c'est trop demandé ?!! >>
Je soupire longuement. Voilà où est le problème qui ne peut malheureusement pas être résolu... En tout cas, pas avec moi.
- Au lieu de me reprocher des choses, tu devrais essayer de régler tes problèmes d'insécurité. Sans vouloir te vexer, j'ai l'impression de me "disputer" avec un enfant de six ans en pleine crise due au manque d'affection.
<< Pardon ?! Parce que tu crois que tu es toute blanche dans l'histoire ?!!! >>
- Déjà commence par arrêter de crier, je ne suis pas sourde... Et non, je sais que j'ai fais des erreurs, mais j'estime avoir assez donné de ma personne dans cette relation et je me suis rendue compte bien avant toi qu'il n'y avait rien à faire. Nous deux, c'était pas fait pour durer.
<< ... T'es en train de me larguer ?? >>
- Quoi d'autre ? Tu espérais que je te donne une seconde chance alors que tu m'as trompé ? Désolé mais la polygamie c'est pas mon truc.
Jun me dévisage avec un air de colère de me voir aussi sereine, alors qu'à l'intérieur j'ai juste envie de lui arracher les yeux et de l'enterrer vivant pour ce qu'il m'a fait. Malgré tout, j'ai préféré agir calmement et sa réaction n'en est que plus jouissive. Je n'ai rien à me reprocher, bien qu'il essaie encore une fois de me prouver le contraire. Je sais quel rôle j'ai joué dans cette relation, mais je ne compte pas m'excuser pour autant. Il m'a trompé, alors cette rupture est légitime et je ne compte pas lui pardonner.
Je le regarde rassembler ses affaires et partir en claquant la porte, me laissant seule dans l'appart' maintenant silencieux. J'ai dis ce que j'avais à dire, ma colère s'est estompée aussitôt qu'il est parti. S'il ose se repointer devant moi avec des paroles mielleuses - ou cinglantes selon son humeur - comme il a l'habitude de le faire pour me reconquérir, je ne serai peut être pas aussi gentille qu'aujourd'hui. En tout cas, j'espère ne pas avoir à en arriver là, car disons que j'ai assez de dossiers à diffuser pour réduire sa vie en véritable fiasco merdique.
'Faut pas me chercher.
Bref, il m'a fallu un peu de temps pour retrouver une vie normale, bien que j'ai toujours préservé ma solitude et mes habitudes. Trois ans de relation ne disparaissent pas du jour au lendemain, j'en avais conscience. Quelques mois plus tard, j'ai mis l'appartement en vente et pris le premier avion pour le Japon. J'étudiais le japonais en cachette et j'avais déjà tout prévu à l'avance sans en parler à qui que ce soit. Même ma propre famille ne se doute pas d'où j'allais, j'ai d'ailleurs coupé les ponts avec eux dans la foulée. Maintenant, on peut dire que je suis bien seule au monde. J'ai tout laissé tomber pour me centrer sur moi même et peut être... réussir à être heureuse pour une fois. Du moins avoir la joie de me réveiller tous les matins avec le sourire, comme dans les animes.
Ma vie n'est pas plus horrible que celle d'une jeune fille qui a subi un viol ou de la maltraitance, mais n'est pas plus épanouie qu'une fille qui a grandi dans l'innocence la plus totale avec des parents affectifs et des amis fiables. Les amitiés de mon côté, je ne les ai jamais gardé plus d'un an, seulement le temps de l'école et parfois c'était de mon gré selon les personnes, résultat je suis toujours seule. Tant pis. Les amours, n'en parlons pas c'est tout aussi catastrophique. Et la famille...
Si on peut appeler ça une "famille"...
Une fille qui n'a pas reçu l'affection souhaitée, qui a dû refouler ses émotions et ses traumatismes au plus jeune âge, totalement invisible aux yeux de ses propres parents qui n'auraient jamais dû se marier... Même s'ils m'ont élevé du mieux qu'ils pouvaient, je ne désirais que leur amour, ou du moins qu'ils me le montrent davantage ; je me suis toujours sentie seule, étrangère et incomprise. Ils ne me connaissaient pas si bien qu'ils le prétendaient et quand je parlais, c'était comme si je brassais de l'air de toute façon.
C'est en partie de leur faute si je suis comme ça aujourd'hui. J'ai grandi en étant froide dans tous les sens du terme, silencieuse et repoussante. Je repousse quiconque essaie de percer ma carapace, je n'arrive pas à faire autrement. J'ai assez souffert par le passé, alors je ne laisse plus personne m'approcher... Pourtant, je n'éprouve plus aucun besoin ni l'envie d'être entourée. Ma solitude a prit beaucoup de place dans ma vie.
Donc j'ai choisi de tirer un trait sur tout ce qui était lié à moi dans l'espoir d'être une nouvelle personne, il en va aussi de ma santé mentale. Pendant un an, après mon voyage sans retour, j'ai travaillé par-ci et là pour gagner de l'argent et obtenir des logements. J'ai enchainé les appartements à proximité de mes jobs et perfectionné mon japonais, au point d'oublier mon français. Bien sûr, je comprends toujours ma langue, mais j'ai de plus en plus de difficultés à parler français de nouveau. Disons que j'ai pris l'accent japonais, c'est marrant. Rien que par le langage, je me suis sentie changer de vie, comme si j'avais toujours vécu au Japon depuis ma naissance.
En une année, j'étais devenue à 90% japonaise et je n'ai plus jamais regretté mes choix.
Cependant, comme j'ai cassé mon inscription au lycée - en France -, je suis aujourd'hui déscolarisée, sans diplôme mais qui s'en soucie ici ? Mon Bac français ne me servira pas à grand chose dans un pays étranger. Si ? Bref, on s'en fout. J'ai à peine 20 ans maintenant, l'âge de la majorité au Japon, et j'ai déjà mon propre appartement, puis un travail, je ne demande rien de plus. Au Japon, on m'a laissé ma chance sans réfléchir, même si j'ai longtemps été une source d'attraction pour certains jobs de restauration. Une française serveuse dans un resto japonais, ça attire la clientèle. Je faisais le chiffre d'affaire de mes patronnes et j'étais plutôt fière. Oui je travaille qu'avec des femmes, les hommes japonais sont parfois un peu misogynes...
Bref, tout ça pour dire que j'ai presque oublié mon passé et j'ai réussi mon objectif. Chaque jour est une aventure pour moi maintenant, alors qu'avant je n'aspirais qu'à vouloir remonter le temps pour retourner à mon âge d'enfant, à l'époque où je ne me rendais compte de rien. Aujourd'hui, j'ai 22 ans, je suis une femme, une adulte avec une situation ni précaire ni millionnaire.
Que demander de plus ?
Je mène ma vie d'égocentrique sans jamais me soucier des problèmes d'autrui. Ce monde est cruel, au point de devoir inventer des héros pour maintenir l'ordre. Tss... Même les flics ne suffisent plus à faire preuve d'autorité, il faut carrément des gens aux Alters badass pour casser la gueule à d'autres Altérés qui foutent la merde. Au début, c'était le meilleur moyen de sécurité, mais plus les générations se chevauchent et plus le métier de "Héros" perd de sa noble valeur avec tous ces cloportes auto proclamés héros pour un peu de pub et de fric. Les vilains ne sont pas mieux, le pouvoir leur monte tellement à la tête qu'ils en deviennent fous et abusent de leurs faiblesses pour se faire prendre en pitié, sous prétexte que leurs intentions sont légitimes. Parfois oui, mais la violence a-t-elle résolu les conflits ? En cassant quelques bâtiments ? En dégradant les infrastructures publiques ? En braquant les banques ? En vendant des substances interdites ? Héros comme Vilains, ce sont tous des idiots...
Mais bon, tant que ça n'affecte pas mon petit confort que j'ai gagné avec mon travail acharné, tout ceci ne me regarde pas. Qu'ils fassent la paix ou la guerre, peu importe. Ce monde ne fait que ça depuis des siècles, détruire et reconstruire.
Que ce monde disparaisse, ce n'est peut être pas plus mal en fin de compte. Du moment qu'on me laisse tranquille, pourquoi je devrais chercher à le protéger ? Ce n'est pas moi qui ai provoqué tous ces chamboulements.
Et puis... Je me suis découverte un pouvoir bien pratique quand je veux mettre le monde en pause le temps de souffler.
À l'époque, je n'étais pas très calée en usage d'Alters et selon certains pays, leur utilisation est banalisée voire quasiment inexistante. En France, on comptait très peu d'agence de héros ou de personnes qui en usaient dans leurs métiers. Moi, je savais que j'avais un Alter, mais je ne l'ai jamais vraiment exploité.
Surtout quand on maitrise le temps, 'faut pas faire n'importe quoi non plus...
Je n'en abuse pas comme le feraient des abrutis en s'autoproclamant "rois du monde", je ne me considère pas comme une déesse non plus, j'ai surtout conscience que cet Alter est unique. Le pouvoir de manipuler le temps à sa guise n'est pas toujours un don et je n'ai jamais rencontré d'autres personnes qui possédaient le même pouvoir... Je n'utilise seulement qu'une minute d'arrêt pour remettre les pendules à l'heure et faire le vide dans mon esprit sans être perturbée par le monde extérieur, disons que cette toute petite minute est mon moment de paix intérieure. Une minute équivaut à un ressenti d'une heure pour moi, mais dans le monde, une minute de figée ne dure qu'une fraction de seconde, alors peu d'impact... Sauf pour moi.
Plus j'utilisais mon Alter depuis que j'ai commencé à m'y intéresser, plus le temps me détraquait. Au début, ce n'étaient que des petits vertiges et des maux de tête sans importance, ça ne durait que quelques secondes pour me réhabituer au cours du temps revenu à la normale, puis les douleurs sont devenues plus variées. Après la tête, j'ai commencé à ressentir de fortes douleurs à la poitrine, des difficultés à respirer comme si mon souffle ne circulait plus dans mes poumons, et j'avais plusieurs fois l'impression de sentir mon coeur imploser. J'ai même manqué de faire un AVC pour avoir tiré quelques secondes de plus.
Alors j'ai peu à peu cessé de figer le temps pour une minute et descendu à cinq secondes pour préserver ma santé. Même si le monde ne subissait pas de changements, mon corps en revanche subissait de sacrés chocs temporels. Les humains ne sont naturellement pas conçus pour ce genre de pratique, c'est logique... Si j'avais continué, je crois que j'aurais dis adieu à ma santé et à mon coeur. Je n'ai jamais dévoilé mon Alter, de peur d'être poursuivie par des fous en quête de pouvoir, alors je le garde secret. L'Alter du temps est un fardeau puissant et facile à manipuler, mais comme tous les excès, il y a des sacrifices.
Tant que je resterai cachée, j'espère pouvoir continuer à vivre tranquillement...
À suivre...
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J'ai oublié de préciser, je ne sais pas si je changerai le titre de l'histoire.
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