Chapitre 4 : Jus D'orange Et Plat De Pâte

31 octobre

Il doit être aux alentours de 17h30. La soirée commence donc dans moins de deux heures. J'essayais de trouver une excuse pour me défiler mais Lizzie m'a appelé tout à l'heure et m'a fait promettre d'y aller. Je lui ai dit "promis juré craché" mais sans cracher parce que j'étais dans ma chambre. En revanche, mon chat, qui n'a pas de prénom fixe (en ce moment c'est Freedent), ne s'est pas privé de me cracher une grosse boule de poil sur le tapis. Après ça il m'a toisé d'un air supérieur et s'est lêché le derrière sans aucune pudeur. Je l'adore mais franchement parfois il me dégoute.

Au moins, lui il n'a pas à aller à une soirée. Il a la belle vie. Et surtout, il n'a pas à se préparer pour aller à une soirée. J'ai une de ces flemmes de me maquiller parce que je sais que après je vais devoir me démaquiller et ça c'est hyper fatiguant. Surtout quand il faut enlever le mascaras, ça colle et ça pars super mal.

Plus tard

Après une demi heure passé dans la salle de bain je me regarde dans le miroir pour faire le point.

Je n'ai pas réussie à camoufler mes cernes, je ne peux rien faire pour la pâleur de ma peau et mes deux traits d'eye liner sont clairement asymétrique.

Je ne pourrais pas faire mieux alors je laisse tomber la résolution que j'avais prise de tenter de me rendre irrésistible et accepte définitivement l'idée que je serais affublé toute ma vie du même physique. Au moins, mes grands yeux bleus et mes petites taches de rousseurs que Megan se plaît à qualifier d'adorables, me sauvent la mise.

Je vous arrête tout de suite, je suis loin de ressembler à Angelina Jolie mais je suis aussi loin d'être comparable à Gollum.

Je suis une personne normale avec des défauts que je sais reconnaître et parfois même accepter mais aussi avec des qualités que je n'échangerais pour rien au monde. Certains jours bénis, je me croise dans le miroir et je me trouve même franchement pas mal du tout. Presque belle quoi.

Enfin bref, je suis pas un canon mais je suis quand même pas dégueu. Une adolescente normale quoi, plutôt mignonne sans être une bombe.

Toujours plus tard (aux alentours de 19h30 je dirais)

Mon père nous a déposé dans la rue il y a vingts minutes. Il fait très sombre et les lampadaires grésillent autour de nous. Luna nous fait remarquer que les films d'horreurs commençent souvent comme ça et que, en général, ça ne se finit pas très bien.

- Bon alors, tu nous la trouve cette adresse ? On se les gèles ici ! s'impatiente Megan en frissonnant.

J'ai envie de lui faire remarquer que si elle avait opté pour la tenue d'indien un peu moins sexy mais un peu plus couverte que je lui ai suggérée en magasin, elle se les "gèlerais" moins.

Mais je ne dit rien et je continue à faire défiler mes messages. Lizzie m'a envoyé un SMS deux jours auparavant pour m'indiquer le nom de la rue et le numéro de la maison mais il m'est impossible de retrouver ce foutu message. Et on n'arrive pas à la joindre non plus au téléphone.

- On pourrait faire le tour du quartier. suggère Lou qui grelotte non pas de froid mais à l'idée qu'on reste plantée dans la rue en pleine nuit. Une fête d'adolescents ça devrait s'entendre avec la musique non ?

Comme toutes les idées de Lou, celle-ci nous paraît une fois de plus excellente mais après cinq tours de quartier on doit se rendre à l'évidence : soit on s'est carrément plantées de rue, soit la soirée est en fait un concours de Scrabble.

- Au pire on toque à toutes les portes. je propose à mon tour.

Cette fois ci l'idée enchante moins l'assemblée et Luna finit de nous convaincre en déclarant qu'elle a également vu ça dans un film d'horreur.

- J'ai mal aux pieds. nous informe Megan qui ne semble pas savoir faire autre chose que de se plaindre.

Elle s'assoit sur un petit muret en pierre. Tout le monde l'imite.

On forme un spectacle pathétique. Une panoplie de pauvresses déguisées en village people dont il manque presque la moitié des membre.

Alors qu'on s'appitoit silencieusement sur notre sort, deux anges apparaissent.

Littéralement deux anges.

Enfin deux types déguisés en ange.

Ils nous montrent le chemin à suivre.

C'est la maison juste à côté du muret, celle à côté de laquelle on est plantées depuis une demi-heure.

Luna fait ce qui est le plus approprié dans cette situation.

Elle fait un facepalm.

Dans la maison la musique est très forte.

L'odeur d'herbe aussi.

Une floppée d'adolescents sont réunis dans la cuisine qui ressemble d'ailleurs plus à un fumoir qu'à une cuisine.

Dans le salon une fille déguisée en Marylyn Monroe et qui porte une robe ridiculement courte s'agite dans tous les sens.

J'en viens presque à me demander s'il elle ne fait pas une crise d'épilepsie.

Il y a trop de monde, trop de bruit, trop d'alcool. Trop est d'ailleurs le mot le plus approprié pour qualifier cette soirée.

Lizzie arrive avec son amie dont je me souviens du prénom une fois sur deux.

Ses cheveux auburns sont noués en deux tresses dont l'aspect coiffé décoiffé parait trop élaboré pour être fait à la va-vite. Elle porte un costume d'ouvrier parfaitement beauf dont elle semble très fière.

Son amie Sonia ou Sara je ne sais plus, porte un déguisement de cowboys.

Tous les membres de village people sont enfin réunies.

Enfin leurs costumes.

- On déchire. affirme Lizzie avec un air hyper détendue (déjà alcoolisée donc) .

Sonia-Sara hoche la tête.

Je souris.

Lou approuve.

Megan lève ses deux pouces en l'air.

Luna mange un toast au fromage.

Malheureusement le groupe ne tarde pas à se séparer à nouveau parce Megan se rend compte qu'une chanson qu'elle adore passe et qu'elle a, de ce fait, un besoin irrépressible d'aller se dandiner avec Marylyn Monroe sur la piste et Luna constate que le toast au fromage est imbibé de vodka et qu'elle a, de ce fait, un besoin irrépressible d'aller le cracher aux toilettes.

Sonia-Sara suit Megan et Lizzie accompagne Luna.

Je me retrouve finalement seule avec Lou qui a l'air autant à sa place en soirée que le serait un éléphant dans un concours de patinage artistique.

Je ne lui jette pas la première pierre, déjà parce que ça fait mal et ensuite parce que je ne suis moi même, pas tout à fait à mon aise parmi cette flopée d'inconnus bourrés et fiers de l'être.

Lou déclare qu'elle a aussi besoin d'aller aux toilettes et je me retrouve rapidement seule perdue dans une jungle d'adolescent.

Je m'approche de la table basse et attrape une bouteille de jus de fruit tout à fait innoffensive pour me servir un verre.

Je bois une gorgée et en recrache un peu d'une maniere absolument pas élégante.

Il est périmé ?

Je regarde la date de péremption, tout à l'air en règle.

Je prends une autre gorgée.

- Fais gaffe, y a du wisky là dedans. m'informe wonder woman en gloussant.

Je recrache le liquide sur la fille qui me regarde d'un air mi-dégouté mi-outré tout à fait compréhensible.

Elle part en roulant des fesses, la tête haute.

Cette fête m'a pour l'instant appris deux choses : premièrement qu'il faut faire gaffe à ce qu'on consomme et deuxièmement que les déguisements d'Halloween sont fait soit pour être drôle soit pour être sexy.

À quelques exceptions près. Par exemple ce mec déguisé en livre qui se trémousse sur la piste de danse et qui ne me parait ni drôle ni sexy.

Deux bols de gâteaux s'offre à moi l'un avec des chips l'autre avec des crackers qui flottent dans un liquide suspect.

Le choix n'est donc pas difficile j'attrape une grosse poignée de chips et les engloutis sans plaisir.

La moitié est molles et a un goût de vodka. Le reste paraît encore à peu près comestible.

Je me laisse tomber dans le canapé bien décidé à rester planté dessus tous le reste de la soirée mais Megan paraît se lasser de bouger son derrière sur du Britney Spears et s'asseois à côté de moi.

- C'est super hein ? me dis-t-elle d'une voix qui ne laisse pas penser qu'on puisse contester son opinion.

- Hum hum.

Elle sent déjà l'alcool.

- Tu veux danser ?

- Non merci.

- Même si je mets la Carioca ?

Je grommèle un truc imperceptible.

- Tu veux boire quelque chose ? propose-t-elle alors.

Elle attrape la bouteille de jus de fruit et m'en sert un verre sans me demander mon avis.

- Il y a du wisky dedans. je lui dis.

- Je sais. C'est pas très grave.

- Doux Jésus ! Tu t'entends parler Meggie ? Il est hors de question que je ne prenne ne serait-ce qu'une goutte d'alcool ce soir ! Je ne connais pas ces gens, je préfère avoir totalement conscience de ce que je fais.

- Comment tu sais que ce jus de fruits est alcoolisé si tu n'as pas pris une goutte d'alcool ? me demanda-t-elle.

-...

- Ecoute Alice.

Elle m'attrape les mains et plante ses yeux dans les miens ce qui me rappelle vaguement ma mère quand elle veut parler de choses sérieuses.

- Je sais que tu n'apprécie pas beaucoup la nouveauté. Ni les soirées costumées. Ni les gens. elle marque une petite pause comme si elle avait oublié ce qu'elle voulait dire puis elle reprend. Ce que je veux te faire comprendre c'est qu'il faut se détendre et s'ouvrir aux autres parce que rencontrer des gens c'est sympa.

La qualité de son argumentation me confirme que, en effet, elle est déjà alcoolisé. Néanmoins son petit discours me fait de l'effet.

Elle paraît très fière de sa tirade un peu comme si elle était le General de Gaulle qui appelle tous les français à rejoindre la résistance.

Elle se lève triomphante, enfin elle doit l'être dans sa tête parce que dans la vie réelle, elle ressemble à une indienne saoule dont le sens de l'équilibre est très discutable.

Il n'empêche que la porte parole de la sociabilité me tend à nouveau le verre de jus de fruit que j'ai refusé un peu plus tôt avec une lueur folle dans le regard. Voilà ce qui arrive quand je ne suis pas là pour la faire revenir sur Terre, elle s'enflamme.

- Aller ma vieille ! Saute une nouvelle étape ! Grandis ! Deviens une femme ! s'écrie-t-elle avec un entrain grandement exagéré sachant qu'on ne parle que d'un pauvre verre de jus de fruit.

Je soupire et capitule, j'attrape le verre et l'avale d'une traite devant les yeux brillants d'excitation de ma chère Megan.

- Je n'en prendrais qu'un je te préviens. je grommelle.

Malheureusement tout comme les résolutions du nouvel ans, les promesses que l'on fait en soirée sont rarement tenues.

C'est pourquoi une heure et une bouteille de "jus d'orange" plus tard, je me retrouve debout, sur la table basse du salon avec Lizzie et Marilyn Monroe en train de chanter J'ai demandé à la lune de Indochine.

Enfin "chanter" est un bien grand mot. En réalité on se contente de beugler des paroles tout à fait approximatives, entrecoupées régulièrement par des gloussements hystériques.

Mais après avoir danser sans m'arrêter pendant vingts minutes, je constate que mes mouvement de bassins incessants ont eut un dangereux effet "machine à laver" sur mon estomac mélangeant ainsi violemment le wisky-jus de fruits et les chips-vodka.

Autrement dis : je risque de gerber d'une minute à l'autre.

J'abandonne Marylyn Monroe qui s'appelle en fait Gertrude mais qu'on continuera à appeler Marylyn pour des raisons évidentes et m'élance dans une course effrénée vers les toilettes.

Ce trajet me paraît l'un des plus longs de toute mon existence, sans doute parce que ma faculté à garder l'équilibre m'a quitté à peu près en même temps que ma dignité, il y a une heure environ, donc.

Je prend alors la meilleure décision de la soirée. Enfin à ce moment là ça me paraissait être une bonne décision.

Je me met à ramper.

Je commence donc à traîner mon vieux corps sur le sol en esquivant les gens et en m'arrêtant pour m'esclaffer tous les deux mètres.

Je paraîs clairement bonne pour l'asile.

Pourtant, dans ma tête ce trajet était presque aussi épique que les courses poursuites qu'on peut admirer dans James Bond.

J'ai découvert le lendemain dans une vidéo prise par Luna que je ressemblais juste à une vieille limace tétraplégique.

Rien de bien glorieux en somme.

Il n'empêche que je réussie à atteindre les toilettes à temps moi. Pas comme Lizzie qui a été contrainte de vomir dans les géraniums.

Finalement, après m'être "délestée" aux toilettes et nettoyée avec un bain de bouche qui traînait dans le coin je sors en titubant des cabinets.

Mes capacités à marcher me sont revenues comme par magie et je crois que je n'ai jamais été aussi émue de toute ma vie.

C'est un peu comme assister aux premiers pas de son enfant sauf que là j'assiste aux miens. C'est vraiment émouvant.

Alors je l'ai dis:

- C'EST HYPER ÉMOUVANT. j'ai beuglé seule dans le couloir.

- De quoi ?

Je n'aperçois pas la personne qui me parle du premier coup, d'une part parce que ma vue est un peu trouble et de l'autre parce que la personne est assise derrière l'étagère à DVD qui trône dans le couloir.

Je réponds quand même :

- J'assiste à mes premiers pas!

- C'est génial ! me réponds de nouveau la voix, hyper enjoué.

La personne semble sincèrement ravi pour moi et ça m'enchante au plus haut point.

- Où es tu ? je finis par demander en tournant la tête de tous les côtés. Grave erreurs, mes nausées reviennent.

Une main s'agite derrière le côté droit de l'étagère.

Je m'approche.

- Blanche neige ?

- Non Elysio.

La personne avec qui je discute depuis tout à l'heure est un adolescent aux cheveux noirs, déguisé en blanche neige, accroupis à côté d'une bibliothèque de DVD. Il en tient un, fermement dans sa main. Devant lui il y a un plat de pâte.

Il me regarde un peu bêtement puis son visage s'éclaire d'un sourire qui lui a donne l'air encore plus stupide. Je dois avouer que le déguisement qu'il porte ne joue pas non plus vraiment en sa faveur.

Je le détaille rapidement. Il a des yeux d'un vert jungle et des cheveux très sombre assez épais.

Il est beau. Ou plutôt, il a un certain charme.

Du coup je me dis que c'est une bonne idée de l'en informer au cas où il l'ignorerait.

- TU AS DU CHARME. je dis, beaucoup plus fort que ce à quoi je m'attendais.

Il rit.

- Merci, toi aussi, tu es très belle ! s'exclame-t-il d'un air guilleret.

Je m'assois à côté de lui et là, chose improbable : je lui sourit.

Comme ça sans crier gare.

Je sourit à un inconnu. Et clairement ce n'est pas un sourire élégant et délicat, mais plutôt un truc incertain et non maîtrisé. Je dois avoir l'air franchement laide.

Il n'a même pas peur et me sourit en retour.

On se regarde comme ça comme des abrutis bienheureux pendant plusieurs longues secondes puis je me décide à me présenter :

- Je m'appelle Alice et j'adore le film que tu tiens dans tes mains.

Il tient fermement un DVD de la citée de la peur qu'il a dû attraper sur l'étagère.

- Je m'appelle Elysio, répète-t-il comme s'il avait oublié m'avoir déjà donné son prénom. Et j'aime les pâtes. ajoute-t-il en désignant le plat de pâte qui l'accompagne comme preuve.

Je hoche la tête, très concentrée. Ce garçon aime les pâtes, ça doit forcément être quelqu'un de bien.

- Enchanté. j'assure.

- Tu m'étonne.

Il me serre la main de manière très solennel.

Je souris.

Il sourit .

Le plat de pâte sourit et le DVD aussi ce qui, après réflexion n'est pas normal.

Le monde entier est heureux et je crois bien que je n'ai jamais eu l'air aussi stupide.

L'alcool fait des ravages.

- Tes pâtes trempent dans le vin rouge. je l'informe.

- Merde ! Je pensais que c'était une sorte sauce. me promet-il.

On rit comme des baleines.

- Tu veux aller t'asseoir ailleurs ? il me demande.

Je dis oui.

Je me retrouve donc rapidement à mon point de départ. C'est à dire sur le canapé.

Elysio à pris son plat de pâte avec lui. On en mange un peu avec les mains puisqu'on ne trouve aucune fourchette à proximité du canapé.

Les pâtes aux vins c'est pas terrible mais c'est pas pire que le toffu.

- Pourquoi tu es déguisé en Blanche neige ? je lui ai demande.

- Et toi pourquoi tu ressemble à Johnny Hallyday ?

- En fait je participe à un costume de groupe avec cinq autres amies. On est déguisés en village people. Moi j'incarne celui déguisé en motard habillé tout en cuir. je le corrige.

Il hoche la tête comme si je venais de lui dévoiler une information crutiale.

- Je fais aussi un costume de groupe. a-t-il dit. Avec mes amis on est déguisé en une princesse disney.

Comme pour appuyer ses propos, un de ses amis s'asseois à côté de nous.

- Je te présente Cendrillon. m'a dit Elysio.

- Je m'appelle Cameron. s'est présenté Cendrillon en me tendant sa main. Et cette perruque me gratte.

Il enlève sa perruque blonde.

Ses vrais cheveux sont châtains clairs un peu bouclés.

Cameron-Cendrillon pose une première question qui fâche:

- Pourquoi t'es déguisé en Johnny Hallyday ?

- Je suis pas... Enfin je suis déguisé en village people. Laisse tomber. Je m'appelle Alice.

- Ravi de te rencontrer Alice.

Puis il pose la deuxième question qui fâche mais cette fois ci a Elysio

- Mec t'es bourré ?

- Noon.

Ce qui est exactement ce qu'une personne bourrée répondrais.

Cameron s'avachit davantage dans le canapé mais il se redresse immédiatement quand il aperçoit Megan.

- Meggie ! je m'exclame.

J'ai une envie tout à fait inexplicable de la demander en mariage.

- Tu es bourrée ? me demande-t-elle presque fière.

Je nie comme toute personne bourrée le ferait.

Sa tête fait un aller retour entre moi et Elysio.

- T'es qui toi ? demande-t-elle, méfiante.

La pauvre n'est pas habituée à me voir aussi sociable il est donc tout à fait naturel qu'elle se pose des questions.

- Juste un mec qui aime les pâtes et la Citée de la peur. se présente-t-il.

- Ah ok cool.

Megan est satisfaite de la réponse.

Elle remarque ensuite Cameron qui rougit un peu et tente de faire comme s'il n'était pas déguisé en Cendrillon.

Malheureusement pour lui, une robe bouffante bleu se remarque assez facilement en général.

- Salut. dit-il pour combler le silence.

- Salut.

Je regarde l'échange.

Megan s'asseoit à côté de Cameron et s'en suit une scène à laquelle j'aurais préféré ne jamais assister.

Ma meilleure amie se met à draguer.

C'est assez pathétique de regarder ces deux êtres se tourner autour.

J'ai l'impression d'assister à la parade nuptiale de deux dindons.

Ils gloussent, Cameron parle très fort et Megan agite tellement ses cheveux que je dois les extirper de ma bouche toutes les cinq minutes.

J'ai vu exactement le même processus sur ARTE devant un reportage sur l'accouplement des volailles. S'en est presque troublant.

Ce spectacle désolant me ramène sur terre et je sens mon taux d'alcoolémie baisser considérablement.

Rapidement l'euphorie qui me contrôlait il y a encore cinq minute est remplacé par une sensation de vide et de fatigue pesante. J'ai l'impression de voir la scène au ralentie et de l'extérieur.

Ça ne me plaît pas.

Alors que Megan s'éclate avec Cameron, Elysio avec son plat de pâte et Luna que j'ai réussis à repérer plus loin, avec un type minuscule à qui elle montre sa collection de boutons de manchette, moi je suis assise sur le canapé, seule, des miettes de chips à la vodka pleins mon soutif et un verre percé de jus d'orange wisky à la main.

Je n'ai jamais autant eu envie d'être dans un bus, la tête collée sur une vitre embuée par la pluie, à écouter du Michel Berger jusqu'à ce que la mort ne vienne me chercher.

- Ça va Alice ? me demande Luna qui a malencontreusement laissé le pauvre garçon s'échapper en baissant sa garde l'espace d'une minute, le temps de ramasser un bouton nacré qu'elle avait fait tomber par terre.

Je laisse échapper un grommellement inaudible, à peine humain.

Lou qui vient de se poser à côté de moi sur le canapé me répond par un son à peu près semblable. Une sorte de râle plaintif.

Il n'y a rien à comprendre à ces bruits plus animal qu'humains mais ils ne signifient qu'une chose : pour nous, la soirée est finie et Megan et Luna l'ont bien compris.

Un tout petit peu plus tard

- Ça ne te dérange vraiment pas de quitter Cameron ? Vous vous entendiez bien.

- Non t'en fais pas. En plus il a insisté pour me donner son numéro. On se reverra. assure Megan en attrapant d'un air dégoutée, sa veste qui trempait dans un bol de guacamole dans la cuisine.

On rejoint Luna et Lou dans l'entrée après avoir saluée Lizzie et Sonia qui se font des crêpes avec Wonder Woman dans la salle à manger.

Mais alors qu'on allait partir Luna se rend compte que la veste qu'elle porte n'est absolument pas la sienne et Elysio qu'il a complètement oublié de me dire quelque chose.

- Tiens Alice. me dit-il en me tendant fièrement une poignée de pâte, le DVD de la cité de la peur qui n'est absolument pas à lui et un bout de papier chiffoné. Il est clair qu'il n'est toujours pas redescendu, lui.

Je fourre quelque pâtes dans mes poches pour lui faire plaisir et repose le DVD sur un siège dans l'entrée pour que son propriétaire le retrouve. Je m'attarde sur le bout de papier.

- C'est mon numéro, j'ai demandé le tiens à Megan tout à l'heure. m'explique Elysio. J'ai passé une super soirée, faudra qu'on se revoit.

-Promis. je réponds.

Luna revient avec une autre veste qui n'est toujours pas la sienne et qui est très grande mais plus personne n'a la force de repartir chercher sa vrai veste. Et puis la couleur lui plaît bien.

Dehors, l'air est frais, les lampadaires diffusent une lumière rassurante et le soleil commençe tout juste à se lever au loin.

- C'était une soirée réussie. conclue Megan le sourire au lèvre.

- Vous allez rire mes clés étaient dans ma veste. déclare Luna chez qui on était sensé se rendre.

Personne ne rit mais tout le monde soupire.

- Tant pis. On improvisera.

Et on part en clopinant dans la rue sans trop savoir où on va, bras dessus bras dessous, plus pour se retenir de tomber que pour autre chose, en gloussant.

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