Chapitre 12

Eleana se réveilla, désorientée, à l'infirmerie. Ses visions ne cessaient de danser devant ses yeux. Elle aperçut Sirius assoupi, la tête posée sur son lit. Distraite, elle lui caressa les cheveux. Jamais ses prémonitions n'avaient été... aussi horribles. Jusqu'à présent, la jeune Black avait assisté à des passages moins... moins déstabilisants. Des années plus tôt, elle avait vu Sirius quitter sa maison. Elle avait aperçu son renvoi de Durmstrang, puis elle avait été témoin des choses peu importantes, des disputes entre ses cousins, une punition qu'elle allait subir... Jamais ses vision ne l'avaient amené aussi loin dans le futur, et jamais encore la mort de quelqu'un ne lui avait été montrée ainsi.

Était-ce un don ou une malédiction ?

Eleana Black venait de voir la décès de son Lily et de son enfant.

Si elle n'intervenait pas, c'est ce qu'il allait se passer... Son cousin allait gâcher sa vie, et son amie, Lily, perdre sa future famille.

Malheureusement, rien n'était jamais simple avec l'avenir. Même si elle s'en mêlait, ses visions risquaient de ne pas changer... ou devenir pires.

Eleana se rappela la fois où elle avait essayé de modifier une prémonition... Son renvoi. Elle avait mis toute sa persévérance dans cette tâche, se métamorphosant en la parfaite petite élève qu'ils attendaient tous. Et ça n'avait pas empêché son exclusion... Ça l'avait même peut-être précipitée.

Deux visions à changer. Cela lui demanderait beaucoup d'énergie.

Celle concernant Lily, la prémonition ne se déroulerait pas avant des années. D'ici là, Eleana aurait le temps de s'y préparer, de prévoir les événements. Car sa décision était prise avant même qu'elle ait besoin d'y réfléchir très longtemps. Elle ne les laisserait pas mourir... Même si ça impliquait sauver Potter d'une mort tragique. Même Eleana Black avait un cœur.

Néanmoins, en ce qui concernait Regulus, elle devrait intervenir le plus rapidement possible.

Elle ne savait pas exactement quand sa vision se déroulerait, mais cela se passait forcement avant la fin de l'année car Lucius était encore à Poudlard. Elle essaya d'oublier leur conversation sur son cas. Le temps pour s'y appesantir lui manquait.

La jeune Gryffondor n'en avait jamais parlé à personne d'autre qu'à Sirius. Ce « don ».

À l'âge de 7 ans, à l'apparition de sa première vision, elle avait tout de suite compris, même à cet âge, qu'il était dangereux. Pas question d'en parler. Ce « don » si particulier qui attirerait les convoitises, elle le savait. Puis, assistant à la montée en pouvoir du Seigneur des Ténèbres, elle avait encore plus farouchement protégé ce secret. Jamais personne d'autre ne devait l'apprendre. Et surtout pas son père, surtout pas le mage noir.

Perdue dans ses pensées, caressant les cheveux de son cousin, Eleana manqua de crier quand une silhouette apparut juste devant elle tout à coup.

Ivanoshi et sa foutue cape d'invisibilité.

Il eut le culot de sourire.

–                    Je vois que tu n'as pas perdu les bonnes vielles habitudes, Ivanoshi.

Il jeta un coup d'œil à Sirius, qui dormait toujours, et s'assit de l'autre côté de son lit.

–                    Ça va mieux, Eleana ?

Elle n'était même pas d'humeur à le reprendre sur son prénom.

–                    Oui, je suis prête pour un match de quidditch, ironisa-t-elle.

Et c'était peut-être même la vérité. Plus aucune douleur ne se faisait ressentir. Rien.

Ce qui annonçait d'autres ennuis. L'infirmière l'avait soignée et désormais, elle était forcément au courant de ses « blessures ».

Le jeune Black pria pour que cette infirmière n'en ait encore parlé à personne. Après tout, n'existait-il pas le secret médical ? Le personnel soignant n'avait quand même pas le droit de prévenir le directeur ? Si ?

La sorcière posa une main à son front, sentant un mal de tête pointer le bout de son nez, conséquence habituelle de chaque vision et de son cerveau détraqué.

Ivanoshi s'installa sur la chaise vide à côté d'elle. Il y eut un énorme silence. Elle ne dit rien non plus. Pourquoi restait-il alors qu'il avait vu qu'elle allait bien ? D'ailleurs, pourquoi était-il là tout simplement ? Pour son stupide pari de la dernière fois ? Finalement, il se décida enfin à rompre le silence en se tournant vers elle.

-          Pourquoi tu ne veux pas me parler ?

Elle fut un peu surprise par sa question directe.

-          Je te parle en ce moment, rétorqua-t-elle.

-          Non. Tu sais très bien ce que je veux dire. Tu ne m'adresse la parole que pour le strict minimum et chaque fois à contrecœur. Qu'est-ce que je t'ai fait ? As-tu autant de préjugés sur ma famille ? Pourtant, tu m'as toujours donné l'impression d'être comme ton cousin.

Que répondre à ça ? Devait-elle lui dire la vérité ? Qu'elle ne serait jamais une personne bien...

-          Malgré ce que tu penses savoir sur moi, je ne suis pas Sirius. Je ne suis pas quelqu'un d'aussi bien que lui. Tout le monde ne peut pas réussir à le devenir.

Il se rapprocha d'elle et posa ses doigts sur les siens avec précaution. Une brûlure l'élança immédiatement sur le dos de sa main. La jeune Black n'avait pas ses gants, mais elle ne le repoussa pas à cause de l'éclat qu'elle pouvait lire dans ses yeux. Ils étaient si perturbants.

-          Je pense que tu te trompes Eleana, tu n'es pas une mauvaise personne. C'est ce que les autres veulent que tu imagines.

Elle rompit son contact en tournant la tête.

-          Tu ne me connais pas !

Il attrapa délicatement son visage et le fit pivoter vers lui. Une fois de plus, à sa grande surprise, Eleana Black le laissa faire.

-          C'est ce que tu crois Eleana. J'ai vu celle que tu caches aux autres... Je te connais depuis très longtemps mais toi... tu sembles m'avoir oublié.

Elle fronça les sourcils. Qu'est-ce qu'il racontait ? Elle ne l'avait jamais rencontré. Entraperçu à l'occasion lors d'une soirée, peut-être, mais c'était tout.

-          Pardon ?

Ivanoshi soupira et se passa la main dans les cheveux.

-          Le mariage d'Arista et Julius.

Et là, elle sut tout de suite d'où ils se connaissaient.

« - Ouille !

Cachée sous une table, Eleana venait de se faire bousculer par un autre enfant.

-          Va-t-en d'ici ! C'est ma table.

Le nouvel arrivant, du haut de ses 7 ans, l'observa avec amusement.

-          Pourquoi ? Maintenant on doit les réserver ?

Ça ne fit pas sourire la petite sorcière qui le regarda fixement. Elle n'était pas d'humeur à rire ce soir. Elle avait bien trop peur pour ça.

-          Va te trouver une autre endroit.

Une fois ces paroles prononcées d'un ton même glacial à 7 ans, elle lui tourna le dos, contemplant la nappe fleurie comme si c'était un rempart qui pouvait la protéger. Mais rien au monde ne pouvait la protéger, elle ne se faisait plus aucune illusion.

-          Bon d'accord, je vais aller trouver une autre table. Puis j'en profiterais pour prévenir tes parents que tu es ici.

Il s'apprêtait à partir à quatre pattes quand elle le tira par le bras.

-          Non ! Ne leur dis pas, s'il te plaît ! Tu peux rester.

Le garçon était surpris par sa réaction. Il pouvait reconnaître la peur quand il la voyait dans les yeux de quelqu'un.

-          D'accord.

Il s'assit à côté d'elle tandis qu'elle recommençait sa contemplation de la nappe. Il y eut un moment de silence avant que le jeune garçon reprit :

-          Tu sais, tes parents ont l'air d'être inquiets.

-          Ils ne sont pas inquiets, répondit-elle d'un ton sûr. Ils sont très agacés.

Nouveau silence.

-          Pourquoi tu te caches ?

Silence. Le garçon réessaya tout de même.

-          Pourquoi tu te caches ?

Et un énième silence.

-          On peut rester ici si tu veux. Je n'ai rien à faire de mieux de toute façon. Ces adultes sont tous si barbants

Alors ils tinrent là, sans rien dire, pendant l'heure qui suivit.  Autour de leur cachette, les adultes cherchaient désespérément Eleana, et maintenant le jeune sorcier qui l'accompagnait.

Ce fut seulement lorsque la petite fille le décida qu'elle répondit à sa question.

-          Je ne veux pas que mon père me retrouve.

Le garçon fut étonné d'entendre sa voix, et heureux qu'elle lui ait donné une réponse.

-          Pourquoi ? demanda-t-il prudemment, de peur que la jeune fille ne souhaite plus lui adresser la parole à nouveau.

-          J'ai fait une bêtise.

-          J'en fais plein moi aussi ! Faut pas t'inquiéter, on va te disputer puis c'est fini.

La petite fille croisa les jambes et posa sa tête sur ses genoux.

-          Je n'ai pas peur de me faire disputer... Ça, je sais gérer.

-          Alors de quoi as-tu peur ?

-          J'ai... J'ai peur de ce qui se passe après. Je ne suis pas une vrai Sang-Pur, déclara-t-elle en relevant la tête, je ne sais pas m'empêcher de crier... Je ne suis pas digne de mon rang.

Le garçon ne comprit pas bien ce qu'elle disait.

-          C'est normal de crier. Moi aussi ça m'arrive des fois.

Et il posa ses doigts sur la main gantée de la petite fille.

-          Quoi ? Toi, un garçon Sang-Pur, tu cries ?

Et il hocha la tête, fier de voir que l'état de la  petite fille s'améliorait.

-          Oui, oui. Maman dit qu'il n'y a pas de honte à hurler quand on a mal.

-          Ta maman est gentille.

-          Oui, c'est la meilleure maman de la terre ! s'enthousiasma le garçon.

Le visage de la fille s'assombrit. Pourquoi elle n'avait pas, elle aussi, une gentille maman ? Pourquoi avait-elle cette maman si méchante et froide ?

En voyant la petite sorcière se fermer sur elle-même, le jeune Sang-Pur s'en voulut d'avoir parlé de sa mère.

-          Si tu veux, tu peux venir. Ma maman dit qu'elle a toujours souhaité avoir une fille.

Même à 7  ans, Eleana était bien consciente qu'il n'était pas possible d'aller, comme ça, dans une autre famille. Mais elle était si curieuse de savoir comme c'était d'avoir une gentille maman. Après tout, même Sirius lui-même n'en avait pas.

-          Elle est comment ta maman ?

Et il passa les deux heures suivantes à lui parler de sa famille. Elle oublia complètement que son père était à sa recherche et elle but ses paroles.

Tout se brisa quand une poigne l'attrapa de sous la table brutalement.

-          Qu'est-ce que tu faisais là, toi ? demanda froidement Oreigo Black. Ça fait des heures qu'on te cherche !

-          Je...

Mais la peur l'empêcha de continuer.

-          Espèce d'idiote ! Tu n'as plus l'âge de te cacher sous les tables ! Tu te prends pour une Sang-de-Bourbe à te traîner ainsi par terre ?

Il semblait attendre une réponse mais elle n'osa pas ouvrir la bouche. Ses dents s'entrechoquèrent quand il la secoua.

-          Tu vas parler ?!

-          No... non, père.

Le patriarche Black se tourna, sentant les regards des quelques personnes encore présentes à la réception. Il se redressa en reconnaissant de vieux ennemis.

-          On réglera ça à la maison. Viens.

Il l'attrapa par la main pour la conduire vers la sortie. Elle eut juste eut le temps de pivoter la tête et de voir le garçon de sous la table que sa mère serait contre elle. Avant de passer la porte, elle se rendit compte qu'elle ne lui avait même pas demandé son prénom.  »

Ainsi le garçon était Ivanoshi. Maintenant qu'il en parlait, il lui semblait que dans ses souvenirs confus, le petit sorcier avait des yeux verts. Comment aurait-elle pu faire le rapprochement ? Après ce soir là, Eleana n'était retournée dans le monde « mondain » que bien des années plus tard. Elle avait bien fait trop honte à son père avec son comportement d'enfant. Et à ses 12 ans, elle ne l'avait jamais reconnu. En y repensant, elle ne se rappelait même pas lui avoir adressé la parole après cette réception. Les Ivanoshi ne s'approchaient jamais des Black et on évitait de les inviter ensemble aux réceptions, histoire d'écarter les ennuis que ça occasionnerait forcément. 

-          J'étais jeune.... Depuis, je peux avoir changé, rétorqua-t-elle.

-          Non, je ne crois pas qu'on puisse changer à ce point.

Que répondre à ça ? La sorcière ne dit rien, peut-être dans l'espoir qu'il ait raison ? Il était si réconfortant de voir que d'autres la pensaient meilleure qu'elle ne l'était.

L'arrivé de l'infirmière mit fin à leur étrange discussion. Ivanoshi se fit sévèrement disputer par Madame Pomfresh et menacé de finir, lui aussi, dans un lit s'il ne déguerpissait pas rapidement. Ce qu'il se dépêcha de faire. Il n'était pas assez fou pour provoquer l'infirmière.

Une fois qu'il fut parti et qu'Eleana s'assura Sirius dormait toujours, la jeune femme passa toute la nuit à regarder le plafond, perdue une fois de plus dans ses songes.

-          ... Il est temps de vous lever, Miss Black, le professeur Dumbledore requiert votre présence.

-          Pardon ?

D'un seul coup, elle fut entièrement réveillée. Madame Pomfresh, qui essayait d'attirer son attention depuis quelques minutes, l'obtint enfin totalement.

-          J'ai dit qu'il fallait vous lever, le professeur Dumbledore ne va pas vous attendre éternellement.

Faire répéter la phrase n'aida pas la Gryffondor à comprendre plus que ça où elle voulait en venir.

-          Le professeur Dumbledore ? Pourquoi donc m'attend-il ?

L'attention de l'infirmière fut brusquement attirée par la contemplation d'un vase.

-          Je ne sais pas, mais dépêchez-vous.

Et elle s'éloigna. Eleana inspira calmement.

Si cette vieille chouette a osé parler de mes blessures au directeur, elle me le payera cher !

Pourtant, à part ses mystérieuses plaies guéries et son « malaise » en plein cours, la jeune sorcière ne voyait pas trop pourquoi Dumbledore la convoquait.

Ça ne pourrait pas être pire !

Mais malheureusement pour elle, la situation pouvait toujours être pire et ça, elle l'apprendrait à ses dépens.


***

Alors, alors, qu'en pensez-vous ? N'hésitez pas à laisser un commentaire pour que je sache votre avis (qu'il soit bon ou non) 😊

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