Chapitre 4 : Les 7 étapes

Encore une fois, Ritsu se réveilla en premier. Mais ce ne fut pas un réveil naturel, il avait été provoqué par les rayons du soleil qui agressaient ses paupières. Ouvrant difficilement les yeux, il se fit la réflexion que son dos était douloureux. Et pour cause, il avait dormi par terre, sur le futon, collé contre son meilleur ami, comme pendant leur sieste la veille, cette fois-ci, épaule contre épaule. Leurs mains étaient toujours enlacées et cela réchauffa le cœur du plus grand. Ils ne s'étaient pas lâchés et ils ne se lâcheraient jamais. Ritsu serait là pour Shou. Une idée lui traversa alors l'esprit. Il essaya de se dégager de la prise de fer du rouquin pour se diriger vers son bureau et ouvrir son ordinateur portable. Il se déclencha et il put faire la recherche qu'il voulait. Après quelques minutes, il sursauta au contact soudain. Shou venait de l'enlacer par derrière, la tête reposant sur le sommet de sa tête. Il lui demanda alors au creux de l'oreille ce qu'il faisait. Ritsu rougit furieusement et se surprit à penser qu'ils avaient l'air d'un couple tout à fait normal dans cette position. Et que si quelqu'un rentrait maintenant dans la pièce, ils les prendraient pour un couple. Ce qu'ils n'étaient pas.


Secouant légèrement la tête pour disperser l'idée, il s'attira d'autant plus la curiosité de l'autre. Shou n'arrivait pas à capter l'attention de son meilleur ami et une idée lui traversa soudainement l'esprit. Il se pencha légèrement et vint mordre Ritsu à la jonction entre son cou et son épaule. Celui-ci couina et sursauta d'autant plus, ne pouvant tout de même pas aller très haut, toujours enlacé par le roux. Shou rigola doucement et reposa sa question « Ritsu. Bébé. Qu'est-ce-que-tu-fais ? ». Ritsu rougit d'autant plus au surnom que venait de lui donner Shou. Ils étaient habitués aux contacts trop proches mais ni l'un, ni l'autre n'avaient jamais appelé l'autre par un tel surnom. Les surnoms se faisaient généralement sur leur nom, pas sur des noms que se réservaient les couples. Bien que. Les filles le faisaient tout le temps non ? Alors pourquoi pas eux ? Puisqu'ils étaient bien plus proches que la plupart des garçons qui étaient amis. Et lorsqu'ils venaient de se retrouver, Shou l'avait appelé « pretty boy ».


Ritsu était reparti dans ses pensées et cela commençait à agacer Shou qui, malgré son action, n'arrivait toujours pas à attirer l'attention du corbeau. C'était voire même pire, puisque Ritsu semblait complètement absent et ne répondait pas aux appels de Shou. Celui-ci fit alors la seule chose qui lui passa en travers de l'esprit. C'est-à-dire voler l'ordinateur de Ritsu sur lequel il était pour voir enfin ce qu'il faisait. Lorsqu'il lui prit des mains, Ritsu sembla enfin se réveiller et essaya de le reprendre, sans succès. L'ordinateur passait de l'aura psychique de Shou à celle de Ritsu mais Shou avait tout de même le dessus et Ritsu finit par capituler. Il s'assit alors à nouveau sur le futon avec lui, le dos collé contre le bois de son lit. Plaçant l'ordinateur sur ses genoux (qu'il avait réussi à reprendre finalement), il soupira.


« Ritsu : Shou ... Je ... J'ai fait quelques recherches.

Shou : Des recherches ? Sur quoi ? Oh, je sais, tu veux trouver un endroit pour notre prochain date.

Ritsu : *s'étouffant avec sa salive* Non ! Non ... c'est, c'est pas ça.

Shou : *penchant la tête sur le côté intrigué* Alors c'est quoi ?

Ritsu : Tu as déjà entendu parler des 7 étapes du deuil ?

Shou : *baisse la tête, perdant son entrain* Ah, ça. Ouais. Mais, pas en détail. Je sais juste qu'il y en a 7, comme tu l'as dit.

Ritsu : Shou, tu sais que je veux t'aider ?

Shou : *relève la tête doucement, sourire triste* Je sais. Tu me le dis, beaucoup.

Ritsu : Tu me fais confiance ?

Shou : Évidemment. T'es la personne en qui j'ai le plus confiance.

Ritsu : Je voudrais qu'on lise les 7 étapes tous les deux et je voudrais que tu me dises si tu as déjà ressenti toutes ces émotions, et ce qu'il s'est passé quand tu es passé par là. Tu crois que tu peux le faire ?

Shou : Ouais. Ça, ça devrait le faire.

Ritsu : Ok, alors. 1ère étape : le choc, le déni. Tu es passé par là je suppose.

Shou : Ouais, à l'annonce de la mort de maman. Je ne les ai pas cru. Ils m'ont annoncés comme ça, de but en blanc qu'elle était morte. J'ai failli tomber dans les pommes. J'étais ... trop choqué pour le croire. C'était impossible, elle ne pouvait pas être morte. J'essayais de me faire croire que c'était impossible alors qu'on me répétait que c'était la vérité. J'étais par terre, j'arrivais plus à me relever, j'en avais pas la force.

Ritsu : *la voix tremblante* D'accord. On continue. 2ème étape : la douleur, la culpabilité.

Shou : Ah, ça, ouais. Je sais. Je sais ce que c'est. Ça fait mal. Je pense que la douleur, ça doit être l'un des premiers trucs que j'ai ressenti. Ça tournait en boucle dans ma tête. Maman n'était plus là, elle ne serait plus jamais là pour moi. J'arrivais plus à dormir, parce que, quand je fermais les yeux, je la voyais, elle était là. J'avais l'impression qu'elle était toujours là, avec moi. Et quand je rouvrais les yeux, je me rendais compte que c'était faux. Alors c'était encore plus douloureux. J'ai beaucoup pleuré, ça, j'en suis sûr. Et ... pour la culpabilité. Ça aussi, je l'ai ressenti. Je me disais que c'était de ma faute, que j'avais pas pu la protéger. Quand j'étais petit, c'était elle qui me protégeait de papa, enfin, jusqu'à un certain point. Et quand cette histoire a été réglée, j'étais assez fort et j'ai promis à maman que ce serait moi qui la protégerait. Mais j'ai échoué. Je l'ai laissée entre les mains d'un salaud. Je me disais que si j'étais resté, si je n'avais pas participé à cette foutue opération de démantèlement, ça ne serait pas arrivé, parce que j'aurais été là pour la défendre. C'était de ma faute, si elle était morte.

Ritsu : *les larmes aux yeux* Shou ... c'est pas de ta faute ...

Shou : Je le sais maintenant.

Ritsu : *prend Shou dans ses bras, le berce*

Shou : *pleure en silence*

Ritsu : *la voix craquelée* On ... on continue ... 3ème étape : la colère.

Shou : Ça doit être l'émotion que j'ai ressenti le plus profondément, pire que la douleur je pense. J'en ai ruiné des chambres d'hôtels ou des salles d'interrogatoire sécurisées dans lesquels ils m'avaient enfermé pour que je me calme. Mes pouvoirs se sont déchaînés comme jamais. J'ai jamais été aussi puissant qu'à ce moment-là. J'étais en colère contre absolument tout et tout le monde. Bien sûr, contre ce fils de pute. Je voulais le retrouver et lui faire payer au centuple ce qu'il avait fait à maman. Je voulais qu'il paye comme jamais, je voulais lui infliger les pires atrocités du monde. Mais j'ai aussi été en colère contre mon père. Parce qu'à cause de son organisation, j'en étais là, à la démanteler, que c'était à cause d'elle que notre famille avait été foutue et que maman était allée trouver quelqu'un d'autre pour se reconstruire. J'étais en colère contre le gouvernement pour m'avoir envoyé en mission alors que ma mère souffrait. Et le pire ... J'étais en colère contre ...

Ritsu : *curieux* Contre qui ?

Shou : *tout bas* Toi.

Ritsu :*surpris* Moi ?

Shou : *honteux* Je sais que c'est stupide, mais à ce moment-là, j'étais en colère contre toi parce que tu n'étais pas là quand j'avais besoin de toi. J'avais besoin de ta présence tout simplement et tu n'étais pas avec moi. Ce qui fait que j'étais encore plus en colère contre le gouvernement, contre mon père. Ça devenait un cercle vicieux de haine que je ressentais.

Ritsu : Qu'est-ce qui t'a fait arrêter ?

Shou : Toi. A un moment, ils ont finis par m'endormir en m'injectant des trucs parce que ça faisait plus d'une semaine que j'avais pas dormi, je ne mangeais plus et je passais mon temps à tout casser et à dépenser une énergie que je n'avais pas. Et pendant mon pseudo sommeil, des souvenirs de toi me sont apparus, je te voyais, toi tout simplement et ça m'a fait du bien. C'est ça qui m'a calmé. Je me remémorais toutes les conneries que j'ai faites avec toi et tous les moments où on était comme ça. Simplement toi et moi, collés l'un contre l'autre. C'est ça qui m'a le plus aidé.

Ritsu : ... Shou ...

Shou : Tout va bien. Puisque t'es là. *sourire forcé*

Ritsu : *resserre sa prise* Ne souris pas. Si c'est trop douloureux pour toi, ne souris pas. Tu sais que c'est inutile de faire semblant devant moi.

Shou : Oui, je sais ... Aller, prochaine étape.

Ritsu : Ah, oui. 4ème étape : marchandage. Tu as ressenti ça ? Quand tu essayes de te faire croire à toi-même et aux autres qu'elle ...

Shou : Oui. Le marchandage, je sais ce que c'est. Avant même de perdre maman, je savais ce que c'était. Merci qui ? Merci papa.

Ritsu : *retiens sa colère* Tu sais ça à cause de lui ?

Shou : Ritsu, bébé, avec tes cours d'économie ou je ne sais pas quoi, tu devrais le savoir toi aussi. On n'a juste pas eu les mêmes méthodes d'apprentissage.

Ritsu : *rougit au surnom* Ah, euh, ouais. Et ... et donc ?

Shou : Ah, ça, ouais. Après m'être calmé, je me suis de nouveau senti mal. J'ai voulu me convaincre moi-même que c'était faux. Je marchandais les autres mais surtout, je me marchandais moi-même. J'usais de tout ce que je savais pour leur faire croire à eux et à moi qu'elle n'était pas morte et qu'elle m'attendait encore à la maison, comme avant. Ça a sans doute été la meilleure période pour moi. Après tout, je me mentais à moi-même, je me faisais croire quelque chose qui était faux, je ne voyais pas la réalité et je ne voulais pas la voir. Je vivais dans un monde de faux-semblant. C'était déjà le cas avant mais c'était encore pire.

Ritsu : Qu'est-ce qui a fait en sorte que tu arrêtes de te mentir à toi-même ?

Shou : Notre bon vieil ami Joseph du gouvernement.

Ritsu : *son aura commence à se déclencher, des petits objets volent* Comment ça ? Qu'est-ce qu'il a fait ?

Shou : Il m'a mis un poing dans la gueule.

Ritsu : *se lève* C'est une blague ? Il a fait quoi ? Il t'a vraiment frappé ? T'es un enfant, putain. En deuil qui plus est. Je vais lui défoncer la gueule.

Shou :*amusé de l'attitude de Ritsu qui ne jure jamais* Rassis-toi. Ça m'a été bénéfique.

Ritsu : *se rassit finalement, pas vraiment calmé* Comment ça a pu t'être bénéfique ?

Shou : Il m'a remis les idées à l'endroit. Il m'a dit « je sais que c'est douloureux, je sais que ça fait mal, je sais que tu veux que ce ne soit pas réel mais ça l'est. Alors affronte-le. T'es le gamin le plus intelligent, mature et courageux que j'ai rencontré, même si t'essayes de montrer le contraire. Je sais que tu pourras passer au-dessus. Je ne te demande pas de l'oublier, c'est impossible, je te demande juste de l'accepter. » J'avoue que j'ai été choqué au début mais en y réfléchissant bien, ça m'a été utile. Ce qu'il m'a dit.

Ritsu : Pour de vrai ? *toujours inquiet*

Shou : *sourire sincère* Pour de vrai.

Ritsu : Si tu le dis. Aller, 5ème étape : dépression et douleur.

Shou : Ah. C'est là. Je crois bien que je suis bloqué là.

Ritsu : La dépression et la douleur ? T'es pas passé au-dessus ?

Shou : Non. Si tu me dis les étapes d'après, je crois bien que ça va confirmer ça.

Ritsu : 6ème étape : reconstruction. 7ème étape : acceptation.

Shou : Alors, ouais, je confirme. J'en suis bien à la 5ème. La reconstruction et l'acceptation, j'en suis pas là. Sûrement pas. Je veux toujours autant qu'elle soit là.

Ritsu : Shou ... même quand tu auras fait ton deuil, tu voudras toujours qu'elle soit là, c'est normal. Joseph te l'a dit, tu ne pourras pas l'oublier.

Shou : Non, je ne l'oublierais pas. Mais je suppose que je peux me concentrer sur les souvenirs heureux.

Ritsu : Ouais, fais ça. C'est une bonne idée. Les souvenirs heureux. Ça va t'aider.

Shou : Les souvenirs heureux et toi. T'es là.

Ritsu : Je suis là. *prend leurs mains ensemble*

Shou : *resserre la prise* Ritsu. Merci.

Ritsu : Ne me remercie pas. Ce que je fais est normal. T'es mon meilleur ami après tout. »


Au fond de lui, Ritsu avait envie de dire plus, d'être plus mais il se retint. Il ne savait pas comment pourrait réagir Shou. Et surtout, il ne savait pas pourquoi il avait cette envie si particulière d'être plus proche de Shou qu'il ne l'était déjà. Eux qui étaient déjà tellement proches. Il mit donc ça sur le compte qu'il voulait absolument l'aider en restant le plus avec lui. Il voulait l'aider à surmonter ce qu'il traversait parce qu'il n'avait pas été avec lui ces deux dernières années et qu'il n'avait pas pu être présent lorsque tout ceci était arrivé. Souriant doucement et tristement, il chassa une larme qui commençait à perler et resta collé à Shou.












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Quatrième chapitre.


Alors, j'ai déjà perdu des membres de ma famille mais comme c'était mes arrières grands-parents que je ne voyais jamais ou avec qui je n'avais pas forcément de lien, je n'ai pas à proprement parler "subi" de deuil. J'ai donc dû m'aider d'internet et de mes quelques connaissances pour pouvoir combler mes lacunes. Si quelqu'un trouve que j'ai très mal représenté le deuil et les étapes par lesquelles sont passées Shou, je m'en excuse vivement et si j'ai blessé qui que ce soit, je m'en excuse également, ce n'était pas mon intention.


Comme dit au chapitre précédent, celui-ci aussi était un chapitre de transition. Le prochain sera beaucoup plus intéressant et croustillant. Bien que tous les chapitres soient intéressants pour le développement d'une histoire.


Comme d'habitude, en espérant que ça vous ait plu.

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