Je souffre donc je suis

Sous la lune qui le juge, Iruka enfile le masque de renard.

Il y a un autre sentiment qui navigue en moi à cet instant, Kakashi.

« Dis-moi, Kakashi... »

Iruka bondit sur un toit, le plus haut de Konoha.

L'envie folle de te retrouver en espérant ne pas y parvenir.

« Dis-moi, est-ce que tu pleurerais si fort que moi ? »

Car oui, je pleure Kakashi alors que j'entame le premier saut en dehors de Konoha. Les larmes terminent de tremper nos rêves utopiques Kakashi. Car tu sais, si je pleure c'est parce que je me dégoute de souhaiter te retrouver plus que tout.

Je me dégoute de désirer te tuer pour pouvoir une dernière fois t'embrasser.

Et je le sais que je vais te retrouver Kakashi. Car nos chemins depuis ce jour se sont liés et toi aussi tu le sais. J'aimerais me demander pourquoi tu es parti mais je n'en ai pas le droit. Tu le sais bien, nous, qui sommes des hommes de l'ombres de Konoha.

Et si je suis aujourd'hui un homme de l'ombre, c'est bien à cause ou grâce à toi, ça je ne le sais pas. C'est moi qui l'ai choisi mais c'est aussi toi qui l'as accepté. Et je ne sais pas aujourd'hui si je t'en veux ou si j'en suis soulagé. Imagine, Kakashi, si j'avais choisi un autre chemin, qui m'aurait éloigné loin de toi. Peut-être serais-tu encore là, bien sagement aux bottes de Konoha ? Imagine...

Et je me dégoute une nouvelle fois, Kakashi.

Je me dégoute de me dire que je préfère cette version de l'histoire où je dois te tuer.

Parce qu'au plus profond de moi, ma part d'ombre me chante que je te préfère mort que sous le soleil sans moi.

Car nous sommes ce que nous sommes, Kakashi.

Te rappelles-tu ? Comment nous en sommes venus à être ce que nous sommes ?

« Kakashi, dis-moi, t'en souviendras-tu lorsque je serai devant toi ? »

Je t'avais dit que je voulais être comme toi. Car je voulais être fort pour ne plus attendre la mort venir me demander le café. Mais je n'avais aucune idée à cette époque de ce que tu étais réellement. A mes yeux, tu représentais la force et comme toi je voulais juste marcher droit.

J'étais encore loin de savoir ce dans quoi j'allais mettre les pieds.

Iruka se stoppe. Il est sur la cime d'un arbre et surplombe la forêt. La lune pâle se reflète sur le masque de renard dans l'obscurité, qu'il vient d'enlever, pour sentir le vend se lever.

« Tu avais essayé de me prévenir. Je m'en souviens. Malheureusement ou heureusement, c'est très loin maintenant Kakashi. »

Iruka se cache de nouveau derrière le masque.

« Le temps où j'avais encore le droit de penser. »

D'une poussé de chakra, il se laisse aspirer par le mystère de la forêt, une nouvelle fois.

« Le pressens-tu que c'est moi qui te traque Kakashi ? »

Et mis à par marcher le soir nous ne faisions rien d'autre encore. Je lisais dans ton œil des choses que je ne savais pas lire. Si bien que plus je regardais l'encre dans ton œil et plus j'avais l'impression d'être un illettré. Tu rentrais régulièrement peint de rouge et pourtant, tu ne prenais jamais la peine de te doucher avant d'avec moi marcher. Cependant tu prenais tout de même la peine d'aller y ranger ton masque de porcelaine que je ne connaissais pas. Peut-être avais-tu cru que cela serait suffisant pour me décourager, mais plus tu rentrais déchiré et plus j'avais envie de te ressembler. Parce qu'au plus fort que tu étais brisé, tu continuais tout de même de marcher. C'est cela, que je voulais faire aussi.

Car si je souriais. Car si je les coloriais. Car si je rigolais. C'était pour me cacher de la solitude qui me traquait. Mais toi elle faisait ta force et c'est en cela que je t'enviais.

J'étais naïf, c'est sûr. Quand j'y repense, peut-être était-ce cela qui envers et contre tout, te plaisait chez moi. Mais alors, peut-être es-tu parti car je l'ai perdu ?

Je t'attendais là où nous nous donnions rendez-vous. Je venais de fêter mes seize ans. Les années étaient passés sans que nous nous en rendions compte.

Il s'agissait d'un arbre différent des autres ed par ses branches étranges. Il était réparable de loin et nous avions convenus qu'il était ainsi facile de se retrouver ici, sur les hauteurs de notre village. Je t'y attendais tous les soirs. Il y avait des jours où tu n'arrivais cependant jamais. Et je ne t'en voulais pas, Kakashi. Je savais que tu te battais contre la vieille amie que je fuyais. Tu arrivais toujours par les airs. Il me semblait que de me surprendre t'amusait. J'avais bien compris que je n'étais pour toi qu'un jouet encore mais pourtant, j'osais espérer que cela ne change un jour.

Je n'étais encore qu'un adolescent naïf qui pensait être simplement ton ami. Je n'étais encore qu'un genin.

Ce soir là, je t'avais attendu de pied ferme, les bras croisés au beau milieu de la clairière sous la lune qui de loin siégeait. Mais tu m'avais une nouvelle fois surpris. Derrière mon dos, tu avais atterri de nulle part et j'en avais déglutis de terreur et d'envie. C'était comme si tu n'avais aucune présence. Presque comme si tu pouvais choisir un temps ne plus exister. Je m'étais simplement retourné en tentant de calmer ma respiration, mais ton aura folle asphyxiait la mienne. J'avais comme à chaque fois que nous nous rencontrions, ce sentiment d'être à ta merci. Il y avait quelque chose d'exaltant dans le fait que tu pouvais me tuer si facilement si l'envie te prenait. Et j'aimais si fort ce sentiment d'insécurité, cette électricité qui me parcourait des orteils jusqu'au cuir chevelu, que j'aimais assez bien te défier du regard. Tu disais sans arrêt que je n'étais qu'un effronté mais pourtant, ce soir là, tu avais juste froncé les sourcils.

Deux de tes doigts griffues d'Anbu, avaient simplement saisi fermement mes joues pour tirer mon visage vers le haut et mon cœur s'était mis à me gronder d'être si intrépide.

« Je suis un homme dangereux. Tu le sais ça, Umino Iruka ? »

J'avais fini par le comprendre, oui. Il y avait juste mon corps qui s'alarmait. Mes poils se hérissaient de partout. Ma bouche s'asséchait. Et mes doigts tremblaient. Oh oui, tout mon corps tremblait et me criait de te fuir et pourtant, cela me confortait dans l'idée que j'aimais ça.

« Oui... avais-je réussi à répondre en dépit de mes joues fermement maintenu.

- Qu'est-ce que tu veux ? »

Cette question revenait souvent sur le tapis, particulièrement ces soirs où autour de toi, je pouvais presque entendre les rires de la vieille amie chez qui tu étais allé toi-même prendre un café.

« Etre comme toi. »

Et cette réponse que tu obtenais à chaque fois, te rendrais fou et bon dieu ce que j'aimais ça. Cette fois là, tu avais serré un peu plus fort mes joues jusqu'à faire perler le sang..

« Est-ce cela que tu veux ? M'avais-tu demandé en ressuyant à peine ce que tu avais fais couler les long de mes joues.

- Je n'en sais rien, je veux juste être comme toi, avais-je répondu faiblement sans lâcher ton retard »

Car Kakashi, en dépit de la folie qui semblait t'habiter, tu étais mon seul repère. Tu étais la famille que je n'avais plus. Tu étais l'amitié que je ne connaissais pas. Tu représentais la force que je n'avais pas. Et si je pouvais devenir l'ombre que le soleil avait cessé de projeter derrière toi, alors je prendrais ce rôle sans rechigner. Après tout, c'est encore tout ce que nous sommes devenus aujourd'hui Kakashi, des hommes de l'ombre.

« As-tu seulement une idée de ce que moi je veux ? Umino Iruka ? Avais-tu répondu en éliminant une partie de la distance entre nous. »

Et ce regard prédateur ne me présageait rien de bon. Preuve en était une nouvelle fois ces doigts venus rattraper mes joues presque rageusement. Pourtant, et même si mon corps entier voulait prendre la poudre d'escampette, mon esprit était hypnotisé par les ténèbres qui t'habitaient presque aussi bien que la solitude et dieu, ce que je t'enviais cette partie sombre de toi.

« Non, avais-je haleté alors que ton autre main griffue s'était invitée autour de ma queue de cheval.

- Tu le sauras bien assez tôt, Umino Iruka. Quand tu seras devenu comme moi. »

Tu avais murmuré ses mots si proches de mes lèvres souriantes de cette victoire, que j'en étais presque tombé à la renverse si tu n'avais pas raffermi ta prise douloureuse dans ma chevelure.

« Dois-je comprendre que tu acceptes enfin d'être mon maître, Kakashi ? Avais-je demandé de mon habituel rictus cette fois accompagné de cette goutte de sang perlant de mes joues.

- Quand tu seras Chunin, Umino Iruka. »

L'examen Chunin arrivait bientôt.

Et tu m'avais alors promis de devenir mon maitre si je l'obtenais. Je m'étais alors entrainé d'arrachepied avec mon équipe qui ne comprenait pas ce nouvel engouement qui m'habitait. J'effectuais la plus grande part du travail lors de nos missions. Je balayais le moindre obstacle sur notre route, la simple idée malsaine de te ressembler me donnait déjà bien assez de force. Et mes co-équipiers m'analysaient de loin, je le savais. Et personne n'avais osé pas même notre chef d'escouade, tenter d'apaiser la rage qui soudain m'avait habité. La rage, était une bonne amie pour accomplir une mission rapidement.

Mais j'étais fatigué Kakashi. Je ne supportais plus ces missions de rang D et C. Je m'étouffais de leur stupidité car je rentrais toujours aussi sain d'esprit que quand je partais. Il n'y avait rien de lourd qui flottait autour de moi, rien de brisé. Moi, je voulais être comme toi.

Me prouver que je pouvais continuer de marché même en étant brisé.

L'examen Chunin fut une première expérience. Comme un avant-gout. Et cette douleur, cette adrénaline qui m'avait habité tout du long, je là ressentais. Je la respirais à plein poumon et je me sentais enfin vivant.

J'avais arrêté de fuir la mort et l'avais laissé venir jusqu'à moi pour la combattre de toutes mes forces que j'avais emmagasiné en attendant ce jour, en pensant à la tienne.

Bien-sûr, je ne rivalisais pas avec certains concurrents. Je n'avais pas encore ce qui te caractérisait toi, une signature. Je n'étais qu'un Shinobi lambda sans pouvoir particulier et j'avais bon espoir que tu allais bientôt m'aider à changer ça.

Les duels de fin d'examen, avaient eu raison de moi. Je m'étais retrouvé sur un lit d'hôpital salement amoché et Sandaime avait grondé mon inconscience malgré son verdict approbateur. J'en avais juste marre d'être considéré comme un enfant à protéger. Kakashi, personne n'avait jamais eu besoin de te protéger toi.

Mais ça y était, Kakashi. J'étais Chunin, et tu m'avais pris sous ton aile.

« Sais-tu ce que signifie ton prénom, Umino Iruka ? m'avais-tu demandé le premier soir de notre entrainement.

- Bien sûr que je le sais, je m'appelle littéralement dauphin, avais-je répondu en fronçant les sourcils. Bon alors, tu m'apprends un truc ? »

Tu avais soufflé d'exaspération avant de me bander les yeux sans me donner mon avis.

« Voyons voir de quoi est capable le dernier membre du clan Umino, Umino Iruka. »

J'avais à peine eu le temps de répondre « Quoi ? » que tu m'avais déjà assailli assez de coups sans une once de pitié.

Et cette douleur, Kakashi, que tu m'as fait ressentir ce jour-là, tu le sais, m'a changé à tout jamais.

Elle fut mon ticket d'entrée dans ton monde. Mon ticket d'entrée sur le chemin de l'ombre.

Et je souriais. Je n'essayais même pas d'esquiver tes coups que je ne voyais pas. Et je ne savais pas pourquoi tu avais bandé les yeux, Kakashi. Pas encore. J'appréciais simplement la douleur que tu m'infligeais comme un nouveau souffle, et je respirais à plein poumon la douleur comme la preuve même de mon existence. Je n'étais plus insignifiant. Je n'étais plus un insecte ou un chien. J'étais là. Moi, Umino Iruka.

Je souffre donc je suis.

C'est ce que j'avais appris de la vie ce soir-là Kakashi, et bientôt j'allais comprendre à quel point j'en avais besoin.

« Bienvenu dans mon monde, Umino Iruka. Fut les derniers mots que j'étais parvenu à entendre avant de sombrer dans l'ombre, un sourire victorieux aux lèvres. »

Une nouvelle fois, Iruka se tient en équilibre sur la cime d'un arbre. La lune est pleine et l'ébloui. Iruka est un homme de l'ombre. La lune est bien trop belle.

« Kakashi, te souviens-tu ce que tu m'as appris ? »

Il retire son masque de porcelaine et se bande les yeux avant de le réenfiler.

« Je suis tout ouï, Kakashi, murmure Iruka avant de sauter de l'arbre à l'aveugle.»

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