Chapitre 22

La vie n'est pas simple mais elle peut être pleines de surprises, comme avec moi. Je me suis réveillé après un an et demi de coma. Et me voilà, les yeux ouverts, normalement seul mais une fille dort dans ma chambre. Eden. Elle a eu un accident de voiture. Après tout ce qu'elle a déjà vécu, elle est encore ici. 

J'aimerais lui parler mais je ne suis pas très causant. Je suis très réservé de nature, surtout depuis que ma copine m'a trompé avec Jace, mon cousin. Putain, j'en reviens toujours pas. Elle n'est même pas venue me voir pendant mon coma, comme si je n'étais rien à ses yeux. Quand on trompe, c'est que l'on aime pas son copain, il me semble. Elle aurait du me quitter au lieu de me faire espérer. Je voyais notre avenir ensemble. En tout cas, je l'avais vu. J'étais un sombre crétin d'avoir imaginé tout ça. Elle m'avait mené en bateau pendant des mois. Bête comme j'étais, je n'avais rien remarqué. Elle avait tout abattu d'un simple geste. Je ne lui avais pas pardonné avant mon accident et même en y repensant, je ne le ferai pas dans un avenir proche. Je pouvais être rancunier quelques fois.

Je parviens à me redresser et à jeter mes jambes par dessus le matelas. Ils touchent le sol et j'ai enfin la sensation sur par terre dur sous mes orteils. Je soupire. C'est un gros effort tout ça. Bientôt, je vais réapprendre à marcher. C'est étrange car je me sens en pleine forme. Je pensais que la fatigue allait apparaitre mais non.

Mes yeux suivent la forme de la silhouette sous la couverture devant moi. Eden est aussi belle que je me l'étais imaginé. Un visage en forme de cœur, de longs cils, des petits traits, de longs cheveux bouclés qui descendent en cascade son ventre. Une fameuse crinière. Sa voix était un peu grave, je l'imaginais plus dure niveau physique. Je me suis lourdement trompé. Elle a une apparence douce.

Pourquoi s'est-elle occupée de moi à ce point ? Elle ne me connait pas. Et voilà qu'en venant me rendre visite, elle a eu un accident de voiture. Elle a eu son permis que récemment et je sais à quel point sa mère a boulotté pour lui acheter une voiture. Grâce à l'héritage de mes parents et mes compétitions de natation, je n'ai jamais été en manque d'argent. Je n'ose imaginer ce que la mère doit ressentir.

Je mange un peu de chocolat en la regardant endormie. Elle a quelques plaies sur son visage qui disparaisse. Son bras est dans un plâtre. Un bout de verre a perforé la peau de son ventre, j'ai entendu les infirmiers le dire. Encore une fois, elle ne s'est pas loupée.

Je me recouche dans mon lit. De toute façon, je n'arriverai pas à marcher. Ma rééducation commence la semaine prochaine si tout va bien. Je pense à toutes les choses que je vais pouvoir faire prochainement. Comme manger normalement et ne plus être nourri par sonde.

Je remonte la couverture sur moi et jette un coup d'œil à mon pyjama. Celui qu'Eden m'a acheté. Le jour ou elle me répète qu'elle est égoïste, je lui ferai remarquer tout ce qu'elle fait pour les autres. Elle est trop généreuse pour se sous-estimer de cette manière.

Je tourne la tête vers la droite et tombe sur un carnet jaune. Je pense savoir à qui il appartient. Je l'attrape et l'ouvre à la première page. J'éclate de rire. Il est écrit :

Ce livre appartient à Eden Castel. Si tu n'es pas mon inconnu, repose le sur le champ, sinon ta lignée aura de gros soucis (je ne suis pas une sorcière vaudou mais presque).

Si c'est bien toi mon inconnu, je te laisse tranquillement le lire. Tu seras la seule personne à vraiment me connaitre et à deviner mes sous-entendus. Et cela voudra dire que tu es réveillé, ce que je te souhaite le plus au monde.

Avec toute mon affection,

Eden

Elle avait raison. Je suis sorti de mon coma, comme elle le pensait. Je l'ai écouté chaque jour me dire à quel point je manquais des choses. Au début, elle ne disait pas ça. Elle semblait en colère contre la vie. Je la comprends. La vie est une chienne. Certains ont faciles, d'autres clairement pas. Eden et moi sommes au milieu.

Mon téléphone est à portée de main. Je me doute que j'ai des milliards de messages. Je repose le carnet sur ma cuisse et allume mon portable. Les messages et les appels défilent dans mes notifications. Surtout de mon meilleur ami Spencer et de ma petite-amie Caro. Enfin mon ex-copine, j'imagine. Je n'ai pas eu le temps de la quitter mais je pense que ne plus répondre à aucuns de messages, mails est une preuve que je n'ai plus envie de la voir. Pourquoi ne sont-ils pas venus me voir ? Pourquoi m'avoir lâchement abandonné ? J'aurais eu tellement besoin de les entendre. Et là maintenant, j'aurais aimé les avoir à mes cotés. Dire à Caro mes quatre vérités, ça me ferait un bien fou et me soulagerait d'un poids que je porte depuis bientôt deux ans. Je l'ai surprise me tromper et le soir même, j'ai eu un accident. J'en suis encore écœuré.

Je décide d'appeler mon meilleur ami. Je veux des réponses. Il répond presque immédiatement.

- Kiéran ? demande sa voix surprise.

Je ricane.

- Ce n'est que moi. Alors, la vie est belle ?

Je ne suis pas du genre à m'énerver. Je suis très calme et quand l'eau déborde, j'explose. Sauf que là, je vais exploser tout de suite si je ne me calme pas.

- Mec, je m'attendais pas à t'entendre. Ca va ? J'arrive tout de suite.

Il semble tellement pressé. Il se met à raconter des tonnes de choses auxquelles je ne comprends rien.

- J'ai une chose à te demander, je l'avertis.

- Demande moi n'importe quoi.

- N'avertis pas Caro que je suis réveillé. Je veux pas la voir avant un bon moment.

Il est encore plus étonné. C'est vrai que lui ne sait rien de toute cette histoire. Il ne demande pas les raisons et tant mieux. Une demi-heure plus tard il arrive au pas de course. Il reste pas longtemps hésitant avant de me sauter dessus. Pour un mec, il est très expressif. Il ne cache jamais ses sentiments et je sais qu'il me considère comme son frère.

- Je suis trop content de te voir gros, comment ça va ?

Il me relâche pour s'asseoir à coté de mon lit, sur la chaise. Il a changé, beaucoup. Il se laisse pousser la barbe et il a les cheveux légèrement plus longs, relevés sur le dessus. Je ne sais pas à quoi je ressemble et je m'en fiche pas mal à cet instant précis. Je veux juste avoir les réponses à mes questions.

Il regarde en direction d'Eden. Elle dort, le visage tourné vers nous.

- Depuis quand tu as une fille dans ta chambre ? Et depuis quand il y a des chambres mixtes ?

Je soupire en passant une main sur mon visage las.

- C'est Eden. Elle m'a parlé tous les jours pendant des mois. Pour se soigner mutuellement, nous sommes dans la même chambre. Presque personne ne le sait. C'est une très longue histoire. Arrête de la regarder ok, c'est pas ton style.

Il recule, faussement coupable. Il a un sourire de triomphe, comme s'il avait obtenu ce qu'il voulait.

- C'est pas peut-être pas mon style mais c'est pas le tien non plus, mon vieux. Elle est chasse-gardée, c'est ça ? Ahah, je m'y attendais pas à ça.

Je décide de parler d'autres choses. 

- Spencer s'il te plait, reste sérieux. Je pourrais aller mieux et toi ?

- Y a un truc qui va pas. Raconte.

On avait 7 mois quand on s'est rencontrés à la crèche tous les deux. Depuis, on est amis. On a fait la natation ensemble, tous les championnats.

- Tu es venu me voir pendant mon coma ?

Son expression se fige. Je croise les bras sur mon torse.

- Oui au début, répond-il et il parait de plus en plus mal à l'aise. Je ne suis pas beaucoup venu par la suite. Je sais Kiéran, c'est horrible. Si j'avais été dans le même état que toi, tu serais venu tous les jours toi. Sauf que j'avais ma vie. Mes études à continuer. Je pense que tu peux le comprendre, non ?

Je suis encore fâché mais je reconnais qu'il a raison. Il a sa vie. Et c'est vrai, je serais tout le temps venu le voir. Il est comme mon frère. On abandonne pas quelqu'un de sa famille.

- Tu m'en veux à ce point ?

Il a l'air blessé par mon manque de réaction. Je hoche la tête.

- Je t'en veux énormément. Tu te rends compte qu'une inconnue est venue me voir tout le temps et pas toi ? Je te connais depuis qu'on est bébé. Je m'attendais au moins à ce que tu viennes une fois par mois. Je me rappelle de tout pendant mon sommeil et je ne me souviens pas de toi.

Il baisse la tête, ne soutenant plus mon regard. Je suis blessé en fait. Mais je ne peux jamais lui en vouloir bien longtemps, il le sait bien.

- Je suis vraiment désolé, Kiéran. C'est vraiment pas ce que je voulais. Pourquoi Caro ne peut pas venir ?

- Elle m'a trompé avant mon accident. Avec Jace.

Spencer fait une tête à tomber par terre. 

- Ton cousin et Caro ? C'est quoi ce délire ?

Moi-même j'en ai aucune idée. Ils se connaissent mais je ne savais pas que ça irait plus loin. Rien ne les a pourtant arrêté. 

- Ca me dégoute, lance mon meilleur pote. Je suis de tout cœur avec toi. Elle n'approchera pas ta chambre, je te le jure. Mais elle me parle souvent. Tu veux que je lui dise quelque chose en particulier ?

- Que je suis bel et bien vivant et que j'ai une copine. Ca lui fera une belle jambe.

Il éclate de rire devant mon plan. Il sait très bien que mon ex ne va pas bien supporter cette révélation. Elle est possessive envers moi depuis le début de notre relation. On a été ensemble pendant quatre ans. Quatre longues années de disputes incessantes, de je t'aime moi non plus. Une vraie attraction. Il était temps que cela cesse.

- Ta copine Eden, peut-être ?

J'ai droit à un clin d'œil. Je souris à Spencer. Il a tout compris.

- Exactement.

Il reste avec moi une heure avant de partir en voyant que j'étais épuisé.

- Elle va être très jalouse Caro. Surtout de la beauté de ta copine.

Ca ne m'étonne même pas. Quand il y a la concurrence, Caro devient morte de jalousie. Tout le monde y a déjà eu droit. Elle ne saura pas avant un petit moment qui est Eden, de toute façon.

- Qu'elle la jalouse seulement. Bye mec.

Je m'écroule dans mon lit, extenué. Je n'ai pas explosé. On a parlé comme si rien ne s'était passé. Ma rancœur a disparu. Mon visage se tourne de lui-même vers Eden, cet ange aux cheveux bouclés. 

- Bonne nuit Eden, je lui murmure.

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