Self-défense
Après mon service le mardi, presque une semaine après avoir vu Drew au centre commercial, Sophia vient me chercher pour s'assurer que je sois bien présente au fameux cours de self-défense au gymnase du commissariat. Elle est passée ce matin comme à son habitude pour prendre un café et m'a rappelée que le cours est ce soir et que je n'ai aucune excuse pour ne pas y aller. Je ne comprends pas pourquoi elle insiste autant. Je n'y serais peut-être pas allée de moi-même, mais quand elle me l'a proposé, j'ai trouvé l'idée intéressante. C'est vrai, je suis une femme seule dans une ville qui n'a pas que des beaux quartiers et je reste parfois tard au café pour faire l'inventaire. Quelqu'un pourrait venir pour voler la caisse quand je suis toute seule.
— Je n'ai pas le temps de prendre une douche avant d'y aller ?
Je m'engouffre dans la voiture de Sophia en soupirant.
— Je pense qu'on va nous faire suer, tu la prendras après.
Elle tapote mon genoux en m'adressant un sourire innocent et démarre.
— Mais je sens le café et la friture, je me plains en tirant sur mon pull pour le renifler.
— Personne ne va venir te renifler, arrête de chercher des excuses maintenant.
Je me laisse aller contre le siège et ferme les yeux pendant les quelques minutes qui nous séparent du gymnase, pour évacuer le stress de la journée. Malheureusement, ces quelques minutes ne sont pas assez longues pour que je dorme un peu. Je suis restée réveillée très tard à cause d'un livre dont je voulais absolument connaitre la fin, maintenant je le regrette.
Nos sac sur les épaules, nous approchons du gymnase, juste à côté du commissariat. Sur la porte une grande affiche annonce le nouveau cours auquel nous allons assister. Deux policiers en uniforme se tiennent de profils, les bras croisés. Je me demande si ce sont les deux hommes qui vont nous faire ce cours.
— Il va sans doute y avoir beaucoup de monde, je remarque en voyant que le parking à côté est rempli, tout comme celui où nous nous sommes garées.
— Ça sera d'autant plus intéressant, réplique Sophia.
— Plus facile de s'humilier, tu veux dire.
Elle lève les yeux au ciel et me pousse dans le vestiaire. Une dizaines d'autres femmes prennent juste le temps de lever les yeux vers nous avant de continuer à se changer. Ça commence bien. Je m'installe à une place libre et me change en regrettant déjà d'être venue. Les souvenirs désastreux du lycée reviennent sans que je puisse les arrêter. Si maintenant je cours souvent pour rester en forme, ce n'était pas du tout le cas au lycée, bien au contraire.
— T'es prête ? On y va ? me demande Sophia en bondissant d'un pied sur l'autre, faisant sautiller ses cheveux qu'elle a attaché en une couette sur le haut de sa tête.
Je me redresse et la suis dans le couloir en attachant mes cheveux.
— Tu es déjà venue ici ?
Elle se repère bien trop facilement dans le dédale de couloirs.
— Une ou deux fois. Avant que la salle de sport ne soit ouverte dans le centre-ville, il y avait des permanences ici pour les personnes qui ne sont pas de la police.
Nous arrivons à l'entrée du gymnase 3, la porte grande ouverte nous laisse voir une vingtaine de personnes déjà présentes.
— Bon, on va pouvoir se cacher au fond, je dis en avançant vers le mur.
Mais Sophia n'est pas de cet avis. Saisissant mon bras, elle me traîne vers l'avant.
— Tu n'es pas très grande, tu ne verras rien derrière.
— Je ne suis pas si petite que ça, je proteste en essayant de repartir dans l'autre sens.
Comment fait-elle pour me traîner derrière elle aussi facilement ? Elle avance toujours et nous dépassons plusieurs femmes. Je me rends compte alors qu'il n'y a aucun homme.
— Jusqu'où tu nous ramène ?
Elle s'arrête enfin. Tout devant.
— T'es sérieuse ? je siffle entre mes dents.
— Mais oui. Ne t'inquiète pas, personne ne va se moquer de toi.
J'aimerais protester, mais c'est Sophia, et face à elle, je n'ai aucune chance. Alors je me laisse tomber parterre et boude.
Nous patientons, assises en tailleurs sur le sol recouvert d'un fin tapis verts sombre. Sans doute pour amortir les chutes. J'en grimace déjà de douleur. Sophia n'arrête pas de regarder sa montre et jette des regards nerveux vers la porte de la salle alors que j'observe plus ou moins discrètement les femmes qui nous entourent. Certaines sont plus maquillées qu'une voiture volée. D'autres regardent autour d'elles aussi nerveusement que moi. Celles-ci je les aime bien. Sophia soupire à nouveau en regardant sa montre.
— Tu attends quelque chose ?
Elle me sourit patiemment.
— Le début du cours.
— Tu as quelque chose de prévu, pour être aussi impatiente ?
— Moi ? Non, rien du tout.
Je fronce les sourcils, ne croyant pas du tout à sa réponse. Derrière nous, soudain, toutes les filles se lèvent. Si vite que je n'ai pas le temps de voir qui vient d'entrer. Sans doute la personne qui va animer ce cours. Nous nous redressons à notre tour et c'est là que je l'entends. Je reconnaîtrais se rire entre mille. Je me tourne vers Sophia qui évite précisément de me regarder.
— Tu le savais ?!
Elle se tourne vers moi d'un air innocent juste au moment où Drew et Palmer arrivent à l'avant de la salle, c'est-à-dire juste devant nous.
Juste devant moi.
Je me fige, à l'image de Drew qui après m'avoir observé quelques secondes, laisse apparaître un sourire ravit sur son visage.
— Bienvenue à toutes, il dit de sa voix grave et sûre en s'adressant à tout le monde, mais ne regardant que moi.
Je m'approche discrètement de Sophia et lui donne un coup de coude.
— Hé ! elle souffle en s'écartant un peu.
— Attendez un peu avant de commencer à vous battre, plaisante Palmer.
Ils portent tout les deux un pantalon de survêtement bleu marine et un t-shirt de la même couleur, près du corps. Très près du corps. Je peux compter les carrés de leur tablettes de chocolat à travers le tissu. C'est totalement ridicule. Bon d'accord, avec en plus le logo de la police imprimé dessus c'est totalement sexy, mais ridicule quand même.
— Elle en avait besoin pour se mettre dans l'ambiance, je réplique avec un sourire innocent.
Drew retient un rire et reprend la parole pour s'adresser à tout le monde.
— Je me présente, je suis l'officier Jacobs, mais vous pouvez m'appeler Drew. Et voici Jensen Palmer.
— Tout le monde m'appelle Palmer, il précise avec un large sourire.
Il me fait un peu penser à Chris Evans, avec moins de muscles et plus petit. Mais il reste séduisant. Rien à voir avec Drew en revanche, qui se rapproche plutôt de Henry Cavill.
— Nous serons vos instructeurs pour ce cours. Rassurez-vous, il n'y a rien d'insurmontable, notre but est de vous permettre de vous défendre le plus efficacement possible en cas d'attaque. Que ce soit par un inconnu ou par une personne de votre entourage. Il est très important pour nous que vous soyez en mesure de répliquer quoi qu'il arrive. Nous ferons en sorte de mettre en scène différentes situations possibles pour vous préparer à tout. Ou presque.
— Ce programme, ajoute Palmer, mis en place par Drew, entre dans le cadre d'une nouvelle campagne de prévention des violences domestiques. J'espère donc, mesdames, que nous vous serons d'une grande aide. Ce cours aura lieu une semaine sur deux, la semaine prochaine, il sera réservé aux hommes, donc passez le mot.
Mes pensées partent un peu dans tous les sens avec ce discours. C'est Drew, qui n'est ici que depuis un peu plus de deux mois, qui a mis tout cela en place ? Je trouve ça impressionnant. Et également intriguant. Je me demande pourquoi une telle campagne lui tient à cœur. Certes, c'est une cause noble et très utile. On ne peut que le féliciter pour cela. Et d'ailleurs, c'est un peu ce que nous faisons lorsque tout le monde se met soudain à applaudir nos deux instructeurs. Drew ne sait plus où se mettre, un léger sourire gêné sur les lèvres, alors que Palmer se pavane comme un paon fier de dévoiler les belles couleurs de son plumage. Il ne faut que quelques minutes pour que les applaudissements cessent et Drew reprend vite son visage sérieux et déterminé.
Le cours commence très vite. Palmer seconde Drew brillamment, se retrouvant au sol quand il le faut. Je ne peux m'empêcher de rire à force de l'entendre gémir à chaque atterrissage sur les tapis. Pendant l'heure et demi de cours, nous apprenons trois techniques de défense et je crois que Drew a appris le prénom de toutes les femmes présentes. J'ai plusieurs fois regretté de devoir m'entraîner avec Sophia et non avec l'une d'entre elles, juste pour pouvoir les mettre au sol.
— Aïe ! gémit soudain Sophia en se massant les fesses.
Je viens de la faire tomber, comme Drew et Palmer nous l'ont montré, mais j'y suis peut-être allée un peu fort.
— Tu te venge de quoi exactement ? elle me demande en se relevant. Je sais que je peux être une garce parfois, mais le dialogue c'est moins douloureux si tu veux régler quelque chose.
— Désolée, ce n'était pas contre toi. Je suis juste un peu sur les nerfs, je marmonne en cherchant nos instructeurs du regard.
Dans un coins, Palmer aide une femme à reproduire l'un des mouvements. Je doute qu'elle ait vraiment besoin d'aide, mais Palmer se dévoue avec joie. Un vrai tombeur ce type. J'en souris et continue à chercher celui qui m'intéresse. Au fond de la salle, Drew discute avec une femme d'environs trente ans qui lui lance des sourires de tueuse. Je ne serais pas étonnée si elle se ramène la semaine prochaine avec une mini-jupe et des talons. Agitant sa main parfaitement manucurée pour s'éventer, elle demande à Drew quelque chose. Toujours aussi souriant, il secoue la tête.
— Ce n'était peut-être pas une bonne idée de te ramener à ce cours. J'ai deux mots à dire à Drew, moi.
Sophia commence à marcher dans sa direction, d'un pas déterminé. Trop déterminé. Je sais que ce n'est pas bon signe. Alors dans la panique, je m'accroche à son bras et la retiens.
— Ne lui dit rien. Il a parfaitement le droit de discuter avec ces élèves, non ?
J'essaye de m'en convaincre moi-même.
— Et puis vous ne sortez pas ensemble, elle ajoute d'un air entendu, retournant le couteau dans la plaie.
— La ferme, je grogne.
Elle rit et nous reprenons notre exercice. Cette fois, c'est elle qui me balance au sol. La chute est rude, mais pas aussi douloureuse que je ne le pensais. Après la deuxième chute, une sensation étrange m'envahie. Comme du soulagement. Sophia me fait tomber encore une fois, finissant de pratiquer les trois techniques apprises. Je ne sais pas pourquoi, mais me retrouver au sol, comme ça, me libère des tensions que j'ai accumulées. Me laisser faire et me retrouver au sol, vulnérable. C'est presque amusant.
— Tu pourrais au moins essayer de te défendre pour rendre les choses plus réelles, me reproche mon amie en m'aidant à me relever.
Un sourire diabolique sur le visage, je lui fais signe de recommencer. Cette fois, j'essaye un peu plus franchement de la clouer au sol. Elle se défend valeureusement et me fait invariablement tomber sur les fesses. Le bruit est assourdi par les tapis de judo mais je ressens la violence de l'atterrissage dans tout mon corps.
— C'était mieux, approuve Sophia.
Je reste allongée au sol, cherchant ma respiration. Je ne suis pas certaine de pouvoir à nouveau me relever. Mes muscles sont douloureux, et il faut avouer que le sol est plutôt confortable.
— Tess ?
Je lève un pouce et ferme les yeux. Derrière mes paupières, une ombre s'approche. Je ne sais pas de qui il s'agit, mais de légers frissons recouvrent soudain mes bras.
— Tout va bien les filles ?
Je me mords la lèvre pour ne pas sourire.
— Il est possible que je l'ai un peu cassé, annonce Sophia sans réelle inquiétude.
J'ouvre un œil et vois Drew m'observer les sourcils froncés.
— Tu me l'a cassé ? il s'offusque en lançant un regard sévère à Sophia. Je ne te prêterais plus rien.
Sophia ouvre la bouche en grand, l'air totalement prise au dépourvue. J'avoue que je le suis aussi. Comme s'il pouvait me prêter à qui que ce soit.
— Je la connais depuis plus longtemps que toi, c'est moi qui te l'ai prêtée.
Attendez une minute ! De quoi ils parlent ?
Sophia croise les bras pour se donner plus d'aplomb. Drew adopte la même posture, l'air butté.
— Tu veux régler ça sur le tatami ? le provoque Sophia.
Je me cache derrière mes mains, me demandant pourquoi je fréquente des gens aussi fous. Ah oui, c'est vrai, ce sont mes seuls amis et je suis aussi folle qu'eux.
— Je t'attends.
Il recule de quelques pas pour s'éloigner de moi, ou du mur peut-être. Sophia le suit, ne le lâchant pas du regard. Les autres élèves du cours s'éloignent et forment un demi-cercle autour d'eux pour admirer le désastre. Je suis obligée de me redresser pour les voir.
Drew n'est pas du tout sérieux, un sourire essaye furieusement de s'étirer sur ses lèvres et son regard brille d'humour. Au contraire, Sophia porte le visage de la détermination. Une fureur enfantine flamboie dans ses yeux. Elle se met en place.
J'entends déjà la moitié des femmes présentes, celles qui ont essayé de refiler leur numéro, ou flirter avec Drew, spéculer sur les motivations de Sophia. Pour la plupart, elles pensent que Sophia cherche à le mettre dans son lit. Quelle bande de vipères. Le vrai retour au lycée.
Je me rapproche du cercle pour avoir une meilleure vue et tenter de faire abstraction des commentaires, juste au moment où Sophia s'élance vers Drew. Je retiens mon souffle, la voyant déjà voler dans les airs avant d'atterrir comme une crêpe sur les tapis. Elle se met même à pousser un grognement de chien enragé tout en s'élançant vers son adversaire qui ne semble pas le moins du monde impressionné. Je ne veux pas voir ça.
Détournant les yeux, je me sens soudain soulevée de terre et emportée tête à l'envers, par une force dont j'ignore l'origine. Enfin jusqu'à ce que mes yeux se posent sur les fesses juste en face de mon visage. Je redresse la tête pour voir tous les regards tournés vers moi et mon assaillant. Ça ne devait pas se passer comme ça.
Drew continue à courir et s'arrête seulement à l'autre bout de la salle. Je ne vois rien, il est tourné vers le autres alors que moi je ne vois que le mur.
— Rends-là moi, tout de suite ! s'écrit Sophia.
Une claque atterrie sur mes fesses, me faisant sursauter. Je réponds de la même façon sans ménager ma force.
— Ça va être drôle, s'amuse Drew en tapant une nouvelle fois sur mon postérieur déjà endolori par mes nombreuses chutes.
Je lui rends sa fessée, laissant peut-être ma main s'attarder un peu trop longtemps. Il faut bien que je garde l'équilibre quand même.
— Repose-la, ordonne Sophia de plus en plus proche de nous.
Drew éclate de rire et repasse son bras derrière mes genoux pour mieux me tenir.
— Accroche-toi, bébé.
Je n'ai que le temps de poser mes mains sur ses hanches, qu'il se met à courir à nouveau dans l'autre sens. Cette fois je vois Sophia nous suivre et les regards furieux, dédaigneux, hautains et j'en passe, des femmes vexées de ne pas être à ma place. Je me retiens de leur tirer la langue, m'accrochant fermement à Drew, le souffle coupé par mon rire. Nous faisons au moins deux fois le tour de la salle avant qu'il ne se décide à me poser parterre. Ma tête me tourne alors que le sang afflue violemment dans le reste de mon corps. Je me tiens collée à Drew jusqu'à ce que je puisse tenir toute seule mais même à ce moment-là, il ne me relâche pas. Ses mains ne cessent de se balader dans mon dos, me caressant délicatement alors qu'il me tient contre lui. J'ai pratiquement le nez dans son torse, chatouillé par son parfum si masculin.
— Désolée pour cette petite blague, il dit d'une voix forte qui raisonne dans le gymnase. Le cours est terminé.
Il ne s'adresse pas à moi, alors que c'est moi qu'il vient de trimbaler dans tous les sens.
— Allons-y, Tess, me dit Sophia en riant encore.
Je fais un pas vers elle mais un bras puissant m'empêche d'aller plus loin.
— Ah, non ! Je l'ai volée à la loyale.
Je soupire, je n'ai ni la force ni l'envie de protester. Et puis Sophia va s'en charger à ma place.
— Ok. Amuse-vous bien, réplique Sophia avec un large sourire.
Elle est sérieuse ?
— Quoi ? Tu me laisses là ?
Elle a voulu se battre avec lui et nous a couru après pour me « récupérer » et maintenant elle ne fait que hausser les épaules et s'en aller ?
— Je suis certaine qu'il s'occupera très bien de toi.
Elle ponctue cette phrase d'un clin d'oeil. A l'intention de Drew. Elle a fait tout ça exprès ? Ou est-ce juste une formidable coïncidence ?
Je regarde mon amie s'en aller vers les vestiaires, sans même se retourner, fière d'elle.
— Ne t'inquiète pas, je vais juste te ramener chez toi. T'as dû avoir une longue journée.
Je frissonne de son souffle soudainement si près de mon oreille.
— Je ne m'inquiète pas, je couine.
Il sourit, sachant très bien que je n'étais pas très partante pour faire je ne sais quoi avec lui alors que je suis couverte de sueur. Franchement, je suis dégoûtante, comment pourrait-il envisager de faire quoi que ce soit d'autre que de m'envoyer dans la douche la plus proche ? Je suis presque jalouse qu'il ne soit pas en sueur comme moi.
— Palmer, tu t'occupes de tout fermer, il ordonne avant de se tourner vers moi. Je t'attends à la porte le temps que tu récupère tes affaires.
Il hésite quelques secondes, sa main tenant toujours mon bras, ses yeux fixés sur le bleu que je me suis fait ce matin. Il n'est vraiment pas très beau à voir, je ne sais pas comment je m'y suis prise, mais j'ai réussi à pratiquement me perforer le bras avec le coin le plus pointu du comptoir du café. Comme j'avais des manches longues, je n'ai pas vu la catastrophe avant d'arriver ici.
— D'accord, je souffle les yeux plissés, ne sachant pas ce que Drew attend pour me lâcher.
Son pouce glisse sur mon hématome et son visage devient soudain plus sombre. Finalement, il hoche simplement la tête avant de se détourner aussi vite que si je venais de le gifler.
Dans la voiture, il reste globalement silencieux, me demandant juste si j'ai apprécié le cours. Il est... étrange. Distant.
— C'est toi qui a mis en place cette campagne de prévention des violences domestiques ?
— Oui.
Son visage est sombre et son regard rivé sur la route.
— Pourquoi ? Enfin je veux dire, ça ne fait que deux mois que tu es là et tu mets déjà un tas de choses en place. Ça a dû te demander beaucoup de travail.
Il hausse une épaule.
— Je gère. Je le faisais déjà avant. Je savais ce que je devais mettre en place et comment.
— D'accord.
Nous continuons à rouler en silence. Un silence pesant dont j'ignore totalement l'origine.
— J'ai été content de te voir aujourd'hui, il me dit en se garant devant mon immeuble.
Je lui retourne un sourire alors que son visage reste étrangement torturé.
— Moi aussi. Merci de m'avoir raccompagnée.
J'ouvre la portière en espérant m'enfuir au plus vite. Il m'attrape la main et la serre brièvement dans la sienne pour que je le regarde à nouveau.
— Je veux que tu puisses compter sur moi, Tess.
Fronçant les sourcils, je cherche ce qu'il veut me dire. Après notre conversation au téléphone la dernière fois, il pense peut-être que je me sens seule, que je ne peux compter sur personne parce que je n'ai personne. Cette idée me déplaît. Je ne veux pas qu'il se sente obligé, qu'il ait pitié de moi.
— Merci, je réponds tout de même avec un sourire forcé.
Cette fois il me laisse m'en aller et démarre dès que je suis dans le hall. J'ai vraiment du mal à suivre ses sautes d'humeur.
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