Rêve éveillé
— Je peux te poser une question ?
Nous venons de partir de son appartement où nous sommes allés pour que Drew prenne quelques affaires et faire savoir à Kyle que nous sommes toujours en vie et qu'apparemment, nous ne rentrerons pas ce soir. Quand Kyle a demandé où nous allons et que Drew lui a répondu « chez nous », il a juste souri, ravi, et m'a adressé un clin d'œil. Je n'ai toujours pas la moindre idée de là où nous allons, mais Drew m'a fait préparer des affaires pour plusieurs jours. J'espère qu'il sait que je travaille demain.
— Je t'écoute, mon cœur, il dit en embrassant ma main avant de la reposer sur sa cuisse, tenant le volant d'une main.
— Hier soir, quand je t'ai dit ce qui m'est arrivée, pourquoi je suis comme ça maintenant, tu n'as rien dit.
Je me tourne vers lui, je vois qu'il a les sourcils légèrement froncés.
— Quelle est ta question, ma puce ?
— J'aimerais savoir ce que tu penses de tout ça. Ce que ça te fait. Pourquoi tu as voulu que je te dise tout ça, alors que tes sentiments n'avaient clairement pas changé pour moi ? Pourquoi tu m'as fait vivre ça pendant une semaine alors que ça n'a pas l'air d'avoir changé quelque chose pour toi ?
Sa main se resserre autour de la mienne.
— Tu as raison, mes sentiments n'avaient pas changé pour toi. Je te l'ai dit. Mais j'avais besoin de savoir à quelle Tess j'ai affaire. J'avais inconsciemment besoin d'entendre tout ce que tu m'as dit hier. Que tu n'as pas besoin de moi pour survivre. Que je n'ai pas besoin de te sauver. J'avais besoin de savoir que tu étais consciente de ça pour être certain que tu ne partirais plus.
Il me jette un bref regard avant de se concentrer de nouveau sur la route.
— Mais je t'ai dit que je ne partirais plus.
— Mais tu ne savais pas pourquoi tu ne partirais plus. Tu as toujours été aussi forte que maintenant. C'est juste que maintenant tu en es consciente.
J'ouvre la bouche pour protester, mais il continu.
— Notre séparation, même si je n'aime pas ce mot, ne t'a pas rendu plus forte. Ça t'a simplement montré que tu en es capable. Capable de te battre pour toi-même. Ne te méprend pas, je me battrais toujours pour toi, tu es la femme la plus importante à mes yeux, ma femme. Je me battrais jusqu'à mon dernier souffle pour toi.
— Je me battrais pour toi aussi, Drew.
— C'est tout ce dont j'avais besoin que tu prennes conscience. Que tu es capable de te battre pour toi et pour moi. Pour nous.
Ses mots font sens. J'ai l'impression que le brouillard c'est progressivement dissipé depuis hier et maintenant il ne reste que le souvenir de ce moment confus. Drew lève ma main vers ses lèvres sans me quitter du regard et je réalise que nous sommes arrêtés. Regardant autour de moi, je reconnais la banlieue résidentielle où habitent Sophia et Jules.
— Qu'est-ce qu'on fait ici ?
Il pointe le menton vers la maison derrière moi.
— Qu'est-ce que t'en pense ?
C'est une bâtisse assez simple, sur deux étages. Les murs sont couleur sable avec un toit de tuiles rouges en pente douce. A l'étage, au milieu, le mur fait une courbe vers l'extérieur avec trois grandes fenêtres qui ne vont pas jusqu'au sol. La porte d'entrée en-dessous est en bois foncé avec une grande vitre décorée de fleurs sculptées dans le verre. Des roses. Il semblerait que cette fleur nous suive partout. Autour de la maison, pour ce que je vois, c'est une simple pelouse, coupée par un petit chemin de pavés qui mène à l'entrée, et une allée plus large pour le garage sur le côté.
— Elle a l'air très belle, je réponds en me tournant vers lui.
— Tu veux voir l'intérieur ?
— Tu as les clés ? A qui est cette maison ?
Il ne me répond pas et sort de la voiture pour en faire le tour et m'ouvrir la portière.
— Qu'est-ce que tu me caches ? je demande les yeux plissés.
— Je suis étonné que tu n'aies pas encore compris.
Il me prend la main et me ramène jusqu'à la porte d'entrée, dont il a la clé. Pourquoi est-ce qu'il a la clé ?
— C'est une location ? Pourquoi tu louerais un truc aussi grand juste pour nous deux ?
— Ce n'est pas une location.
Il me pousse à l'intérieur. J'arrive dans un large hall avec un grand escalier sur la droite et une ouverture sur la gauche. Elle donne sur un salon moderne avec un écran plat gigantesque et un canapé d'angle où il est possible de faire pas mal de choses. En face, le hall se prolonge jusqu'à ce qui semble être l'entrée d'une cuisine.
— Ici, tu as le salon, il me dit en me poussant dedans.
Nous ne nous arrêtons pas, il me tire jusqu'à la double porte coulissante en bois sculpté. Il l'ouvre et fait apparaître une large salle à manger.
— Il y a de la place pour environ vingt personnes quand la table est dépliée, il me dit.
Impressionnant, mais je ne comprends toujours pas. Reprenant ma main, Drew ne me laisse pas vraiment le temps de voir tous les détails hormis les vitres qui longent la pièce et donnent sur le jardin derrière. De l'autre côté d'une petite porte, nous tombons sur la cuisine, de style rustique comme celle qu'il y avait chez mes parents. Je souris en passant mes doigts sur l'évier en pierre polie. Drew me laisse plus de temps que dans les autres pièces, mais me tire à nouveau vers la prochaine porte qui donne sur un large salon d'hiver, avec des meubles en osiers, quelques fleurs, et un autre escalier.
— On passe à l'étage ?
— Si tu veux, mais je ne comprends toujours pas.
Enfin j'ai une idée, mais elle est trop saugrenue pour être vraie. Il ne peut pas avoir acheté cette maison. Ça serait de la folie. Et quand aurait-il pu faire ça ? Nous venons à peine d'arranger les choses entre nous. Une telle maison doit coûter une fortune.
En haut des escaliers, nous arrivons dans un long couloir éclairé par les fenêtres à chaque extrémité et la lumière qui sort des pièces dont les portes sont ouvertes.
— Il y a trois chambres et une salle de bain par-là, il dit en pointant la droite. Ici tu as la chambre parentale avec sa salle de bain privée et une autre petite chambre avec une seconde salle de bain.
— Ça fait beaucoup de chambres. Et beaucoup de salles-de-bains, je dis en me tournant vers lui toujours aussi perdue.
— Je t'ai dit que la salle-de-bain parentale à une baignoire ?
— Je commence à penser que cette maison est juste mon rêve devenue réalité, et maintenant tu vas devoir faire beaucoup d'effort pour combler ma frustration de ne pas pouvoir y habiter.
Il se mord la lèvre pour ne pas rire, mais ses yeux brillent tellement que sa joie est contagieuse.
— Quoi ? Arrête de faire cette tête ! je le sermonne en riant.
— Je t'ai dit que je t'emmènerais chez nous aujourd'hui.
Je hoche la tête lentement.
— J'ai acheté cette maison il y a trois semaines.
Mon cœur vient d'arrêter de battre. Et je crois que mes poumons se sont totalement vidés d'un seul coup. Il y a trois semaines, ça veut dire avant notre séparation.
— Je t'ai déjà dit que tes blagues ne sont pas drôles, je réplique d'une voix blanche.
Il prend mon visage entre ses mains et me regarde droit dans les yeux.
— Ce n'est pas une blague, ma puce. Il ne manque que ta signature, mais techniquement cette maison est à nous.
— Quoi ? Mais... Comment ? Quand ? Qu'est-ce...
Il ne me laisse pas paniquer, il m'embrasse pour me faire taire jusqu'à ce que j'arrête de protester.
— Tu veux une explication tout de suite ?
Je hoche la tête, sans voix, le souffle court. Je suis agrippée à son t-shirt pour ne pas m'effondrer.
— Très bien, alors pour faire court, la famille de ma mère était plutôt aisée. Ma mère avait coupé les ponts avec eux mais quand ma grand-mère est morte il y a deux ans, elle nous a laissé un très gros héritage qui m'a permis de payer les trois quarts de cette maison. Kyle l'a cherchée avec moi, parce que comme tu l'as dit, il va vivre avec nous un moment. Et je voulais t'en faire la surprise, une sorte de cadeau de mariage en retard.
Je le frappe du plat de ma main sur son torse.
— Hé ! Qu'est-ce qui te prend ?
— Tu es malade ! C'est une fortune ! Je t'ai quitté et tu m'as acheté une maison ?
— C'était avant que tu ne me quitte.
— Peu importe ! C'est dingue !
Je plante mes deux mains dans mes cheveux et commence à faire les cents pas dans le couloir.
— Je m'attendais plutôt à un « Merci, je t'aime, faisons l'amour dans toutes les pièces ! ».
Je lui lance un regard noir et m'arrête en plein milieu du couloir, les mains sur les hanches.
— Tu es dingue, je t'aime, mais tout ça... c'est trop.
Il n'est plus du tout aussi joyeux qu'avant. Doucement, il s'approche, les mains tendues pour ne pas m'effrayer.
— Tess, tu l'as dit toi-même la semaine dernière. Tu veux vivre dans une maison, une grande maison. Et c'est que ce que je veux aussi.
— Mais...
— Pourquoi faut-il que tu proteste ? C'est la maison de tes rêves, je n'en espérais pas autant, mais ça me ravi au plus haut point. Tu n'es qu'à trois rues de Sophia, quinze minutes en voiture de ton travail et du mien, et il y a assez de chambres pour que l'on repeuple au moins cette ville. Tout ce que tu as à faire, c'est d'en profiter.
Il faut admettre qu'il a de bons arguments. Et cette maison est effectivement parfaite. Je n'ai pas encore vu le jardin mais pour ce que j'en ai aperçu, c'est assez plaisant.
— Tu en es sûr ? Tu veux vraiment nous offrir cette maison ?
— Oui, et c'est déjà fait. Elle est à moi et elle sera à toi également dès que tu auras signé les papiers.
Je regarde autour de moi, mes mains dans celles de Drew comme s'il avait peur que je parte en courant. Je pourrais me faire à une vie dans cette maison. Je m'y vois déjà à vrai dire. Ça m'aurait fait mal au cœur de repartir en sachant que je n'y vivrais jamais, mais là, c'est un rêve devenu possible grâce à l'homme de ma vie, mon âme sœur.
— Quel était ton plan en venant ici ? je demande très sérieusement sans lui faire part de ma décision.
Il pose mes mains sur ses épaules et passe les siennes autour de ma taille pour me rapprocher.
— Eh bien, il y a une bague pour toi, rangée dans une des pièces de cette maison. Je voulais t'en offrir une que j'aurais pris le temps de choisir.
Il coule un regard entendu vers mon alliance. Je me rappelle maintenant un peu plus de cette soirée mais c'est encore très confus. Nous sommes allés dans la première bijouterie que nous avons trouvée, mais je ne sais pas exactement ce qui nous a poussé à choisir ces alliances. Elles n'en sont pas moins belles pour autant.
— Le jeu est simple, il reprend. Tu as tout le temps que tu veux pour la chercher, mais tu dois le faire complètement nue et à chaque fois que tu auras fouillé une pièce sans succès, je t'y ferais jouir.
Mes cuisses se resserrent et je me mords la lèvre.
— Ai-je vraiment envie de retrouver cette bague ? je demande avec malice en commençant à déboutonner mon chemisier.
Je retire mes converses en même temps et les balances dans un coin du bout du pied.
— C'est à toi de voir.
— Tu seras nu aussi ?
— C'est une requête ?
— Je dirais plutôt une condition.
Il sourit et retire son t-shirt. Je laisse tomber mon chemiser au sol et ouvre mon jean.
— Alors, tu veux de cette maison ? il demande avec espoir.
Je fais glisser mon jean, me retrouvant devant lui en sous-vêtements.
— Je veux de toi... dans cette maison... pour le restant de mes jours, je lui réponds en caressant son torse.
Avec un sourire vorace, il m'attrape par la taille et me colle contre lui.
— Je crois que l'on peut déjà dire que ce couloir a été fouillé sans succès.
— Dommage, je souffle sans le penser.
Il me plaque contre le mur le plus proche et ses lèvres trouvent les miennes avec avidité et abandon.
— Je t'aime, il me souffle.
— Plus que tout, je lui réponds.
Il me soulève, passe mes jambes autour de sa taille, et je n'ai plus qu'à trouver une autre pièce à explorer en priant pour ne pas trouver cette bague avant quelques jours.
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