16 - Révélations
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- LAUVIAH - L'ange de la révélation.
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Maman se tourne lentement vers moi, son visage marqué par la colère. Mon cœur bat à tout rompre, comme si j'étais coincé dans un film d'horreur.
Je me demande ce que je vais dire pour me défendre. Je ne peux pas lui parler de ce qui s'est passé avec le serpent. Et si, comme je le pense, c'est lié avec l'autre monde ?
Quoi dire ?
Je jette un coup d'œil à mes frères, espérant qu'ils interviennent, mais ils semblent aussi figés que moi. En la rejoignant, chaque pas me parait être une épreuve, ressentant pour chacun d'eux une décharge électrique. Comme si j'ai attraper un câble dénudé les mains mouillées que je relâche et reprend tout le long de ma traversée jusqu'à elle.
- Oui, maman ?
Elle se retourne et me fixe avec une intensité qui me fait frissonner. Je sens la tension dans l'air, et chaque seconde semble durer une éternité. Quand elle prend enfin la parole, ma respiration se bloque.
- Marie, qu'est-ce que c'est que ça ?
- Maman, ce n'est pas...
- Pourquoi tu n'as pas nettoyé les marches comme je te l'ai demandé. Tu a fais quoi depuis tout à l'heure ?, s'énerve-t-elle en me coupant la parole.
Hyn ?
Je réalise alors que ma peur était totalement infondée. Les marches sont intactes, rien ne semble hors de l'ordinaire. Je soupire de soulagement et peu à peu mon cœur retrouve son rythme habituel.
- Marie ! Réponds-moi quand je te parle.
Je sors de mes pensées, puis lui répond :
- Oui, désolé, je vais le faire tout de suite, maman.
J'attrape le balai et commençe à nettoyer.
- De toute façon, tu sais que Marie ne sert à rien, pouffe-t-il dans mon dos.
- Tu as raison, Jonn, je suis dégouté que ce soit ma sœur, continue-t-il.
Je n'en crois pas mes oreilles. Ce que je viens d'entendre est tout simplement irréel. Mes frangins parlent de moi avec une telle légèreté, comme s'ils ne comprennent pas l'impact de leurs mots. Depuis quand se permettent-ils de me juger ainsi ?
Je repense au serpent qui m'a mordue, à cette douleur fulgurante qui m'a traversé. Et si ce serpent était venimeux et que le venin avait altéré mon esprit me faisant imaginer des choses qui n'existent pas ?
Je poursuis mon ménage en balayant les grains de sable qui descendent lentement, un à un, les escaliers. Chaque coup de balai me semble un peu comme une tentative de nettoyer non seulement le sol, mais aussi mes pensées tourmentées.
Les rayons du soleil filtrent à travers la fenêtre, illuminant la poussière dans l'air, et je me perds dans cette contemplation, espérant que les mots blessants de mes frères s'effacent aussi facilement que ces grains de sable.
- Elle est sourde aussi apparemment, poursuit-il, pendant que Jonn réagit à ce commentaire désobligeant, rigolant sans gêne.
Je me retourne pour jeter un œil, afin de vérifier que ce ne sont pas mes frères qui parlent de cette façon, mais bien des hallucinations auditives.
Lorsque mon regard se pose enfin sur eux, je les trouve en train de me sourire, et un souffle de soulagement m'envahit. Leur sourire me rassure enfin, dissipant les doutes qui tourbillonnent dans mon esprit.
Ce n'est que dans ma tête.
Dans cette lumière douce, je réalise que peut-être, tout cela n'est qu'un malentendu, une illusion provoquée par mes propres peurs et l'écho de mes pensées.
- Pff, j'en ai vraiment marre d'elle, pouffe Enry.
- Vous avez raison, heureusement qu'elle n'a pas de père, il aurait honte d'avoir une fille comme elle.
C'est la voix de ma mère.
Ce commentaire horrible m'a immédiatement fait tilt. Jamais, oh non jamais, ma mère n'oserait prononcer une telle chose. Cette pensée me renvoie à la réalité, ou plutôt à l'illusion qui m'entoure, me faisant réaliser que je suis en plein rêve.
Les rêves que je fais deviennent de plus en plus réels, si bien que je ne parviens plus à distinguer ce qui est réel de ce qui ne l'est pas.
Je suis tellement heureuse de les retrouver et sa paraît si réel que j'ai oublier que je suis dans un de ces rêves.
La frontière entre la réalité et l'illusion s'efface lentement, me laissant dans un état de confusion où chaque mot, chaque sourire peut masquer une vérité bien plus sombre. Je me sens piégé dans un monde dans lequel tout est possible, où même les paroles les plus cruelles peuvent surgir à tout moment, m'amenant à me demander si je peux vraiment faire confiance à ce que je perçois.
- On peut enfin arrêter la comédie maintenant, elle est là où le maître a voulu qu'elle soit, s'exprime Enry.
Quoi ?
Mon esprit s'embrouille. Je sais bien que tout cela n'est qu'une création de mon imagination, mais cela me touche tout de même, me pinçant le cœur. Les émotions que je ressens, bien que fictives, me laissent un goût amer.
- Tant que le maitre n'a rien dit, il ne faut pas trop ouvrir vos bouches, bande d'idiot, dit-elle, se comportant différemment aussi, tout autant que les jumeaux.
- De toute façon, marre d'être gentil tout le temps. Eh, l'ange, écoute moi !
Mes yeux s'écarquillent.
- Comment tu sais que je suis un ange ?, demandé-je, perdu et choqué par ce qui se passe.
Ce n'est qu'un rêve... ce n'est qu'un rêve, me répété-je dans mon esprit.
- Non, ce n'est pas qu'un rêve angelesse, dit Enry, s'approchant de moi, montant quelques marches d'escalier, s'arrêtant face à moi. Et je veux aussi t'annoncer que nous ne sommes pas ta famille, tu en a aucune d'ailleurs.
Ils ricanent.
- Tu arrives à lire dans ma tête ?
Malgré le fait que j'ai mis toutes ces dernières paroles dans un coin de mon esprit, ce qu'ils m'avouent me brise le cœur peu à peu. Mon sixième sens me dit que tout cela est réel et que ce n'est pas qu'un simple rêve.
Je veux me réveiller, tout de suite.
- Ne t'en fais pas, tu vas bientôt te réveiller.
Tout d'un coup deux grande ailes noirs font apparition sur son dos. Ce sont les mêmes que ceux de l'académie : noir, sombre, et presque totalement déplumé laissant mieux voir l'ossature des ailes.
Mon poignet me brûle.
- Vous êtes aussi des anges noirs ?
- Haha, rigole-t-il, non, réessaie.
À ces mots, ma mère et Jonn déploient à leur tour leurs ailes, tout me souriant avec une intensité mêlée d'effroi. L'image que j'avais d'eux, d'une famille heureuse et soudée disparaît à jamais, remplacée par une réalité troublante. Les ailes qu'ils portent valent un secret profond, une vérité que je n'ai jamais soupçonnée.
- Tu ne trouves toujours pas ?, dit-il, impatient de me donner la réponse.
Il se rapproche plus près, puis se penche vers de mon oreille avant de reprendre :
- Nous sommes très loin d'être des anges.
Ce n'est qu'un rêve... ce n'est pas un rêve ?
- Petite ange pur, si tu m'entends, n'oublie pas que tu peux te sortir de là. Rappelle-toi de ce que je t'ai appris un peu plus tôt.
Aéphyra.
Je l'entend dans mon esprit.
- Aéphyra, aide-moi, suplié-je, espérant qu'elle m'entende ne quittant pas une seconde les yeux d'Enry face à moi, sans même les cligner une seul fois.
- Aéphyra ?, répète-t-il. Ne serais-ce pas la reine Selphie ?
- Je pensais qu'on l'avais tuer celle là y'a des dizaine d'année, s'écrit Jonn.
- Si celle là est connecter avec elle, il suffit de la tuer pour que l'autre succombe également.
Sa voix, au fur et à mesure qu'il parle, commence à changer, parlant d'une façon excité par le fait de parler de meurtre. Ils me regardent à présent, tous avec un regard de psychopathe, et je sens que quelque chose de mal va se passer.
Oh, merde.
Mon instinct de survie prend le dessus. Je jette ce que j'ai dans la main sur Enry, puis je m'enfuis, me dirigeant vers ma chambre à toute vitesse.
Une fois à l'intérieur, je m'enferme dans la salle de bain de justesse, restant derrière la porte et poussant de toutes mes forces, car ils essayent de la forcer. Mon cœur bat à tout rompre, le bruit de ces coups résonne dans ma tête.
Je sais que je dois rester calme, mais la peur m'envahit. Je lutte pour maintenir la porte fermée, espérant que cette épreuve ne sera qu'un cauchemar dont je finirai par me réveiller.
- Viens me retrouver là où nous nous sommes rencontrés, je peut te protéger, c'est la seule solution pour qu'ils ne te suivent pas dans ton voyage.
- Tu ma dit qu'en faisant ça les gens qui sont avec moi me suivrons quand même.
- Ouvre la porte ! Exige-t-il.
Je l'ignore et continue de bloquer la porte.
- Pas dans ma forêt, c'est moi qui décide dans ce lieu qui peut et ne peut pas y entrer.
Je n'ai jamais connu une montée d'adrénaline aussi saisissante. Une vague d'émotions contradictoires m'envahit, la peur, comme une ombre menaçante, se mêle à une tristesse profonde, tandis qu'un dégoût viscéral s'insinue dans chaque fibre de mon être.
- Pe-tit ange, tu ferais mieux d'ouvriiir avant qu'on ce mettent en colèèère, dit-il au ralentit, insistant sur chaque mot.
Des larmes ce bloque au coin de mes yeux sans les avoir remarquer.
J'essaye de respirer plus calmement, cherchant à apaiser le tumulte intérieur qui me perturbe. Me concentrant sur les directives d'Aéphyra, je m'efforce de retrouver cette clarté d'esprit nécessaire pour avancer. Je ferme les yeux, laissant mon esprit vagabonder vers la forêt où nos chemins s'étaient croisés pour la première fois. Les arbres majestueux, leurs feuilles dansant au gré du vent, et le doux parfum de miel des trèfles au goût trompeur.
La porte ne secoue plus et les cries on cesser.
Je ressens le vent, une douce brise qui me caresse le visage, apportant avec elle une légère odeur de miel. Dans mon dos, une texture différente, plus dure et difforme, remplace celle de la porte sur laquelle je m'appuyais de toutes mes forces, luttant pour ne pas laisser entrer ceux qui me poursuivaient. J'ai toujours les yeux fermés, n'osant pas les ouvrir, me concentrant sur le rythme effréné de mon cœur qui bat la chamade dans ma poitrine.
À chaque respiration lente que je pratique, j'entends mon cœur ralentir, trouvant peu à peu un semblant de calme au milieu de la tempête.
Je décide d'ouvrir les yeux, malgré la peur qui persiste en moi, priant pour que j'aie bien changé de lieu. En la voyant devant moi, je ressens un mélange d'apaisement et d'appréhension. Sa présence semble m'envelopper d'une chaleur réconfortante, chassant l'angoisse qui m'a envahie tout entière.
- Petit ange pur.
La pression redescend dès qu'elle prononce ces mots, sa caresse délicate sur ma joue, là où une larme coule enfin. Son sourire tendre me réconforte, et je ressens en elle un lien maternel qui me ramène à ma propre mère et à tout ce que je viens d'apprendre de sa bouche.
Je suis perdu, submergé par des émotions contradictoires, incapable de discerner ce qui est réel ou non. Les pensées tourbillonnent dans mon esprit, et tout à coup, je me mets à pleurer silencieusement, transformant une simple goutte en une rivière incontrôlée de chagrin.
À ce moment-là, elle me prend dans ses bras, me réconfortant avec douceur. Ses caresses sur mon dos sont apaisantes.
- Lâche prise, je suis là maintenant.
Je laisse enfin chaque larme s'exprimer, libérant un poids que je porte depuis trop longtemps, et dans ce moment de vulnérabilité, je réalise à quel point j'ai besoin de soutien.
- Doucement, petit ange pur, ne t'en fais pas, je suis là près de toi à présent, que ce soit dans la réalité ou dans tes rêves.
Ces mots m'apaisent et me permettent de me calmer un petit moment après.
- J'ai une question, est-ce vrai ce qu'ils ont dit ? Ce ne sont pas ma véritable famille ?
- Je n'en sais rien, ton existence est un mystère, petit ange pur. Mais ne pense pas à ça désormais.
- Est-il possible de me faire oublier tout ça ?
- Ce n'est pas dans mon pouvoir, je suis navré.
Je me détache de ces bras, encore un peu ému, et je me souviens de la clé dorée que j'ai trouvée. Je lui tends, impatient de voir sa réaction, mais à cet instant, son regard change complètement. J'arrive à voir de la peur dans ses yeux.
- Qui a-t-il ? Pourquoi fixes-tu cette clé avec cet air effrayé ?
- Où l'as-tu trouvé ?
- Dans ma maison.
Elle ne détourne pas le regard une seconde et m'annonce alors :
- Cette clé... Elle ouvre une serrure qui doit rester fermée à jamais. Elle a été perdue pendant des siècles, après avoir été volée à l'ange Raziel, gardien des secrets.
- Elle ouvre quoi ?
- Je ne peux pas t'en dire plus. Ça doit être ton destin de la retrouver, cache-la précieusement et ne fait confiance à personne.
Cette frontière entre la réalité et le rêve commence à me sembler de plus en plus fine, presque aussi fragile qu'une bulle de savon.
Serait-ce la clef que je devais trouver pour ouvrir ce chevet noir dans un de mes précédents rêves.
Je commence à ressentir des étourdissements et tout devient flou autour de moi. J'ai l'impression que je suis en train de me réveiller.
- Aéphyra.
- Je suis là. On se revoit de l'autre côté, petit ange pur.
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