Chapitre 1
La fête bat son plein, accordant les soûlons avec les jeunes adultes friands de folies. La musique agressante résonne toujours dans le "palace" de Noah, un ami du frère de Béatrice.
C'est tellement fort que même ma tête semble résonner en rythme. Elle semble être devenue un téléphone sur vibrateur dont il est impossible d'arrêter l'alerte.
Ceux qui se trouvent à cette petite soirée ont plus de dix-huit ans, contrairement à mes copines et moi qui sommes encore que des jeunets.
Xavier, le frère de Béatrice, nous y a fait entrer tout naturellement, comme à notre vilaine habitude de nous infiltrer pour tomber dans l'ivresse. Surtout moi, d'ailleurs. Certains disent même que c'est mon passe-temps préféré.
Si seulement ils savaient...
Au début de la soirée, l'ainé de mon amie s'est simplement contenté de nous avertir, beau parleur comme il est, que si l'une de nous se fait un peu trop minoucher, et bien, cela ne sera pas son problème. Il dit que nous devrons nous en prendre qu'à nous-même, surtout si nous nous alcoolisons comme des fillettes tordues et blablabla. Il oublie souvent qu'il fait exactement la même chose avec d'autres nanas soûlées jusqu'à la moelle.
Il ne précise jamais que ce sont des types comme lui qu'il faut se méfier...
Mais bon... de ce qu'elles m'ont dit, mes petites poulettes se cherchent des mecs plus vieux, ce qui n'est pas mon cas. Il avait, en effet, bien des beaux gosses, mais je me restreints un peu d'aller flirter vu que je suis techniquement en couple... et cela avec le gars le plus populaire de notre bahut. Justin Paradis, comme son nom l'indique, ressemble à un ange tombé du ciel. Il a des cheveux blond blanc, une peau très pâle et des yeux verts clairs.
Certains pensent même qu'il est albinos. Moi, je trouve que son apparence lui donne une allure lumineuse et complètement craquante.
Je l'ai presque supplié de m'accompagner à cette fête. Bon, en fait, je n'aurais peut-être pas dû et profiter de son absence, vu notre type de relation. En plus, il dit qu'il n'aime pas trop se mêler aux corps suintant de sueur des jeunes adultes fous (il l'avait vraiment dit comme ça).
Mais bien évidemment, comme un bon mec qui accepte les caprices ridicules de sa dulcinée, c'est à dire moi, il est venu en tant que cavalier pour la princesse que je suis.
Même s'il n'était pas motivé, il en a quand même profité. Pas autant que moi, évidemment. Je suis la reine des fêtes. La fée marraine qui transforme un vieux grenier en une salle de bal avec sa simple présence hypnotique. Bon, j'exagère, mais n'importe qui en comprendrait le sens.
Parfois, en rigolant, mes amis me surnomment la fille de Dionysos, le dieu du vin et de la fête. En vrai, c'est ironique, car je supporte très mal l'alcool. D'ailleurs, en sachant cela, j'en ai quand même pris assez pour me soûler. Idiot, mais utile dans ce genre de soirée. Aucune gêne à se sentir ridicule... ce qui est souvent mon cas.
Je n'ai pas arrêté de boire pendant toute la soirée, jouant à des petits jeux et lançant des défis aux plus vieux qui rigolent avec moi alors que je dis des blagues nulles.
En vrai, ils doivent rire de moi et non avec moi.
En revanche... j'ai fini la soirée à vomir mes tripes dans la toilette, Justin me frottant dans le dos et me sermonnant de toujours en faire trop pour qu'on me regarde. Pour qu'on m'accepte dans le groupe... un groupe dans lequel il est sûr que je ne voudrais pas entrer si je savais ce qu'ils y faisaient réellement... alors que lui, il en fait partie...
Je ne comprendrai jamais les gens... surtout quand ils déconseillent de faire ce qu'ils font eux-mêmes.
Justin me soutient et avertie mes amies qu'il va me raccompagner chez moi. Celles-ci parurent déçu... mais pour une courte durée.
Évidemment.
Elles continuront à faire la fête et à fleurter comme des adolescentes normales... alors que moi... il y a tellement de chose que j'aimerais oublier... pour être une véritable princesse, la fausse fille de Dionysos. Celle que je cherche tant à être aux yeux des autres... masquant mon cœur repli de haine envers tous ceux qui ont la vraie belle vie... et seul l'alcool pouvait m'aider à oublier tout ce que mon esprit voit chez les autres.
Je déteste ça... me sentir si fragile et impuissante.
Dès que j'avais mis les pieds dans cette baraque puant l'alcool à plein nez, j'avais pressenti la mort de quelqu'un, routine qui pourrait paraître insignifiante vu que je ressens ce genre de chose depuis toujours.
Ça me donne autant le goût d'en finir pour de bon...
J'ai déjà fait des plans, au cas où l'envie m'en prendrait... je me dis continuellement que le jour fatidique de ma propre mort prémédité approchait...
Mais j'ai trop la trouille de la mort...
Le pire, à cause du fait qu'il y avait trop de monde, je ne pouvais même pas savoir qui allait disparaitre ce soir. La seule chose que je sais, c'est que ce gars ou cette fille allait beaucoup souffrir, l'horrible mal de crâne qu'il me donne le confirmait. Ils sont aussi violents que le feu de l'enfer quand la mort de quelqu'un est lente et... terriblement douloureuse. C'est comme si une tronçonneuse me martelait le cerveau de l'intérieur ou qu'on me le découpait au scalpel.
De la vraie torture.
La seule manière de me soulager, c'est d'engourdir mes sens, donc de me soûler à n'en plus finir...
Ma mère ne serait pas fière de moi...
Justin m'emmène dans sa voiture et prend un sac en papier brun avant de me le tendre.
- Au cas où tu vomirais encore, dit-il sans me regarder.
Il ne souhaite évidemment pas que j'en mette partout dans sa belle berline qu'il vient tout juste de commencer à payer.
- Tu es vraiment une imbécile, ajoute Justin en démarrant sa BMW noir. Pourquoi as-tu bu autant... tu sais que ça finit toujours mal...
Je grogne, mais ne dis rien.
Je ne veux surtout pas qu'il me prenne pour une dingue.
Mais tu es déjà tarée, dit une voix dans mon esprit que je chasse aussitôt.
Mon mal de tête empire et la panique me gagne.
Oh non...
Non...
Ne me dit pas que...
Je tourne vivement la tête pour regarder vers la maison, alors que Justin fait marche arrière. Une fille sort en chancelant, une bouteille à moitié vide dans une main. Mon cœur tambourine comme un fou contre ma cage thoracique. Mon souffle est court. J'ai l'impression d'étouffer.
Aucun doute.
C'est elle.
L'épée de Damoclès est en haut de sa tête.
Proche. Trop proche.
Je veux crier. Je veux lui dire de rester où elle est, mais rien ne sort. Ma gorge est trop serrer. La peur de l'inévitable me nous le ventre. Un couinement m'échappe, alors qu'elle traverse imprudemment la large rue. Elle chancelle et je veux lui dire de courir, mais je ne peux pas. Ma respiration devient saccadée. Je suis trop loin. Trop loin d'elle. Trop loin pour la sauver. Des phares arrivent vers elle, vite.
Trop vite.
Mon cri sort enfin alors que le bruit de roue qui grince contre la pierre nous parvient comme le cri soudain d'une chouette.
Énervant. Irritant.
Justin continu de rouler comme si rien ne se passait. Comme s'il ne m'avait pas entendu hurler.
Comme si tout cela ne se passait définitivement que dans ma tête.
Mais c'est impossible que ce soit faux.
Elle est là.
Elle est bien là.
Mais je ne peux pas l'atteindre.
Il m'est impossible de la sauver.
J'ai mal.
Mon crâne palpite en rythme avec mon cœur.
La nausée me gagne.
Intense. Pesante. Oppressante.
Nous nous éloignons de la maison sans même que Justin est remarqué ce qui vient de se passer derrière nous. Ma nausée se calme d'un coup, alors que j'ouvre la fenêtre pour respirer l'air nocturne.
Elle est morte.
Elle est irrémédiablement morte.
Le sentiment étrange de bien être le prouve.
Mais ce n'est que pour un instant.
Un instant avant que mon esprit rejoigne le sien.
Tous mes membres me font mal. Je suis là, avec elle, sans y être vraiment. Je ne ressens que de la douleur. Une douleur qui n'est pas mienne.
Piquante. Irritante. Essoufflante.
Je l'accompagne dans sa souffrance jusqu'à ce que son dernier souffle s'éteigne.
Je reviens enfin dans mon corps qui était devenu mou comme une guénille.
Une autre que je n'ai pas su sauver...
Encore...
C'est encore ma faute...
Je ne peux que les accompagné...
Même si je préfèrerais que ça ne se produise jamais...
Justin soupire sans même remarquer à quel point je me sens mal, autant physiquement que mentalement.
Inutile. Je suis inutile.
Rien qu'une bonne à rien.
Je ne suis qu'un déchet.
Un déchet qui emprisonne l'odeur de la mort...
Qui ne fait que les accompagné sans pouvoir les sauver.
Nous roulons dans un silence étouffant sur la longue route vers chez moi.
Après une vingtaine de minute interminable et exaspérante, de pleure silencieuse pour cette fille morte beaucoup trop jeune, Justin engage son véhicule dans la longue allée devant chez moi. Il me dit bonne nuit et m'embrasse sur ma joue humide comme si de rien n'était. Je sors d'un pas chancelant, trop sous le choc pour lui rendre la pareille. Il recule seulement au moment où je débarre la porte gothique de notre vieux manoir.
Il est deux heures du matin, alors je me dépêche de monter dans ma chambre aussi vite que ma tête et mes petites jambes me le permettent. Je ne prends pas la peine de me changer et de me débarbouiller, je me laisse tomber sur mon lit baldaquin en grognant. Je m'endors d'un coup en sentant l'odeur réconfortante et la douceur des draps immaculés.
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