Chapitre 30 Clara
Nous restons tous un moment en silence. Je jette un coup d'œil vers Yakim, contemplant un instant son profil viril. Il a lui aussi de vilaines cernes et ses cheveux bruns sont encore plus en bataille qu'à l'accoutume. Après quelques secondes, je reporte mon attention sur Valier en fronçant les sourcils tout en avalant difficilement ma salive.
– Il... c'est passé quelque chose... n'est-ce pas?
Le policier en chef pousse un soupir à fendre l'âme alors que Yakim fixe toujours dans le vide... comme s'il était là sans vraiment y être.
– Ambrose... mon fils... et le meilleur ami de Yak... est mort... il y a trois jours.
J'ouvre grand la bouche avant de la refermer d'un coup sec en serrant les poings.
– Mes condoléances, dis-je en serrant les dents à m'en faire mal.
Le silence pesant me noue l'estomac. Je me doute de ce que sa mort signifie... et pourquoi Cédrick Valier a arrangé la présence de Yakim à notre petite entrevue.
– Tu devrais retourner à ton appart. Je vais trouver un moyen de vivre sans inclure d'innocentes personnes. Le plus tôt serait le mieux.
– Je te l'avais dit Yak, qu'elle dirait ça...
– Et je tuerais le tueur!
Cédrick Valier me regarde en plissant les yeux, comment si soudainement, il comprend qu'il ne me comprend pas. Une intense rage monte en moi et j'eus de la difficulté à ne pas l'envoyer sur tout ce qui se trouve à ma portée.
– Il n'est pas question que tu fasses un truc aussi imbécile, me gronde le représentant des Forès comme s'il se prenait pour mon père.
Ce n'est pas parce qu'il vient de perdre son fils que j'ai besoin d'un père!
Son attitude ne fait qu'augmenter mon mécontentement.
– Il mérite que la mort, cette ordure!
Je frappe le bureau avec colère, ce qui fait sursauter les deux hommes. Yakim lève les yeux et reporte son attention sur moi. En voyant son expression si pitoyable, ma colère se change en quelque chose d'inconfortable, tellement que j'éclate en sanglot. Le souffle court, alors que mes larmes ne cessent pas de couler, je me cache le visage entre mes mains.
– Qu'est-ce que je peux faire alors! Rester à ne rien faire en attendant qu'un malade vienne me trucider en voyant que je n'ai aucun intérêt! La seule manière de le faire sortir de son trou, c'est de le chercher activement!
– Je... euh... tu devrais d'abord te calmer, me dit Cédrick Valier avec hésitation.
– Me calmer, me suis-je exclamée en me levant d'un bon tout en le foudroyant des yeux. Pour qui vous vous prenez! Ce n'est pas vous qui êtes au centre de toute cette folie! C'est moi! Moi! Ce n'est pas vous qui avez été traumatiser en découvrant les cadavres méconnaissables de vos parents à l'âge de quatre ans!
Valier pince les lèvres, puis pousse un long soupir avant de me regarder avec reproche... comme si tout était ma faute.
– Es-tu prête à entendre nos nouvelles informations?
Je renifle en essayant de calmer ma respiration, puis je sens la grande main de Yakim agripper doucement la mienne. Son simple contacte fait apaiser ma colère.
– Allez-y...
Valier regarde un instant nos doigts entrelacés, comme s'il jugeait ça inapproprié, avant de se racler la gorge. Il regarde ses papiers étalés sur son bureau tout en croisant ses larges mains. Je m'assois de nouveau en donnant une légère pression sur la main de Yakim en guise de remerciement.
– Je vais d'abord te rappeler ce que tu sais déjà, puis je te dirais ce que nous avons découvert c'est trois derniers jours, ça va?
– Oui oui, dis-je avec un signe de ma main valide. Allez-y.
Il me regarde un instant, comme s'il me voyait pour la première fois.
– D'abord, tout est partie avec le meurtre de tes parents, des Invis, puis de tes grands-parents, aussi des Invis. Nous pouvons donc en déduire que soit cette ou ces personnes avaient une dent contre ta famille soit c'est parce qu'ils savaient qu'ils étaient des Invis. Les plaies sur le corps de chacune des victimes avaient quelques choses en commun, soit, comme tu l'avais cru, les initiales d'un nom. K ou X et V ou W. Et je crois bien que celui qui la fait veut se moquer de nous, la police, car il nous donne un indice tout cru dans la bouche. Son prénom comment soit par K ou X et son nom de famille V ou W. Peut-être même qu'il désigne deux personnes avec cette ambiguïté. De plus, en investiguant plus profondément, nous avons réalisé que tous les meurtres sont survenus piles à dix-neuf heures ou autrement dit, à sept heures de l'après-midi. Ce qui nous pousse à croire que, si le tueur aime jouer à un jeu, comme nous pourrions le penser à cause des initiales, il pourrait aussi volontairement donner le nombre de personnes derrière tout ça... ce qui voudrait dire pas une, mais sept personnes qui organisent méticuleusement les meurtres. Dont un qui tue, un qui vous envoie des messages et peut-être un autre très près de vous qui vous surveille... si ce n'est pas la même personne pour c'est trois choses. D'un côté, je me dis que c'est peut-être une hypothèse un peu pousser, mais ça pourrait avoir du sens. Aussi, si ta famille était vraiment le seul souci de ses gens, ils s'auraient déjà débarrasser de toi. Or, je pense que leur but est plus grand... et j'en viens avec le meurtre de Steven Worst et Ted Kennedy, qui... étaient également des Invis.
Je fronce les sourcils en entendant sa dernière phrase et serre d'avantage la main de Yakim.
– Et les autres meurtres alors?
Cédrick Valier hoche la tête.
– Je pense qu'ils servent, d'un côté, à camoufler le véritable but... mais aussi de te menacer. Tout cela vient à dire que... l'assassin est fort probablement quelqu'un dans ton entourage qui a besoin de toi pour découvrir qui sont les autres Invis.
J'entrouvre la bouche avant de la refermer comme si j'étais un poisson.
Est-il possible qu'il s'agit de Jake Renzer... avec l'aide d'Aya? Si c'est le cas, leur disparition concorde plutôt bien avec le taudis qu'il y a eu dans les archives... mais je ne vois pas comment l'un ou l'autre pourrait connaître l'endroit que même moi j'ignore... et si on se fie aux initiales, aucun des deux correspond à une des lettres des hypothèses. Mais ça, c'est si ça montre des lettres et non un code. Et si c'est un code... la lettre K est la onzième lettre, le X la vingt-quatre èmes, le V la vingt-deux èmes et le W la vingt-trois èmes. Non. Ce n'est pas un code. Il n'y a pas de sens-là dedans, donc ce sont bien des lettres. Donc un nom. Donc le meurtrier n'est pas aussi intelligent qu'il essaie de faire croire... ou comme la dit Valier... il se joue de nous.
– Vous savez que je distingue les marqués, dis-je à Valier alors que Yakim me jette un regard.
– Je discutes parfois avec Pamela, donc oui, je sais que tous les Invis en sont capables. Ce qu'ignore vraisemblablement ceux qui veulent t'utiliser. D'ailleurs, j'en viens à nos nouvelles découvertes. Bien que mon... fils... est été un Forès, il est mort... semble-t-il, sans qu'il n'aille pu se défendre, ce qui laisserait croire à un Vités... Mais nous sommes presque sûr que ce n'est pas le cas... dû aux emprunts presque effacés dans la neige. Nous avons même fait le tour des magasins de la ville en inspectant chaque type de bottes, mais nous ne sommes abouti à rien. De plus, un homme ou un jeune homme est allé donner ceci à Yak... or, quand il a été... un peu plus lucide, il trouvait que quelque chose clochait chez l'individu. En plus, selon la description qu'il m'a fourni, l'homme était complètement habiller de noir... comme Keven l'avais déjà décrit.
Cédrick Valier pousse une petite boîte, à peine plus longue et plus large que ma main, vers Yakim et moi.
– Je l'ai rapidement inspecté, mais elle est vide.
Je fronce les sourcils en me levant de nouveau tout en lâchant la main de Yakim. J'ignore pourquoi, mais quelque chose d'étrange et peu rassurant semble se dégager du contenant. J'avale difficilement ma salive et m'avance doucement alors que mon estomac et ma gorge se nouent.
Je tends la main vers la boîte.
Mon cœur bat si fort que je suis presque sûr que les deux hommes peuvent l'entendre. Ma respiration se fait plus courte alors que je la retiens pendant une fraction de seconde. Je soulève doucement le couvercle en redoutant de voir ce qu'il y avait à l'intérieur. Dans un coin, quelque chose de noir, visqueux et gluant glisse contre les parois de la boîte, se tortillant comme un ver pour avancer malgré ses multiples pattes longues. Quelque chose d'humide et gélatineux se rependent sur le carton à son passage. Une écœurante odeur de pourriture, de bave et de moisissure me parvient au nez alors que j'entends distinctement son corps mou suinté sur le carton avec un bruit de succion. Prise de nausée, je referme en vitesse le couvercle et recule loin de la boîte. Yakim m'agrippe le bras alors que je chancèle, puis il m'aide à m'asseoir.
Cédrick Valier fronce les sourcils tout en m'observant.
– Qu'as-tu vu?
– Je... je ne sais pas, ai-je bredouillé alors que Yakim me serre de nouveau la main. Ça... ressemblait... à un mélange de ver... de milles-pattes... et d'araignée... tout noir... et gluant... et puant...
Cédrick Valier hoche la tête comme s'il s'en doutait... ce qui est évident impossible.
– L'individu devait être au courant de l'existence de la... chose, dit-il en enferment la boîte dans un coffre en métal codé. Et que cette chose devait utiliser Yak, d'une manière ou d'une autre, sans que celui-ci ne le sache. D'ailleurs, il ne l'a pas ouvert lui-même... et la chose semble n'avoir rien à faire de ceux qui trouve sa... cachette, si on peut dire. Elle ne nous a rien fait. Ni à toi, Clara ni à moi. Elle sait donc qui est sa victime et n'a pas l'intention d'utiliser un autre hôte.
Pourquoi parle-t-il comme s'il savait de quoi il s'agit?
– Ça n'avait même pas de yeux, ai-je marmonné plus pour moi-même.
– Qu'est-ce que tu penses que c'est, lui demande Yakim en le fixant des yeux.
– À en croire la réaction et la description de Clara... et les ressources que je possède grâce à ma position de représentant... il s'agirait d'un démon... un démon possesseur, pour être exact.
– Un... un démon, ai-je bredouillé en pinçant les lèvres.
Valier hoche la tête en me regardant, puis en reportant son attention sur Yakim.
– De ce que nous savons, il y a deux types de démon possesseur. Ceux qui ressemble plus à des serpents s'approprient le cœur et les émotions... et ceux qui ressemble plus à des araignées s'attaque directement au cerveau... et dans ce cas-là, selon certains spécialistes venus d'ailleurs, il est impossible de tuer le démon sans tuer la personne possédée. Yak a été chanceux de ne pas l'avoir ouvert avant que tu ailles pu le voir, Clara.
Après un long moment de silence à nous observer mutuellement, je dis:
– Donc... Yakim est partie de l'appartement et...
– J'ai passé ma journée au gym, dit celui-ci, en me jetant un coup d'œil. Comme je ne voulais pas retourner à mon appart... tu sais... hmmm...
Je hoche la tête pour l'inciter à continuer.
– Donc... euh... bein... pour la soirée, j'ai contacté Ambrose pour voir s'il était libre... mais avant je euh... j'ai ragé sur un arbre... pour un tas de raisons... et il y a ce type strannyy qui est venu me donner la boîte. Je pensais que c'était une blague nul en croyant qu'elle était vide. Donc... je l'ai juste mis dans ma poche. Ambrose... m'avait donné rendez-vous devant chez lui. Nous sommes entrés et nous avons un peu discuté avant qu'il n'aille à la cuisine pendant que j'attendais dans le salon. Et... il est... mort...
– Comme je l'ai dit, soupire Valier en se passant les mains sur son visage fripé de fatigue. Mon fils n'a pas semblé avoir le temps de se défendre... et l'arme des crimes est sans doute toujours la même... une dague...
Je hoche la tête en tenant de rassembler toutes mes connaissances.
– Donc... il n'aurait pas entendu le criminel arrivé... ce qui veut dire qu'il est soit un Vités, soit un Ouïrès, soit un Intès ou soit un Invis. Dans ce dernier cas, ça me semble peu probable. Il ou elle m'aurait déjà tué vu qu'il ou elle peut détecter lui-même ou elle-même les autres marqués. Nous pouvons soustraire l'idée d'un Vités... à moins que les emprunts ne soient volontaire. Dans le cas des Ouïrès, seul les plus puissants de leur clan peuvent réduire le bruit qui les entoure. Il doit y en avoir maximum trois, ce qui laisse six pourcents de probabilité. Et c'est à peu près pareil pour les Intès... mais eux jouent sur la mentalité. Sur les perceptions des autres.
– La possibilité d'un Vités n'est pas encore de zero, dit Valier en me regardant droit dans les yeux. Mon collègue, l'inspecteur Tim, que tu as déjà rencontré lors de... l'assassinat de... tes parents adoptifs... a suivit les traces et à analyser l'emprunt avec moi. Il a découvert où ça menait... et c'était bien volontaire. Car ça menait vers une rue où les emprunts disparaissaient, vu qu'il n'y avait presque pas de neige.
– Ça ne veut rien dire, dis-je en fronçant les sourcils. Êtes-vous allés voir de l'autre côté de la rue?
Cédrick Valier fait un sourire dédaigneux.
– Tu nous prends pour des débutants?
– Non, je n'ai pas dit ça, ai-je grogné en plissant les yeux.
– Bien sûr que nous sommes allés voir. Il n'y en avait aucune.
– Mais ça ne veut pas dire pour autant que c'était un Vités, ai-je argumenté en serrant les poings. Il pourrait tout autant y avoir eu quelqu'un qui l'attendait sur le bas-côté de la rue, ou même son propre véhicule.
– Certes, il ne faut pas mettre ces... deux autres hypothèses de côté.
– Ce qui vient à dire que ça pourrait être n'importe qui entre ces quatre... enfin, plutôt trois clans.
Cédrick Valier soupire.
– Tu as vraiment une tête dure.
– Oui et alors, dis-je en le trouvant agacent, comme si, parce qu'il est beaucoup plus mûr et qu'il a fait des études que je ne sais strictement rien du fonctionnement d'une enquête. Au moins je ne mets rien de côté sans avoir de preuve concrète.
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