Chapitre 13 Clara

Je regarde par la fenêtre du salon alors que des feuilles de toutes les couleurs tombent doucement sur le sol. Je jette un coup d'œil dans le salon avant de reporter de nouveau mon regard vers l'extérieur. Hier, Keven a fixé une heure aujourd'hui pour que nous planifions l'enquête de sa mission. Il a réussi à convaincre le Conseil que je pouvais l'aider pour trouver Jake Renzer et découvrir ce qu'il manigance. Les hommes ne voulaient même pas m'écouter avant que Keven ouvre la bouche. À dire vrai, ils m'avaient clairement ignoré alors que Pamela et Kat m'avaient attentivement écouté. En plus, j'étais vraiment agacée par Alec. Il avait réagi comme si nous ne nous connaissions même pas alors qu'il est mon professeur stagiaire... mais ça ne semblait rien changer pour lui... à l'extérieur, nous étions des étrangers.

De ce que Keven m'a dit, après la réunion, il avait reçu un texto de Jake pour assister à une fête où il ne précisait pas que c'était réserver aux démarqués, mais nous nous en doutions, car Aya avait reçu la même invitation de sa part... Ce qui veut dire que les démarqués savent que je suis une marquée... Mais je ne vois pas comment ils peuvent être au courant... À moins que l'un d'eux sait que nos rencontres se déroulent chez le maire et que celui-ci ou celle-ci a pour mission de nous espionner... Ce qui confirmerait les doutes du conseil.

Mes pensées vagabondent vers l'homme d'hier. Il m'a semblé un peu coincé, mais j'imagine que c'était dû à la méfiance. Je pousse un soupir en me rappelant ses yeux rouge sang. Contrairement à ce que j'ai d'abord pensé, il n'est pas aussi effrayant que les Forès me laissent penser... À moins qu'il soit le seul à être aussi... calme? J'ai toujours eu envie d'en confronter un pour voir s'ils contrôlent si peu leurs émotions que certains sous-entendent. Je pousse de nouveau un soupir. Il n'a même pas reconnu ma voix, l'autre soir, mais moi, je m'en rappelle bien, bien plus que les traits de son visage sérieux et viril. Elle grave et vibrante. Il doit sans doute plaisir aux filles... comme Keven. J'ai eu cette drôle d'impression que s'il criait, il aurait pu faire trembler la terre. Il semble avoir un côté naïf, mais même se petit côté parait intimidant. En repensant à lui, j'eus un drôle de frisson.

Est-ce de la peur?

Aya descend les marches pour me rejoindre dans le salon.

– Comment allons-nous nous y prendre pour que tu entres aussi, me demande ma jumelle en s'asseyant à côté de moi.

– Nous verrons ça avec Maggie et Keven lorsqu'ils seront là... Ils ne devraient plus tarder.

Léo et Louisia entrent dans la pièce à ce moment-là. Louisia nous regarde avec un sourire triste, tandis que Léo a une mine sévère. Il devait encore nous en vouloir pour l'autre fois...

– Nous allons être dans la cour arrière pour construire le cabanon, dit Léo en se plantant devant ma sœur et moi. Vous n'avez pas intérêt à sortir discrètement, surtout pas sans votre téléphone, c'est clair?

Je lève les yeux au ciel alors qu'Aya hoche légèrement la tête, se sentant sans doute un peu mal pour vendredi. Et voilà ce que je pensais. Toujours aussi papa poule. Il part vers la cour avec son éternel air bougon.

– Il était vraiment inquiet lorsque nous ne vous avons pas trouver à la maison, dit Louisia en le regardant.

Ils avaient installé la même application pour nous suivre avec leur cellulaire quand ils ne sont pas à la maison.

– Il est trop papa poule, dis-je en m'étirant les bras vers le plafond. Il ne nous arrivera rien. Si c'était le cas, nous serions sans doute déjà mortes.

Aya me fait des gros yeux, alors que Louisia grimace.

– Bein quoi, dis-je en haussant les épaules. L'assassin n'attendrait quand même pas que nous soyons adultes pour nous trucider, si? Nous ne devons pas être difficile à trouver et franchement, un traceur ne vous dira pas si nous sommes déjà mortes ou non. Et n'est-ce pas ridicule de ne pas nous avoir tué lorsque nous étions jeunes et sans défense? Maintenant, nous avons eu le temps d'apprendre à nous battre... enfin, moi, contrairement à Aya qui ne voulais pas.

– Clara, s'exclame Aya avec un visage scandalisé. Ne dit pas n'importe quoi!

– Je dis simplement la vérité.

– Elle a raison, Aya, dit Louisia avec le même sourire triste que tout à l'heure. Les traceurs ne sont pas très utiles pour vous protéger... Il vous faudrait des bodygards, mais vous n'êtes pas assez importante pour que le gouvernement ne face autre chose que de vous confier à nous, la police.

Louisia tapote la tête d'Aya avant de sortir et d'aller rejoindre Léo à l'extérieur.

– Dit comme ça, c'est triste, marmonne ma sœur avant de se perdre dans ses pensées.

– C'est justement pour ça que je cherche à me rapprocher d'au moins un Forès, ai-je murmuré plus pour moi que pour Aya. Peut-être qu'il accepterait de nous protéger...

Je regarde de nouveau vers la fenêtre au moment où l'on sonne à la porte. Je me lève lentement et vais ouvrir à mes amis. Maggie et Keven sont là, chacun avec un sac sur l'épaule.

– Keven m'a raconté que tu as proposé ton aide au conseil, dit Maggie en me saluant avec son livre dans la main.

– Salut. Oui. Entrez.

Je les laisse passer avant de refermer la porte. Je les guide jusqu'au salon (où Aya n'a pas bouger d'un pouce) après qu'ils se sont déchaussés.

– Asseyez-vous, je vais nous chercher de quoi boire et grignoter.

Ils hochent la tête avant de prendre place alors que je me dirige vers la cuisine. Je nous remplis des verres de limonade et vide un sac de chips nature dans un grand bol avant de retourner dans le salon, puis de mettre le tout sur la table basse.

– Nous commençons par quoi, demande Maggie alors que je m'assois à même le sol, à côté du divan où Keven est installé.

Nous regardons tous celui-ci alors qu'il prend une gorgée de sa limonade. Keven fait durer le silence, tellement que je dus lui donner un petit coup pour le faire parler.

– J'ai réussi à obtenir le plan de sa maison.

Il sort un rouleau de son sac et tasse le bol de chips avant d'étaler le plan. Je prends le bol qui est dans une position précaire et pioche dedans en observant ce que Keven vient de sortir.

– Ça à l'air plutôt grand, chez lui, dis-je alors qu'Aya se penche en avant pour mieux voir.

– Surement pas autant que chez le maire, dit Maggie en prenant une gorgée de limonade alors que Keven boit d'une traite la sienne.

– Il habite où déjà, ai-je demandé, la bouche pleine de chips.

Le regard qu'Aya et Maggie m'envoient semble dire: « Tu n'es pas classe du tout, là, Clara. » Je les ignore et tends le bol vers Keven tout en attendant une réponse. Il s'en prend une bonne poignée et l'engloutie en une seule bouchée. Je fais un petit sourire victorieux à ma sœur et mon amie qui secouent la tête.

– C'est seulement à quelques rues d'ici et plutôt près de chez le maire...

– Alors il aurait bien pu voir les voitures dans le coin et qu'il s'est dit que se devait être une réunion des marqués, dit Maggie en regardant Keven.

– Si je me souviens bien, commence Aya avec une mine sombre. Il est fils unique, mais c'est deux parents sont des marqués.

– En tout cas, dit Maggie en souriant, puis en buvant quelques gorgées de sa limonade. Tu es vraiment un bon espion, Keven.

Keven haussait les épaules alors que la mine d'Aya semblait s'obscurcir. Était-ce parce qu'elle ne faisait toujours pas confiance à Keven? Bientôt, elle changera d'avis face à lui et comprendra pourquoi je lui fais confiance.

– Et comment procédons-nous pour entrer, demandait Aya en buvant sa limonade en plus de la mienne.

– Simple, dit Keven en piochant de nouveau dans le bol que je tenais toujours sur moi, ce qui le fit avoir le visage très très près du mien... mon cœur s'emballe et je tends difficilement de l'ignorer. Toi et moi sommes attendus à cette soirée, nous passerons donc par la porte d'entrée. Clara et Maggie passeront discrètement par derrière, vu qu'il y a un grand boisé derrière chez lui.

Tout en parlant et en mastiquant ses chips, il inscrit nos positions sur la carte.

– Et qu'elle est le but de tout ça, grogne ma jumelle en me surprenant.

Pourquoi est-elle si méfiante envers Keven? Il n'a pourtant rien fait qui puisse la déranger autant... même pas la première impression qu'elle a eue de lui. Qu'est-ce qui la chicotte, bon sang!

– Ressembler des indices, voir des preuves, pour confirmer les doutes du Conseil sur les démarqués. Ces parents ne sont au courant de rien.

– Et quand est-ce que ça a lieu, demande Maggie en se levant tout en vidant son verre.

– Vendredi, dirent Aya et Keven en cœur.

Le second lui fait son sourire charmeur (grrr, mon agacement remonte la pente) alors que la première se renfrogne tout en rougissant légèrement. Pourquoi elle réagit comme ça maintenant! Ça m'enrage! J'ai envie de leur donner une bonne claque à tous les deux! Je ne le fais pas, évidemment.

– Bon, moi je vous laisse, dit Maggie en nous saluant de la tête. J'ai promis à ma grand-mère de passer la voir après notre petite réunion... et c'est pas mal long, à vélo.

– Salut, marmonne Aya avant de se perdre dans ses pensées.

– Fait attention sur la route, dit Keven en lui souriant.

Maggie eut un petit sourire avant de secouer la tête. Je la raccompagne jusqu'à la porte et la regarde s'éloigner sur son vélo bleu marine et noir jusqu'à ce que je ne la voiles plus. Quand je reviens dans le salon, un silence étrange règne. Keven se passe une main dans les cheveux en me jetant des coups d'œil. Veut-il me dire quelque chose?

– Dit, dit-il enfin après quelques minutes. Vu que nous en avons terminé avec ça...

– Oui?

– Ça te dirait si... nous allons quelque part... tous les deux?

Je le regarde un instant, surprise alors que mon cœur s'emballe. Qu'est-ce que je fais? Je dis oui? Ou je dis non pour voir s'il sera triste et lui dire oui après? J'ouvre la bouche pour lui dire ma réponse, mais Aya me devance.

– Ah non! Il n'est pas question que tu ailles quelque part avec Clara! Et de toute manière, elle doit m'aider pour mes devoirs!

– Oh, dit Keven qui ne semble pas du tout toucher par cette soudaine intervention. Je vois. Une prochaine fois, alors.

Il se passe de nouveau une main dans les cheveux tout en se levant.

– Est-ce que je vous laisse le plan, me demande-t-il en faisant un signe du menton vers le papier étalé sur la table.

– Pas besoin, dis-je d'une voix faible en m'efforçant de garder une expression posée. Et nous nous retrouverons ici avant d'y aller... j'en ferais par à Maggie demain.

Keven hoche la tête, puis met le plan dans son sac. Il se tourne un moment vers moi et reste là, sans bouger.

– Euh, fait-il alors qu'il me semble soudainement mal à l'aise. Je peux vous emprunter la toilette?

Je le regarde en clignant des yeux. Ce qu'il est chou quand il est timide!

– Bien sûr, dis-je avec un léger sourire. C'est juste à côté de la salle à manger.

Je lui pointe l'autre côté de la pièce et il me fait un signe de tête avant de partir de ce côté, laissant son sac au sol. Il vient à peine de disparaitre qu'Aya me jette un regard noir. Qu'est-ce qu'elle a encore? Ne me dit pas qu'elle a vu ma déception lorsqu'elle a répondu à ma place?

– Quoi?

– Je ne vois pas pourquoi Maggie et toi, vous lui faites confiance!

– Il est un Ouirés, il peut t'entendre.

– Je m'en fiche! Tu n'as pas répondu à ma question!

– C'est un bon gars, me suis-je exclamée, en essayant de garder un semblant de contrôle sur mes émotions.

– Il a avoué tromper quelqu'un! C'est un menteur qui deviendra voleur, puis un voleur qui deviendra tueur!

Gloup. J'ai déjà menti plus d'une fois. J'ai déjà volé des tas d'autres fois. Vais-je finir par tué quelqu'un? Non. Je ne crois pas. Enfin. J'espère. Ou peut-être bien que si. Le tueur de ma famille.

– Peut-être même qu'il ment à tout son entourage! Toi y compris!

Là elle va trop loin! Il n'y a aucun mensonge entre lui et moi! À moins que ce soit pour ma sécurité, comme pour ses missions!

– Il ment lorsque c'est nécessaire. Et il n'y a jamais eu de mensonge entre lui et moi! Nous sommes honnêtes l'un envers l'autre.

– Vraiment, dit Aya avec un sourire mesquin. Et tes sentiments envers lui alors.

Elle penche légèrement la tête sur le côté en plissant les yeux de manière malicieux. Non mais! Elle ose utiliser mes sentiments pour lui! Elle va voir! Je vais moi aussi utiliser son ancien chéri, Jake, comme argument!

Un cri qui vient de l'extérieur nous fait toutes les deux sursauter. Nous nous regardons avec inquiétude alors que les hurlements deviennent insupportables. Nous avons tous les deux l'instinct d'aller voir ce qui se passe, mais Keven court vers nous, complètement paniqué. Il nous pousse soudainement vers l'entrée et prend en vitesse son sac.

– Vite, crie-t-il en nous poussant de nouveau. Il y a un malade dans votre cour!

Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top