Lundi 13 novembre 2017 :

Je resserre les accoudoirs. Je suis plaquée au fond de mon siège. L'accélération enfonce mon coeur au fond de ma poitrine. Je sens le sol se dérober sous mes pieds. Nous quittons la terre. Je suis penchée en arrière, les yeux fermés, essayant de me concentrer sur ma respiration. Inspiration. Expiration. Inspiration. Expiration.

J'ouvre doucement les yeux alors que l'avion commence à se redresser doucement, signe que nous commençons à atteindre notre altitude de croisière. J'ai beau avoir pris plein de fois l'avion, j'appréhende toujours le décollage. Il serait donc pour moi inimaginable de partir pour l'espace, surtout sachant qu'il faut encaisser au minimum 3G, soit trois fois son poids lors du décollage. C'est probablement pour cela que les astronautes sont si admirés. Mais évidemment qu'ils le sont aussi car c'est un risque énorme qu'ils prennent.

Certains disent qu'il faut être totalement fous pour partir dans l'espace, je préfère me résoudre et me dire que non, il ne faut pas être fou, mais totalement lucide, qu'il faut savoir pertinemment ce qu'il se passe et pourquoi l'on fait cela.

C'est aujourd'hui que je pars pour le Kazakhstan, 7h30 de vol pour rejoindre l'aéroport de Kyzylorda, puis deux heures de bus pour arriver à Baikonour, le lieu où la fusée va décoller dans quelques jours. Je sais que la machine est lancée, que plus rien ne va retourner en arrière, que le décollage aura lieu quoi qu'il en soit.

De toutes façons, tout est fait par la NASA pour que je projet s'accomplisse dans les meilleurs conditions, à commencer par les doublures qui accompagnent les titulaires dans le programme de préparation. Si jamais un des titulaires venait à ne pas pouvoir embarquer dans la fusée, tout est fait pour que sa doublure le puisse. N'est ce pas magique !?! 

J'ai pu revoir une fois Thomas après notre première entrevue. C'est toujours autant difficile pour moi d'imaginer qu'il va partir dans l'espace, dans un univers totalement froid, inconnu, redoutable. Mais je me raccroche à l'idée que d'autres personnes ont deja mis les pieds là bas, que tout devrait très bien se passer.

De toutes façons, même si je prie de tout mon corps, que l'entièreté de mon être espère que tout va très bien se passer, cela ne changera absolument rien. Plus rien de ce qui va se passer ne m'appartient, je ne peux plus rien changer et c'est peut être mieux comme cela.

Je sens une presence à côté de moi, je tourne alors la tête, me sortant de mes pensées. C'est Isabella. Elle me demande si elle peut s'asseoir sur le siège vide à mes côtés. Je lui réponds par un signe de tête, l'invitant à s'installer.

L'avion est un appareil de l'ESA, qui a été privatisé rien que pour les familles et les membres du staff, nous avons donc largement la place.

« So, how do you feel ? » elle me demande alors que je ne sais pas quoi répondre. Depuis que Thomas s'est lancé dans cette aventure, cette question m'a tant de fois été posée, mais cela n'empêche pas le fait que je ne sais jamais quoi répondre. Etre honnête peut mettre mal à l'aise la personne, mentir peut me mettre mal à l'aise. Et puis qu'est ce que je ressens réellement ? Je n'en sais rien, alors comment répondre à cette question ?

« To be totally honest I don't know. I can't explain that feeling. On the one hand, I'm really proud of Thomas, knowing that he will help the science, is just incredible, but on the other hand I'm so scared, and mad at him. He's leaving me here, alone, knowing that everything could gone wrong, that he could even died. These thinkings are sometimes so important and always present that they make me cry, without controlling anything. » je lui réponds, alors que les larmes commencent à inonder mes yeux.

« Oh no ! Don't cry, everything is gonna be alright. I'm sure that you've heard that sentence so many times that it doesn't have meaning anymore, but that's right. Everything is going to be alright. Experts are working for so long time on that project, Thomas is so well prepared, that there is no other possibility. » elle m'explique à nouveau en me prenant dans ses bras. Ce contact me rend instinctivement plus calme et plus sage. Je me redonne, tout va très bien se passer, c'est ce que l'on me dit et c'est ce qu'il va se passer.

Le reste du voyage se fait dans le calme, j'essaie de ne pas réfléchir à tout ce qui m'attends, à toutes les choses qui vont désormais bouleverser ma vie, ni à la perception que les gens ont et auront de moi. 

***

Hey, franchement je ne sais pas trop quoi vous dire... ca fait tellement de temps que je n'ai pas mis les pieds ici. Comme je vous en avez deja parlé, je doute beaucoup et je reçois très peu de soutien. Alors je vous le demande sincèrement, laissez moi un commentaire, un like, cela ne vous prends que quelques secondes mais pour moi cela veut dire beaucoup. 

Je vous remercie grandement et en espérant que le chapitre vous aura plu