Chapitre 3 bis
Lou
Ma consolation est de courte durée, car j'aperçois Dan à l'autre bout. Il marche vite, sans se retourner, comme s'il était pressé. Il n'a pas l'air de vouloir m'attendre, cette fois-ci. Je fronce les sourcils et essaye de le rattraper.
— Dan !
Il ne tressaille même pas. Il ne ralentit pas non plus. Bon, y'en a marre. Je me mets à courir franchement et le rejoins. Je le tire par le coude pour qu'il se tourne vers moi. Il s'arrête enfin. Son visage est fermé.
— Qu'est-ce qui se passe ? demandé-je en tentant de reprendre mon souffle.
— Je croyais que tu rentrais avec Malo, m'explique-t-il calmement.
Un peu trop calmement à mon goût.
Ses poings s'enfoncent dans les poches de son jean. Son regard me fuit.
— Je n'ai pas assez confiance pour monter derrière lui.
Un mini-sourire se dessine sur ses lèvres, mais disparaît bien vite.
— OK.
Ah, comme cette réponse m'horripile ! Il le sait parfaitement, on en a déjà parlé. Dan reprend sa marche, mine de rien. Il a décidé de me pousser à bout aujourd'hui. Où est donc passé le garçon jovial de ces dernières semaines ?
— Quoi, c'est tout ? m'écrié-je en lui emboîtant le pas.
— Ouais. Tu fais bien ce que tu veux.
Sans comprendre pourquoi, ses mots me blessent. Beaucoup trop. Son haussement d'épaules désinvolte me crispe. Bon sang, il n'est pas très avenant !
Je l'imite en glissant mes mains dans les poches de mon pantalon.
— Encore heureux, répliqué-je en me forçant à paraître de bonne humeur. Il semble sympa, j'ai hâte qu'on apprenne à se connaître.
Je ne réagis pas quand il s'arrête net. Je m'oblige à ne pas sourire de satisfaction. Je prends même un air étonné en me retournant, sourcils relevés.
T'as voulu jouer l'indifférent, hein ?
— Qu'est-ce qui t'arrive ? dis-je le plus innocemment du monde.
Dan me dévisage. Je sens une sourde colère gronder en lui. Il m'a cherché aussi à faire comme si ça ne l'embêtait pas. C'était flagrant quand même ! Moi, ce que je veux savoir, c'est pourquoi.
Faut que j'en aie le cœur net. Il va me dire ce qu'il pense vraiment, à la fin ?
— Ce type t'intéresse ? lâche-t-il entre ses dents serrées.
— Il est mignon, précisé-je avec un timbre sensuel et un peu niais.
— Ah, oui, tu as raison, c'est super important. Mais, dis-moi, qu'il se foute de ta gueule, ça compte ou t'en as rien à branler ?
Son agressivité décuple les battements de mon cœur. Ses paroles me rendent perplexe. Pourquoi réagit-il aussi vivement ? Le sujet le touche bien plus que je ne le pensais. Que je ne l'espérais...
— De quoi tu parles ?
— Laisse tomber, soupire-t-il.
Et Monsieur se remet en route. Dan me dépasse sans même me regarder. Comme si j'allais en rester là ! Je hâte le pas et me plante bien en face de lui, poings sur les hanches, bloquant le passage.
— Tu vas me dire ce que tu sais, à la fin ?
— Pas mes affaires.
— Ah non ? Alors, pourquoi tu t'en mêles ? Tu es jaloux qu'un garçon s'intéresse à moi ?
— Il ne s'intéresse pas à toi, me rétorque-t-il froidement.
Je déglutis, douloureusement touchée.
— Eh bien, à priori si, me défends-je tout de même, histoire de me protéger.
— Non, insiste-t-il. Il ne voit en toi qu'un substitut à Salomé. Il ne peut pas coucher avec elle ? Pas grave, il se fera la petite sœur.
Mes mains tremblent. Ce qu'il dit, là, me met la rage. Des larmes me viennent bêtement aux yeux. Il a craché ses phrases avec une telle méchanceté que tout me corps se fige. Ma poitrine se comprime.
C'est ça qu'il pense, lui aussi ?
— Pourtant, tu ne lui ressembles pas, jette-t-il.
Je me mords la lèvre, encaissant comme je peux son nouveau coup de poignard, mais une goutte s'échappe tout de même. Je me suis bien trompée sur son compte. Il doit avoir pitié de moi, la pauvre conne qui imaginait pouvoir intéresser un mec. Pire, une idiote qui espérait rivaliser avec sa sœur ? La bonne blague. Je suis loin d'être aussi belle et charismatique que Salomé. Je baisse les yeux une fraction de seconde, puis fais demi-tour pour m'éloigner. J'ai trop mal.
— Attends, s'écrie-t-il en attrapant mon poignet. Tu n'as pas compris.
— Je crois bien que si, répliqué-je avec amertume.
J'essaye de me dégager, mais Dan ne lâche pas prise. Son regard paraît soucieux et il semble surpris en voyant mes larmes.
Ouais, Ducon, tes piques ont atteint leur but. Félicitations.
— Je suis désolé, je n'aurais pas dû le dire comme ça, je...
— Ça va, le coupé-je avec agacement. Pas la peine d'en rajouter. Maintenant, lâche-moi. On n'a plus rien à se dire !
— Lou, écoute, c'est pas...
Avec ma main libre, je le pousse au niveau du torse. Il fait un pas en arrière, mais m'entraîne avec lui, ne voulant toujours pas relâcher mon bras. J'enrage. Il ne croit pas que je vais rester plantée devant lui à entendre ses explications du pourquoi du comment je ne pourrai jamais ressembler à ma sublime sœur ? Il me dégoûte.
Énervée par ses mots et par la situation, je me débats. Je tire pour me libérer tout en le repoussant de l'autre côté.
— Mais arrête, grogne-t-il alors que je le déséquilibre un peu.
J'essaye d'en profiter pour me dégager sauf que je m'emmêle les pieds. Dan relâche sa prise un quart de seconde à ce moment précis et je pars en arrière. Un cri m'échappe. Je le vois écarquiller les yeux avant de se précipiter vers moi. J'atterris sur le dos. Le choc à la tête est amorti par sa main à lui. Il a eu le temps de placer son bras autour de ma nuque. Il se retrouve à quatre pattes, juste au-dessus de mon corps allongé. Son souffle est aussi rapide que le mien.
— Ça va ?
Il a l'air inquiet, en plus.
— Oui, murmuré-je, perturbée par notre position et sa proximité.
— Tu sais, c'était un compliment, rectifie-t-il, le regard adouci, troublé.
— Un compliment ?
— Que tu ne ressembles pas à ta sœur.
Je rêve ?
Dan sourit et ses yeux parcourent mon visage. Il se rapproche alors. Les battements de mon cœur s'envolent furieusement.
— Tu es bien plus authentique qu'elle. Tout est faux chez Salomé. Mais toi, tu rayonnes, me chuchote-t-il. Tu as bien plus de charme, Lou.
Oh my... Je cligne des paupières, pas sûre de réaliser ce qu'il est en train de me dire. Il ne pouvait pas me faire plus plaisir. Ma réaction l'amuse et il se penche encore un peu plus. Son nez frôle le mien. Je me perds dans ses prunelles noisette, presque dorées.
— Tu me plais tellement plus, avoue-t-il.
— Oh...
Je dois être rouge comme une tomate, mais je m'en fiche. Je ne contrôle plus rien, de toute façon. Pas quand il est si prêt.
— J'ai envie de t'embrasser.
Je crois mourir.
— Je peux ?
— Oui !
Évidemment !
Son visage réjoui me fait fondre. Ses doigts sur ma nuque se resserrent et me soulèvent la tête. Je suis incapable d'effectuer le moindre geste. J'ai comme un électrochoc lorsque ses lèvres se posent sur les miennes. Je ne m'attendais pas à cette sensation, à cette chaleur, à ce désir. Mes yeux sont grands ouverts, je ne veux rien louper. Je plonge directement dans son regard pénétrant. Mon entrejambe se crispe délicieusement.
Sa bouche bouge doucement contre la mienne. Un gémissement de plaisir monte dans ma gorge. Quand il s'écarte, je suis à bout de souffle, toute retournée. Dommage qu'il s'arrête. Dan se redresse et me tend la main pour m'aider à me mettre debout. Je ne sens plus mes jambes. Je pose mes doigts sur son avant-bras pour me soutenir.
— Tu n'as pas envie de recommencer ? osé-je timidement.
— Bien sûr que si, souffle-t-il avant de reprendre mes lèvres beaucoup plus fougueusement que la première fois.
Je perds pied avec lui.
Faites que je ne redescende jamais.
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