Chapitre 16 - Restons amis
Madeline
A peine mon réveil avait-il sonné que j'étais déjà sous la douche. J'avais du pain sur la planche avant d'arriver en cours : gommage, shampoing, lissage de mes cheveux... Je voulais absolument être parfaite. Cette journée de novembre était triste et pluvieuse, et je voulais rayonner.
Elisa m'attendait en bas de chez moi. Elle voulait être là pour moi au moment fatidique.
Elle était surtout en première ligne pour les potins !
Je préférais néanmoins l'avoir sous le coude que d'affronter ça seule. Pas un message. Il ne m'avait rien envoyé depuis hier. Même si je ne lui avais pas donné mon numéro, il y avait bien des moyens de nos jours de rentrer en contact avec quelqu'un. Sauf si on ne le souhaitait pas...
Je filais sous son parapluie et nous nous dirigeâmes vers l'école. J'avais mis mon beau pantalon en simili cuir avec un pull en cachemire amarante piqué à ma mère avant de partir. J'avais accentué mes yeux marrons d'un trait fin d'eyeliner et rosi mes pommettes artificiellement. Rien de voyant non plus, mais ce maquillage changeait de d'habitude. Mon ciré bleu petit bateau et mes bottines en cuir venaient parfaire mon look.
— T'es superbe ! Prête pour le moment de vérité ?
— Pas vraiment... On dirait que je vais à l'abattoir, lui signalais-je en faisant la moue.
— Respire, ça va aller. S'il te zappe, c'est vraiment un con, au passage.
On arrivait à deux vers l'entrée. Les garçons étaient sous le porche à l'abri de la pluie, en train de fumer comme à leur habitude. Je repérais directement Edgar, appuyé contre le mur du fond, en pleine conversation avec son meilleur ami. Mon ventre se tordit dans tous les sens et mon cœur était prêt à s'échapper de ma poitrine tant j'étais nerveuse et stressée. Elisa embrassa directement et fougueusement Théo pendant que je me dirigeais vers Edgar, peu sereine.
— Salut ! me dit-il en me faisant la bise.
Non pas que j'eu tourné la tête, ou quoi que ce soit. A vrai dire, je m'étais figée et l'avais laissé venir. Il avait décidé de m'embrasser les joues plutôt que les lèvres. Il regrettait. Pas de signe d'amertume sur ses traits, mais une profonde insensibilité vis à vis de moi. Je n'étais donc rien. Juste une fille de plus à son tableau de chasse, et visiblement, il n'avait pas aimé. D'où son regard absent après l'avoir fait... Il n'avait pas aimé.
Je n'étais pas la fille la plus expérimentée de son tableau, mais j'avais eu l'impression qu'il s'était passé autre chose que du sexe, hier. Une alchimie, un combo gagnant... Une fusion plus importante qu'un simple rapport sexuel. Ce que j'avais trouvé merveilleux, il l'avait trouvé fade et sans intérêt.
Je souris du mieux que je pu et le saluais en retour, cachant ma peine avec difficulté.
Il n'avait pas aimé. Il avait dû détester.
Un frisson me parcourut le dos et je refermais mes bras autour de moi, comme pour me protéger des sentiments qui m'assaillaient.
Je saluais les autres en même temps qu'Elisa puis prenais vite congé.
— J'ai froid dehors, je vais en classe, annonçais-je à Elisa, qui guettait mes moindres réactions.
— On pourra parler plus tard ?
Edgar m'avait retenu le bras avant que je rentre, essayant de pénétrer mes pensées de son regard orageux. Mais il n'y avait rien, Edgar, que du vide, ce matin.
— Ouais. A plus.
Je détournais rapidement le regard et filais en cours, Elisa à mes basques.
— Il t'a dit quoi ?
— Il veut me voir plus tard. Il m'a fait la bise. Ça n'augure rien de bon.
Mon corps tremblait encore sous la pression. Son contact avait renforcé mes tremblements et je partais en cours avec la boule au ventre. Je savais ce qu'il allait me dire. Il ne voulait pas de moi. Il avait testé la marchandise et ce qu'il avait vu ne lui avait pas plu.
— Ça va aller ma poulette, tenta de me rassurer Elisa en me frictionnant les épaules et le dos.
Je passais la journée d'une morosité oisive. Le temps ne m'aidait pas non plus à passer une bonne journée. Il pleuvait tellement que la pluie se transformait en petites rigoles vers les caniveaux.
Si je n'avais pas été autant entourée, c'aurait été mon visage inondé. Une rancœur énorme avait pris possession de mon être. Même s'il ne m'avait encore rien dit, pour moi, les dés étaient lancés, et j'étais trop éprise de ce garçon pour ne pas être touchée.
***
A dix-sept heures je n'avais pas de nouvelles d'Edgar, je ne l'avais pas revu et je ne préférais pas le voir. Sachant déjà au fond de moi, ce qu'il allait me dire, je ne voulais pas enfoncer le couteau dans la plaie. Je fonçais vers chez moi, tête baissée sous ma capuche bleue.
— Madeline !
Putain.
Il courait derrière moi tandis que je le jaugeais rapidement. Il allait être malade avec seulement sa veste en cuir sur le dos.
Je m'étais arrêtée à contrecœur en dessous d'un balcon et contre un mur pour ne pas être trempée tandis qu'il s'approchait de moi en petite foulée. Ses cheveux ruisselants tombaient sur son visage, froid.
—Tu vas où ?
— Je rentre chez moi, lui répondis-je en pointant le croisement de rue.
— Faut qu'on se parle.
— Economise ta salive, Edgar. J'ai compris.
J'essayais de faire bonne figure, mais à l'intérieur, je me consumais.
— J'peux pas.
Je le regardais de manière à ce qu'il étoffe ses propos. Ce qu'il fit.
— C'est pas moi ça, je ne sais pas ce que je fous. Ça ne va mener à rien. Trouve toi un gars qui te mérite. Ma vie est trop fuckée.
— C'est quoi ton problème ? Tu as juste eu ce que tu voulais, en fait.
— Je comprends que tu le vois comme ça. Mais je ne regrette rien. C'était...
— Ah oui c'est sûr, tu n'as vraiment pas l'air de regretter ! lui dis-je ironique. Comment j'ai pu être aussi conne, putain ? Elisa m'avait mis en garde contre toi et je ne l'ai pas écoutée.
Je reprenais mon chemin sous la pluie. Et tant mieux, l'eau battante dissimulait les larmes au bord de mes yeux.
— ça ne pourrait pas marcher, Mad... restons amis.
Il me suivait et essayait de terminer cette conversation. Je me retournais pour lui faire face et le pointait du doigt face à cette ultime attaque.
— « Restons amis » ? Tu te fous de ma gueule ? Mais on n'est pas amis, Edgar. Je ne veux plus te voir. A vrai dire, tu me dégoûtes.
J'avais craché ces dernières paroles avec un tel dédain que j'avais presque perçu une faille dans la dureté de son visage. Déception ? Tristesse ? Je n'avais pas envie de creuser plus loin. J'étais trempée jusqu'aux os et je n'allais pas tenir bien longtemps sur mes jambes flageolantes.
Je partais en courant vers mon immeuble avec le reste de mes forces. Les yeux noyés de larmes.
Arrivée dans le hall d'immeuble, je respirais fort. Comme si j'étouffais. Cette douleur dans la poitrine. Ce sentiment dans le cœur. Je montais tant bien que mal jusqu'à mon appartement et je m'écroulais en refermant la porte. Blottie derrière celle-ci, je me laissais aller et pleurais toutes les larmes de mon corps.
Vidée, je commençais à grelotter. Tel un zombie, je déposais mes affaires mouillées sur le sol et me dirigeais vers la douche. Une eau bien chaude me ferait le plus grand bien.
Fatiguée d'avoir autant pleuré, Je me couchais en discutant avec Elisa qui était bien déterminée à me remonter le moral.
La nuit allait être brève, mais demain était un autre jour.
« Restons amis », qu'il m'avait dit....
*************
Qui l'a déjà eu ce coup là : "Restons amis" ?
Belle douche froide pour Madeline, en tout cas. Elle avait beau savoir où elle mettait les pieds... La raison est si ignorante par moment ...!
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