Chapitre 20
« Mon seul avenir est de n'en avoir aucun. Et sans avenir, je ne suis rien si ce n'est un fantôme. »
Moi (paroles de Cassian)
Autrefois, dans un village reculé vivait un petit couple heureux. Mais la vieille femme toute fripée voulut tester la fidélité et l'amour de son vieux mari malheureux. Et tout comme il lui offrait des fleurs chaque dimanche, elle déposait pour lui une rose de passion lundi.
Voulant pousser le vice tortueux plus loin, le jour suivant elle accompagna ses fleurs de lettres passionnées, les signant du nom de Bambina.
Le vieil homme était heureux de lire ces mots si semblables à ceux de sa femme. Une plume légère et parfumée qui le plongeait dans la nostalgie d'un passé sans larme.
Mais la vieille femme n'était plus aussi belle que dans sa jeunesse. Pour tester la tentation de son mari à aller voir mieux qu'elle, plus jeune et plus belle qu'elle ne l'était aujourd'hui, elle laissa une ultime lettre, donnant rendez-vous à son mari sous le nom de Bambina. Et Bambina s'y trouva.
Son mari, flétri par le temps, était heureux de voir ces mots, de sentir ce parfum et de se rendre en ce lieu. Tout lui rappelait cette petite poupée qu'il aimerait jusqu'à sa propre fin. Ce fut d'un large sourire et une larme en coin qu'il accueillit la jolie et jeune créature se trouvant à la fontaine du village, à minuit. Cette petite Bambina, si jeune, si belle. Aussi belle jusqu'à la fin. Il tendit sa main vers son visage, elle s'en saisit. Jamais il ne l'avait trahi.
— Oh ma Bambina, que ferais-je sans toi ?
— Oh mon Bambino, que serais-je sans toi ?
Et le fantôme de la vieille femme disparut sous les rayons de la Pleine Lune, laissant de nouveau le vieil homme seul. Il recevrait sans doute d'autres fleurs et d'autres lettres durant la semaine précédant la prochaine Pleine Lune. En attendant, il se retrouverait seul, l'âme en peine. Et chaque dimanche, jusqu'à la prochaine Pleine Lune, il irait déposer une jolie fleur sur la tombe de sa femme.
Il y avait des réveils plus difficiles que d'autres. Étrangement, celui-ci n'était pas le pire que j'avais eu à subir. La tête me tournait et une bonne partie de mon corps était engourdi. Et je pleurais. Mais je me sentais plutôt bien. Une mélodie s'élevait non loin, berçante pour me rassurer. Je n'avais rien à craindre. Jusqu'à ce que mon regard se pose sur l'auteur de cette chanson que je ne connaissais que trop bien.
Des cheveux cendrés dans leur blond, malgré son aspect effacé, ses yeux semblables à ceux de son frère n'avaient pas changé. Ni son sourire. Il avait arrêté de chanter. Sa main se tendit vers moi, je tentais de m'en saisir. Mes doigts passèrent au travers. Il n'était qu'un fantôme.
— Martin, pourquoi es-tu là ?
Il était la trace résiduelle que j'avais sentie et aperçue autour de Frédéric plus tôt. Ou il y a quelques jours. Je ne savais pas combien de temps j'étais restée inconsciente.
Mais Martin n'était pas vraiment un fantôme. Juste une trace du passé. Ou bien une hallucination. Ruth m'avait prévenue que cela pouvait arriver chez les sorcières avec des dons oculaires. Perte de pouvoir, certes, mais en plus un début de folie. Génial. Et voir le fantôme de son ex ne faisait pas vraiment partie des choses que j'avais envie d'expérimenter. Surtout lorsqu'il s'agissait du reflet de mes peurs et de mes regrets. De ma culpabilité.
— Je suis tellement désolée, Martin. Je...
— Je ne suis pas en colère. Je t'ai aimé jusqu'à la fin.
Il s'approcha de moi, posant son front contre le mien. J'avais tourné la page. Martin était un homme que j'avais aimé. Une terrible erreur. Aujourd'hui, si je ne pouvais pas l'oublier, ce n'était pas pour le souvenir de cet amour, mais pour la culpabilité engendrée par ce dernier.
« Plus jamais je n'aimerai. »
— Je suis en paix, sans rancœur ni colère. Pourras-tu te pardonner ?
Et il disparut.
— Hella, à qui parles-tu ?
Oanelle se tenait dans un coin. La cellule était petite, froide et humide. Ses pierres n'aidaient pas à réchauffer les lieux. Pourtant Oanelle m'avait recouverte de la seule couverture.
— Depuis combien de temps ?
— Tu dors depuis plusieurs heures. Je dirai qu'une journée a dû passer. J'espère que tu n'avais pas trop d'examens.
— Je les ai finis. Nous nous sommes fait enlever par des vampires, mais tu as l'air plutôt calme.
— Parce que je sais que mes frères vont venir pour nous. Nous sommes une meute, chaque membre est important.
— Toi peut-être, mais moi...
— Tu fais aussi partie de la meute, non ?
— Je suis une sorcière. Je n'ai pas de meute.
Ni de coven d'ailleurs.
— Et alors ? Tu es des nôtres, sourit-elle à pleines dents. Enfin, si tu pouvais nous avancer et utiliser de la magie... Il semble que notre cage soit trop solide pour ma force de louve.
— Je ne peux pas.
— Protection anti-sorcière ?
— Protection anti-sorcière.
Enfin, en vérité les protections étaient plutôt faibles seulement je n'avais toujours pas récupéré du 1er Mai, ce qui était plus que problématique en cet instant. Plaçant mes mains devant moi, je tentais de faire apparaitre une quelconque énergie, sans succès. Et pour autant, je parvenais à voir l'aura du loup en Oanelle se déployer. Il était agressif, mais surtout effrayé. Un animal ayant peur pouvait s'avérer être dangereux.
Néanmoins, il y avait une chose que je pouvais faire même sans magie. Dans des moments comme ça, j'en venais à m'en vouloir de détester autant ma mère.
Je soulevai mes cheveux pour retirer le trombone qui y était emmêlé avec des pinces. Parfait. M'approchant du verrou, j'entendis des pas venir à nous. Alors je fourrai ma clé improvisée dans ma poche. Un vampire arrivait. Finalement, nul besoin de crocheter une serrure, ce qui m'aurait demandé du temps. J'avais perdu l'habitude de ce genre de chose.
— Le Seigneur Drake souhaiterait vous voir.
Encore mieux !
Il ouvrit la porte. Aussitôt, je bondis sur lui. Coup de genou dans les parties sensibles, une main posée en dessous la mâchoire, je levai la paume pour le faire basculer. Une jambe pour béquille, il tomba sur le dos. Il ne me suffit plus que de l'achever avec un pied dans la face. Complètement K.O, cela nous laissait la voie libre. Pourquoi n'avoir envoyé qu'un seul homme ? Pensait-il que ce dernier serait capable de maîtriser une sorcière et une louve ?
Je compris bien vite qu'ils n'étaient pas si naïfs lorsque je vis cinq autres hommes autour de nous. J'aurai essayé. Tous avec des armes à feu, je préférais lever les mains que de tenter le diable.
— Oanelle, je crois que le Maître des lieux veut nous voir.
Elle sortit sa tête de la cage avec un grand sourire.
— Ah oui, je crois que tu as raison.
— J'ai tellement faim. Espérons qu'il ait des sucreries.
Les hommes nous escortèrent plus haut. Mais plus nous nous éloignions des prisons, plus je pouvais sentir de failles dans les protections de la demeure.
Il s'agissait d'un château, assez immense à dire vrai. Et les protections anti-sorcière étaient trop vieilles à certains endroits, effacés à d'autres. Mais ce qui m'intéressait dans l'immédiat était tout autre. Lorsqu'on nous fit entrer dans un bureau, mon regard inspecta rapidement l'environnement et tomba sur des objets très intéressants.
— Lorsque je te le dirai, tu fuiras.
— Hella ?
— Ne joue pas les héroïnes. Tu fuiras et iras chercher Ruth pour moi.
Il n'y avait personne dans la pièce, si ce n'était nous deux et nos gardiens. Je me tournai vers eux, tentant de les attaquer. Ils tombèrent dans l'erreur de me frapper, me faisant chuter contre une commode. Mes mains agrippèrent l'une des épées au mur. Toujours viser la tête, règle d'or apprise dans les films d'horreur et par ma mère.
Le cou de l'un des gardiens fut tranché net, me surprenant autant que les autres. L'épée était vraiment bien affûtée.
— La fenêtre, maintenant ! ordonnai-je à Oanelle sans perdre plus de temps.
Se transformant en loup, la fenêtre se brisa pour elle et elle sauta pour fuir. Les vampires voulurent l'en empêcher, mais coupant la tête d'un autre et lançant ensuite mon arme sur un troisième à la manière d'une lance, la lame se plantant dans l'épaule, chacun détacha son attention de la louve pour se concentrer sur la véritable menace : moi.
Un tir retentit et je tombai, laissant s'échapper mon cri. Ma jambe avait été touchée par une balle. Le monde vacilla rapidement alors que la flaque de sang s'agrandissait autour de moi. Un sang à la couleur plus claire que la normale, m'indiquant le danger de la blessure. Retirant ma ceinture, je trouvais la force nécessaire pour un garrot.
Puis deux bras me soulevèrent du sol.
D'autres vampires entrèrent dans la pièce.
— Seigneur Drake, le loup s'est enfui.
— Peu importe, ce n'est pas comme si une meute allait attaquer pour récupérer une sorcière solitaire.
Il avait raison. Drake, l'homme qui me tenait et qui se trouvait être celui qui m'avait enlevée dans le parc, comprenait qu'il me tenait. Je ne savais pas où nous étions, mais j'espérais que cela ne serait pas loin de chez Ruth.
« Tu es si certaine qu'Oanelle ira prévenir ton amie », se moquait la petite voix de ma tête.
Strix m'avait prévenue du danger d'être solitaire. Mais mon choix, pouvant sembler stupide au premier abord, était loin d'avoir été irréfléchi.
— Maintenant, tu vas m'écouter, petite sorcière.
Il me posa sur le bureau, chassant ses hommes pour qu'ils nous laissent seuls. Il souleva ma jambe. Sa main levée laissa paraitre des griffes qui grandissaient. Il les plongea dans la plaie, ressortant la balle.
Arrachant le tissu endommagé pour ne laisser qu'une jambe à mon pantalon, je ne me sentais pas la force de lutter. Après avoir retiré le garrot, il passa sa langue sur la blessure.
— Le saignement va s'arrêter comme ça. Ta mort n'est pas envisageable avant l'arrivée de Thérésa.
Les vampires se nourrissaient aux artères et leur salive était un coagulant excessivement puissant.
— Mais putain, pourquoi vous faites ça ? Thérésa ne semble pas vraiment vous aimer.
Il me lâcha.
— Elle fait partie du nid. Personne ne sort d'un nid aussi facilement.
Là où les loups vivaient en meute, les sirènes en banc et les sorcières en coven, les vampires vivaient en nid dont un Maître était à la tête. Souvent, les vampires du nid étaient des personnes mordues par le Maître.
— Et toi tu vas me la ramener.
— Mais elle est quoi pour vous ? Vous vous donnez tellement de mal.
— Elle ne t'a rien dit ?
— Encore une fois, je ne suis pas son amie.
Un rire discret, il s'installa sur le siège confortable du bureau.
— Thérésa était une sorcière avant que je ne la morde. Elle a survécu à mon poison, devenant une vampire.
Si les humains résistaient plutôt bien au poison des créatures comme les loups-garous ou les vampires, se transformant presque à coup sûr en ce qui l'avait mordu, ce n'était pas le cas d'autres créatures surnaturelles. Si Thérésa avait vraiment été une sorcière, alors elle avait beaucoup de chance de s'en être sortie.
— Grâce à ça, elle a encore quelques capacités tirées de son ancienne nature. Tu as pu en être témoin alors qu'elle disparaissait dans un écran de fumée. J'avais placé des protections dans la propriété et lui avait posé un collier. Elle n'aurait jamais dû pouvoir utiliser ses pouvoirs sans mon accord.
— Mais vos protections sont périmées. Elle n'avait qu'à retirer son collier.
Me saisissant aussitôt par la gorge, le vampire m'avait enfilé un ras-le-cou. La sensation terrible de destruction s'empara de moi, me faisant tomber au sol, à genou. La main de Drake se posa sur ma tête, comme on l'aurait fait pour un chien obéissant.
Je commençai à comprendre pourquoi Thérésa avait parlé d'une « question de vie ou de mort ».
— Protection ou non, ce collier t'empêchera d'utiliser tes pouvoirs. Tu vas en souffrir pendant quelque temps.
Mes doigts s'y agrippèrent, espérant le retirer. Je n'y arrivais pas, étouffant presque. Pourquoi celui-ci semblait me déchirer de l'intérieur ? Le collier d'Hunter n'avait pas eu cet effet...
Mais le pire n'était pas encore arrivé.
— Et si nous nous amusions un peu en attendant Thérésa ? proposa Drake.
Le vampire lécha ses doigts humidifiés de mon sang.
***
Oanelle qui disparaissait en même temps qu'Hella. Hunter aurait tout d'abord pensé à une fugue stupide venant de deux jeunes femmes aimant tester les limites des règles. Mais Oanelle avait des responsabilités. Elle lui aurait laissé un message, juste pour éviter de le faire s'inquiéter inutilement. Et surtout, Michael ne serait pas venu lui parler de kidnapping.
Aucun message sur son portable, laissant comprendre qu'Oanelle n'était pas parvenue à s'enfuir, ni seule ni avec Hella. Il avait été rendre visite à sa voisine de territoire, la sorcière Ruth. Elle était bien plus accessible que la grand-mère d'Hella et son coven de la forêt. Mais la rouquine n'était pas parvenue à localiser Hella et son familier n'était pas venu pour la prévenir d'un danger. Si les pouvoirs d'une sorcière pouvaient être brimés, le lien réunissant tous les loups d'une meute était impossible à tromper. Seule la mort pouvait le supprimer, ou l'abandon d'un loup à la meute. Hunter pouvait alors sentir Oanelle.
Il remontait sa trace en voiture. Hunter avait pris un peu de retard, le temps qu'il se laisse envahir par l'inquiétude et que l'agacement de son instinct devienne insupportable. L'imprégnation n'avait rien d'une partie de plaisir. Et si l'autre partenaire ne ressentait pas la même bestialité qu'eux, les loups-garous pouvaient vite devenir insupportables. Ils étaient de nature territoriaux et très possessifs. Ajouter à ça le fait que Hunter soit un Alpha et le tout devenait bien pire. Hunter était un dominant né, un Alpha dont le loup comprenait sa supériorité sur les autres et qui n'hésitait pas détruire ce qui empiétait sur son territoire.
Mais que pouvait-il bien espérer d'Hella ? Il n'avait absolument rien à exiger d'elle.
Un ami lui avait par le passé donné un conseil pour prévenir cette éventualité. Avant toute chose, tâter le terrain en quelque sorte. Évaluer des désirs de l'autre. Si Hella ne ressentait rien et ne donnait aucun signe d'un futur en ce sens, il faudrait absolument qu'il s'éloigne. Impossible pour un Alpha responsable d'une meute. Quoiqu'il le faisait presque tous les siècles, se rendant sur d'autres de ses territoires. L'immortalité avait de quoi alerter les humains. Ils avaient beau être de parfaits idiots, voir que des individus restaient jeunes durant des siècles éveillerait forcément les soupçons.
Mais peut-être une autre possibilité existait-elle ? Et celle-ci lui plaisait bien plus. Tout faire pour qu'Hella succombe était tout à fait dans ses cordes, n'est-ce pas ?
Peu importait, dans l'immédiat il devait retrouver les deux femmes en espérant qu'elles aient juste décidé de fuguer pour s'amuser. Il comprit bien vite que la situation était bien plus grave. La voix d'Oanelle résonna dans sa tête. Elle avait peur, elle était paniquée et très proche de leur position.
Soudain, dans un crissement de pneu la voiture pila, le pied d'Hunter écrasant la pédale de frein alors qu'une femme sortait des bois. Oanelle était là, les bras autour d'elle et les cheveux décoiffés. Elle avait pleuré.
Hunter sortit immédiatement pour se précipiter vers sa jeune sœur, la soulevant dans ses bras. Elle frotta sa tête contre son menton, la louve remerciant son Alpha.
— Oanelle, que t'est-il arrivé ? Où est Hella ?
Le nom de la sorcière anima sa sœur qui agrippa Hunter à deux mains.
— Hunter, Hella est... Elle est restée là-bas ! Je dois prévenir Ruth... Je dois...
— Tout va bien Oanelle. Dis-moi juste ce qu'il se passe.
— Des vampires. J'ai essayé de l'aider, mais ils nous ont enlevés toutes les deux. Hella a réussi à me faire sortir pour que j'aille chercher de l'aide.
Michael ne resta pas dans la voiture, se précipitant sur sa sœur pour la dérober à Hunter. Elle se blottit contre lui, accueillant le garçon avec une plus grande complicité qu'elle n'en aurait pour son Alpha.
Oanelle retrouvée, il n'était pas question pour Hunter de laisser Hella derrière lui.
***
Les désastres provoqués par la tempête d'Hella Doux étaient une catastrophe pour les sorcières. La tornade et ses vortex n'avaient pas touché les Hommes, ce qui avait permis de ne pas alerter les Soverains. Mais des sorcières à balais avaient été secouées par les vents ravageurs qui avaient soufflé des forêts et des champs. Blessés et blessés graves, mais aucun mort. Bakoly avait fait soigner ceux touchés et avait épargné Hella des difficultés administratives que les plaintes avaient engendrées.
Le 1er Mai était toujours agaçant. La fête donnait des combats sanglants et certains venaient toujours se plaindre. Cette année au moins la tempête avait permis d'empêcher de nombreux sorciers d'aller se faire tuer dans les grottes de dragons ou les crocs de loups-garous enragés. Il y avait moitié de morts comparativement à l'année précédente. Du jamais vu. L'année prochaine, peut-être serait-il avisé de désigner à nouveau Hella comme guide ? Cela leur avait porté chance. Pour autant, tous les Sièges ne partageaient pas ce même avis concernant la jeune sorcière, dernière des Laga. Et Bakoly avait peur de comprendre pourquoi.
Ezter, bouteille en main, n'était pas encore saoule. Néanmoins, par précaution, son familier apparut sous forme humaine pour lui prendre sa boisson. La sorcière bouda, mais ne résista pas. Hélios, comme à son habitude, embêtait Anis dont les papillons familiers volaient autour d'elle. La jeune femme ne se plaignait pas des tentatives de l'homme pour la charmer, demeurant silencieuse et froide alors même que son élément se trouvait être le feu. Et puis il y avait Thomas qui n'était pas dans son bon cycle. L'homme semblait vouloir aller se pendre. Bien sûr, son espèce familier l'empêchait toujours de sauter le pas. Bakoly avait dû parfois intervenir elle-même. Les humains le diagnostiquaient bipolaire. Était-ce la vérité ? Aucune idée, avec la magie on ne pouvait être certains. Il était possible qu'il souffre simplement d'une malédiction pour ne citer qu'un exemple parmi tant d'autres. Mais la descendance Theuggia était assez secrète. Et Thomas, qui en portait le nom, était de cette descendance par le sang. Qui sait ce qu'elle portait avec elle ?
Finalement, Arnaud fut le seul à aborder le sujet sur toutes les lèvres de la réunion d'aujourd'hui entre les Sièges.
— Hella Doux, qui est-elle ?
Le silence s'imposa et Arnaud reprit.
— Il faut la détruire. Elle est une menace pour nous tous. Un dieu druidique, un familier aussi perfide et deux cartes, comme sa mère. Elle sera aussi dangereuse que Malaurie !
— Que savez-vous exactement de Malaurie, 3ème Siège, intervint alors Thomas.
Grinçant des dents, Arnaud se tut pour ne pas répondre aux provocations furieuses de Thomas. Mais il était vrai que la sorcière Malaurie n'avait pas été la sorcière de l'année.
— Elle a tué des créatures, nous le faisons tous, continua Thomas.
— Elle est dangereuse. Et je ne serais pas étonnée qu'elle ait entrainé sa fille pour qu'elle devienne une sorcière tout aussi menaçante. Sa magie est instable, et Malaurie s'en est nourrie. Hella est une sorcière de naissance dont les pouvoirs ont été restreints par un sortilège, l'aidant à devenir plus puissante de jour en jour. Ce n'est pas pour rien que les enfants de sorciers reçoivent un Radix Fons pendant l'enfance. Si la magie disparait pour certains, d'autres développent une puissance incontrôlable.
Thomas acquiesça, visiblement d'accord.
— Elle est peut-être une bombe à retardement.
— Jalil Katz.
Les premiers mots d'Anis surprirent chacun autour de la table. Si Bakoly savait malheureusement où voulait en venir la jeune sorcière, personne d'autre ici n'était au courant. La sorcière malgache avait espéré que cela reste secret encore quelque temps. Baron Samedi et Mama Brigitte lui avaient révélé de nombreuses choses qu'elle pensait pouvoir utiliser à son avantage. Trop tard.
Anis n'était pas à prendre à la légère. Elle était silencieuse, certes, mais très observatrice.
— Pourquoi parles-tu de lui ? s'étonna Hélios, quelque peu malaisé.
Parler du défunt 1er Siège était un sujet tabou ces derniers temps.
— Nous avons tenté de faire remplacer Jalil en vain, continua Anis en fixant Bakoly.
Elle savait, Bakoly en était certaine. Mais elle ne cèderait pas face à la silencieuse Anis.
— Vous ne trouvez pas cela étrange alors même que ce dernier est mort ?
— Bakoly, tu étais proche de Jalil, affirma Arnaud.
Ce vautour n'attendait que ça de faire tomber le 2ème Siège. Il rêvait de devenir le 1er Siège depuis si longtemps...
— Oui, j'ai ensorcelé le 1er Siège. J'estimais que personne n'était encore digne d'y siéger.
Anis se mit à sourire.
— Je te veux à la tête, Bakoly, se mit-elle à voter.
La main d'Hélios et de Thomas se levèrent pour montrer leur accord, ce qui n'était pas le cas d'Ezter et Arnaud. Mais Ezter finit par accepter et lever à son tour la main. Arnaud ne le ferait jamais.
— Dans ce cas, laissez-moi vous présenter le nouveau 2ème Siège, présenta Anis.
Une femme apparut sous l'arche qui faisait l'entrée de la pièce au style vieilli dont les teintes brunes et ambrées donnaient un côté charmant au lieu.
— Annette Voisin, Mage du coven des Forêts étranges.
Et sous son apparence de sorcière blanche et si jeune, elle remercia la petite assemblée. Bakoly comprenait que cela allait se compliquer.
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