Chapitre 14 - 1/2
« Il est la beauté, il est la vie.
Je le regarde jusqu'à ce qu'il disparaisse à l'horizon.
Quelqu'un à mon côté dit : "il est parti !"
Parti vers où ?
Parti de mon regard, c'est tout ! »
William Blake
Retour à l'université. Les cours, les professeurs et les amis. Les examens aussi. Tout était parfait.
Mon sourire si resplendissant d'une sincérité travaillée depuis bien longtemps, je saluai quelques personnes qui tentaient de me lancer des « Bonjours » enjoués ou bien de faire des signes de la main. Les habituelles questions fusaient, prenant des nouvelles, demandant comment avait été le week-end. Bien sûr, il était obligé pour mon image d'y répondre. Alors on inventait des absurdités classiques, parfois on faisait preuve d'un peu plus des créativités. Dans tous les cas, jamais on ne disait la vérité. Cela aurait été une erreur. Ça l'était toujours. Encore plus depuis que j'étais devenue une sorcière.
Ce que j'aimais pourtant avec les rentrées de week-end, c'était ces bonbons qui atterrissaient facilement dans mes poches et mon sac. Les étudiants étaient si généreux. Alors quoi de mieux que de s'asseoir sur un banc du campus pour manger les sucreries tout en réfléchissant à son avenir détruit à cause justement d'un maudit bonbon qui avait fait passer mon existence de « tranquille et maîtrisée » à « chaotique et imprévisible » ?
Non, je ne voyais rien d'autre. Ah si, il y avait les frères louveteaux, à savoir Oanelle et Michael. Oanelle secouait ses bras dans tous les sens tout en me criant « Salut Hella ! Je suis trop contente de te voir ! », même si elle ne s'approchait pas. À mon grand bonheur d'ailleurs.
Pour Michael, c'était un peu différent. Il me scrutait du regard, les bras croisés autour de la poitrine. Cela aurait pu être une posture offensive. Mais je la reconnaissais comme étant un moyen inconscient de se protéger. En d'autres termes, il avait la trouille. Ce qui le terrifiait ? Hella la Méchante Sorcière.
Peut-être y avais-je été un peu fort à notre dernière rencontre ? Enfin, peu importe. Mes bonbons ne se finiraient pas tout seuls.
— Tu manges de plus en plus de sucreries. Comment fais-tu pour ne pas grossir ? me demanda-t-on en français.
Ah oui, Thérésa la vampire. Il m'était sorti de la tête qu'elle devait venir me trouver.
— Je fais beaucoup de sport. Sinon, c'est quoi ce truc pour lequel tu aurais besoin de mon aide ?
— Il est possible que des rumeurs m'aient fait parvenir une information pour le moins... effrayante, insista-t-elle en imitant un fantôme pour ajouter une peur inexistante.
— Et alors ?
— J'aurai besoin de toi pour confirmer ça.
— Bon, j'ai bien compris que tu avais besoin de mon aide. Mais que crois-tu que je puisse faire ?
— Avec ton don, je voudrais que tu regardes ce qui est caché pour les yeux normaux.
— T'es bien gentille ma p'tite, mais ça m'aide pas des masses. Je ne sais pas utiliser mon don.
Alors elle s'assit à mes côtés.
— Ce n'est pourtant pas sorcier. Ferme les yeux.
— Mais dis-moi Jamie, comment je fais pour voir si j'ai les yeux fermés ?
— Tes yeux ne sont pas les seuls à pouvoir percevoir. Bon sang, mais qu'est-ce qu'on vous apprend à Poudlard ?
— À transformer les vampires en grenouille.
— Ferme les yeux Hella. Fais-moi confiance.
Non sans oublier de lâcher un soupir ennuyé, je pris un autre bonbon avant de fermer mon sac et de le serrer contre moi pour le protéger de tous voleurs potentiels. Une fois certaine que Thérésa ne me prendrait rien, j'obtempérai et fermai mes yeux. À part mes bonbons si jamais elle voulait me les dérober, je n'avais rien à perdre à obéir.
— Maintenant que tu ne vois plus, essaie de te détendre. Ne te concentre plus que sur ta respiration.
— Tu me demandes de faire de la méditation, là.
— Exactement.
D'un haussement d'épaules, je chassai une insulte envers la femme vampire et décidai d'au moins tenter. La méditation, j'en connaissais un rayon.
« — Les araignées grouillent autour de toi, les serpents sifflent. Peux-tu les entendre ? Si tu ouvres les yeux, si tu bouges, si tu as peur, tu te feras mordre et nous devrons recommencer. Je ne te donnerai d'antidote que lorsque tu auras réussi à tout oublier autour de toi tout en faisant preuve d'hypervigilance. »
Un frisson d'horreur me parcourut le dos. Non, je n'avais pas vraiment envie de repenser à ça.
Inspirant calmement, il ne suffit que d'une expiration.
Mes sourcils se froncèrent et j'ouvris les yeux.
— C'est étrange, repris-je en anglais.
— Qu'est-ce qui est étrange ?
Lorsque l'on méditait, on entrait dans une sorte de transe. On ne pensait plus à rien. Habituellement, ce n'était pas très compliqué pour moi. Mais là, quelque chose me gênait.
— Un nouvel élément se trouve dans mon environnement. Je n'arrive pas à l'oublier, à ne pas y porter attention.
— Parfait ! C'est exactement sur ça que tu dois te pencher.
Retentant l'expérience, je me focalisai sur cette étrangeté que je pouvais ressentir. Plus besoin de méditation, il n'y avait qu'à se concentrer sur cette énergie.
— Que vois-tu, Hella ?
— Ce n'est pas vraiment une vision. Mais comme une carte, je crois que... Eh bien, je te vois en fait. Enfin pas toi, mais le vampire. Merde, je ne savais pas qu'il y avait autant de monstres ici.
— Quelles autres créatures tu vois ?
— Sorcières et loups-garous, ça c'est sûr. Et quelque chose qui ressemble à un... troll ? Je ne sais pas, c'est gros, chauve, grand et moche.
— Et des vampires. Tu en vois d'autres ?
— Pas en ville.
— Et ailleurs ?
— Je... Je ne sais pas si je peux vraiment...
— Concentre-toi Hella !
Les mains de Thérésa s'approchèrent si rapidement de moi que je m'en saisis en plein vol sans avoir besoin de la voir. Une réaction incontrôlée.
— Hella ?
— Attends...
Puis ce fut comme un déclic. Toujours reliée à mon corps, toujours assise, je me trouvais pourtant en dehors de tout ça. La sensation, la vision que j'avais ne semblait pas pouvoir être décrite. Si une comparaison était à faire, j'aurai cité Cerebro, la machine du Professeur X des X-men pour repérer les mutants et les gens en général. Mais ma machine à moi, elle était dans ma tête et mes lumières n'étaient pas des personnes. Il s'agissait d'auras. Et chaque créature en possédait une différente.
Celle des vampires...
Soudain, quelqu'un poussa un cri, me forçant à rouvrir mes yeux.
La citerne sur le trottoir non loin venait d'exploser, laissant place à un jet d'eau puissant et dangereux. La citerne rouge tomba juste à côté d'un passant au téléphone qui tomba à la renverse à cause de la surprise.
Je me tournai vers Thérésa.
— Laisse-moi deviner. L'eau est ton élément.
— Je n'ai pas fait exprès.
Ouvrant mon sac, je mangeai mes derniers bonbons. Il n'y en avait pas suffisamment pour rassasier la passionnée de sucreries que j'étais.
— Alors, qu'est-ce que tu as vu ?
— Rien du tout. Au moment de me concentrer sur les vampires, c'est comme si ma tête avait explosé. Littéralement.
— Syndrome de la tête qui explose ?
— Sauf que je n'ai pas pris de drogue pour ça.
— Ah, tu connais ? Je ne pensais pas que la médecine était au programme de licence d'histoire.
Après s'être un peu moquée, elle regarda le pauvre homme qui se relevait alors que l'eau jaillissait encore.
— En tout cas, ça explique la citerne qui tente un voyage dans l'Espace. Je suppose que tu manques de puissance. Tu es une sorcière novice après tout. Mais si tu pouvais lâcher ma main, ça m'arrangerait.
Ah, je lui tenais toujours le poignet. La libérant, elle se frotta la partie endolorie avec surprise.
— Je ne pensais pas que les sorciers avaient de tels réflexes.
— Non, en effet. Je suis simplement exceptionnelle, me vantai-je ouvertement.
Thérésa sourit. Sa main passa sous mon menton, soulevant mon visage délicatement vers le sien.
— Tu es vraiment à croquer, m'avoua-t-elle en se léchant les crocs.
— Oh que non !
Une main sauveuse tira Thérésa en arrière.
— Thérésa, je t'avais ordonné de ne plus t'approcher d'Hella.
Strix venait d'arriver, et elle empêchait fermement Thérésa de me toucher encore.
— Nous, on doit parler. Toi, Hella, tu retournes en cours.
— Je n'en ai plus.
— Alors, rentre. Qui sait quelles autres créatures veulent encore poser leurs sales pattes sur toi.
Elle entraina le vampire avec elle. Une fois toutes les deux disparues, rentrer me parut être la plus sage des décisions. Surtout après avoir utilisé de la magie. Mais j'avais faim.
La paume sur mon ventre, ce dernier me réclamait des sucreries. Je pouvais le sentir mourir et ramper sur mes intestins dans un espoir suppliant de me faire craquer. Et autant dire que face aux pâtisseries succulentes que je visualisais déjà dans mon esprit, la tentation gagnerait toujours.
Alors je me levais, prête à aller chercher des gâteaux. Une chose à laquelle je ne m'entendais pas pourtant, ce fut que mes jambes m'abandonnent. Le sol se déroba sous moi qui basculais en avant. Un bras m'attrapa juste à temps, me maintenant debout accrochée à lui tandis que je me sentais trembler.
— Tu as usé trop d'énergie pour ce vampire.
La voix soufflait près de mon oreille, me poussant à lever mes yeux vers celui qui m'empêchait de tomber.
— Hunter, es-tu au courant qu'ici c'est une université ? C'est fait pour les étudiants. Tu n'es pas étudiant. Et d'après certaines rumeurs, tu es de la mafia. Donc, tu n'es pas le bienvenu.
— Si je te lâche, tu tombes. Veux-tu vraiment que je te laisse ?
— Si je tombe, en sachant que surement une bonne dizaine de paires d'yeux nous dévisagent, je suis persuadée que l'on t'accusera d'agression.
— Mais en sachant que je suis de la mafia, que je suis donc dangereux, cela ne signifierait-il pas surtout que plus personne n'oserait t'approcher en sachant que je t'aurai « agressée » ?
— Ah, je n'avais pas prévu que tu sois intelligent.
Son autre bras se plaçant sous mes genoux, l'Alpha me souleva de terre avec une satisfaction non dissimulée sur le visage.
— Et à présent chacun pensera que le parrain de la mafia est tombé amoureux de moi. Génial.
— Ou bien croiront-ils que tu es un membre de mon groupe ?
— Ce n'est franchement pas mieux. Est-ce que toi et ta famille pourriez me laisser en paix ? J'ai déjà suffisamment à faire avec la sorcellerie.
— Et un vampire.
— Oui, mais Thérésa traine des rumeurs de noblesse et de richesses. Autrement dit, être avec elle est bénéfique. Me balader avec toi est de mauvais augure. Et je suis une sorcière, je m'y connais en mauvais présage.
— Bien sûr. Mais Thérésa peut-elle te proposer des pâtisseries toutes fraîches préparées par des pâtissiers il y a quelques heures ?
Mes bras l'enlacèrent immédiatement, mes yeux devenant suppliants tout en demeurant méfiants.
— Des pâtisseries ?
— Chez moi. Tu as fini tes cours ?
— Chez toi ? Que comptes-tu me faire ?
— Moi ? Rien, mais tu manques à Oanelle.
— OK, je te laisse me kidnapper.
Si j'avais été intelligente, jamais je ne l'aurai laissé m'emmener. Après tout, je l'avais vu. Oanelle était encore à l'université et elle était loin d'être chez eux. Mais lorsque je m'en rendis compte, l'image des gâteaux à la crème et du chocolat m'aveuglèrent de nouveau.
Deuxième règle à appliquer dans le futur après la première qui était de ne pas accepter de bonbons venant d'inconnu : ne pas suivre un homme qui vous proposait des pâtisseries.
« Je crois que j'ai un problème d'addiction aux sucreries. Il faudrait vraiment que je pense à consulter ».
Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top