5 - CHANGING

novembre 1941, Angleterre

Novembre était un des mois les plus tristes qu'ils m'avaient été donné de voir. D'ordinaire, l'attente de noël compensait quelque peu, mais en cette période de guerre, rien ne pouvait atténué la maussadité des nuages gris planant dans le ciel.

Sans oublier que le froid rendait les conditions de vie dans l'hôpital de fortune d'autant plus compliquées. Même dans mon bureau étriqué et qui devrait garder la chaleur, je ne pouvais m'empêcher de frissonner.

— Constance, on a besoin de toi dans l'allée principale, le lieutenant Dreamy est atteinte d'un mal que personne n'arrive à comprendre.

Je relevais la tête de ma lettre destinée à Charlotte et me dépêchai de me lever, essuyant l'encre sur mon tablier. Je passais mes mains sous l'eau et me dirigeai à pas de course vers l'entrepôt qui servait d'hôpital.

L'infirmière en chef me guida jusqu'au lieutenant des infirmières, et la pâleur de sa peau et de ses lèvres contrastaient tellement avec le rouge de ses yeux et le noir en dessous que la vue me donna des frissons.

— Je vais avoir besoin d'un masque, prononçais-je doucement.

Une fois qu'on me l'eut apporté, sans un mot, je lui adressais un sourire qu'elle ne vit pas sous la matière blanche, et me penchai vers elle, essayant de comprendre ce qui n'allait pas. Je sortis une petit lampe de poche d'une des poches de mon tablier et lui intimait de suivre le faisceau. Ses pupilles avaient du mal à suivre, et étaient exagérément dilatées.

Je posais mes mains sur son front puis le mien, le sien trempée de sueur et beaucoup plus chaud que moi.

J'enfilais un stéthoscope et le pressais sur sa poitrine. Sa respiration était sifflante et difficile.

— Ça fait combien de temps ? demandais-je.

On me répondit que cela durait depuis hier matin. Les signes d'une pneumonie bactérienne étaient évidents ; le lieutenant tremblait, toussait et se tenait les côtes sous des douleurs thoraciques. Le fait que les autres infirmières ne l'aient pas remarqué me terrorisait pour les autres blessés ou malades.

Mon attention revint sur l'infirmière, et je vis qu'elle-même avait compris qu'elle n'avait pas de chances de survie dans de telles conditions. Elle me saisit le poignet de ses doigts faibles.

— Je veux que... je veux que vous... me remplaciez, réussit-elle à prononcer.

Je lui souris et posais ma main sur la sienne, secouant la tête. Sa main était chaude à cause de la fièvre.

— Nous verrons ce que le Capitaine Rider dira. En attendant reposez-vous, ça ne sert à rien de vous faire plus de mal que de bien en polluant votre esprit d'autant de questions.

Je me relevais après lui avoir respectueusement fait un signe de tête ; elle restait mon lieutenant après tout.

Les filles me guidèrent dans notre bâtiment, me pressant de leur dire ce qu'il se passait.

— Une pneumonie bactérienne. On aura de la chance si elle passe la semaine, dans de telles conditions.

La plupart des infirmières eurent les yeux de remplissant de larmes, les autres baissèrent solennellement la tête. Je me raclais la gorge, chassant la boule qui s'y était installée.

— Aucune d'entre vous n'a pu détecté la pneumonie ? dis-je doucement pour ne pas paraître hautaine.

Les quatre rougirent, regardant le plafond ou leurs pieds. Je soupirais doucement, avant de m'excuser et de retourner dans mon bureau pour finir la paperasse, trois des infirmières s'occupant des blessés.

La quatrième, qui devait s'occuper des papiers comme moi, passa la tête entre le battant et l'encadrer de ma porte. 

— Oui ? demandais-je avec un sourire pour l'inciter à parler.

Elle se racla la gorge.

— La plupart d'entre nous sont ici car elles veulent aider, mais nous n'avons pas la moindre connaissance en médecine. C'est à peine si nous savons recoudre des plaies. D'habitude, ce sont les médecins qui se chargent des maladies, mais ils ont été tué par un obus au sud avant d'arriver. Peut-être pourriez-vous... nous apprendre quelques trucs ?

Je remarquais alors qu'il s'agissait de celle qui restait le plus longtemps le soir. Je hochais la tête.

— Comment vous vous appelez ?

— Constance Pritchard. Tout le monde m'appelle Stan — allez comprendre pourquoi. Vous ?

J'eus un rire.

— Constance Jones. Vous pouvez me surnommer comme vous voulez.

Elle rit elle aussi, avant de me faire un clin d'œil.

— Connie, ce n'est pas si mal.

Le sang quitta mon visage et je grimaçais en me souvenant brutalement de James. Je n'avais pas de nouvelles de lui, et cela m'inquiétait. Mais après tout, pas de nouvelles, bonne nouvelle, non ? A moins qu'il ne soit mort.

Je chassais cette idée morbide avant de me mettre à trembler.

— Constance ? Je peux changer de surnom si ça vous rappelle un mauvais souvenir.

Mon sourire se fit triste alors que je terminais de remplir un papier permettant à un blessé grave d'être transféré en amérique pour se remettre.

— Non, tout va bien. C'est juste que... une connaissance m'appelle comme ça.

Elle plissa les paupières et eut un sourire mutin.

— Le soldat auprès duquel vous êtes restées au chevet il y a quelques mois ?

Ma bouche s'ouvrît en un "o" alors que mes yeux s'écarquillaient.

— Comment vous...?

Elle haussa les épaules.

— Je m'en suis doutée parce que ce n'est que depuis qu'il est parti que vous guettez chaque véhicule arrivant.

Je rougis, essayant de me cacher en défaisant mon chignon.

— Vous l'aimez ? continua Stan.

J'eus un rire nerveux.

— Aimer est un grand mot. Je l'apprécie. Il me rappelle celle que j'étais avant le début de la guerre quand je pense à lui. C'est agréable.

Stan me fit un clin d'œil.

— En tout cas, j'espère. être invitée à votre mariage.

Je m'offusquais en la chassant, son rire disparaissant derrière la porte.

— ❅ —

Le lieutenant mourut à la fin de la semaine. Toute l'équipe était sur le qui-vive en attendant la visite du Capitaine Rider, qui amènerait soit une nouvelle lieutenant, soit qui en nommerait une.

Stan passa la tête dans mon bureau.

— Le Capitaine Rider est là. Il demande à toutes les infirmières d'être présentes.

Je m'empressais de me lever, courant presque dans la salle principale avant de me placer dans le rang. Il nous salua, puis alla droit au but.

— Suite au décès inattendu du lieutenant Dreamy, je nomme, en prenant compte de ses derniers vœux dont elle m'a fait part dans une lettre, Constance Jones lieutenant. Vous pouvez disposer.

Il fit demi-tour, s'éloignant après que nous l'ayons salué.

Toutes les têtes se tournèrent vers moi alors que mes joues rougissaient. Stan me fit un grande sourire. Carrie tenant de m'assassiner avec son regard.

— Quels sont vos ordres, lieutenant Jones ? demanda mon amie.

Je lui rendis son sourire.

— Essayons de garder ces hommes en vie.











𝐀𝐔𝐓𝐇𝐎𝐑'𝐒 𝐍𝐎𝐓𝐄 :

je suis fière de ma petite fille, lieutenant infirmière, ça grandit si vite :(

comme vous l'avez remarqué, pas de bucky dans ce chap :( mais dans le prochain... ;)

chalut !

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