31

Le lendemain, dans la matinée, comme Kristen était prise au bureau, Rosalie se proposa pour continuer les rangements. L'adolescente était ravie de pouvoir profiter de l'absence de sa mère pour se rendre seule au manoir et enquêter. C'était aussi l'occasion de faire le point, mais aussi de continuer de s'entraîner à voyager dans le temps. C'est vrai, il lui fallait absolument réussir à contrôler ses sauts entre les temporalités. Au plus profond de son être, elle savait qu'elle en aurait besoin plus tard. Et peut-être plus tôt que prévu.

Durant le trajet jusqu'au manoir, Rosalie pensait à la soirée de la veille. Le repas s'était plutôt bien passé. Pendant ce dernier, l'adolescente avait pu apprendre qu'Harry n'était pas seulement un collègue de son père. En effet, il venait de revenir à Auburn après avoir accepté le poste haut gradé de shérif. Il était alors devenu en quelques sortes, le chef de son père. Et c'était lui qu'elle avait bousculé devant le Nautilus ! La pauvre Rosalie, elle en était encore toute honteuse. Quelle première impression lui donnait-elle ? Cependant, il ne lui en avait pas tenu rigueur, ou tout du moins, il ne l'avait pas montré. Au contraire, il avait été très curieux à son sujet, lui avait posé tout un tas de questions, le tout avec formalité et politesse. De plus, il possédait un sens de l'humour incroyable qui plaisait beaucoup à Rosalie. Cette dernière s'était prise à sourire à toutes ses blagues et à tous ses jeux de mots.

Lorsque l'adolescente passa les immenses grilles du manoir, qu'elle pénétra sur la propriété Roswell, quelque chose lui parût immédiatement différent. Tout lui semblait plus... vivant. Et elle se rendit bientôt compte que le manoir Roswell n'avait plus l'air laissé à l'abandon. Est-ce que j'ai voyagé sans m'en apercevoir ? se demanda-t-elle. Encore ?

Elle soupira avant de s'enquérir de l'heure qu'il était. 9h53.

Elle n'aimait pas voyager de cette manière, et détestait ne pas avoir le contrôle. Mais plus que tout, elle redoutait les voyages forcés et douloureux. Et rien que cette idée la fit presque frissonner. Heureusement, celui-ci, s'il avait eu lieu, fut rapide et asymptomatique.

— Hey ! entendit-elle soudain.

Rosalie dût réprimer un sursaut, posant sa main sur son cœur qui battait désormais à tout rompre. Ce n'était que Michael. Ce n'est que Michael, se répéta-t-elle afin de calmer son organe vital. En effet, le garçon était dehors, assis sur la vieille balançoire que l'adolescente n'avait encore jusque-là jamais approchée. Oui, elle avait bel et bien voyagé dans le temps. Elle était de retour en 1987.

— Hey, répondit-elle en secouant légèrement la main droite.

Même si le voyage n'était pas prévu, Rosalie était ravie de voir le garçon qu'elle considérait déjà comme un ami.

Michael l'invita alors à le rejoindre sur la balançoire. Rosalie hocha la tête tout en lui lançant un grand sourire avant de venir s'installer à côté de lui. Elle songea tout à coup que le moment était bien choisi pour obtenir certaines réponses à ses nombreuses questions. Alors après quelques « comment vas-tu ? », « quoi de neuf ? » et autres banalités, ainsi que de quelques réponses habituelles, Rosalie se lança :

— Ça ne doit pas être facile d'être fils unique, non ?

Michael haussa les épaules.

— J'essaye de ne pas y penser, tu sais. J'ai toujours vécu comme ça, du coup... forcément... ça ne m'embête pas. Et puis, j'ai Héloïse au Nautilus, elle me donne l'impression de tenir le rôle de grand frère à ses yeux.

— Mais tes parents n'ont jamais voulu d'autres enfants ? Ils n'ont jamais eu le désir de fonder une grande famille ?

— En fait, ma mère n'a jamais pu retomber enceinte après ma naissance. On se fait à l'idée à force...

Alors il ne savait pas. Il n'avait aucunement connaissance de l'avortement de sa mère. Forcément, Rosalie n'osa plus rien dire. Elle n'était pas en posture de lui avouer quoi que ce soit à ce stade.

C'est de cette manière que le silence s'installa entre les deux adolescents, naturellement, aussi doux et léger que le vent lui-même. Et puis, de temps à autre, Rosalie laissait son regard se balader. Alors elle se demanda, par exemple, si sa maison était visible derrière ces grands arbres, eux qui voilaient l'horizon. Cependant, elle se dit bien rapidement qu'elle avait dû être construite des années plus tard. Il fallait qu'elle ne se fasse pas d'illusions. Rien ne la rattachait à cette époque-là. Seul son pouvoir lui permettait de la connaître.

À ce moment précis, Michael se rendit compte que Rosalie avait l'esprit ailleurs et il suivit son regard.

— À quoi est-ce que tu penses ?

— À plein de choses.

Michael ne dit rien et attendit qu'elle explicite ses pensées. Rosalie constituait un véritable mystère à ses yeux. Il ne savait presque rien à son sujet, sinon qu'elle aimait la musique, Peter Pan, et les aventures du Capitaine Eo. Michael savait aussi que l'adolescente préférait davantage poser des questions que d'y répondre. Ainsi, il devinait déjà la suite de leur conversation : elle ne dirait rien, pas même ce qui traversait son esprit si mystérieux.

— Je me disais en fait que...

Rosalie chercha ses mots pendant quelques secondes, se mettant également à chercher un petit mensonge.

— Non, oublie.

Michael ne dit rien sur le coup. Après tout, Rosalie était souvent comme ça. Étrange, énigmatique, mais incroyablement charmante. Par ailleurs, malgré toute la singularité qui caractérisait l'adolescente, le garçon se sentait irrévocablement attiré par elle. Il l'appréciait beaucoup, même si ses sentiments semblaient le bousculer sans son accord. De plus, il ne pouvait lui tenir rigueur de tous les secrets qui semblaient l'entourer. Alors il sourit et soudain lui proposa un défi :

— Tu vois cet arbre ?

Rosalie hocha la tête. C'était un chêne immense, un de ces arbres massifs pourvus de gigantesques branches. C'était sur ce genre d'arbre que des cabanes pouvaient être bâties.

— Le premier qui arrive sur la grosse branche du milieu a gagné.

Le cœur de l'adolescente parût s'affoler.

— Parce que tu sais grimper aux arbres ? demanda-t-elle surprise.

— Pas toi ?

Un éclair parût traverser le regard du garçon. Il la défiait vraiment.

— Je sais pas... Il faut dire que je n'ai jamais vraiment essayé...

Michael laissa échapper un gloussement.

— Quelle honte !

— Je sais, j'ai raté ma vie, s'indigna-t-elle.

— C'est bien dommage pour toi !

Tout à coup, Michael sauta de la balançoire et se mit à courir vers le chêne à une vitesse folle. Rosalie le suivit immédiatement afin de ne pas se faire distancer. Elle ne voulait pas le laisser gagner. Cependant le garçon arriva en premier et tel un vrai gentleman, commença à grimper, abandonnant Rosalie en bas. Cette dernière se mit à rire.

— On dirait un singe !

— Bah alors ? Tu ne viens pas ?

L'adolescente lui tira la langue comme le ferait une enfant. Comme le ferait Héloïse ou bien son frère, Danny. Et toujours dans un esprit de compétition, elle entreprit à son tour de monter, mais glissa à plusieurs reprises.

Michael éclata de rire. Il ne pouvait pas s'en empêcher.

— Arrête de te moquer, c'est injuste !

— C'est que tu t'y prends mal, commenta le garçon tout sourire et d'une voix teintée de rires.

— C'est sûr que c'était facile pour toi aussi de grimper aux arbres pour la première fois, monsieur le chimpanzé, ironisa-t-elle en croisant les bras sur sa poitrine.

L'ironie lui permettait de cacher qu'elle était vexée. Mais sa posture ne trompait personne, pas même le garçon. Alors il décida de faire machine arrière.

— Attends, je vais t'aider.

Il descendit de quelques branches et tendit sa main afin que Rosalie s'en empare. Ce qu'elle fit sans plus attendre. Ce faisant, ses traits s'adoucirent légèrement. Il la hissa ainsi pour qu'elle attrape un appui. Dans un moment d'égarement, elle abandonna son regard avant de le tourner vers le bas. Son cœur battait la chamade. Il faut dire que c'était vachement haut.

Ensuite, essayant d'oublier la hauteur à laquelle ils se trouvaient – enfin Michael, lui, n'y prêtait aucunement attention –, tous deux grimpèrent jusqu'à la plus grosse branche dans le but de s'y installer.

— J'ai gagné, sourit Rosalie, je me suis assise en premier.

Elle savait toutefois que sans le garçon, elle n'y serait jamais arrivée.

— Oui, admit Michael. Mais seulement parce que je t'ai aidée.

— Tu sais quoi ? La prochaine fois, on fera vraiment la course, proposa l'adolescente, et tu perdras face à mon agilité inégalée.

Michael émit un petit rire.

— Je te prends au mot alors.

Et ils restèrent là un moment, se laissant tous deux envelopper par un silence doux et reposant. Presque salvateur.

À cet instant, Rosalie avait tout oublié. L'enquête, le drame, les voyages dans le temps. Elle savourait simplement ce moment passé avec Michael. Hors du monde, hors du temps. 

*

Je suis si heureuse de vous publier ce chapitre ! Je l'aime beaucoup ! 

Il ne se passe pas grand chose en terme d'intrigue, mais Rosalie et Michael passent de bons moments ensemble ;) 

J'espère que vous aimez toujours ! 

Des bisous ! 💜

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