28
Le lendemain matin, après une nuit sans rêve, Rosalie ouvrit les yeux avant de les refermer aussitôt. Le soleil étant déjà haut dans le ciel, ses rayons illuminaient la petite chambre de l'adolescente, l'éblouissant par la même occasion. Rosalie émit un léger râle avant d'enfouir sa tête dans son oreiller, l'air de vouloir se rendormir immédiatement. Aujourd'hui, en effet, elle ne voulait pas se lever. Même si elle avait plutôt bien dormi, elle se sentait encore fatiguée. Sûrement une des nombreuses conséquences de sa capacité à voyager dans le temps. En effet, vivre plusieurs fois la même journée était une chose bien éprouvante et il était vrai que Rosalie avait l'impression d'avoir continuellement besoin de caféine dans le sang, bien qu'évidemment, elle n'en buvait jamais.
Cependant, elle ne put rester là à flâner dans son lit. En effet, elle se souvint qu'elle devait se préparer pour aller chez ses grands-parents ce midi. Les parents de Kristen les avaient conviés à un barbecue. Rosalie en était d'ailleurs ravie, ça faisait longtemps qu'elle n'y était pas allée. C'est vrai, comme ils habitaient à Détroit, elle n'avait pas l'occasion de les voir aussi souvent qu'elle ne l'aurait voulu. À vrai dire, le trajet pour s'y rendre durait près de deux heures. C'est pourquoi plus Rosalie grandissait et plus les occasions se faisaient rares.
Quand elle descendit finalement prendre son petit-déjeuner, elle s'installa comme à son habitude dans la cuisine, feuilleta rapidement le journal qui traînait sur la table avant de s'arrêter sur sa date de parution. Le 1er juillet 2017. Et ça lui fit l'effet d'un électrochoc. Comme un flash, non pas douloureux, mais plutôt irrésistiblement puissant. En effet, elle songea aussitôt à la photographie qu'elle avait trouvée dans le cahier de Michael. Un cliché d'elle et de lui... Celui-ci avait été daté au 1er juillet 1987. Comment ? l'adolescente n'en avait pas la moindre idée ! Surtout qu'elle n'aurait pas l'occasion de voir Michael aujourd'hui. À moins que... la photo fut prise au Nautilus ? Si c'était le cas, alors elle pourrait s'y rendre dans la soirée et faire en sorte que le cliché existe.
*
Les grands-parents de Rosalie habitaient à Détroit, dans un joli petit pavillon avec jardin, situé à la lisière de la ville, dans un quartier calme et tranquille. Ils avaient toujours vécu là dans les souvenirs de l'adolescente. C'est vrai, d'aussi loin qu'elle pouvait se souvenir, elle avait toujours connu cette maison, ce jardin fleuri et son potager différemment garni selon les saisons. Contrairement aux parents de Bradley Moore, ceux de Kristen étaient tous les deux en vie et en bonne santé. Enfin, la vieillesse commençait à les rattraper, mais rien de trop grave ne leur était encore arrivé. Ainsi, Penny et Charles vivaient paisiblement.
- Comme tu as grandi depuis la dernière fois ! s'exclama Penny, la mère de Kristen, dans un sourire authentique en voyant Rosalie. Tu deviens une belle jeune femme !
Ça devait faire deux mois que Rosalie n'avait pas vu ses grands-parents et à chaque fois que le temps se faisait aussi long, elle avait le droit aux mêmes remarques. À chaque fois, elle avait l'impression de grandir, de mûrir, de changer. Parallèlement, sa grand-mère prenait de l'âge au fil des années, mais ne lui semblait vraiment pas différente. Elle n'était pas si vieille, tout juste âgée de soixante ans, et possédait encore tout le dynamisme de sa jeunesse. Penny faisait partie de cette catégorie de personnes qui bougent beaucoup et qui adorent être en constante activité. Elle n'était absolument pas pantouflarde. Au contraire, elle exerçait le métier de professeur et désirait enseigner jusqu'à la fin de sa vie alors qu'elle avait la possibilité de prendre sa retraite dès l'année suivante.
- Tu dois en attirer, des beaux garçons, ajouta Penny avec un regard complice.
Seulement, il apparaissait que seule sa grand-mère était consciente du charme de sa petite fille. En effet, Rosalie n'était sortie qu'avec très peu de garçons et ça n'avait jamais duré longtemps. La dernière fois, par exemple, c'était lorsqu'elle était entrée au lycée. Elle avait rencontré un garçon ; il faisait partie de l'équipe de football. Mais ça n'avait pas fonctionné et ils avaient fini par rompre deux semaines plus tard.
Mais voyant Rosalie grimacer, Penny fronça les sourcils avant de s'esclaffer :
- Ou des filles ?
Rosalie secoua la tête, un sourire amusé peint sur ses lèvres. Ensuite, ce fut Charles qui prit la parole :
- Penny, cesse donc d'enquiquiner Rosie avec ces histoires de garçons, tu sais bien qu'elle a encore le temps...
Rosalie croyait entendre son père.
- Félicitations pour ton diplôme ! Tu sais ce que tu veux faire à la rentrée ?
Charles était à la retraite depuis quelques années. Il avait bien huit ans de plus que son épouse, mais la différence d'âge n'était pas vraiment visible. C'était un infirmier qui avait échappé à la guerre du Vietnam. Il ne s'était pas engagé en 1964 et n'avait pas non plus été enrôlé. Par contre, il s'était occupé, pendant quelques mois, de soigner et remettre sur pieds les survivants de cette terrible et injuste guerre. Et il le répétait tant de fois, soigner ce type de blessures était une épreuve bien difficile.
- Non, j'attends encore la réponse des universités que j'ai choisies, répondit Rosalie. Pour l'instant, tout est encore flou.
À vrai dire, elle n'était même pas sûre de savoir ce qu'elle désirait vraiment faire plus tard. Au fond, elle voulait aider les gens de la même manière qu'elle souhaitait venir en aide à Michael ; et puis, elle voulait être capable de résoudre des enquêtes comme le faisait son père. Travailler dans les forces de l'ordre, c'était le chemin le moins brumeux qui s'offrait à elle. Le plus évident, aussi. Elle ne se voyait pas assise dans un bureau à longueur de journée, ou bien dans un hôpital. Elle aurait aimé être capable de sauver des vies de manière directe, mais elle savait qu'elle en était incapable.
Plus tard, pendant le repas, alors que Rosalie n'osait pas entamer la conversation, Kristen parla du manoir qui se situait derrière le lac d'Auburn. Elle raconta comment le maire de la ville avait décidé de remettre en vente le manoir et de quelle façon elle procédait pour le parfaire dans cet objectif-là. Puis, les yeux posés sur sa fille, elle ajouta que Rosalie s'intéressait beaucoup à l'histoire des Roswell. L'adolescente était amusée de la situation, parce qu'elle savait que sa mère faisait implicitement en sorte qu'elle obtienne les réponses à ses questions.
- Ah, soupira Charles, on n'a jamais vraiment su le fin mot de l'histoire ! Pourquoi t'y intéresses-tu ? s'enquit-il, les yeux ancrés dans ceux de sa petite-fille.
Parce que je voyage dans le temps et que je suis en mesure d'empêcher que le drame ne se produise...
- Juste comme ça... En plus papa m'a donné le dossier de l'affaire !
- Alors comme ça, on ressort des dossiers classés ? s'amusa Charles avant de décapsuler sa bière.
Bradley sourit avant de boire, à son tour, une gorgée de sa boisson alcoolisée.
- On les connaissait bien, les Roswell, pas vrai ? continua Charles en s'adressa à son épouse.
Penny acquiesça d'un hochement de tête, se remémorant leur vie à Auburn.
- Je connaissais bien leur garçon... il était dans une de mes classes... c'était quoi son nom, déjà ? s'interrogea la sexagénaire.
Charles voulut lui répondre, mais il bredouillait, lui aussi avait oublié :
- Micky ? Mickey ?
L'adolescente faillit éclater de rire.
- Michael ? suggéra-t-elle ensuite d'une voix presque innocente, comme si elle ne savait rien de lui - ou qu'elle ne le connaissait pas.
- Michael... Michael Roswell... ça doit être ça, oui ! Il était dans mon cours de littérature. Un charmant jeune homme dans mes souvenirs.
- Il était comment ? s'intéressa l'adolescente, consciente qu'elle allait apprendre un millier de choses grâce à ses grands-parents.
Penny confia alors ses souvenirs les plus honnêtes :
- Plutôt intelligent et studieux. Ses copies étaient bonnes, il me semble. Mais il était isolé du reste de sa classe. Il parlait peu, il s'effaçait beaucoup. Parfois, il arrivait qu'il ne vienne pas, ou qu'il arrive en retard. C'est marrant, il avait toujours l'air fatigué.
- Il n'avait pas d'amis ?
- Pas vraiment, très peu parmi ses camarades, ou alors je ne m'en souviens pas. Ça fait si longtemps... Trente ans quand même ! Sa disparition m'a beaucoup touchée à l'époque... Je le revois encore tandis que je n'arrive presque plus à visualiser ses anciens camarades.
Elle marqua une petite pause et sembla se replonger en 1987.
- Par contre, je me souviens bien de ses parents. Surtout de Jonathan. Il traînait beaucoup dans les bars à cette époque-là. On disait beaucoup de choses sur lui...
- Oui, renchérit Charles, il buvait beaucoup... beaucoup trop. Je pense même qu'il trompait sa femme.
Il trompait Elizabeth ?!
Ah bon ? formula Rosalie dans son esprit, comme si elle ne pouvait pas y croire.
- C'est fou qu'elle soit restée avec lui malgré tout ce qu'il lui faisait subir...
Les yeux de Rosalie s'écarquillèrent et son cœur manqua un battement. Qu'est-ce qu'il voulait dire par « tout ce qu'il lui faisait subir » ? Est-ce qu'il... oh mon dieu...
- Même pour Michael... à sa place, j'serais jamais resté. J'serais parti bien avant. M'étonne même pas qu'il ait disparu. Si c'est pas Joe qui l'a tué, c'est lui qui s'est sauvé.
- Charles !
Ensuite, le sujet de discussion changea et Rosalie ne cessa de penser à ce qu'elle venait d'apprendre, se mettant en tête de porter une attention toute particulière à Jonathan Roswell. Parce qu'elle se mettait aussi à y croire, que Jonathan était le coupable...
*
Et oui ! On va en apprendre des choses sur la famille Roswell... Tout n'était pas tout rose...
J'espère que vous aimez toujours !
En tout cas, j'ai vraiment hâte que vous lisiez la suite !
Bisouilles ♥
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