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- Rosalie ?

Attendant une réponse de sa part, le garçon la regardait intensément. Ses yeux bruns très sombres s'étaient liés à ceux de la demoiselle, si bien que cette dernière rougissait à vue d'œil. Derrière le comptoir, lui s'interrogeait. À quoi songeait-elle ainsi la tête dans la lune ? C'est dans ces moments qu'il réalisait qu'il ne savait presque rien à son sujet. Il n'avait aucune idée de qui elle était, ni d'où elle venait. La seule chose qui semblait quasiment certaine à ses yeux, c'est qu'elle venait probablement d'emménager en ville.

Cependant, malgré tous les mystères qui planaient autour de Rosalie, Michael devait avouer qu'il l'appréciait beaucoup.

- Désolée, s'excusa alors timidement l'adolescente, euh... je crois que je vais prendre un coca.

- OK, acquiesça Michael avec un grand sourire, un coca pour la demoiselle.

Et pendant qu'il s'occupait de la servir, Rosalie l'observait, le menton enfoui dans le creux de sa main tandis que son coude reposait sur le comptoir. L'adolescente laissa ainsi ses prunelles se balader, s'attardant d'abord sur la tenue du garçon - une marinière et un pantalon bleu marine, quasiment noir -, puis sur ses boucles sombres qui retombaient sur son front comme à son habitude, et enfin, sur son visage doux et jovial. Ses traits reflétaient d'ailleurs sa concentration, ce qui le rendait terriblement séduisant. Rosalie devait l'admettre, il était vraiment beau garçon. C'est là qu'elle songea à quel point il était dommage qu'il n'ait pas vécu dans son présent à elle.

Quand il releva soudainement les yeux vers Rosalie, il se rendit compte qu'elle le fixait - peut-être depuis un moment déjà - et il se mit à rougir, sentant instantanément ses joues chauffer et virer au cramoisi. Reprends-toi, Mike, sois normal, sois cool, se somma mentalement Michael.

- Voilà pour toi, dit-il lorsqu'il posa son verre en face d'elle, essayant autant que possible de rester professionnel.

- Merci, prononça-t-elle tandis qu'elle lui tendait quelques pièces de monnaie.

Aussitôt, le garçon pensa que s'il avait pu, il aurait refusé qu'elle paye son verre. Il aurait dit quelque chose comme : « Non, laisse, c'est un cadeau de la maison. ».

- Tu sais, je suis content que tu sois là ce soir, lui avoua alors Michael avant de se servir un verre à son tour.

Puis il se tourna vers la serveuse qui se tenait derrière lui :

- Tatiana, je prends ma pause !

La dénommée Tatiana se retourna et hocha la tête avant de prendre le relais et de s'occuper des autres clients. Ce faisant, elle jetait quelques coups d'œil au garçon, parfois avec un air rêveur et un sourire pendu aux lèvres, et d'autres fois en pinçant sa lèvre inférieure en même temps. Rosalie ne manqua pas de le remarquer et se dit que la serveuse devait sûrement en pincer pour lui. En même temps...

Enfin, Michael fit le tour du bar pour venir s'installer à côté de Rosalie, s'asseyant sur le tabouret juste à sa gauche. Cependant, en frôlant la jeune fille, il s'aperçut que son gilet était trempé. Il fronça les sourcils :

- C'est normal que tes vêtements soient mouillés ?

Rosalie, qui en apparence semblait sereine, se mit à paniquer. Elle ne savait vraiment pas comment répondre au garçon. Par la baie vitrée, l'adolescente pouvait percevoir que le soleil entamait lentement sa descente derrière les arbres et les toits des habitations d'Auburn. Ainsi, elle ne pouvait pas dire qu'il y avait eu un terrible orage. Sûrement d'ailleurs que les dieux ne s'étaient pas mis en colère au-dessus de la ville d'Auburn en ce jour de 1987 et que le temps avait été particulièrement ensoleillé toute la journée. Par conséquent, Rosalie opta pour une réponse évasive à l'aide de son humour vraiment douteux :

- Je suis tombée par-dessus bord, expliqua-t-elle d'une petite voix, faisant référence au fait que le Nautilus était un bateau.

Mais aussitôt, Rosalie songea que sa blague n'était pas drôle et elle s'enfonça un peu plus sur son tabouret. Ok, malaise extrême...

Le sourire du garçon s'élargit tout de même - l'adolescente se dit alors que c'était par pure politesse de sa part -, il allait même lui rétorquer quelque chose ; mais ce dernier n'eut pas le temps de prononcer un seul mot que Rosalie, de plus en plus nerveuse, s'empressa de changer de sujet :

- Tu travailles ici depuis longtemps ?

Et ça fonctionna. Michael ne chercha pas à en savoir plus sur ses vêtements encore mouillés, même s'il fallait l'avouer, il brûlait de tout savoir au sujet de sa nouvelle amie. Après tout, Rosalie avait bien le droit d'avoir quelques petits secrets.

- Pas vraiment, depuis janvier à peu près, il haussa les épaules avant de boire une gorgée de son soda. Et toi, c'est la première fois que tu mets les pieds ici ?

Rosalie hocha la tête et Michael l'interrogea à nouveau :

- Tu viens d'emménager ? Je ne t'avais jamais vue avant...

L'adolescente, à court d'idées, décida de lui donner raison afin qu'il ne devienne pas trop suspicieux. Elle voulait à tout prix éviter les questions. Et même si elle détestait mentir, parce qu'elle pressentait que tout lui retomberait dessus un jour, elle y était obligée.

- Oui, je suis arrivée il y a deux semaines... et j'habite...

Derrière le lac... mais ça, je ne peux pas lui dire puisque mes parents ont fait bâtir notre maison peu avant ma naissance. Bloquée, elle se tût alors avant de se racler la gorge.

- À la deuxième étoile à droite et puis tout droit jusqu'au matin, j'ai retenu, tu sais, lâcha-t-il amusé, même si clairement, il voulait en savoir davantage.

- Je vois ça, rit-elle ensuite, essayant par la même occasion de se détendre.

Un nouveau silence s'installa doucement ensuite et les deux adolescents ne savaient pas comment le briser. Ni l'un ni l'autre n'osait parler, craignant de dire quelque chose de stupide ou d'insensé. D'ailleurs, cette peur était quadruplée dans l'esprit de la jeune fille. Une petite voix dans sa tête la mettait toujours en garde, lui rappelant les risques qui existaient... C'est vrai, elle devait faire attention à ce qu'elle disait, à ce qu'elle faisait... parce que même sa simple présence ici pouvait tout bouleverser. À vrai dire, ce discours à propos du continuum espace-temps, elle ne le connaissait que trop bien.

- Rosalie, je..., commença par prononcer Michael avant d'être interrompu.

En effet, une petite fille se tenait à sa gauche et tirait sur le bas de son tee-shirt sans ménagement. Selon l'adolescente, l'enfant devait être âgée d'au moins cinq ans, peut-être même qu'elle en avait six ou sept. Elle avait de longs cheveux blonds attachés avec deux couettes au-dessus de chacune de ses oreilles et une frange qui cachait ses sourcils. Elle semblait adorable.

- Qu'est-ce qu'il y a ? s'enquit Michael en prenant une voix un peu plus douce, commençant à jouer avec une des couettes de la petite fille.

- Michael, t'avais dit que tu viendrais jouer du piano... ronchonna cette dernière en faisant traîner les deniers mots.

- Aww, lâcha alors le garçon. J'arrive, d'accord ?

Il se tourna ensuite vers Rosalie, un peu embarrassé :

- Ça ne te dérange pas ?

L'adolescente répondit par la négative, lâchant même un sourire. Elle finit par se lever pour suivre Michael et la petite fille jusque dans l'autre pièce. Et ce faisant, elle put remettre quelques pièces du puzzle « Roswell » en place - ou tout du moins, celui de Michael. Parce qu'en effet, l'impression de connaître la petite fille naissait doucement dans le for intérieur de Rosalie ; si bien qu'elle se demandait si l'enfant n'était pas la serveuse qu'elle avait rencontrée plus tôt alors qu'elle se trouvait encore dans le présent.

Et si, par le plus grand des hasards, c'était le cas...

Alors elle était en train de modifier le passé en y laissant son empreinte.

*

Bouuuh ! Comment allez-vous ?

J'espère que vous avez aimé ce chapitre et que la suite vous plaira tout autant, voire davantage !

Quelles sont vos théories pour la suite ?



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