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Non ! Ça ne peut pas arriver maintenant !
Rosalie était en train de paniquer, s'imaginant déjà disparaître devant tous ces gens... Comment ferait-elle ensuite pour expliquer, sans se faire arrêter, qu'elle voyageait dans le temps ? Elle savait qu'il était impossible de dire la vérité à qui que ce soit. Ainsi, elle ne pouvait pas laisser ça arriver. Non... elle devait résister. Cependant, tandis qu'elle essayait d'empêcher le voyage de se produire, elle se rendit compte que ça ne faisait que l'affaiblir davantage. L'adolescente n'avait aucun contrôle.
Ça allait arriver. Ce n'était plus qu'une question de minutes... ou de secondes.
Par conséquent, Rosalie décida de trouver un endroit tranquille afin de ne pas attirer l'attention. Mais où aller ? Dehors ? C'était pire... Dans la pièce secondaire ? Non... quelqu'un pouvait se trouver dans la même pièce en 1987...
Enfin, quand ses yeux se posèrent sur une porte au fond à droite, derrière le bar, elle comprit que c'était là le seul endroit où elle pouvait aller se réfugier. Les toilettes.
Bon... quand faut y aller, faut y aller, songea-t-elle tandis qu'elle longeait le bar.
Et alors que le monde semblait tanguer sous ses pieds, Rosalie réussit à atteindre les toilettes sans tomber, évitant difficilement les personnes qui se trouvaient sur son chemin. En effet, ses vertiges étaient bien plus violents qu'avant. Son mal de tête l'était également. Si bien que l'adolescente avait l'impression qu'elle allait finir par imploser. Peut-être parce qu'elle était loin du manoir ? Elle ne savait pas. Elle avait encore tant de mal à comprendre tout ce qui lui arrivait dernièrement.
Une fois à l'intérieur des toilettes pour femmes, Rosalie soupira d'aise : il n'y avait personne. Les cabines toutes entrouvertes ne laissaient aucunement place à l'imagination ; la pièce était bel et bien vide de toute présence humaine. L'adolescente était rassurée. Au moins, elle n'aura pas à s'expliquer sur son état relativement préoccupant. C'est vrai : Rosalie respirait bruyamment, si bien qu'on pourrait croire qu'elle manquait d'air ; elle tenait d'ailleurs difficilement debout, ses jambes flageolantes manquaient de la lâcher à chaque instant... Elle n'avait même pas la force nécessaire pour se mettre dans le fond ou bien même pour s'enfermer dans une des toilettes.
Ainsi, pour éviter de tomber, elle décida de prendre appui sur le lavabo en face d'elle, posant ses paumes de mains de chaque côté de la vasque. Elle pencha ensuite très légèrement son corps en avant, libérant le poids sur ses jambes, puis essaya de réguler sa respiration. L'adolescente se battait fébrilement pour rester consciente. Même ses propres pensées lui paraissaient loin...
— OK, souffla-t-elle, respire. Tout va bien... tu vas bien... Inspire... Expire...
Et lorsque ses yeux s'arrêtèrent sur l'immense miroir accroché au mur, elle croisa son propre regard. Ce dernier paraissait éteint et brumeux, si bien qu'elle n'osa pas le soutenir plus longtemps. Elle ferma alors les paupières quelques secondes afin d'oublier à quel point elle avait l'air lamentable.
— Tout va bien, mademoiselle ?
Le cœur de Rosalie bondit dans sa poitrine sous le coup de la surprise. Elle rouvrit aussitôt les yeux et aperçut le reflet d'une dame à travers le miroir. Elle hocha faiblement la tête tandis que les mots semblaient lui manquer. C'est bizarre, songea-t-elle au même moment, je ne l'ai pas entendue arriver.
— Vous êtes sûre ? insista-t-elle tout de même avec bienveillance, faisant quelques pas dans la direction de Rosalie.
Finalement, l'adolescente étira ses lèvres afin de former un sourire avant de se redresser.
— Juste quelques vertiges, ça va passer, prononça-t-elle alors, ne sachant pas quoi dire d'autre tandis que la femme commençait déjà à s'éloigner.
Rosalie en profita pour la détailler, ne pouvant s'empêcher de noter ses cheveux frisés – sûrement l'œuvre d'une permanente –, sa veste dorée, son jean plutôt large, ses hauts talons... le tout relativement typique des années quatre-vingts. Venait-elle donc de voyager dans le temps ?
Non... Si ?
Pourtant ça n'arrivait qu'au manoir ! Et même si elle avait eu les mêmes « symptômes », c'était bizarre. Comment était-ce possible ? D'autant plus que rien n'avait changé. La pièce semblait être exactement la même. Quoique... peut-être que la décoration était différente... Rosalie n'en était plus très sûre à présent.
Se sentant – étonnamment – légèrement mieux, elle balaya la pièce du regard, ne sachant plus à quelle époque elle se trouvait. Son cœur battait déjà très vite à la seule pensée de se trouver au Nautilus en 1987... alors quand elle songea aux chances qu'elle avait de rencontrer Michael ce soir, elle ne put s'empêcher de sourire.
Avant de sortir, elle se passa de l'eau froide sur le visage afin d'éviter une montée de fièvre – même si elle savait au fond que ça ne fonctionnerait pas –, puis se tourna vers le miroir pour inspecter son apparence une dernière fois. Elle haussa finalement les épaules face à son reflet, l'air de se dire que de toute manière, elle ne pouvait pas faire demi-tour.
De nouveau dans la pièce principale du Nautilus, Rosalie se dirigea vers le bar afin de se prendre à boire. Ce faisant, rien ne lui parût différent. Les aquariums étaient toujours là, les poissons aussi... L'agencement des meubles demeurait le même...
Fausse alerte, devina-t-elle, le cœur soudain serré. Elle y avait cru si fort... elle y avait mis tant d'espoirs... qu'elle était indéniablement déçue. C'est vrai, à cet instant précis, l'adolescente aurait préféré être en 1987.
Désormais assise sur un tabouret en face du bar, Rosalie se demanda s'il ne valait pas mieux qu'elle s'en aille. C'est vrai : pourquoi rester si ce n'était pas pour voir Michael ? Elle était venue au Nautilus spécialement pour lui... et perdre son temps ici ne lui servirait à rien. Elle le savait mieux que quiconque, les jours étaient comptés. Dépitée, elle s'apprêtait ainsi à se lever quand quelqu'un se positionna en face d'elle, derrière le comptoir.
— Hey, qu'est-ce que je te sers ? s'enquit alors une voix qu'elle connaissait bien.
L'adolescente releva aussitôt la tête pour plonger ses prunelles dans celles de son interlocuteur. Soudain, elle se sentit ravivée par une joie indescriptible. En effet, Michael était là, habillé comme tous les autres employés du Nautilus, et il lui souriait. Rosalie n'en croyait pas ses yeux. Finalement, ce n'était pas une fausse alerte... elle avait réellement voyagé dans le temps – et pour la première fois, elle l'avait fait en dehors du manoir.
*
Eh oui ! Rosalie se trouve au Nautilus, là où travaille Michael !
Ce chapitre est assez court, mais il permet d'amorcer la suite :)
J'espère que ça vous plaît toujours ! ♥
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