22 décembre
Thème : Enfant du bout du monde
-Je t'assure le gars, il était sur le point de me montrer sa bite, rigole-t-elle avec chaque mot qui tremble.
Je rigole avec elle, cette histoire est totalement hilarante. Si j'ai bien compris, c'était lorsqu'elle se trouvait en première ou en deuxième année de lycée, un gars de sa classe voulait lui montrer sa bite pour la convaincre de sortir avec elle, mais ce qu'il n'avait pas capté, c'était qu'elle n'était pas attirée par ces derniers, mais plutôt par l'appareil génitale féminin. J'en suis morte de rire, la gêne que le gars a dû ressentir lorsqu'elle l'a envoyé balader aussi sec. Ça devait être mordant de rire à voir, j'aurais bien aimé y assister mais nous ne nous connaissions pas encore à cette époque car on ne vient pas du même coin. On s'est plutôt à une soirée en tant qu'infirmière l'une de l'autre, et puis on a réussit à se rapprocher car on avait des amis en commun ou encore des amis des amis puisqu'on se trouvait miraculeusement dans la même université mais dans les mêmes filières et options.
-Il m'a dit : « Tu vas voir, elle est tellement longue que tu vas jouir rien qu'en la voyant ». Et moi, je lui ai rétorqué, en mode genre je m'en bats les trompes de Fallope, ces mots : « Désolée mais j'aime les vagins, les bites ne m'intéressent pas. Puis, je suis sûre que la tienne n'est pas aussi grosse que tu le prétends. Il paraît que plus vous en parlez, plus elle est petite. Ce serait une sorte de manière de relever de votre impuissance ». Et ensuite, je suis partie, me déhanchant presque pour le narguer alors qu'il avait la gueule jusque par terre et que ces potes se foutaient royalement de sa gueule ! Renchérit-elle entre deux fous rires.
Nous rions de bon cœur et lorsque nos rires s'estompent, on se rend compte que ce n'est plus Les feux de l'amour –dont nous nous moquons ouvertement en disant que c'est de la merde car c'est ce que nous pensons- mais un programme pour enfant est là, c'est le silence complet. Aucune de nous deux n'osent prononcés un seul mot, totalement captivées par les histoires naïve de Winnie l'Ourson. J'adorais réellement ce dessin-animée lorsque j'étais enfant et je ne regarde que les anciens épisodes –ceux de mon enfance donc- car les nouveaux sont franchement fades et bizarres.
De toute ma vie, je n'arriverais jamais à me faire à l'idée que Winnie et toute sa troupe sont devenus des détectives avec une petite fille. Jamais, ô grand jamais je ne m'y ferais. Et Danielle est de mon avis, et comme on adore toutes les deux les émissions qui ont bercés notre enfance, on ne peut s'empêcher de les regarder. Les nouveaux sont beaucoup moins intéressants et pas vraiment dignes d'intérêts à nos yeux. Pauvre enfant de nos jours qui n'ont pas eu la chance d'avoir les dessins-animées de nos époques. Je soupire finalement, suite à cette pensée et le visage de ma petite amie se tourne vers moi. Je sens son regard sur moi et ça me déstabilise vraiment car il est bizarre son regard, franchement bizarre.
-Nora ?
Je tourne la tête vers elle, les lèvres pincées et sur le point de me mordre l'intérieure des joues lorsque je remarque que des étoiles –des milliers, des millions même- dans le fond de ses prunelles. J'en ai le souffle coupé. Qu'est-ce qu'elle me prépare encore et qu'elle doit trouver si merveilleux que pour avoir autant d'étoiles aussi belles –probablement plus belles que celles que j'admire presque tous les soirs avant de dormir ou lorsque je n'arrive pas à dormir et qu'à la base, rien ne peut réellement les égaler tellement qu'elles sont belles dans ma tête, dans mes yeux et dans mon cœur- dans les yeux et un sourire aussi splendide sur les lèvres qui ne me donnent qu'une envie, c'est de l'embrasser fougueusement en ne m'arrêtant sous aucun prétexte ? Je n'en sais rien et ça me rendre complètement folle si ça continue ainsi. Je l'interroge du regard et son sourire grandit encore plus, au point où l'on pourrait croire que les commissures de ses lèvres atteindront bientôt le lobe de ses oreilles si ce sourire ne cesse pas de grandir dans la seconde.
-Aimes-tu les enfants ? S'enquiert-elle avec une pointe d'indifférence et de détachement mal essayé.
-Oui, pourquoi ? Lui retournais-je la question.
-Je... Je pensais que... Que..., balbutia-t-elle vainement.
-Pourrais-tu poser ta question en une seule fois parce que j'ai l'impression d'entendre Porcinet là ? Demandais-je avec une pointe d'humour dans la voix.
Danielle croise les bras sur sa poitrine, se renfrogne et commence ainsi à me bouder. Alors ou bien elle n'a pas comprit que je la taquinais –mon air taquin n'était peut-être pas assez bien dévoilé- ou alors elle fait semblant qu'elle ne l'a pas comprit et fait donc semblant de me bouder. Et là, elle me fait penser à une enfant. Je souris, dévoilant mes dents blanches et bien alignées avant de lui sauter dessus –oui, vous avez bien lu- pour la chatouiller partout surtout au niveau des côtes car c'est l'endroit où elle est le plus sensible aux chatouilles. Nous rigolons toutes les deux et je finis par embrasser le bout de son nez et ensuite ses lèvres qui fendaient son visage en un sourire car elle riait. Je me redresse et reprends ma place initiale dans le canapé, assise et Danielle fait de même. On se regarde dans le blanc des yeux un instant, les pulsations de nos cœurs finissant seulement par se calmer. C'était... Hilarant !
-Revenons à nos moutons maintenant. C'était quoi encore ta proposition ? La questionnais-je, un rictus en coin.
-Je pensais que nous pourrions... Euh... Adopter, se risqua-t-elle en faisant la grimace à la fin de sa phrase, ayant peur d'un refus catégorique sûrement.
Sauf que contrairement à ses craintes, j'adorerais avoir un enfant. C'est même plus qu'une envie, c'est un désir qui finissait tout doucement à se transformer en un rêve. Mais la seule et unique crainte que j'ai, qui est plus une sorte de réticence que de crainte, c'est que l'enfant que Danielle et moi on aurait serait mal. Je n'ai pas envie d'être mère si c'est pour en être une mauvaise, je n'ai pas envie de donner une vie aussi bordélique que la mienne à un enfant qui n'a rien demandé et je n'ai pas non plus envie que cet enfant qui n'a toujours rien fait ni demandé subissent des critiques sur le fait qu'il ait deux mamans et pas de papa à la place d'avoir un papa et une maman.
Je n'ai pas envie qu'un enfant subisse une vie comme celle-là, et je veux encore moins en être le cause. Mais c'est un risque et comme sur la couverture du livre « Everything, Everything » de Nicola Yoon que j'ai lu durant mon adolescence il me semble, les risques dans la vie c'est de ne pas en prendre. Ou encore, pour suivre les dictons que tout le monde connaît ou presque, c'est « Qui ne tente rien n'à rien ». Je me mords la lèvre inférieure, légèrement septique.
-Tu ne veux pas, c'est ça ? S'exclama-t-elle aussitôt ma mine légèrement changée.
-Ce n'est pas que je ne veux pas ma chérie, mais je n'ai pas envie d'obliger un enfant à subir des critiques qu'il ne devrait pas avoir, répliquais-je avec un ton un peu acerbe.
Danielle se renfrogne de nouveau et je soupire. Je sais que j'agis mal, que ça partait d'une intention mais le problème c'est que nous ne sommes pas encore dans une situation stable –d'où le côté bordélique de nos vies que je ne veux pas faire subir à un gosse-, les critiques que ce dernier pourrait avoir sur ses parents –donc Danielle et moi- ne m'attirent guère et puis, il y a la peur de ne pas être une bonne maman. Car s'occuper des gosses des autres, c'est toujours plus facile que de s'occuper des siens, bien évidemment. Et puis, l'éducation des enfants est toujours à donner en dernier lieu aux parents légitimes ou biologiques. Je ne sais plus où j'ai lu cette phrase, mais je pense que ça doit être dans un livre de psychologie ou un roman de mon adolescence.
-C'est tout ? Renchérit-elle comme absente, après avoir réfléchit pendant quelques secondes.
-J'ai peur d'être une mauvaise mère. J'ai peur que cet enfant subisse des critiques sur le fait qu'il n'ait pas de père et deux mères –ce qui n'est pas encore « normal » de nos jours, ne l'oublie pas- et ça, je n'arriverais pas à le tolérer. Et puis, j'ai peur que notre vie ne soit pas encore assez stable, équilibrée vois-tu, pour accueillir un enfant. Nous avons encore des problèmes financiers –de dettes en plus, Danielle !- et je travaille de jour, tu travailles de nuit et tu as tes cours du soir. Ce n'est vraiment un rythme de vie adéquat pour un enfant. Il n'y a que ça –enfin, c'est quand même pas mal- qui m'empêche de te dire « oui » pour l'adoption, répondis-je, un peu lessivée par cette conversation qui pourrait d'une seconde à l'autre tournée véritablement au vinaigre.
Danielle soupire juste à ma droite et je fais de même après. Car c'est tellement chiant la vie, on a des envies et des désirs, voire même des rêves, sauf qu'elle nous empêche souvent de les concrétiser. Et c'est excessivement chiant, justement, mais bon on ne peut pas avoir tout dans la vie non plus. Quand je repense à mon frère John qui m'a annoncé ce matin –je suis toujours sous certificat médical- qu'il partait pour de bon en plaquant tout derrière lui, et bien j'ai pratiquement envie de faire la même chose en compagnie de Danielle. Mais le problème c'est qu'on a commencé à construire nos vies ensembles et ici, alors on aura un peu de mal à tout plaquer pour aller ailleurs. Avec nos dettes, surtout. Et là, si un enfant vient s'ajouter à l'équation, ce sera définitif, nous ne pourrions plus vivre comme on le fait maintenant. Il faudra trouver un nouvel équilibre qui ne soit pas précaire ou éphémère.
-C'est vrai que vu ce point de vue là, c'est tout de suite autre chose, murmura-t-elle plus pour elle-même que pour moi.
Et c'est sur ces mots que je me rends compte que j'étais assez défaitiste. Que je ne pensais peut-être pas de la meilleure manière qu'il soit. J'ai souvent eu tendance à voir énormément ou pratiquement tout le négatif des choses et ainsi à oublier le positif. Et c'est peut-être une très mauvaise idée de décider cela sur un coup de tête, mais j'en ai marre de me la prendre cette tête justement, et puis, un enfant peut nous apporter beaucoup de bien. J'en suis sûre et certaine. Il faudra juste faire quelques sacrifices et revoir certaines choses, mais si l'envie est là, féroce et dure comme du roc, je ne pense pas que l'on peut l'ignorer éternellement. Aussi, si on ne le fait pas maintenant, on ne le fera probablement jamais. Alors oui, je le fais sur un coup de tête, mais il sera probablement la meilleure chose faite sur un coup de tête de toute ma vie !
-Tu sais quoi ? Tant pis, on arrête de se casser le truc pour des choses que nous pourrions régler plus tard, que nous pourrions changer et faire en sorte que ça se passe sans encombre. Adoptons un enfant, je pense que c'est la meilleure chose qui pourrait nous arriver en ce moment ! M'enquis-je avec joie.
-Sérieusement ? S'extasia d'un seul coup Danielle.
-Oui !
-Alors... Euh... Un enfant d'où ? Demanda-t-elle avec se mordant la lèvre inférieure.
-Un enfant du bout du monde ? Proposais-je avec un sourire.
-Un enfant du bout du monde.
-Et peut-être plus tard... Des enfants du bout du monde ? Réitérais-je ma proposition au pluriel.
-Des enfants du bout du monde, dit-elle avec le sourire.
Et c'est comme ça que Danielle et moi avions commencé à rêver et imaginer différents enfants, à chercher après ceux qui pourraient nous intéresser, les centres d'adoption qui proposaient des enfants d'ailleurs, les lois et les documents concernant l'adoption, le cas de parents homosexuels souhaitant adopter, les origines et nationalités qui nous donnaient toutes les deux envies. C'est comme ça que Danielle et moi, on a commencé à chercher après un premier bout de chou...
***
Musique ; Army - Ellie Goulding
NDA ; Bonjour ! Comment allez-vous ?
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