coming like a hurricane.
L'avantage d'être à l'hôpital, c'est que tout le monde a une sale tête là-bas. Leur état n'a rien à voir avec ce qu'on peut voir dans la plupart des films. Ils sont tous plus ou moins pâles, plus ou moins fatigués. Chez certains, ça saute plus aux yeux que chez d'autres, mais il n'empêche que tout le monde est dans un sale état, et ça, ça aide à se sentir un peu moins minable. C'est triste, de se rassurer dans la misère des autres, mais c'est comme ça que ça marche, en tout cas pour Kihyun. Il a cette habitude de se comparer constamment aux autres pour chercher une sorte d'approbation de sa propre existence. Il arrivait même à se sentir supérieur ici, ce qui n'arrivait pas souvent. En général, il était le type qui ne parlait jamais, avait toujours des cernes énormes et arborait un air fermé et presque mélancolique. Ici, certes il était toujours comme ça, mais pas plus que les autres, et puis lui, il n'était pas dans un état aussi grave que certains des patients présents. Lui, il avait droit à ses vêtements et non pas au pyjama immonde de l'hôpital, lui, il pouvait tenir debout, il pouvait se balader librement. On lui demandait parfois ce qu'il foutait là tant il avait l'air en forme comparé à d'autres. Le truc positif avec lui, c'est que tout se passait à l'intérieur, il arrivait à le contrôler, et à ne pas se pourrir physiquement.
Enfin, au début, il pensait que c'était positif. Que c'était sa force. Le truc, c'est que Changkyun est soudainement apparu dans sa vie. Changkyun, il était assez unique. Il souriait tout le temps, mais vraiment tout le temps. Et le plus âgé n'était pas vraiment habitué à ça, surtout ici. Son cadet semblait tout le temps heureux, il s'émerveillait de tout, était reconnaissant pour absolument tout. Il était reconnaissant d'être en vie, il était reconnaissant que les gens autour de lui soient en vie, il était reconnaissant d'avoir accès à des soins, il était reconnaissant de tout. Et surtout, il était constamment sur le dos de Kihyun. Dans le réfectoire, il venait toujours prendre la place à côté de la sienne. Parfois, il le trouvait assit dans le couloir, pas loin de la porte de sa chambre, et il le soupçonnait de l'attendre. S'il devait être honnête, il ne l'appréciait pas tant que ça, ce Changkyun. Quelque chose chez lui l'agaçait. Cette joie de vivre l'insupportait, lui qui s'était habitué à vivre dans l'obscurité. Et puis surtout, Changkyun, il était mal en point lui.
C'était ce qui l'agaçait aussi. Que Changkyun agisse ainsi alors qu'il était clairement dans un sale état. Chaque jour, il le voyait se traîner dans les couloirs, se noyer dans les pyjamas de l'hôpital bien trop grand pour son corps frêle, s'asseoir dès qu'il en avait l'occasion, passer le repas à parler sans avaler le moindre aliment. Et il n'aurait su se l'expliquer, mais ça l'agaçait. Il avait ce sentiment que le garçon se foutait presque de sa gueule, comme s'il lui mentait. Ce qui n'avait aucun sens, mais honnêtement, l'esprit de Kihyun avait toujours été un grand mystère.
Alors, sans le moindre ménagement, il le repoussait toujours, partant parfois alors que Changkyun était au milieu d'une phrase, en train de lui raconter une quelconque histoire. Il ne l'écoutait pas, tout simplement. Il ne lui accordait pas vraiment d'attention. Après tout, tout le monde l'aimait à ce gamin, alors il ne comprenait pas vraiment ce besoin qu'il avait de tout le temps être avec lui, de venir le voir dès que Kihyun quittait -enfin- sa chambre. Chose qu'il faisait assez rarement. Oui mais voilà, il avait beau être totalement indifférent à la présence de Changkyun, celui-ci n'en démordait pas, jamais. Il était toujours là, toujours à venir lui parler, lui demander comment il allait.
-Tu aimes les enfants Kihyun ?
-Hm.
-Moi j'adore les enfants. Quand je reprendrais mes études, je me lancerais dans cette voix je pense, j'aimerais être professeur en école maternelle, ça fait un moment que j'y réfléchis.
-Ah.
-Je trouve qu'ils sont tellement purs, les enfants. A chaque fois que j'en vois un, mon cœur se gonfle de bonheur. Ils sont plein d'espoir et de bonté, c'est vraiment beau à voir. J'espère que je pourrais avoir des enfants plus tard. J'espère que je pourrais être un bon père...
Sa voix s'était un peu fanée sur la fin. Les yeux de Kihyun quittèrent alors quelques instants son téléphone portable pour jeter un coup d'oeil discret à Changkyun, qui fixait ses mains sur la table avec un air triste. Puis en quelques secondes, un sourire reprit place sur son visage et, avec un grognement de frustration, le plus âgé baissa de nouveau le regard pour se concentrer sur le message qu'il rédigeait à l'intention de sa sœur, se plaignant comme d'habitude de la présence bruyante de Changkyun à ses côtés. Et pourtant, il écoutait bel et bien chaque mot, chaque confession.
-Mais avant, je veux trouver quelqu'un de bien. De vraiment bien. Je veux pas faire des enfants pour faire des enfants, c'est débile, je veux faire des enfants pour les rendre heureux. Je veux qu'ils se sentent aimés et chéris. C'est le plus important, tu crois pas ?
-Hm.
-Je dois t'avouer que j'ai toujours voulu avoir une fille. J'aime tous les enfants, évidemment, mais depuis que cette petite au parc m'a offert une fleur en m'expliquant que c'était parce qu'elle me trouvait beau, je sais pas... j'ai juste vraiment envie d'avoir des enfants et de les faire sourire comme elle m'a souri. Et toi alors, t'en veux combien, des enfants ?
-Je déteste les gosses.
Et sous le regard un peu déçu de Changkyun qu'il ignora soigneusement, tout comme il ignora la pointe du culpabilité qui traversa sa poitrine, il se leva du banc et retourna à l'intérieur, prenant directement la direction de sa chambre. Et c'était toujours comme ça. Quoi qu'il arrive, il restait quelques minutes dehors, pour prendre un peu l'air, il restait concentré sur son téléphone pendant que le plus jeune lui parlait, pour en général parler à sa sœur pour se plaindre comme il savait si bien le faire, et puis il retournait à l'intérieur en coupant court au discours passionné de Changkyun, qui avait toujours l'air d'un pauvre chien battu quand il le laissait. Et pour rien au monde il ne l'admettrait, mais parfois, ça lui faisait réellement un pincement au cœur, de l'abandonner et d'être aussi désagréable avec lui, mais il ne pouvait pas s'en empêcher.
Le fait est qu'il ne pouvait laisser Changkyun entrer dans sa vie. Parce que, tout le monde le savait, le garçon était condamné. Personne ne savait exactement combien de temps ça prendrait, mais Changkyun, il était en fin de vie. Et cet idiot lui parlait toujours d'avenir, dès qu'il en avait l'occasion, alors qu'il était le premier à savoir qu'il n'en aurait pas, que c'était fini pour lui, qu'il ne sortirait jamais de ce trou, contrairement à Kihyun. Et quelque part, il ne comprenait pas, c'était ce qui l'avait poussé à se fermer autant. Parce que s'il commençait à chercher de la justice dans cette histoire, et dans le monde en général, il deviendrait certainement complètement fou. Alors il laissait couler, et il ignorait, c'était la meilleure solution, pour lui, parce qu'il fallait qu'il soit égoïste pour s'en sortir, il n'avait pas d'autre choix.
Mais il le voyait. Il ne pouvait s'empêcher de le voir et d'avoir cette image de lui marqué au fer blanc dans son esprit. Changkyun, il était affreusement maigre. Quand on regardait ses jambes, on se demandait comment il parvenait à soutenir le reste de son corps. Il n'en était franchement pas fier, mais il se souvenait de la première fois où il l'avait vu arriver avec ce tube relié à son nez qui passait sur sa joue creuse, il se souvenait avoir eu peur. Sans vraiment savoir de quoi il avait peur exactement. Juste un sentiment de peur l'avait traversé, comme un frisson. Parce que Changkyun, il faisait vraiment peur à voir. Il n'était pas juste un peu maigre, non, il avait littéralement la peau sur les os. Quand il lui avait tendu la main pour le saluer, il se souvenait avoir eu peur de le briser en serrant à peine trop fort. Et ce sourire. Ce sourire, il était encré en lui, et ça aussi, ça lui faisait peur. Il ne voulait pas, mais il n'arrêtait pas d'y penser.
Une main sur son épaule le fit brusquement revenir à la réalité. Il détestait partir aussi loin dans ses pensées, il détestait s'investir dans quoi que ce soit, et là, il s'investissait beaucoup trop. Cette rage qui commençait à naître dans son ventre, il l'identifiait très bien, il savait parfaitement qu'elle était dû au fait que Kihyun commençait à repenser à ces conneries de justice et surtout d'injustice. Et il n'en voulait pas, il ne voulait plus ressentir tous ces sentiments si forts et si dévorants, il les avait abandonné depuis longtemps, ce n'était pas pour que cet idiot ravive tout.
-Kihyun ? Tout va bien ?
-Oui, oui, désolé.
-C'est votre tour pour le traitement, venez.
L'infirmier retira sa main puis le guida vers la salle de soin, où il s'installa sur le fauteuil, attendant qu'on lui tende ses cachets. Il les avala avant même qu'on lui donne un verre d'eau et se releva, le remerciant brièvement avant de sortir et de se diriger vers le réfectoire. Comme d'habitude, Changkyun l'attendait près de la porte, un large sourire étirant ses lèvres pâles. Très pâles. Trop pâles. Kihyun les fixa d'ailleurs quelques instants avant de soupirer et d'entrer pour se diriger vers l'une des tables, ne faisant même pas attention au plus jeune qui s'installait à ses côtés et commençait déjà à lui raconter avec enthousiasme que sa mère l'avait appelé pour lui dire qu'elle lui rendrait visite. Kihyun lutta alors contre l'envie d'esquisser un petit sourire. Il savait combien Changkyun aimait sa mère. Mais il ne voulait pas être heureux pour lui, il voulait n'en avoir rien à faire. Personne ne venait le voir à lui après tout, même sa sœur habitait trop loin pour venir, alors il avait bien le droit de faire la gueule, non ?
Et comme d'habitude, Changkyun ne toucha pas à son assiette, en offrit même le contenu à l'un des jeunes hommes qui s'était installé à la même table qu'eux. Et Kihyun avait lancé un regard mauvais à cet idiot quand il avait accepté sans même demander au plus jeune s'il ne voulait pas au moins en garder un petit peu. Évidemment, il savait que Changkyun aurait répondu non, mais le fait que l'autre ne s'en soucie même pas, ça l'agaçait.
Son sang se glaça, et il secoua la tête. Non, il ne devait pas se faire de souci pour Changkyun. Il devait se soucier de lui-même, de ses problèmes, et uniquement de ça. Il n'avait déjà pas assez d'énergie pour se tirer hors du lit le matin, alors il n'allait pas en dépenser à s'occuper de quelqu'un d'autre. Tout le long du repas, il ignora royalement son voisin de table qui animait à lui tout seul toute la pièce. Pourtant, peu étaient ceux qui parlaient, après tout, tout le monde avait d'assez grosses difficultés ici. Mais Changkyun, il fallait presque le faire taire. Il complimentait la coiffure d'une fille à une autre table, il offrait sa nourriture à qui la voudrait malgré les règles qui lui interdisait normalement de partager, il parlait de sa mère à un infirmier qui était installé près de leur table, et puis il parlait à Kihyun. Alors par moment, il s'adressait à quelqu'un d'autre, mais il revenait toujours vers lui. Honnêtement, le plus âgé ne savait plus quoi faire pour se débarrasser de ce pot de colle.
Comme à chaque fois après le repas de midi, les soignants offrirent le café à ceux qui le voulaient. Et comme à chaque fois, Kihyun était celui qui avait besoin de se démarquer et d'embêter tout le monde en demandant un thé. Mais on le lui servait quand même, plus à cause du regard suppliant de Changkyun qui appuyait sa demande que pour faire plaisir au râleur de service. Au fond, Kihyun, il les amusait. Mais il fallait bien avouer que parfois, certains avaient du mal à supporter son sale caractère. Personne ne comprenait l'intérêt que Changkyun lui portait, mais ce dernier n'avait pas besoin que qui que ce soit comprenne. Il était heureux comme ça, à passer son temps avec son aîné.
Changkyun, il donnait tout ce qu'il avait, sans rien garder pour lui. Il avait peur de la solitude, alors il s'assurait que les plus solitaires ne se sentent pas trop seuls. Il avait peur des aiguilles, alors quand on faisait une prise de sang à l'un des autres patients, il était toujours derrière la porte, à presque crier pour raconter ses blagues et distraire ceux qu'il considérait comme ses amis. Il avait peur de souffrir, alors il faisait en sorte de faire apparaître un sourire sur chaque visage qu'il croisait. Il avait peur d'être abandonné, alors il s'accrochait à chaque personne qu'il rencontrait. Il avait peur de mourir, alors il s'assurait que tout le monde reste en bonne santé. Et il avait beau essayer si fort, Changkyun, il était malheureux. Il trouvait toujours quelque chose à redire sur son comportement pourtant irréprochable, sur son poids pourtant affreusement bas, sur son esprit pourtant très ouvert.
Et Kihyun, il essayait d'ignorer tout ça, mais le soir, quand il se couchait seul dans le noir, tout revenait.Tout ces moments où il voyait le plus jeune se déposséder de tout et offrir tout ce qu'il avait aux gens autour de lui, tout ces moments aussi où il voyait son visage se fermer durant les discussions de groupe sur les sujets les plus sensibles, ou quand on lui faisait remarquer qu'il n'avait définitivement pas assez mangé. Et la vérité qu'il n'admettra jamais à qui que ce soit et dont seul les infirmiers de nuit qui font leur ronde et passent dans les chambres toutes les deux heures sont au courant, c'est que tous les soirs, sans exception, des larmes brûlantes glissaient au coin de ses yeux pour atterrir sur l'oreiller. Et parfois, l'un des soignants lui demandait s'il voulait un traitement pour se calmer, s'il voulait discuter. Mais il ne répondait jamais et il se tournait dans l'autre sens, attendant que le sommeil l'emporte enfin et le soulage de ce poids que Changkyun avait involontairement mit sur ses épaules.
Plus le temps passait, plus il le détestait. Plus le temps passait, plus il l'aimait. L'un allait avec l'autre. Parce qu'il savait qu'il ne sortirait pas indemne de cette histoire. Il essayait de le tenir hors de sa vie autant que Changkyun essayait de s'en sortir, et on peut dire que pour tous les deux, les résultats n'étaient pas très concluants. Au fil des jours, il sentait ses mains devenir de plus en plus moites, son cœur battre de plus en plus vite, le sang lui monter de plus en plus aux joues à chaque fois qu'il sortait de sa chambre pour croiser le regard de Changkyun. Il aurait pu jurer que le jour où il lui avait attrapé les mains, sous l'enthousiasme alors qu'il lui expliquait que sa mère avait adopté un nouveau chien, son cœur s'était arrêté quelques instants. Brusquement, il avait retiré ses mains et il était parti, la tête basse. Et tout le long du repas après ça, Changkyun n'avait cessé de s'excuser. Ce qui rendait Kihyun encore plus mal, puisque c'était lui qui gâchait toujours tout, et pourtant c'était celui qui avait conquis son cœur de pierre qui s'excusait toujours.
Le jour où il a enfin pu goûter à ses lèvres, il a passé la nuit après ça à se maudire. Alors qu'il était sorti boire sa tisane du soir dehors, sur l'un des bancs du jardin, Changkyun l'avait encore rejoint. Parfois, il se demandait si le plus jeune avait des sortes de caméras pour repérer où se trouver son aîné. Et il ne l'avait pas écouté. Il n'avait pas enregistré un seul mot, il entendait juste le son de sa voix, sans comprendre ce qu'il disait. Et il était soudainement très conscient de la présence de Changkyun. Il sentait sa hanche osseuse appuyer contre sa propre hanche, leurs cuisses se frôler, il sentait les petits courants d'air que les mouvements de mains du brun envoyaient dans sa direction quand il parlait, il sentait son odeur l'enivrer, et puis il le voyait. Il le fixait sans même s'en rendre compte, il voyait son sourire qui creusait un peu plus ses joues. Il voyait son nez de profil, il avait envie de retracer sa ligne du bout des doigts. Il voyait ses cils battre et il aurait pu jurer que c'était si beau que son cœur s'était accordé de lui-même à ces battements. Il voyait sa peau qui avait l'air si douce, mais si fragile, comme si elle aurait pu se déchirer au premier contact. Il voyait ses cheveux bruns, presque noirs, qui tombaient de plus en plus au fil des jours et qui semblaient encore plus sombres avec le soleil qui se couchait doucement. Et il voyait ses lèvres. Ses lèvres tellement pâles, qui avaient l'air d'avoir tellement froid. Il était si beau. Il en avait entendu certains commenter son apparence squelettique et combien ils trouvaient ça repoussant. Il ne comprenait pas. Bien sûr, ce n'était certainement pas sa maigreur maladive qui faisait sa beauté, mais comment pouvaient-ils manquer ce charme, cette aura lumineuse qu'il dégageait même dans la nuit ?
Alors quand Changkyun termina sa phrase et se tourna vers Kihyun dans l'espoir d'une réponse qu'il n'obtenait pourtant quasiment jamais, celui-ci rapprocha lentement son visage. Tout doucement, sans se presser, savourant le moment. Il sentit le souffle de Changkyun se couper brusquement et tout le corps de son cadet se figer. Mais il ne recula pas, alors Kihyun se pencha un peu plus et leurs lèvres se trouvèrent enfin. Et il avait eu tord, parce que les lèvres de Changkyun, elles n'était pas froides, elles étaient tièdes, et accueillantes, c'était comme un retour à la maison. C'était un baiser simple, doux, tendre. Ni pressé, ni fougueux. Juste un baiser presque timide, mais qui libérait tellement leurs cœurs.
Ils avaient passé le reste de la soirée à déposer de légers baisers sur les lèvres de l'autre, sur leurs doigts entrelacés, jusqu'à ce que l'heure de fermer le jardin arrive. Et ce soir là, assit par terre dans sa chambre, incapable de pleurer, Kihyun avait accepté le traitement que lui avait proposé l'infirmier de nuit. Il lui en avait même fallu une deuxième dose quelques heures plus tard, ce qui l'avait tellement endormi qu'il cru en se réveillant le lendemain qu'il avait tout imaginé. Il eut bien vite la preuve que ce n'était pas le cas quand une paire de lèvres rencontra les siennes alors qu'il sortait à peine de sa chambre, attisant quelques rires d'autres patients. Il leur lança un regard noir, assez peu convainquant vu la couleur de ses joues. Mais les rires n'étaient pas moqueurs, ni méchants. Juste un peur surpris et attendris.
Et tout se déroulait comme avant, rien ne changeait. Changkyun était toujours le seul à parler et Kihyun faisait toujours semblant de ne pas l'écouter. Seulement maintenant, le plus jeune était persuadé qu'il était écouté, ce qui ne faisait que redoubler son enthousiasme. Et comme avant, tout le monde se demandait ce que ces deux là faisaient ensemble, comment ils se supportaient en étant si différents. Mais peu leur importait, ça marchait. De temps en temps, ils échangeaient quelques baisers, c'était la seule chose qui changeait vraiment.
Ce qui devait arriver arriva un mardi. Kihyun s'était levé sans trouver Changkyun devant sa porte. Et il ne l'avait pas cherché, parce qu'au fond, il savait. Il savait qu'il n'y avait qu'une seule explication pour que le plus jeune ne soit pas là, à l'attendre. Alors il n'avait pas parlé, il n'avait pas mangé, il errait tout simplement. Et les infirmiers ne l'avaient pas forcé. Parce qu'ils savaient eux aussi. Ils savaient que Kihyun n'était pas un idiot, ne l'avait jamais été. Ils savaient qu'il avait comprit.
Et il fut le seul à ne pas pleurer quand ils furent tous réunis dans le réfectoire et que la directrice du service leur annonça la nouvelle. Changkyun n'avait pas survécu à cette nuit. Son cœur avait lâché.
-Si vous voulez parler, bien entendu vous savez que toute l'équipe est là pour vous.
Et l'équipe a effectivement été là tout l'après-midi, pour tous les patients. Qui n'était pas attaché à Changkyun ? Tout le monde l'aimait. Il était le soleil du service, et le soleil s'était éteint, tout était si sombre maintenant, si froid. Personne n'osait y croire. Personne à part Kihyun. Parler ? À quoi bon ? Il l'avait dit, dès le début, que cette histoire le détruirait. Que Changkyun était condamné.
Et personne n'avait rien pu faire. Personne n'avait pu l'arrêter quand il avait débarqué dans la chambre de Changkyun encore imbibée de sa présence, personne n'avait pu l'arrêter quand il avait tout jeté par terre, quand il s'était mit à hurler à la mort, à insulter celui qu'il aimait de tous les noms. Personne n'aurait pu le calmer, parce que sa haine n'avait d'égal que son amour. Il l'aimait si fort qu'il le haïssait comme personne. Bien sûr qu'il lui en voulait. C'était lui qui s'était accroché à lui. Kihyun, il voulait pas de ce mec brisé dans sa vie, il voulait se protéger. Mais le plus jeune ne l'avait pas laissé faire et voilà où il en était.
Il s'est enfui, ce soir là. Et personne ne l'a jamais revu. Encore une fois, ils savaient. Ils savaient tous où il était. Ils savaient tous qu'ils ne le reverraient jamais. Et que c'était pour le mieux.
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