Chapitre 11: Thys prend le contrôle
Le jeune Ether camoufla un nouveau haut-le-cœur et essuya d'une main les gouttelettes de sueur qui s'installaient sur son front. Il se félicita de maîtriser la situation et décida qu'il allait agir. Il prit Cid à part :
— C'est une Niemens !
— Quoi ? C'est quoi déjà une Niemens ? Une méchante ?
La remarque fit sourire l'adolescent au regard vairon.
— Oui, les Niemens font partie d'une des lignées d'Indesiratas. Mais, ne crains rien, elle ne m'a pas senti ! Je vais essayer d'en savoir plus.
Et le garçon s'approcha de Mariette. Il tournicota autour de la jeune femme sans savoir comment l'aborder. Celle-ci s'intéressait à une œuvre.
— Pas fameuse, cette toile avec ce mélange de couleurs et ses disques scindés ! Ça donne le tournis ! commenta Thys provocateur.
— Comment, jeune homme, mais vous ne pouvez pas parler de ce chef d'œuvre ainsi ! Vous êtes totalement ignare ! Sachez que ce tableau a une valeur inestimable...
Quand elle parlait, le bout de son nez dépourvu de cartilage oscillait légèrement et un petit chuintement dû, sans doute à une narine bouchée, accompagnait chacune de ses phrases. Thys resta un moment fasciné par le phénomène puis reprit son rôle de cancre.
— Ben, moi je n'arrive pas à comprendre que l'on puisse passer des heures à regarder ces tableaux. C'est vide, inutile.
— Mais non, voyons ! Chaque tableau porte un message ! Voyez celui-ci par exemple, l'artiste a voulu exprimer l'harmonie picturale, la juxtaposition des couleurs donne une sensation de mouvement, on s'évade...
Le jeune Ether n'écoutait pas la voix nasillarde qui bourdonnait dans la grande salle, mais se concentrait sur l'être maléfique qui lui faisait face ! Ainsi, elle ne se doutait de rien. Que c'était bon d'être dans le rôle de celui qui savait ! Il avait devant lui une Niemens inoffensive qui ne s'imaginait pas qu'elle discutait tranquillement avec un Ether. Il eut l'envie subite de la voir souffrir. Il jeta un regard circulaire dans la salle. Un groupe de visiteurs, visiblement des retraités s'étaient rassemblés devant leur guide qu'ils écoutaient sagement. Théo, toujours emballé, discutait encore avec Danny, la stagiaire. Et Cid faisait mine de contempler un tableau en serrant les poings. Stressé, il jetait d'incessants coups d'œil suppliants à son ami.
Thys prit une longue inspiration intérieure tout en souriant faussement à la femme qui lui faisait face. Elle crut qu'elle le gagnait à sa cause et poursuivit de plus belle :
— Chacune de ces œuvres se vend une petite fortune !
Et voilà, encore une histoire d'argent ! On y était. L'Indesirata montrait sa vraie nature. Tout était lié à l'argent, au profit ! Thys laissa monter la colère. Il se sentait bien, il inspirait sa puissance et exultait face à l'ignorance de sa proie.
Cid s'était rapproché discrètement, il sentait que quelque chose se tramait. Il avait peur de voir son ami partir en poussière ou recevoir un feu d'artifice d'énergie maléfique en pleine figure. Mais le jeune Ether s'enhardissait. Il se sentait habité par une force nouvelle. Il laissa cette Mariette maigrichonne parler et se préparait à l'assaillir de sa haine.
Un grésillement discret prit naissance au bas de son dos, remonta le long de sa colonne lui procurant un fabuleux frisson de jouissance. Ses mains chauffèrent. Son Ingeni le démangeait et commençait à luire sous sa mèche. Il était prêt, il ne pouvait plus attendre. Il fallait qu'il projette sa rancœur. Elle ne se doutait de rien. Elle lui tournait le dos pour admirer un tableau.
Et c'est quand Cid effleura l'épaule de Thys pour l'enjoindre à quitter ces lieux dangereux que l'énergie fusa. Les cheveux de Cid se hérissèrent, il ressentit une sorte de décharge électrique et recula aussitôt. Au même instant, Mariette couina, se prit la tête à deux mains et s'agita bizarrement. Elle respirait fort, serrait les poings et se dandinait en passant nerveusement d'un pied à l'autre. Thys eut l'impression que la salle prenait vie. Les tableaux lui offraient la force de leur couleur et la vivacité de leurs traits en mouvement. Il savourait chaque instant. Il était le tout puissant. Mariette souffrait et il pouvait palper toute cette douleur qu'il lui causait. Quel délice ! La jeune femme se tourna vers lui, le regard perdu.
Elle semblait implorer de l'aide. Le sang jaillissait de ses narines par vague. Deux filets rouges gluants se balançaient à la base de son nez, sans se décider à tomber sur le sol. Son beau chemisier blanc était couvert de taches circulaires et de projections sanglantes. On pouvait curieusement y trouver une certaine ressemblance avec les œuvres de Delaunay.
Comme il ne voulait pas éveiller les soupçons, Thys cessa son attaque et se précipita vers la stagiaire. Il avait en mémoire la fausse gentillesse de Laëtitia Yessel, la Milvuit, qui l'avait piégé en lui apportant son aide lors de son malaise pendant la fête organisée pour Briac. Il prit donc une voix compatissante et se montra inquiet.
— Mademoiselle, mademoiselle, que vous arrive-t-il ? s'étrangla-t-il d'un ton faussement catastrophé.
— Je... Je ne sais pas ! Aidez-moi !
— Oui, oui ! À l'aide, elle se sent mal !
Aussitôt, les curieux encerclèrent Mariette, mais stupéfaits par la quantité de sang qui recouvrait la jeune femme, beaucoup hésitèrent à lui porter secours. Ce fut Théo finalement qui prit les premières initiatives. Il la fit asseoir et pratiqua un point de compression au-dessus de chaque narine pour calmer l'hémorragie comme il l'avait appris lors de ses stages de premiers secours pour la spéléo. Elle se sentit rapidement mieux. Évidemment, Thys avait cessé son action destructrice. On lui distribua des mouchoirs en papier et elle usa plusieurs paquets pour se redonner une certaine contenance. Une tache rouge de sang séché persistait sur sa pommette droite et tous les badauds avaient envie de l'essuyer.
Toujours assise, Mariette observa ceux qui l'entouraient. On aurait dit qu'elle cherchait quelque chose, sans doute l'auteur de son malaise. Thys essaya de prendre un visage inquiet et évita le regard de la stagiaire qui s'attardait sur lui.
Monsieur Blanc, alerté par le responsable du musée, arriva sur les lieux de l'incident dans tous ses états. Le jeune prof visiblement rassuré de ne pas voir un de ses élèves mourant proposa à Mariette de se reposer tranquillement dans le bus pendant l'heure suivante. Il ne put cependant s'empêcher de commenter l'incident :
— Mademoiselle, vous avez pris un coup sur le nez pour saigner autant ?
— Non, non, c'est arrivé soudainement, une sorte d'attaque par surprise, mais ne vous inquiétez pas, je vais prendre le dessus.
Seul, Thys pouvait comprendre le sens caché de ces paroles et il eut la désagréable sensation que Mariette le regardait quand elle prononça ces derniers mots.
Monsieur Blanc rassembla ses élèves dans la galerie d'Art entièrement consacrée aux futures artistes et chacun put s'exercer à copier une œuvre de Delaunay. Mélia s'échappa momentanément de son trio pour rejoindre son frère.
— Mon Ingeni s'est mis à chauffer tout à l'heure, c'est curieux ! lui dit-elle à mi-voix.
— Ouais, le mien aussi, ne t'inquiète pas, c'est sous contrôle.
— Ah ! Explique-toi, ça a un rapport avec ce qui est arrivé à la stagiaire ? demanda-t-elle soudain, suspicieuse.
— Ouais, c'est moi !
— Quoi, c'est toi ! Je te parle des saignements de Mariette là !
— C'est grâce à moi qu'elle a saigné !
— Tu plaisantes, tu ne l'as pas boxée quand même ! Qu'est-ce qui t'arrive, qu'as-tu fait ?
Mélia contemplait son frère, complètement ahurie par les propos de celui-ci. Cid qui n'avait pas ses oreilles dans sa poche s'immisça dans la conversation :
— Ce kamikaze a attaqué une niaise Mens !
— Non, mais vous débloquez tous les deux !
— C'était une Niemens, je l'ai sentie et j'ai réussi discrètement à l'atteindre ! clama fièrement Thys.
— Oh ! T'es sûr ?
— Oui, tu as pas vu tout le sang ?
— Non, je veux dire, tu es sûre qu'elle ne sait pas que c'est toi qui as fait ça ?
Thys sourit pour rassurer sa sœur, mais celle-ci garda le front froncé. Ils ne purent pas continuer cette conversation, Monsieur Blanc regroupait ses élèves pour leur proposer de choisir un tableau à reproduire. Il espérait éveiller en chacun, le génie qui somnolait.
Théo produisit une œuvre remarquable qui époustoufla les profs, Thys eut moins de succès.
— Hé ! Monsieur ! Vous avez vu, Thys a reproduit les taches du chemisier de Mariette ! le railla Julien.
En quelque sorte, c'était vrai, le jeune Ether avait revécu une dizaine de fois son attaque en mémoire et s'était plus concentré sur Mariette que sur le tableau qu'il devait représenter. Mélia s'empressa de détourner l'attention du prof pour demander un avis sur son œuvre qui était plutôt réussie.
Pour le trajet du retour, Cid emmena Thys tout au fond du bus, le plus loin possible de Mariette. Mélia décida de s'asseoir à proximité de son frère. Mariette passa dans les rangs faisant mine de compter les élèves, mais elle prenait beaucoup de temps, ses petits yeux épiaient les faits et gestes de chacun.
Thys, dont l'estomac se contractait de nouveau, réussit malgré tout à lui sourire et lui demanda même de ses nouvelles. Elle lui certifia qu'elle allait mieux et continua son inspection sans s'arrêter sur Mélia, mais elle parut plisser les yeux et s'interroger face à Cid. Puis, elle s'assit devant et sortit un petit miroir. Tout en faisant mine de se maquiller, elle espionnait chaque enfant. Elle était sur ses gardes.
— T'es un grand malade toi, finit par éclater Cid, tu avais besoin de réveiller le dragon !
— Oh ! Calme-toi vieux ! Tu ne risques rien !
— Ouais tu n'as pas vu comme elle m'a regardée. Et puis tu as pas assez d'ennui comme ça pour jouer les super héros !
— Il fallait que je me venge ! Tu n'as pas vécu ce que j'ai vécu, tu ne peux pas me juger !
— Je te signale que ce n'est pas elle qui t'a fait souffrir ou qui a attaqué ta famille !
— C'est une Niemens, elle fait partie des pires humains et...
— Chut, grogna Mélia en plaçant son visage furibond entre les deux sièges arrière. Vous voulez informer tout le bus ou quoi !
Bougon, ne se sentant pas reconnu dans son exploit, Thys ne prononça plus un mot de tout le trajet qui se passa d'ailleurs sans encombre.
A la maison, les jumeaux eurent la surprise de trouver Téodor Lux confortablement installé dans le fauteuil en cuir du salon. Plix était lové sur ses genoux et Electric, pour une fois paisible, s'était allongé sur les pieds du Maître, faisant office de couverture chauffante. Téodor conversait avec Anthony, Sylvie, Nadine et Charles à propos de leur recherche de logement et ne leva qu'une main discrète pour saluer l'arrivée des enfants. Le maître Arcan, tel le messie, apportait des solutions au problème existentiel des Ano. Dès le lendemain, la famille pourrait emménager dans un petit appartement du centre-ville. Le logement appartenait à une connaissance de Marceline Chanfrain. Le propriétaire ne risquait aucunes représailles de la part des Indesiratas puisque qu'en tant qu'ethnologue, il étudiait les groupes indigènes de la forêt vierge et était totalement impossible à localiser.
La joie d'Anthony et Sylvie était modérée. Certes, ils avaient un logement, mais perdaient le confort et le réconfort de leur maison.
Le Maître accepta les remerciements proférés, puis se leva sans considération pour les deux animaux qui somnolaient contre lui. Plix miaula piteusement et arqua son dos pour s'étirer et Electric se secoua en faisant tinter l'horrible clochette accrocher à son collier. Mais Maître Lux ne s'apprêtait pas à partir, il avait simplement besoin de prendre de la hauteur pour s'adresser à ses interlocuteurs. Il rejeta en arrière une mèche qui s'emmêlait dans sa moustache bien fournie et se racla la gorge. Il prit une voix plus rauque tout à coup.
— Mes amis, l'heure est grave. Toutes les zones d'Ethérie sont en émoi. La Faille progresse. Ses effets sont déstabilisants : de moins en moins de Prudens sont formés, il n'y a eu aucun nouveau passage d'Oritis depuis celui de Thys. Plus inquiétant encore, en Ethérie il y a de plus en plus de zones mortes, des passages se ferment, perdent leur vie, des nœuds d'entrée disparaissent.
— Que pouvons-nous faire, Maître ? demanda Anthony.
Sylvie, elle, s'était pris la tête entre les mains et affichait tout le désespoir qui l'accablait ces derniers jours. Charles maugréait dans son coin tandis que Nadine essayait de décoder les informations d'un monde qu'elle ne connaissait pas.
Pensif, Téodor ne répondit pas immédiatement. Il regardait Mélia. Ses yeux pour une fois n'étaient pas incisifs, mais paraissaient voilés d'un reste de brume venue l'Ethérie. Son silence dura longtemps. Electric eut le temps de parcourir une dizaine de fois le salon en tous sens et d'agacer tout le monde avec les petits tintements guillerets de son grelot. Sylvie, n'y tenant plus, envoya l'animal s'ébrouer dehors. Le chien sorti, Téodor retroussa les babines dans un sourire triste et énonça comme une évidence pour lui-même :
— L'humanité court à sa perte. L'actualité du monde n'est qu'une série de désillusions, de catastrophes, de progrès mal dirigés. Les êtres humains ont peur de l'avenir. Ils s'angoissent pour leurs enfants, mais continuent à s'enliser dans la mauvaise voie. On perd toutes nos valeurs. On oublie l'essentiel pour se mettre au service de l'argent, de la gloire. On ne doit pas répéter l'histoire des Ethers Originels, on doit redresser la barre avant la Catastrophe. Il est peut-être déjà trop tard.
Le maître Arcan se plaça alors face à Mélia, lui posa les deux mains sur les épaules. Un grésillement diffus surprit la jeune fille. Son corps fut parcouru d'un frisson glacial à la hauteur de la détresse du Maître.
— Mélia, tu es Clairvoyante ! Tu es en ce moment notre seule bouffée d'air. Tu es le renouveau que l'on espérait pour changer le monde ! Je sais que je te demande beaucoup, mais il faut que tu te concentres, que tu cherches en toi les réponses. Les Ethers Originels n'ont pas pu empêcher la fin de leur civilisation, mais l'on sait qu'ils ont trouvé comment rétablir l'équilibre. Pour eux, il était trop tard, alors ils ont laissé une trace de leur savoir dans huit Cités pour d'éventuels survivants à l'origine d'une nouvelle civilisation. Leur mémoire s'est perdue, mais leur savoir se cache dans des ruines mal comprises quelque part sur notre planète. Mélia, tu détiens la clef de chacune de ses ruines, j'en suis sûr ! Cherche en toi pour nous guider.
— Maître, je désire vraiment vous aider, j'y mets toute ma volonté, mais je ne suis pas capable de contrôler mes rêves ainsi que mes bonds spatio-temporels.
— N'y mets pas ta volonté, au contraire lâche prise et laisse venir, sers-toi des méditations ! Je crois en toi !
Thys exaspéré par tant de sollicitude envers sa sœur attendait une interruption du flot de paroles pour essayer de se mettre en valeur. Il choisit le moment de pause durant lequel le maître insufflait sa volonté à son élève d'un regard bienveillant.
— Ben moi, en tout cas, je commence à débarrasser le monde de la vermine qui la recouvre.
— Que veux-tu dire ? s'inquiéta aussitôt Téodor.
Sylvie redressa la tête et scruta son fils, tandis que Charles et Anthony prirent un air intéressé.
— J'ai réussi à faire souffrir une Niemens aujourd'hui au musée !
Thys inconsciemment bombait le torse, la fierté se lisait aussi bien dans son regard étincelant que dans son port de tête soudain altier.
— Que racontes-tu ! tempêta le Maître en s'étouffant à moitié.
Le ton irrité de Téodor surprit le jeune Ether, pourtant, il poursuivit avec emphase :
— J'ai découvert qu'une des stagiaires d'Arts appliqués était une Niemens, je l'ai senti ! insista-t-il.
Personne ne lui sourit, alors il se dépêcha de continuer son histoire.
— J'ai feinté, je l'ai questionnée sur l'Art et quand je l'ai sentie à ma merci, je lui ai envoyé toute la haine que je portais. J'ai trouvé ça facile. Elle a souffert, vraiment ! Elle a saigné une mare. Mais je n'ai pas réussi à l'anéantir...
— Encore heureux, imbécile !
— Mais Maître, je vous parle d'une Niemens, une ennemie !
Thys commençait à paniquer face à Téodor Lux qui semblait soudain se cabrer. Jamais il n'avait vu le Maître avec un regard si noir. Des crocs semblaient bien pointer en dessous de sa moustache. Le petit homme lui paraissait une nouvelle fois gigantesque, prêt à l'avaler en une seule bouchée.
— Triple Niguedouille, mais qu'as-tu fait là !
— Je vous promets que je ne me suis pas fait repérer, hein, Mélia !
Un filet de voix geignarde s'échappait des lèvres tremblotantes de Thys, il avait besoin du soutien de sa sœur face à la furie du Maître. Mais Mélia grimaça sans rien n'oser dire. Sylvie était blême. Anthony avait posé une main apaisante sur l'épaule de Charles dont les yeux furibonds auraient très bien pu pétrifier le garçon. Téodor se rapprocha encore de Thys. Le souffle fade de la colère du Maître pénétrait les entrailles du jeune Prudens qui n'en menait pas large.
— Tu as attaqué une jeune femme juste pour le plaisir de la faire souffrir, juste pour ton propre contentement... C'est bien ça, âme de microbe ?
— Cette femme était une Indesirata, Maître !
Thys n'osait bouger un muscle, il parla comme un ventriloque face à un colosse de pierre prêt à l'écraser.
— Tu as fait souffrir sciemment une personne parce qu'elle appartient aux Indesiratas et cela te semble bien.
— Ben...
Thys ravala le « oui » qui lui brûlait la langue, il eut du mal à déglutir. Ce mot était plutôt indigeste.
— Écoute-moi bien Niguedouilleau, tu as agi comme une âme nocive ! Tu as pris plaisir à générer du mal. Tu as pris plaisir à contrôler plus faible que toi ! Tu ne vaux pas mieux que ces Indesiratas qui t'ont séquestré.
— Mais...
— Tais-toi ! Les Indesiratas ne sont pas tous des monstres. Ils ont tous les mêmes ambitions : parvenir à s'enrichir et contrôler ceux qui les entourent. Ils veulent profiter de toutes les ressources qui leur sont offertes pour prendre plus de pouvoir ou pour installer leur autorité, c'est dans leurs gènes. Ils sont inquiétants, arrogants, vicieux. Mais tous ne sont pas dangereux, tous ne sont pas prêts à ôter la vie de ceux qui les gênent. Certains même ne savent pas encore qu'ils font partie des âmes de la Terre et encore moins qu'ils se trouvent du mauvais côté. Parfois, ils vivent des situations extrêmes et en sortent grandis, leurs sens s'équilibrent. Rien n'est figé, comprends-tu !
Le garçon hocha la tête, il n'avait plus envie de s'exprimer. Sa salive séchait dans sa bouche qu'il gardait entrouverte d'étonnement. Mais le Maître n'en avait pas fini. Il n'avait pas encore assez abaissé sa proie.
— Quel être misérable peut faire souffrir un congénère juste pour le plaisir ! Réponds, allez, réponds !
— Je suis désolé, je ne recommencerai pas, Maître ! balbutia Thys, complètement anéanti.
— Oui désolé ! As-tu pris conscience au moins que tu t'es comporté comme un Indesirata ? Tu as joui de ta puissance. Tu as aimé contrôler. Cela t'a plu d'être le plus fort... Je suis déçu Thys, horriblement déçu...
Le garçon qui espérait la reconnaissance du Maître Arcan et de sa famille tombait de haut. Il voulait simplement son heure de gloire, une petite mise en lumière comme avait pu en profiter Mélia à diverses occasions depuis qu'ils avaient passé l'Oritis. Mais à la place de l'auréole, il était plongé dans une obscurité abjecte qui lui collerait sûrement longtemps à la peau. Il quitta silencieusement la pièce pour regagner sa chambre où il se mit à pleurer comme un bébé. Il avait verrouillé sa porte et enfilé son casque pour écouter la musique à fond afin de ne pas entendre toquer. Il savait que sa mère et sa sœur ne manqueraient pas de venir le consoler et c'était bien la dernière chose qu'il désirait. Il se sentait si minable et ce sentiment serait encore pire face à leur bonté.
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