Chapitre 2 Le Maître Arcan

À l'instant où Thys poussa la lourde porte d'entrée, il sentit bien que quelque chose d'anormal se passait. Était-ce ce silence plus pesant qu'à l'ordinaire ou cette odeur fade, à peine perceptible, qui lui titilla immédiatement les narines ?

Encore tout secoué par ce qu'il venait de vivre, il s'engouffra, méfiant, dans le hall désert. Inspection rapide. Rien d'inhabituel. La capeline blanche de sa sœur pendait sur le portemanteau mural en bois sculpté. L'horloge égrainait les secondes, s'apprêtant à carillonner seize heures. Deux ou trois mouches, ankylosées par la chaleur, s'ébrouaient sur le ficus assoiffé qui siégeait sur la commode rustique. Thys esquissa un sourire en secouant la tête. Il devenait complètement paranoïaque. Ces histoires d'Ethers et les signes étranges qu'il ressentait de plus en plus ébranlaient son assurance.

Alors qu'il s'apprêtait à monter les escaliers menant aux chambres, un chuchotement issu du salon interrompit son élan. Le garçon tressaillit et déglutit rapidement. Qui était-ce ? À cette heure-ci, seule Mélia, présence discrète, se reposait à l'étage sur sa couette douillette. Ses parents ne devaient pas rentrer avant 19 heures. Son père, ornithologue passionné, observait sans doute les traquets motteux avant leur départ pour un hivernage en Afrique. Sa mère passait un après-midi jardinage avec la veuve Durmand. Elle regagnait la demeure généralement à la nuit tombée, fière d'avoir aidé sa vieille voisine à gérer son potager. Quant à sa tante Nadine, elle avait prévu d'emmener Grand-père Ano au bord du Lac de la Creumière où il retrouvait ses copains pêcheurs pendant qu'elle profitait d'heures de shopping. Alors qui se trouvait dans le salon ?

Une sorte de rire granuleux retentit cette fois.

Thys, tendu à l'extrême, s'approcha prudemment de la porte. Mais le silence s'installa. Seul le cœur du garçon tambourinait dans ses oreilles. Immobile, à travers le tintamarre de son corps, il essayait de percevoir les sons inhabituels qui habitaient la maison. Pour la première fois, les lieux lui paraissaient hostiles, il se sentait épié par les murs et l'ombre des meubles était menaçante.

Le bruit qui émanait du salon n'était pas normal, d'autant plus que cette présence se voulait discrète. Deux murmures semblaient maintenant se répondre. Que se passait-il ici ?

Le cœur de Thys lui martelait le torse prolongeant son écho jusqu'à ses tempes. Les chuchotements s'arrêtèrent d'un coup, mais furent aussitôt remplacés par un frôlement feutré, comme une glissade de souris sur le parquet.

On trainait quelque chose ? Thys prit deux longues inspirations pour se donner du courage. Il devait en avoir le cœur net. Pour se rassurer, il saisit le parapluie noir de son père qui reposait gentiment dans un seau en métal argenté. L'arme était dérisoire et pas assez intimidante. Il chercha quelque chose de plus effrayant, capable de mettre en déroute des rodeurs. Mais les lieux ne cachaient rien de tel. Il finit par se rabattre sur une chaussure à talon aiguille de sa mère. Pointue, la chaussure, impressionnant le talon, certes, mais pas vraiment inquiétant.

Ainsi paré, il se rapprocha de la porte. Il posa sa main sur la poignée et marqua un arrêt. Il prit une grande inspiration. Mais la porte s'ouvrit toute seule, brutalement, laissant paraître un petit homme au regard perçant.

— Eh bien, le voilà ! lança l'inconnu en dégageant une rangée de dents massives.

Était-ce l'amorce d'un sourire ou s'apprêtait-il à mordre ? Thys se surprit à se poser cette curieuse question. Il faut dire que le petit homme qui lui faisait face était assez impressionnant avec ses cheveux noirs coupés au carré, parsemés de quatre longues mèches blanches bien réparties dans la masse. Son nez fin émergeait d'une moustache épaisse et soyeuse totalement blanche. Ses yeux verts avaient les pupilles anormalement dilatées. Il tendit à Thys une main démesurée par rapport au reste de son corps et lança haut et fort :

— Téodor Lux, Maître Arcan, initiateur des transformations de premier cycle et modulateur de l'Oritis.

Alors Thys lâcha discrètement le parapluie et cacha la chaussure dans son dos. La phrase résonnait encore dans le hall, et sembla même s'engouffrer dans l'escalier pour conquérir l'ensemble de la maison. Et tandis que le garçon éberlué essayait de mettre un sens sur ces paroles, l'étrange personnage lui prit la main, la serra fortement. Il fit ensuite pivoter Thys sur lui-même et lui apposa deux doigts durs sur la nuque. Le garçon se laissa faire. L'homme lui tâta alors vigoureusement les côtes. Cette fois, Thys se dégagea nerveusement et toisa l'individu qui lui faisait face. Mais sans se préoccuper de l'air bravache du jeune homme, l'énergumène lui plaça vivement une main sur le front et l'autre au creux du ventre puis il dit simplement :

— Ça va. Mais avance un peu, voyons. Il faut que je t'examine.

Son haleine était tiède et l'odeur curieusement fade. Thys était étourdi, déphasé. Il ouvrit la bouche, les yeux perdus, les bras ballants. Téodor Lux ne souriait pas. Ses petits yeux reptiliens scrutaient tour à tour les pupilles, la gorge, le torse du garçon. Toujours immobile, Thys avait l'impression de passer au scanner et de livrer l'intimité de ses entrailles.

— Hum ! La peau est pâle, s'exclama l'intrus. Un peu de muscles, mais il est encore frêle.

Thys se tassa sous la remarque, abasourdi et bien incapable de gérer la situation. L'examen apparemment achevé, l'étonnant bonhomme poussa le garçon au cœur du salon. Et là, il les vit tous. Ils étaient assis docilement dans le canapé en cuir fauve ou les fauteuils assortis. Ils semblaient poser pour une photo de famille. Il y avait ses parents, le sourire crispé. Tantine, les mains croisées sagement sur les genoux, grand-père Ano, le dos droit et même Mélia, pâle, quasi transparente, mais illuminée d'un sourire doux.

— Mais qu'est-ce que vous faites ? Qu'est-ce qu'il se passe ? réussit-il difficilement à articuler.

— Thys, mon chéri, viens t'asseoir avec nous ! Tu rentres tôt aujourd'hui.

Sa mère se redressa gracieusement et lui désigna un tabouret. Il avança comme un automate en fixant ses parents.

— Maman, qu'est-ce que vous faites tous ici ? Qu'est-ce qui se passe ? demanda-t-il une nouvelle fois, pris d'appréhension.

— Le jour de ton Oritis arrive ! lança la grosse voix de grand-père Ano. Le Maître Arcan nous fait l'honneur de sa visite, tu devrais le saluer correctement.

L'intonation était impérieuse. Grand-père Ano semblait offusqué par le comportement de son petit-fils. Ses yeux d'habitude bleu océan viraient au gris acier sous la contrariété. Thys reporta alors son attention sur le visiteur. C'était vraiment un curieux personnage. Il devait à peine mesurer un mètre cinquante, mais il était aussi impressionnant qu'un colosse. Il dégageait une aura particulière du genre « qui s'y frotte s'y pique ». Le garçon le salua timidement et bredouilla des excuses inintelligibles. Il s'assit sur le tabouret et attendit la suite des événements en silence.

Le Maître prit la parole d'une voix impérieuse :

— Jeune homme, le passage de ton Oritis approche, tu as dû sentir la puissance des signes ! Bientôt l'ouverture sur le plan Ethérique sera possible et tu pourras être initié. Tiens-toi sur le départ, car l'Appel peut être imminent.

Thys déglutit, muet. Tout cela le dépassait. Il avait l'impression de perdre contact avec la réalité et se trouvait incapable de réagir. Le Maître fit une moue dédaigneuse.

Tantine ne put résister à la mine décatie de son neveu :

— N'aie pas peur Thys ! La cérémonie de l'Oritis est un honneur, la mienne tarde à venir et tu sais que ça me désespère.

Le garçon reprit, peu à peu, contenance. Alors, on y était ! Le jour tant redouté arrivait ! Tout cela paraissait tellement irréel. Le sang affluait de nouveau dans ses pommettes et il retrouvait l'usage de ses sens et de la parole.

— Oui, oui, d'accord, je me tiens prêt, finit-il par balbutier. Il faut que je fasse quoi ?

Téodor Lux se racla la gorge, mais ne répondit pas. Et il détailla une nouvelle fois le jeune Ether. Il sembla un instant déconcerté par le regard du garçon. Thys avait les yeux vairons, l'œil droit d'un bleu pâle et le gauche vert tendre. Il dissimulait cette singularité en laissant une grande mèche de ses cheveux blonds, presque blancs, couvrir une partie de son œil vert. Le Maître plissa les lèvres, mais ne fit aucun commentaire. Il continua son inspection. Soudain son regard perçant se figea avec malice :

— Puis-je savoir ce que tu fais avec cette chaussure de femme à la main ?

— Je... ben... je... heu !

Thys rougit jusqu'à la pointe des oreilles. Il l'avait oubliée celle-là. Depuis le début, ses doigts maintenaient fermement la chaussure à talon, comme crispés sur une sorte de bouée de sauvetage. Quelle situation ridicule ! Il posa l'escarpin au pied du tabouret sans oser lever les yeux sur l'assemblée railleuse. Cependant les questions se bousculaient maintenant dans son esprit redevenu alerte. Que se passait-il vraiment le jour de l'Oritis ? Pourquoi sa tante n'avait-elle pas encore eu droit à cette célébration ? Comment comprenait-on que le moment était venu ? Qu'allait-il lui arriver ? Serait-ce dangereux ? Pourrait-il en parler à Cid après ?

Il cherchait en lui le courage de s'adresser au Maître Arcan, ne sachant par quelle question il allait commencer. Mais, son père intervint alors d'une voix sans appel.

— Thys, nous avons encore quelques points à régler avec le Maître Arcan. Peux-tu nous laisser et accompagner Mélia dans sa chambre ?

Submergé par ses interrogations, les pensées en ébullition, Thys prit machinalement le bras de sa sœur et la soutint dans son déplacement. En passant devant Téodor Lux, il sentit son regard le transpercer encore une fois et un frisson lui parcourut lentement l'échine, glaçant une à une chacune de ses vertèbres.

L'atmosphère de la chambre de Mélia était fraîche et paisible. C'était ce qu'il fallait à Thys pour retrouver tous ses esprits. Il eut besoin néanmoins de plusieurs minutes pour vraiment reprendre contact avec la réalité. Mélia l'observait en silence quand il s'écria soudain :

— Ce n'est pas possible, ça y est ! Tu te rends compte, ça arrive ! Mon Oritis !

— Chut ! Ne crie pas ! Tu es content, hein ? lui demanda sa sœur d'une voix douce.

— Je ne sais pas, ça me fout la trouille surtout. Jusqu'à présent, ça semblait lointain. Pas vraiment réel. Je ne sais pas ce qui m'attend. Je suis complètement perdu, là.

— Tu as de la chance, je voulais que mon Oritis arrive en même temps que le tien ! Je doute même d'y avoir droit un jour, moi !

Thys considéra attentivement sa sœur. Elle était adossée à un oreiller rose mousseline sur lequel se répandait sa longue chevelure blonde, quasi blanche. Son chemisier mauve faisait ressortir la pâleur de son teint. Et ses yeux bleu-vert, d'une transparence presque irréelle, se voilaient de larmes.

Mélia était une enfant malade, fragile. Dès la naissance des jumeaux, Thys avait rayonné par son énergie, tétant goulûment le sein de sa mère et beuglant à vriller les tympans, alors que Mélia, chétive petite crevette au poil incolore et à la peau blême, n'avait, semble-t-il, même pas eu la force de pleurer.

On lui décela diverses anomalies. Les reins fonctionnaient mal, l'appareil digestif n'était pas bien achevé, les poumons peinaient. La petite Mélia fut rapidement prise en charge par des médecins pessimistes qui tentèrent plusieurs opérations. Et contrairement à toute attente, elle survécut. Mais elle demeura une enfant anémiée, très vite fatiguée ou essoufflée, sujette à de fréquentes crises d'étouffements, et devait garder le lit une grande partie de la journée.

Elle ne pouvait pas participer aux jeux dynamiques des autres enfants. Le bruit l'épuisait. Elle suffoquait et faisait facilement des malaises qui effrayaient les petits et contrariaient leurs parents. Elle restait donc à la maison et suivait des cours par correspondance. Elle passait son temps à lire ou à rêvasser sous le grand marronnier du jardin.

Parfois, Thys se sentait coupable de la maladie de sa sœur. C'était sa jumelle, pourquoi était-elle née malade ?

— Tu sais, Mélia, je suis sûre que le jour de ton Oritis arrivera vite ! Tu es si sensible, si ouverte sur le monde, toutes les qualités qui font, selon grand-père et papa, un bon Ether, lui dit-il en la couvant d'un sourire protecteur.

— Oui, peut-être, répondit-elle songeuse. En tout cas, aujourd'hui, j'ai eu de nouvelles sensations. Super flippantes. Je m'étais endormie sous le marronnier et j'ai été réveillée par un cri. Je n'ai vu personne, mais je t'assure, j'ai senti une présence, comme si quelqu'un me tournait autour. C'était hyper bizarre. Et un peu après, j'ai eu l'impression de partir en arrière, comme si je tombais et là j'ai eu un pic aux poumons ! J'avais plus d'air. J'étouffais vraiment. Et je me suis évanouie.

— Une nouvelle crise ? demanda Thys contrarié.

— Non, une sensation, je te dis ! Elle a duré plus longtemps que les autres et elle n'était pas agréable du tout, c'était douloureux. Ça ressemblait à une sorte d'attaque venue de nulle part ! Ne ris pas, hein !

— Non, non, je n'ai pas du tout envie de rire. Moi aussi, j'ai vécu cela aujourd'hui !

Et Thys rapporta sa mésaventure. Avec sa sœur, il n'y avait aucun tabou concernant les étranges phénomènes dont ils étaient parfois témoins. Très complices, les jumeaux se racontaient toujours tout et s'épaulaient pour essayer de mieux comprendre ce qui leur arrivait. Ils s'étaient unis devant le manque de confidences de leurs parents et face à leurs diverses perceptions inexplicables.

Thys s'allongea sur le lit à côté de sa sœur et fixa le plafond, songeur.

— Bon, t'en penses quoi, toi, de ce mec ? demanda-t-il en faisant la moue. Ce Téodor Lux, un Maître, initiateur de je ne sais pas trop quoi ?

— Ben, il est impressionnant, il me fait un peu peur ! avoua-t-elle. Il est arrivé ce matin juste après ton départ pour le collège. Il a dit que l'Oritis était pour bientôt et que l'on devait se réunir dans le salon à quinze heures. Pa et Man semblaient ravis. Ils sont tous restés à la maison aujourd'hui, mais ils ne m'ont rien expliqué.

— Et le Maître, il est resté aussi ?

— Non, il est revenu à quinze heures pile. Il n'a même pas sonné. Je ne sais pas comment il s'est retrouvé dans le salon.

Mélia fut prise d'une quinte de toux et elle dut s'interrompre plusieurs minutes. Thys l'aida à s'apaiser en lui massant délicatement le dos, puis il la soutint pour qu'elle puisse se redresser un peu sur le lit. Alors, elle continua entre deux respirations sifflantes :

— Il nous a demandé de nous asseoir et il nous a parlé de toi, des signes qui annonçaient l'Appel.

Elle prit le temps de plusieurs inspirations avant de poursuivre :

— Il a dit que l'on devait être vigilants. Par moment il chuchotait, parlait d'indésirables ou d'un désir raté et d'un Guéni. Bref, il a raconté plein de trucs que je ne comprenais pas. Et quand j'ai posé une question, il m'a regardé d'une de ces façons ! Je n'ai plus rien osé demander...

À la fin de sa phrase, Mélia se crispa et porta ses mains sur son ventre pour gérer un des nombreux spasmes intestinaux qui lui rendaient la vie douloureuse. Thys respecta sa souffrance et observa, chagriné, sa sœur si pâle qui supportait ça bien trop souvent en silence pour ne pas l'inquiéter.

— Ce qui m'a un peu rassurée, c'est que Tantine paraissait aussi perdue que moi ! poursuivit-elle la voix chevrotante, comme si rien ne s'était passé.

— C'est peut-être parce qu'elle n'a pas encore eu droit à son Oritis !

— Sans doute...

— D'ailleurs c'est curieux. Tu le savais toi qu'elle n'était pas initiée ? demanda Thys en promenant une main songeuse sur son menton.

— Pas vraiment, elle a trente ans, je pensais que la cérémonie se déroulait à l'adolescence. Mais c'est vrai qu'elle pose aussi des questions à papa parfois, répondit Mélia après une énième quinte de toux.

— Bon, on interrogera les parents après le départ de ce type ! décida Thys.

Mais le Maître Arcan ne semblait pas pressé de quitter les lieux et il fit même partie des convives pour le souper. Tante Nadine, alias Tantine, était là aussi. Célibataire, elle occupait une partie de l'aile droite du manoir, aménagée en un appartement douillet. Mais elle prenait souvent ses repas avec la petite famille. Grand-père Ano, lui, avait rejoint sa maisonnette, dépendance coquette de la demeure, située à deux cents mètres de la bâtisse principale. Il avait légué la grande maison à son fils, Anthony, quand celui-ci avait épousé Sylvie.

Le repas se prit en silence. Téodor Lux avalait sa soupe par grandes lampées, les yeux clos, et semblait se délecter de chaque cuillerée, ce qui faisait sourire Nadine. Tante Nadine, la sœur d'Anthony ne lui ressemblait pas. Alors qu'il était grand, blond et d'une discrétion peu commune, elle était petite, brune, pétillante au teint rose. Vive et intelligente, elle s'occupait souvent de Mélia et veillait à égayer les journées de la jeune fille par ses récits de voyage, toujours très rocambolesques.

Ce soir-là, pourtant, Nadine se faisait discrète. Comme tous, elle étudiait l'invité et espérait des précisions sur l'événement en cours. Mais celui-ci ne prononça qu'un mot. Après avoir émis un rot sonore en fin de repas, il quitta ses hôtes sur un simple : « bonsoir ».

— Le Maître Arcan occupera la chambre d'amis et prendra ses repas avec nous jusqu'au Grand jour, annonça Sylvie à ses enfants d'un ton impérieux qu'on ne lui connaissait pas.

— Il te demande, Thys, de ne pas trop t'éloigner de la maison et de rentrer immédiatement après les cours, ajouta son père.

— Ah ! Et le Grand jour, c'est pour quand alors ? s'enquit Thys, tiraillé entre la peur et l'excitation de la nouveauté.

Ses parents se concertèrent d'un regard, son père grimaça un sourire tandis que sa mère répondit.

— On verra, ça approche selon le Maître ! Surveille les signes !

— Les signes ? Quels genres de signes ? Qu'est-ce que je...

— Ne t'inquiète pas, tu verras quand ça arrivera, l'interrompit Sylvie. Au lit maintenant !

Thys n'en savait pas plus que la veille, il était frustré d'être toujours maintenu dans cet état d'ignorance. D'un autre côté, il comprit qu'il n'obtiendrait rien de plus ce soir.

Quand il vint souhaiter bonne nuit à sa sœur, il s'attarda longuement pour commenter la journée et la drôle de soirée qu'ils venaient de vivre. Il essaya d'imaginer avec elle, comment allait se passer la cohabitation avec le petit homme.

— Il me file la chair de poule, confia-t-il à Mélia.

— Ouais, en plus il ne parle presque pas et ses yeux sont carrément flippants !

— J'espère que le jour de l'Oritis arrivera vite, j'ai la tête pleine de questions, ça me rend dingue ! Allez bonne nuit, Mèl.

— Thys ? chuchota encore la voix de Mélia.

— Oui ?

— Pourquoi tu avais la chaussure de maman à la main, tout à l'heure ?

Pour toute réponse, son frère ferma vigoureusement la porte en maugréant. Il entendit alors le petit rire cristallin de Mélia glousser sous sa couette

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