Chapitre 9 :

Je n'arrive pas à croire que le connard que j'ai devant moi, soit cet artiste que j'admire tant. Celui qui a travers sa première toile a su toucher une corde sensible au fond de moi. Mais quel connard ! Le mec est waouh ! Un spécimen de mâle qui doit faire se pâmer pas mal de dindes en chaleur.

J'ignore si le rouge qui doit colorer mes joues en cet instant est dû à la colère que je sens monter, ou à la chaleur qui se diffuse entre mes cuisses. Le regard qu'il me jette suffirait à refroidir quiconque s'approcherait trop de lui et pourtant. Toujours aussi énervée, je détaille Donovan de la tête aux pieds. Le mec est habillé tout en noir ,ce qui lui sied plutôt bien.

Contrairement à son agent et à nous, il n'est pas en tenue de soirée. Ce qu'il porte est simple mais efficace. Après tout les artistes sont connus parfois pour leur non respect des codes. Super Connard, porte magnifiquement le pantalon de costume et la chemise plutôt bien. Tout ce noir accentue, l'aura sombre qui se dégage de lui. En même temps, si vous le voyiez, vous comprendriez.

Le gaillard est plutôt bien taillé. Proche de la quarantaine, plutôt grand ( je dirai entre un mètre quatre-vingt et quatre-vingt dix), musclé mais pas trop. Des cheveux noirs qui donnent envie de s'y accrocher, un visage de mauvais garçon, et des yeux d'un brun dont je ne saurais décrire la nuance. Dans l'immédiat Sexy connard est toujours en train de s'impatienter et nous le fait bien savoir.

– Ah, ben bravo Brent ! Si c'est tout ce que tu as put me trouver pour la soirée, ça promet !

Mais pour qui il se prend, ce con ! Je vois Cassandre prête à lui sauter, dessus et Brent dont les sourcils se froncent s'avancer vers lui. Sortant de ma transe, je m'avance à mon tour et viens me placer devant lui. S'il y a bien quelque chose qui arrive à me mettre vraiment hors de moi, c'est bien ce genre de remarques ! Malgré mon mètre soixante quinze, je suis obligée de lever la tête pour pouvoir le regarder en face. Durant un court instant, je me perds dans ses yeux, avant de me ressaisir. Je suis à deux pas de lui, deux pas à franchir avant de lui transpercer le pied avec mes talons aiguilles. Je ne lui ferais pas le plaisir de me donner en spectacle.

Encore un pas, j'y suis, je ne le quitte pas du regard. Son pied est juste là et lorsque je me saisis de son bras, J écrase volontairement mon talon sur le bout de sa chaussure, y laissant une marque et un rictus de douleur sur son visage. C'est bas, je le sais, mais qu'est-ce que ça fait du bien.

– Ok, puisque tout a été dit, si nous entrions, puisqu'il paraît que nous sommes en retard ! Dis-je en adressant mon sourire le plus fourbe à cet enfoiré.

Derrière-moi, j'entends mon amie retenir un rire, je sais qu'elle a vu ce que j'ai fait. Il me cherche, il va me trouver. Accrochée au bras de sexy connard alias Blake Donovan, je découvre le lieu de l'exposition et en reste scotchée. Brent qui se tient à côté de moi, m'explique rapidement, pourquoi ils ont choisit ce lieu pour exposer. Donovan quant à lui a eu vite fait de lâcher mon bras et s'est tiré en clopinant très légèrement, pour faire soit disant un dernier tour pour vérifier que tout est comme il l'a voulu.

Tout autour de nous se trouvent des statues, des montages photos, ainsi que des tableaux. Je n'ai pas le temps de tout voir et j'espère que j'arriverai à jeter un il, sur ses travaux. L'exposition est placée sous le thème de la rue. Tout ce qui nous entoure est dans des tons gris, noirs. Quelques tâches de couleurs amènent un peu de chaleur à ses œuvres. Si je n'étais pas aussi énervée, je prendrai le temps d'admirer son art. Pendant, que j'écoute d'une oreille distraite Brent, nous expliquer rapidement en quoi consiste le travail de Blake sur l'expo, je ne peux m'empêcher que de chercher ce dernier. Il se déplace tellement rapidement que je peine à le garder dans mon champ de vision.

J'aime parfois comparer les hommes à des animaux en fonction de ce qu'ils dégagent. C'est mesquin, j'en ai conscience. Mais n'allez pas croire que c'est pour uniquement les dénigrer. Ce soir, je me l'effet d'une proie et ça me glace. Il est le chasseur, rien qu'à le voir se déplacer tout en souplesse. Même si je me laisserai bien croquer, je sens qu'il serait dangereux pour ma sérénité que de me laisser attraper.

Pour l'heure, plus le temps de fantasmer sur ce qu'il pourrait me faire. Le temps de la représentation est arrivé. L'expo ouvre ses portes, je dois entrer rapidement dans le rôle que l'on m'a attribué ce soir. Le bras qui vient de se glisser autour de ma taille m'électrise et me rappelle la raison de ma présence ce soir.

Le début de la soirée se passe sans anicroches. Donovan n'a besoin de personne pour briller, il y parvient très bien tout seul. Un verre de champagne à la main, je me laisse emporter d'un coin à l'autre, pas besoin de parler, cela me convient autant que cela me déplaît. L'objet de toutes les conversations est cette œuvre que tout le monde attend de voir déballée. Amateurs, journalistes et même ceux qui ne sont là que pour trouver une occupation, tous posent la même question.

Au début Donovan répond gentiment, puis son ton change et se fait plus sec. Suis-je la seule à m'en rendre compte ? Je sais que je ne joue qu'un rôle de potiche, que le mec qui m'accompagne est un connard fini, mais enfin merde, le type est devenu une référence dans son art, alors respect merde. Il y a ici pleins d'oeuvres à découvrir et je ne peux même pas le faire ! Alors quand arrive cette énième question sur l'oeuvre mystère, je m'écarte du bras de Donovan. Je n'en peux plus, la coupe est pleine et la mienne est vide.

Mon mouvement interrompt un instant Blake qui me regarde de travers. Cela lui déplaît tant mieux ! Pour ma part, il faut que je m'arrache un instant d'ici avant que je ne finisse par dire ou faire n'importe quoi.

– Je reviens dans un instant, lui dis-je en touchant son bras et en voulant l'embrasser sur la joue.

Je peux être tout ce que vous voulez, mais je commence un travail, je le fais bien. Et comme Blake est aux prises avec une bimbo plastifiée, je fais ce dont pourquoi ma présence est requise. Sauf que tout ne se passe pas toujours comme on le pense, et que au moment où je m'en vais déposer un baiser sur sa joue, sexy connard tourne la tête. Mes lèvres entrent alors en collision avec les siennes et ce qui devait être un petit bisous de rien du tout, se transforme en un baiser digne d'Hollywood.

Une chose est sûre Barbie en a eu pour son compte et moi, moi je fuis, rouge comme une écrevisse, m'éloignant aussi vite que la bienséance me l'impose. Si lui est le loup, je suis alors le petit chaperon rouge. Avisant, un serveur, je me débarrasse de ma coupe vide, me saisit d'une que je vide d'un trait, puis en prends une autre. Le serveur me regarde d'un air qui dit, toi ma cocotte tu en as déjà bu trop, ce qui est complètement faux, mais qui semble possible au vu de la rougeur trompeuse de mes joues.

Je jette un oeil derrière-moi et je vois Donovan qui me regarde. A cette distance, je ne parviens malheureusement pas à voir son expression. J'imagine qu'il doit bien rire de ma réaction. Plaquant mon sourire le plus faux, celui que je surnomme mon sourire Colgate, je lève ma coupe dans sa direction et dans un geste de pure bravade, je la bois celle-ci aussi d'une seule traite, avant de lui tourner le dos et de partir à la recherche de Cass, mais avant ça il faut que je me rafraîchisse.

Le tour aux toilettes quand on est une femme est un indispensable. Encore plus dans ce type de soirée. Se repoudrer le nez n'est ni plus ni moins qu'un code typiquement féminin pour dire, allons déblatérer sur un tel ou un tel. Et oui, il est plus important de médire des autres plutôt de satisfaire un besoin naturel. Dans mon cas, il est surtout urgent que je me passe de l'eau froide sur le visage, ah non je ne peux pas, sans risquer de de ruiner mon maquillage. Me reste plus que l'option me cacher dans une cabine et attendre de retrouver ne contenance.

Quand, je vous dis que les toilettes pour femmes sont une mine d'or pour qui veut amasser des munitions contre d'autre ! Dix minutes enfermée près des lavabos et j'en apprends des vertes et des pas mûres sur les gens présents. Au début je n'écoute pas, jusqu'à ce que ces dames commencent à parler de Sexy Connard. Au début,elles restent soft, ces dames ne parlent de sa façon sa tenue et au passage un peu de moi, jusqu'à ce qu'une autre les rejoignent et se plaigne qu'il ne soit pas seul ce soir. A ça, une autre lui répond que je dois être sa dernière conquête et que de toute façon, je ne durerai pas. Si elles savaient à quel point c'est vrai et que ma date de péremption n'ira pas plus loin que la fin de cette soirée. Arrivent enfin les cancan, ceux qui ne devraient pas m'intéresser et qui pourtant retiennent toute mon attention.

Quand je finis pas sortir des toilettes, je ne toujours pas calmée, mais au moins j'ai repris un masque glacial. Le sourire Colgate, j'attrape une nouvelle coupe de champagne sur un plateau. Les petits fours sont soit en option, où ils savent se faire discrets. Ils me seraient bien utiles pour éponger un peu tout ce que j'ai déjà bu. Mais plus cette soirée s'étire, plus cette mascarade m'agace. Une fois encore, je me demande pourquoi, j'ai oui à Cassandre. Comme si elle m'avait entendu, ma copine fait son apparition devant moi.

– On joue les déserteurs à ce que je vois, me sort-elle.

– Et toi, tu n'es plus scotchée aux lèvres de ton client ? Je lui réponds du tac au tac.

Cette dernière sourit et se place à côté de moi. Elle fait mine d'admirer la photo qui me fait face. Je la sens qui cherche à me dire quelque chose. Rester ainsi silencieuse n'est pas habituel. La taciturne c'est plus moi qu'elle.

– Vas-y crache le morceau C ! Tu vas finir avec un ulcère.

– C'est un sacré morceau Blake !

– Un fieffé connard oui !

– Je suis...

– Stop, tu ne vas pas commencer à t'excuser!Des connards on en a vu, ce n'est pas un de plus qui changera la donne.

– Je sais bien, mais Brent pensait que...

– Que quoi ?

– Rien.

– Cass !

– Rien, je te dis ! Je te jure, me dit-elle en levant la main avant de chopper deux flûtes du plateau du serveur qui passe.

– Accorde-moi une faveur s'il te plaît !

– Laquelle ?

– Ne me demande jamais plus de remplacer une de tes filles

– Promis.

Sur cette promesse, nous entrechoquons nos verres et buvons une gorgée en parlant de la photo devant laquelle nous nous attardons. Il s'agit d'un portrait en noir et blanc d'une femme SDF tenant dans ses bras un lange bleu duquel dépasse une truffe. La femme semble être en train de bercer son précieux compagnon. Lequel réchauffe l'autre, nul ne saurait le dire. Cette photo me parle, elle me renvoie à cette fameuse époque où je suis arrivée à Phili avec juste mon sac à dos et quelques vêtements à l'intérieur. Si je n'avais pas cette échéance qui se rapproche de plus en plus, je me porterai acquéreur de cette photographie, mais à quoi bon si c'est pour finir par ne plus la voir.

Quand je m'apprête à porter ma coupe à ma bouche, une main m'en empêche en me la volant. Cette même main porte ma coupe à des lèvres que je reconnais comme celles qui m'ont embrassé plus tôt.

– Non, mais ! Ma surprise et ma colère sont telles que je m'étrangle sur mes mots.

– Il serait malvenu que ma si charmante compagne finisse par s'écrouler ivre morte !

– Mais quel connard ! Dis-je un peu plus fort que prévu.

– Sibylle s'il te plaît ! Tente de me calmer Cassandre. Pas maintenant et pas ici !

– Écoutez donc votre copine, Carotte !

S'il y a une chose qui m'énerve encore plus que ce sale type, c'est que l'on me donne tous les sobriquets qu'il puisse exister par rapport à ma couleur de cheveux, carotte étant celui que je hais le plus. Si Brent n'était pas venu nous interrompre avant que je n'explose pour de bon, nous aurions fini dans les faits divers. Jamais, au grand jamais un homme a eu le pouvoir de me faire sortir de mes gonds. Je ne me reconnais pas, ou bien ce sont toutes ces coupes de champagne qui me sont finalement montées au cerveau. Plus vite cette soirée s'achèvera, mieux ce sera.

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