Chapitre 46

Blake.

Maintenant que nous roulons et que Carotte dort, je peux enfin souffler. La sortie de ce satané hosto, n'a pas été de tout repos, entre les papiers et le reste. Je crois que je n'ai jamais senti Sibylle aussi fragile qu'en ce moment. J'espère me tromper, que c'est juste parce qu'il lui faut du temps pour refaire surface, mais je ne peux pas m'empêcher de penser que quelque chose s'est brisé en elle.

Je ne ressens plus cette flamme qui émane d'elle . J'ai devant moi, un oisillon tombé du nid et dont la survie dépend de la main qui va le trouver et le nourrir. L'arrivée d'un texto me détourne un instant de mes pensées. Appuyant sur un bouton, l'écran de mon ordinateur de bord m'affiche le contenu du message. Ça provient de Brent qui m'apprend que tout est en ordre chez moi pour recevoir Sibylle et que Cassandre rapporte quelques affaires de ma rouquine.

Comme il m'est impossible de lui répondre, je prends le risque de l'appeler en déconnectant mon téléphone du système Bluetooth. Sibylle dort, et par égard pour elle, je ne veux pas qu'elle entende notre conversation. Au bout de la deuxième sonnerie mon pote décroche et je suis soulagé de l'entendre , son soutien m'est primordial, si je ne veux pouvoir aider ma belle endormie.

-Salut mec, lui dis-je en l'entendant.

-Ça y est vous êtes sur la route ?

-Oui, lui dis-je doucement.

-Pourquoi tu parles si bas, me demande Brent.

-Sibylle s'est endormie, lui réponds-je. J'ai coupé le Bluetooth, si on pouvait faire vite ça m'arrangerait.

-Comment va-t-elle ?

-Je ne sais pas trop, lui dis-je prudemment.

-Comment ça ?

-Elle est très fragilisée, je... Ce n'est pas la Sibylle qu'on a l'habitude de voir.

-Je vois...

-Non, je ne crois pas. J'ai vu ton message, merci d'avoir tout finalisé. Par contre, je ne pense pas qu'un comité d'accueil soit le bienvenu quand on arrivera.

-Ça lui ferait peut-être du bien, Cassandre attend son retour avec impatience, tu sais.

-Je m'en doute, Brent. Je ne dis pas ça pour la faire chier, quoi que...

-Blake !

-Je plaisante Brent. Désolé, j'ai besoin d'un peu de légèreté. Ce que je vais te demander, ne va pas te plaire, mais je pense que c'est mieux pour elle.

-Quest-ce que tu veux dire ?

-Je sais que vous voulez la voir, surtout Cassandre, mais si tu pouvais la tenir éloignée de la maison quelques jours, que Sybille puisse prendre un peu ses marques, je t'en serais reconnaissant.

-Je ne sais pas Blake.

-Brent, je ne te le demanderais pas si ce n'était pas nécessaire. Sibylle sursaute pour tout, le moindre contact, le moindre bruit. On a bien failli ne pas réussir à sortir de l'hôpital .

-Blake...

-Fais-le, c'est tout. Laissez-nous quelques jours, deux ou trois. Je ne veux pas la brusquer.

-Je vais essayer, finit-il par me dire.

-C'est tout ce que je te demande. Je te laisse, je t'enverrai un message quand on sera arrivés.

-Ok, ça marche. N'oublie pas de nous tenir au courant.

-D'accord , merci mec.

Sur ces dernières paroles, je raccroche et connecte à nouveau mon portable au système Bluetooth de la voiture. À côté de moi, Sibylle semble toujours dormir, ses poings sont serrés et je soupire en constatant qu'ils restent dans cette position.

Doucement, je repose ma main droite sur sa cuisse qui tressaute à mon contact avant de se détendre, comme si son corps reconnaissait le mien. Me concentrant sur la route, j'effectue la dernière heure de conduite dans le silence le plus total, en luttant pour ne pas songer à ce qui nous attend à notre arrivée.

Notre retour à Philadelphie se termine comme il a commencé dans le silence et l'ambiance feutrée de la voiture. Seul mon appel à Brent et les mots que ma belle a murmurés dans son sommeil sont venus troubler le calme qui nous entoure.

Me garant le long du trottoir, j'hésite à réveiller Sybille. D'une certaine façon, j'appréhende moi aussi sa sortie de l'hôpital . Même si tout a été prévu et vérifié par plusieurs membres du centre de réadaptation que ma rouquine avait contacté, rien ne sera plus réel que lorsque nous passerons le pas de la porte de ma maison. Je pensais être prêt à affronter ça, après mes longs entretiens avec la physiothérapeute, mais en fait, je ne le suis pas du tout.

Comme Sibylle, je vais évoluer dans le noir le plus total. La peur de commettre des impairs est ce qui me fait le plus flipper. Je ne sais pas comment nous allons gérer tout ça, mais il faudra bien que l'on avance. Même si cela doit être dur, je ne lâcherais rien, pour elle, pour moi, mais surtout pour ce « Nous » qui me donne de l'espoir.

Une fois à l'intérieur du garage, jinspire un grand coup et me donne un bon coup de pied au cul, mentalement bien entendu, puis je coupe enfin le moteur. Je fais rapidement le tour de la voiture et ouvre lentement la portière. Carotte dort comme une souche et na même pas bronché quand j'ai détaché sa ceinture avant de descendre de la voiture.

La soulevant délicatement, je l'emporte dans mes bras puis gravis un à un ces escaliers qui ne me paraissent plus aussi sympas que lorsque j'ai fait l'acquisition de la maison. Prenant soin de ne pas me vautrer sur la dernière marche, je me dirige droit vers ma chambre pour y déposer mon précieux paquet.

Sibylle ne pèse rien dans mes bras et je constate qu'elle a perdu du poids depuis mon départ pour le Japon. Trop à mon gout, ses vêtements sont plus lâches sur son corps si pâle. Le plus doucement possible je la couche sur mon lit, et la regarde se recroqueviller en chien de fusil, ses poings à nouveau serrés. Mon cœur rate un battement en voyant ça.

Me saisissant d'un plaid, je la couvre et sors en laissant la porte ouverte. Elle est si frêle que cela me brise. Avant d'envoyer un message à Brent, je me rends dans la cuisine, et me sers une bière. Au passage, je vois que l'on a pensé à remplir mon réfrigérateur et quon m'a laissé une note sur la table. Il s'agit d'un mot de Blondie, qui indique qu'elle a laissé dans la chambre un dictaphone avec un message à l'intention de Carotte. Message qu'elle m'interdit d'écouter . Je tiendrai compte de sa demande, du moment que cela ne vient pas perturber ma douce, ça me va.

Quelques minutes plus tard, je m'installe avec ma bière, et le sandwich que je me suis confectionné sur le canapé. Tout en mâchant quelques bouchées de mon casse-dalle, je me saisis de mon téléphone et comme promis, envoie un message à mon pote pour le prévenir de notre retour.

Nos échanges sont brefs et me permettent de me concentrer sur la lecture que j'ai abandonnée sur ma table basse avant de partir à la recherche de celle qui fait battre mon cœur plus que de raison.

Il se passe à peine une heure quand l'interphone sonne. Me levant, je jette un œil à Carotte dont le sommeil est agité, mais qui pourtant, n'a pas l'air de se réveiller.

Soupirant, je me dépêche de descendre et de voir qui vient me casser les couilles.

Alors que jouvre la porte et me trouve face à une Blondie déterminée et à un Brent gêné, un cri vient déchirer le silence qui m'entourait jusque-là. Un cri si douloureux qu'il me remue les tripes. Les laissant sur le pas de la porte, je me précipite dans les escaliers et me rue dans ma chambre. La scène que je vois, me déchire, me blesse autant que si je l'avais vécu moi-même.

Sibylle se balance davant en arrière tout en se frottant les cuisses de ses poings, des larmes ravageant son si beau visage.

Je n'hésite pas un instant et entre dans la zone de combat. Me plaçant derrière elle, je la prends dans mes bras et tente de la bercer en lui parlant doucement pour la faire revenir parmi nous. Ses cris déchirent mes tympans, elle se débat, mais je ne lâche rien.

Cassandre et Brent qui mont suivi regardent la scène qui se déroule sous leurs yeux, jusquà ce que la blonde s'effondre dans les bras de mon pote. Ces derniers ne m'étant d'aucun secours, ils me laissent seuls avec ma rouquine.

-Là, mon cœur , doucement. C'est moi, Blake. Tout va bien Sibylle, tu es en sécurité, il ne t'arrivera plus rien. Chut...

Je lui répète ses paroles inlassablement, jusqu'à ce que la crise passe et qu'elle se calme enfin. Lorsque j'émerge enfin de la chambre, Brent et Cassandre sont toujours là et attendent que je vienne leur parler. Sibylle s'est endormie à nouveau son corps épuisé par la crise que nous venons de vivre. Passant les mains sur mon visage, je me laisse tomber dans le fauteuil et soupire épuisé moi aussi, par ce que nous venons de vivre.

Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top